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Full text of "L'illustration : journal universel"

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;    7^^ 


ig»UR:|s[A:L.| 


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in  2010  with  funding  from 

University  of  Ottawa 


http://www.archive.org/details/lillustrationjou12pari 


imiinBATiON 


TOME  XII 


Septembre,  Octobre,  IVovembre,  Décembre 
1848 
Janvier,   Février 

1849 


A.   LE   CHEVALIER  ET  C '^  ÉDITEURS 

60  ,    RUE     RI  C  H  E  Ll  E  U 


L'ILLUSTRATION, 


Ab.  pour  Paris.  3  mois,  8  fr.  —  6  mois,  16  fr.  —  Un  an,  30  fr. 
Prix  de  chaque N",  7S  c— La  collection  mensuelle,  br.,  2  fr.  7ô. 


N»  288.   VuL.    Xll. 


SAMEDI  2  SEPTEMBRE  1848. 
ui'  nicliellrii,  60. 


Ah 


pourlesdép.  — 3  mois,  9  fr.  —  6  mois,  17  fr.  — Un  ai>,32fr 
pour  l'c^tranger,     —    10  fr.         —       30  fr.         —      40  fr. 


SOMMAIRE 

IliBfoirp  de  la  semaine-  Portrmi  iic  m  BuirhoTi.  —  s<^ance  dn  25 

aorti  18tl8  —  Coiirrlcpile  l'arls.  l'urlniil  île  l».  CaïuttUiérc ,  Dislribii- 
litiH  lit  V  r'V(ii»/'(n.<(  .1-  /'('(/ r-  l'fj-iiD^ithn  de  lfi»8;  D  stnbiition  de  nouftc  aux  piiu- 


'1" 

fa 

I  -  1) 
alifliie 

illon  cl 

,    I.TlIM—c.olc. 

III 

III 

lll 

X.  -  Lrllrpsd'iin  flânear.  Vlll. 
liloNlovalaiiiiP,  i'aiti.lp.  Bijoux 

1    •liiun'-ii  imtwnnlell  :  l'trwurhen  :  Huile 
iz:   Tn-iiuiieli  :  liliil  .«i.  ,rD|.  i.M.  II..11. 
iveriiiri'  de  la  rli,i>^si>  flt^iiiii- 

lim  dex  hilmriil.  — <:ili'unti| 
cp<«  morale!»  elpolllii|ue!i 
Mbus- 

'■' 

"" 

Hipulp.  —  VraflPiiiliMl 

ra/.cisi»,  — BerzOliUB- 

vvr 

ll-ll- 

Histoire  de  la  semaine. 

Coite  semaine  tout  entière  a  vécu  sur  le  grand  événement 
parlementaire  qui  a  terminé  la  semaine  précédente ,  et  au 
récit  pittoresque  duquel  Vlllustration  consacre  un  article 
-■ipécial.  Ici ,  clironologiste  e\acl ,  reprenons  les  débats  de 
I  Assemblée  où  nous  les  avons  précédemment  laissés. 

.\près  ceux  de  ses  travaux  que  nous  avons  mentionnés  il 
y  a  nuit  jours,  l'.4ssemblée,  qui  avait  ordonné  une  enquête 
sur  les  opérations  électorales  de  l'Hérault ,  dont  la  nomina- 
tion de  M.  Laissac  avait  été  le  résultat ,  a  entendu  le  rap- 
port que  lui  a  fait  sa  commission  ,  après  envoi  sur  les  lieux 
(l'une  sous-commission  qui  avait  procédé  avec  beaucoup 
d'activiléot  desoin.Laconnnission,  à  l'unanimité,  concluait 
a  l'annulation  de  l'élection.  L'Assemblée  s'est  montrée 
beaucoup  moins  unie  dans  sa  décision  ,  car  les  conclusions 
du  rapport  n'ont  été  adoptées  qu'à  une  majorité  relative  de  i 
13  voix. 

MM.  les  ministres  se  sont  ensuite  succédé  à  la  tribune 
pour  la  présentation  do  mesures  qui  rivalisaient  d'impor- 
tance. D'abord  ,  M.  le  ministre  de  l'intérieur  a  présenté 
d'urgence  un  projet  de  décret  pour  rétablir,  au  profit  du 
budget  de  la  ville  de  Paris,  le  droit  d'octroi  sur  la  viande  de 
boucherie,  qu'avait  supprimé  brusquement,  avec  un  consi- 
dérant déclamatoire ,  un  de  ces  innombrables  décrets  du 
gouvernement  provisoire,  <|iii  («lursiiivait,  |)liis  IVffrl  i]ii  il 
ne  se  préoccupait  des  résultais.  Les  irsullats  de  sa  iiicsiiri' 
étaient,  un  profit  insignifiant  pour  le  consommateur  qui  cnii- 
tinuait  ii  payer  la  viande  il  peu  prés  comme  par  le  passé, 
un  déficit  de  cinq  millions  dans  la  caisse  de  la  ville,  la  dimi- 
nution de  son  crédit  avec  ses  ressources,  et  par  conséquent 
l'impossibilité  pour  elle  d'emprunter,  d'entreprendre  de 
grands  travaux  et  de  venir  l'hiver  au  secours  de  la  popula- 
tion nécessiteuse  ,  si  des  ministres  plus  prévoyants  ne  se 
fussent  hâtés  de  parer  au  mal.  —  M.  le  ministre  des  finan- 
ces est  venu  donner  lectun^  du  pi'ojel  de  décret  qu'il  s'était 
engagé  ii  produire,  en  icliranl  la  lui  sur  les  créances  hypo- 
thécaires, et  qui  a  pinirliul  ircUihlirun  impôt  desoixanle  mil- 


lions sur  If 
18i!l,  impôt  inlruduil  p: 
nistre  de  la  niarinr  a  pn 
qu'une  indemnitiMlr  qu, 
aux  anciens  prnpiiclain 
de  l'émancipation   l)  api 


spéce  pour  l'année 
ilion.  —  M.  le  mi- 


lle II 
,li.  rep 

;i  Sun  tour,  un  |irojet  pour 
i;l-ili\  millions  soit  accordé  • 
l.ives  aux  colonies  ii  rai.sun 
ijjet,  l'indemnité  serait  ])ar- 


tagée  en  dix  annuités  dont  la  première  seulement ,  formant 
une  somme  de  douze  millions,  serait  payée  dans  les  années 
1848  et  1849. 

Puis  est  venu  le  vote  d'un  décret  éle\ant  le  chiffre  des 
primes  pour  l'exportation  des  iimrui's  de  pèche  française 
Cette  pèche  est  une  branche  lonsiilérable  de  notre  coni- 
nierce  maritime.  Elle  emploie  pies  ilo  400  liàlimeiits  jau- 


geant près  de  30,000  tonneaux  et  occiqiant  l!i.000  marins 
environ.  —  Ensuite  a  été  volée  l'aiitorisiliiiii  iliin  i^uprunl 
de  vingl-eiiiq  millions  pour  l;i  \  illcdr  l>,iris  —En lin  est  m- 
nue  la  réforme  piisinle  (le  -!■  nippcllr.  el  immis  ;i\"ns  ru 
occasion  de  leilireihinsrrllr  rniillc,  qu  m  l.Si.'i  la  clnuiiliiv 
des  di'pnir'S,  sni.-r  il  uni-  pi.i|His:tMiii  auiiil  pour  base  k 
syslèinrilr  l;ii,i\c  iinh|iir  >■■  il  i\  isa  au  moment  dii  voto  en 
dru\  p;ii  lll  s  v'j,:i\i-.  17(1  piMir  il  170  contre).  Personne  au- 
jourd  liui  ,  uxcrpic  Jl.  D^sliingrais ,  n'a  soutenu  la  taxe 
progressive  et  n'a  voté  pour  elle.  Los  calculs  de  la  commis- 
sion de  1844,  basés  sur  des  documents  officiels,  ont  on  effet 
établi  : 

"  Qu'il  n'y  a  qu'uni'  différence  d'environ  Fj  centimes  entre 
la  dépense  (icca.-iiirinre  par  la  lettre  qui  |)arcourt  la  plus 
grande  dislaiii-e  cl  la  (|i''p('iise  occasionnée  par  celle  qui  par- 
court la  distance  la  pluscourle:  la  surtaxe  grevant  la  prc- 


niiiT.^  ne  d'vniildonc  pas  dépasser  cette  faillie  diUérence 
Ce|iendanl  la  lettre  qui  ne  ]iarcourl  (pie  iO  kilnmelres .  et 
qui  rm'itr  environ  10  centiiiirsilr  Irai:.,  .U(|uill('  une  taxe  de 
il)rriitÎ!iii"s:elle  paye  par  ruiisn|u,'iii  m,  iiii|'ni  delOcen- 
liiiirs  Tandis,  au  contraire,  qiir  la  Irllii- qui  parcourt  la 
distance  la  plus  longue  et  qui  coûte  enxiron  l'i  centimes 
de  frais  paye  une  taxe  de  1  franc  20  centimes,  ou  1  franc 
3  centimes  d'impôt;  c'est-à-dire  un  impôt  onze  fois  plus  fort 
que  la  preitiiére    ~ 

Le  ili'liat  il  anjiiurd'hui  S3  trouvait  éclairé  et  épuisé  d'a- 
vaniv  pai  liiiii  .V  qui  avait  été  précédemment  dit  et  publié: 
aussi  11  a-l-il  .ipporté  aucune  lumière  nouvelle  et  n'a-t-il 
offert  qu'un  médiocre  intérêt.  Le  décret  ne  s?ra  applicable 
qu'à  partir  du  1"  janvier  1849.  Le  chiffre  de  la  ta>e  uniiiue 
est  de  20  centimes.  Le  poids  de  la  lettre  ordinaire  esl  de 
7  gramines  et  demi. 


.M.  Bauclcirt,  r.-qiporleur  Je  la  commission  d'emiucte. 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVFRSLL. 


C/csl,  iipiês  ccttiî  suiU'  ili'  lni\iui\  f]iir  I  A--i'niblw,  ;i  cii- 
liHiit!  la  discussion  sur  \c  ni|i|jnrl  de  M  l!iiiiilhirt.  au  nom 
(1(3  la  commission  drnqiKMc  des  (M'iiiiociiN  d(!  mai  et.  de 
juin    i;\-^-;cMilil('r('Uiil  c.invo.iiir,.  ,i  ini.licl   ,i\anl  riicurc 

niilh|(hf     Ir-  lv|iiVMiiI;ilil,   rhlhlil    .1    Iriii    |,n-lr     l.c  pulllic 

cl   \r-   |,ri\ili-jh-  (Ir-,  lui -  M-,-i\.'i-  ;i\;iirii|  ,'.|i'.  cnciilX' 

|,lil-  |,iviii;.Mnviii,.,,l  r\,,rl^     \  >  ;ilil  .hi.c..r(lcr  l;i  |i,irol(.inl\ 
,,|Mh.|ll-     k|.M-hlrMl,   M     \l;.ll,i>l      ,1   lllMlc  I   A>M 'l.  1 1 .1.  r ,   |iMr 

,|ii,'l.|ih'- liiri,  -ciiti-.    ,i  ^;nilri  le  ciliii,.  cl  l;i  di;..ml(' 

<1   iicr:--;iic  -  ^Lin.  une  1 1  l-CH- loii  lie  (elle  lijliiic     Cei    ;i|,- 
|1CI    il    (''.II'     |Jie-i]lie    L'eiUT.lleillClLL  (■llteilllll .  l't,   SU  ul  (|1I('I(|U('S 

]nl(MTU|ilMHi-  ileel hiiics  (111  (1(!  iiiauvais  ^'oiU,  aucun  in- 

ciilcnl  ririvlhilile  ii  i-i  M'iiu  ji'tcr  dans  \c  déUuL  la  violence 

Le  (li'lial  si'st  ouvert  par  les  questions  de  détail.  Il  n'a 
olîciL  |in'S(|ue  aucun  intiTtH.  Le  seul  incident  curieux  est 
celui  (|ui  s'est  (ilevé  entre  MM,  Portails  cl  Landrin  d'une 
|iarl  et  MM.  Arago  et  l,c(liii-l{(>llin.  Uo  chaleureuses  pa- 
roles de  M.  Landrin,  un  iirand  accent  d'honnêteté  et  de  sin- 
c(!'rili'  lui  ont  valu  de  vils  a|i|ilaudissements. 

Celte  partie  (In  (l(''li;U,  l'enn(''e ,  la  parole  a  été  donnée  à 
M  Ledrii-Knllin  .S(i[i  diseonissecomposait  de  deux  parties: 
la  première  n'était  i;iiere(pi  une  re|ir(iduction  pins  étudii'-e. 
I  liais  aussi  moins  entrai  liante  p;irce  (pi  Clic  l'-tait  nKtin.^spen- 
lanee.  de  la  irpdn.se  immi''(liale  iinil  a\;iil.  I.iile  i|iiirize  |iiiirs 
auparavant  après  la  lecliirc  liii  rapport  de  .\L  liaiicliart  l.a 
seconde  partie  était  un  pnii.'i;nnnie  .senii-socialiste  ,  seiiii- 
(•iniiniiinisle  (pii  a  en  peu  de  Micces  dans  I  .Vs.^emlilce  et  (|iii 
ne  nous  parait  pas  plus  piii|iii'  a  r.i>-.iirer  les  intcr(''ts  ipia 
attirer  à  lui  les  novateurs  (  c-i  mi  |ii-ie  milieu  |ieu  si''(lui- 
sant  et  peu  pratique.  Foi  l  min-ii'  iii\ei.  I  .iiineiine  oppo- 
sition, ce  discours,  du  nmiii-  1!  ele  iiHiileie  .M  Ledril-Kol- 
liii  ,  en  lioininedc  cieiii-,  ,i\,iil  co!ii|ni-,|ii  il  iie(le\,nl  pas, 

1 rhisiili>r:i(iiiiiiilese^iiiili|Mlliie,  ;t|.ii-,|ii  il  nCLiil  pas, 

lui,  inculpe,  a^L'iiner  la    silu.ilion  de   deux   colle;jiies  ipn 

l'étaient,  en  j(\lant  une  irrilati i,iL:eiiM' (I,mi>,  le  (lelml 

A  M,  Lcdru-Uollin  a  succède  .M  l.oiii>  HLine  Lu  pivniiere 
partie  de  son  dùscours  a  tenu  I  A>>eiiililee  iciinie  |ll^(|ll  a 
lires  de  six  heures.  Une  suspension  d  une  heure  etdeniie  a 
été  pr(inonc(''e  |iar  .M,  .Marrast,  X  sept  heures  et  demie  les 
repn'.senlanls  étaient  de  noiiNcau  à  leurs  hancs  et  M.  Louis 
lilanc  a  la  triliune.  —  Kst  \eiiii  cnsiiileM  Cinissidiére,  qui 
a  lu  un  discours  fort  liiiii;,  lueii  (|ii  il  ml  i  i  n  devoir  l'abré- 
ger en  passant  un  certain  lumiliiv  de  leinllels 

A  la  suite  de  cedernierdi^i  iiiii>,  .M  le  président  a  donné 
lectiii(>  d  un  iVvpiisitoiic  de  .\L  le  procureur  L'énéral  pr(''S  la 
Cour  d'appel  de  Paris,  lenilaot  a  olileiiir  raiiliiiisation  de 
|i(iui>uivic.M.M.  lilancetCaii.s-idieic  .\  piirlirdc ce  uioiuent 
le  dchat ,  jusi|ue-la  i,'rave  et  inipo-.mi  -,iii>  doute,  s'est  as- 
somliri.  Le  chef  du  pouvoirexeciilil  i-i  moule  a  la  tribune 
a  une  heure  du  malin  pour  soiileiiii' celle  diiiiande,  et  le 

ministre  d,'    l,i  pi~liee   p •  i-eeliimei    liirL'enee    .\pics  un 

(l(''liat  prololIL'e'l  iir-eliee;i  eh'  deehiive  p.ir  V.I:î\oi\coiiIic 
"27-2    Alois  s. si  oiueil  lu  ili>eii«-i"n,  M    liac  a  parlé  a\ec 

plu- d  ,diond,Mi.v  ,| le  -eriMliilileeii  l'avour  de  M.  Louis 

Ifl.inc     l,;i  dcm.indi'  d  iiiiton-iil le  poursuites  contre  ce 

repnsenliiiil  ,  a  I  oeejMoii   d'  1; iiliit  du    L'i   mai  ,  a  été 

accueillie  par  VMi  bilhUs  blancs  eoiilre  ±'i2  billets  bleus, 
M.  Flocon  a  trouvé  en  faveurde  .M  C,aii>.-iiliere  (pielipies 
phrases  do  cœur  qui  ont  \iveiiieiil  cimi  I  \^-,'iiililee,  i77 
voix  se  sont  prononcées  pniir  iiiiloii>er  le  pioenreur  i;rnr- 
ral  a  poursuivre  cerepre>"iil:tnl  (|n;int  ,i  I  ,i  lien  lui  dn  I '1111(0; 
:2I1S  ont  refusé  cette  iiutoi  i>.iIimii  .\1iii>  pour  hiticiilal  d(( 
juin  l'autorisation  de  poursuivre  i\l  Caussidiere  a  été  re- 
riisee  pari.^)8  représentants;  251  seulement  ont  été  d'avis  de 
l'accorder, 

A  six  heilnsdil  malin  ,  le  samedi,  le  piésidcnt  (l(''cl,ir;iil 

'Pieles  en on-,  ,,\,,ieiil  ,  pin-  encore  ,|nr  .,    dniVv  >,,n> 

exemple,  conlnbuc  ,1  rendre  -1  leli-iinle  ei  -i  pénible. 

Lundi  un  di'cret  sur  I  cleclioii  de-  |n;_-e-  1  nn-ulaircs  a  été 
\ote  par  rAssembli'v  II  allribiie  le  deoil  cleeloralcn  même 
Icinp-  (|iie  IY'Il;:ilidile  ;i  tous  les  comniel (;,iiils  [iiilent('>s  (le- 
|iiii-  cim|  ,111-  el  don  ne  die.  de|iius  deux  ans  au  luoinsdans 

le  ii—nii  d l.niLil    In  meideiil  curieux  a  manpié  la  lin 

de  cette  se.iucc.  .M  le  nnni-liv  de  riiiteneiir  avait  cru  de- 
voir donnera  la  Iribune  i|iiel(|iie>  explications  ipii  eussent 
peut-être  été  mieux  plac(''e>,  -dus  lonne  de  note,  dmis  le 
Moniteur,  sur  les  pn''caiilioiis  (pic  le  i;oii\crneiiieiil  a\ail 
prises  pour  ipie  des  délournements  de  papiers  commis  aux 
Tuileries  après  la  lévoliiliou  de  février,  ne  pussent  pas  élre 
renouvclf's  aujourd  luii.  Il  allait  ipiitlerla  tribune,  lorsipie 
M  Laussedal  lui  a  demandé  de  sa  |.l,ieesi  le  couvi-rneineiil 
était  pour  (picl.pie  chose  dans  la  piibli,  alioii  de  la  l{rnir 
rrlrosi>erlhu\  .Sur  la  réponse  néuatuc  de  .\1  .Scnard  ,  une 
autre  \(iix  de  la  M(intai;ne  a  exprimé  le  mimi  ipie  la  Rrriic 
rrliiispcrlifr  fut  suspendue.  M,  Taschereau  est  miuilé  il  la 
Inliuue  pourconlirnier  le  dire  de  M.  Sénard  et  dc-ap-r éga- 
lement la  responsabilité  de  ladminisl  ration  antérieure  ('.  Cst 
sous  lei;(iu\eriieiiicnl  provisoire  ipie  la  llrriir  rétrospective 
a  eu  communication,  non  pas  des  papiers  dont  piiihiil 
M.  Sénard  ,  mais  de-  deux  iioilefenilles  déposes  au  paripiet 
de  M.  le  procureur  uenei.il  1,11c  s'est  tron\ee  eealement, 
au  21  février,  en  |in-.e--i(ni  de>  papiers  compos.mt  le  ca- 
binet du  secrétaire  d  un  ain  icii  minislrc  du  ;;ou\eriieioent 
(leiuillcl  (-.(Si  a  ces  deux  sources  (pi'ellc  a  pui>é  Klle  iiu- 
prune  intc-ralement  toutes  les  pièces  trouvées  dans  les  deux 
poitchaiillis  s.ins  choix  aucun,  .sans  le  moindre  letranche- 
ment,  sans  nulle  exception:  elle  inipriiue,  d'un  autrii  coté, 
tout  ce  qu'avait  recueilli  de  curieux  M,  (ienie.  .Si  ces  docu- 
ments et  ce>  cmiosilcs  ne  compromettent  pas  les  liomnics 
ipiela  Monla-neMindraitvoircompromis,  el  s  ils  uni  dévoilé 
M  lilan.|ui  ci  i|iicl(pies-uns(les  anciens  correspondants  oli- 
siMpiieiixile  M  (lui/ot  et  de  M  (ieiiie,  aujourd'hui  Monta- 
gnards il  tous  crins .  en  vérité  M  Taschereau  n'en  peut 
mais.  Que  M,  Laussedat  s'en  prenne  il  ceux  qui  ont  eu  la 
maladresse  d'écrire  el  non  à  celui  qui  a  le  courage  d'ini- 
priincr. 


Mardi  a  été  lu  le  projet  revise  de  la  (  oii-^liliilion.  Non.-, 
aurons  a  en  rendre  compte  la  .scnidiie  |.iin  li.iinc,  (|uand  le 
ra|ip(irt  aura  été  distribué,  et  (piaiid  (le|,i  l.i  di-cu.ssion  su 
trouvera  commencc'H!.  —  Apres  celle  leiime  \1  Laii-scilat, 
poursuivant  sa  canipagno  de  la  \eilli  ,1  |Mo|i,,.e  la  Im  ma- 
lion  par  l'Assembh'M;  dune  caimiii--Miii  ili,ii_-ee  d  iii.enio 
rier  et  de  publier,    .s'il  y  a  heu,  le-  papici=  de.-.  Tuileries 

Il  a  dein:iiiile  I  invemc    i|ni  a  ele  ie| ssi'œ.  Sa  proposition 

a  ele  ivn\o;,ee  ,in\  lime,in\  . |m  ,i i n  on I  .1  sO  prOnOncer  SUr 
la  ipie-lioii  de  -.iMiir  M  1  .\>-emlilee  doit  OU  non  prendre 
en  con.sideration  cetle  eolleeliou  diine  autrearnioire  de  fer. 
Que  M.  Laussedal  prenne  liiiMi  garde  de  ne  trouver  la  en- 
core ([ue  des  aiitdgraplies  de  ses  amis! 

La  commi.ssion  d'enipiêtc,  cpii  a  fait  imprimer  ii  la  suite 
du  Happorl  de  M,  Bauchart  trois  volumes  de  pièces  justili- 
catives,  n'a  pas  voulu,  pour  abn'.ger,  grossir  ce  rctueil  de 
la  correS|ioiidance  des  deleLou-s  de  l.i  Commi^-iiiu  des  clubs 
dans  les  dépailemeiiL-,  a\ei  le  pic-uleni  de  . elle  (!oinmis- 
sion,  le  sieur  l.oiiL'e| I  (Jiiali-e-Miii:l-M\  do— lers.  ,se  rap- 
portant ,iu\  .pi.llie  Miivl  MX  dep.nleinenl-,  oui  (■■l(■■d('■pll^(■•S 
aux  arclll\eMle  I  A-enil.lee  II-  ividelliienl  le-  lell,c-de, 
CCS  lnl"loliliai|-e>  dcinoenalc-  .Non,  iiell  ne  pelll  ivndre  le 
SU  le,  lorlliograplie.  la  logapie,  lcs>ciitinierits  de  ns  epislo- 
l,iiivs  di.  la  M'ille  (In  eiml  iè\er!  Il  serait  a  jamais  icL'ret- 
table  pour  Ihistoire  de  notre  temps  el  pour  l'enseignement 
des  Lmigepied  liilurs  ipie  cetle  coricspoiidancc  ne  lïit  jias 
iiiiprmice  II  \  a  parlieiihcrenienl  de-  lellre-  d  un  citoxcn 
loiy-d'Aiiioiii-,  en\o\(''  dans  l';iirc-(i  l.nir,  (pril  tant  il  l'ont 
prix  arracher  a  l'oubli.  Quand  on  a  lu  ces  epitres,  (piand 
on  voit  il  quels  hommes  notre  pauvre  France  s'est  trouvée 
livrée,  on  peut  se  dire  : 

Nous  l'avons,  en  dormant,  madame,  échoppé  belle  1 

Le,s  journaux  et  les  correspondances  de  l'étranger  n'ont 
rien  apporté  de  bien  nouveau  dans  la  situalion  des  afl':iires 
eiiro|H''eiiiies  l.llaliec-l  a^ali'c  de  haile-  m, rie-  de  inniive- 
liienlM'onlnaires,  en  alleniianl  I  elTet  de-  iie;joei,il  mn- pour- 
suiMcsparla  Fraïuat  et  rAiiglelcric  Ces  iiegoci, liions  ne 
paraissent  piis  jusipiici  avoir  inllue  sur  la  e Iiiile  des  Au- 
trichiens, ijui  est  toujours  la  conduite  d'un  vainipiciir,  cl 
d'un  \ainiiiieiir  irrité  dans  un  pays  conquis.  Cependant 
Vienne  la  i  a|iiiale  de  l'Autriche,  est  livrée  au  désordre  de 

Ile-  liriiii>  d  intervention  armée  courent  en  ce  moment  ii 
Paris.  On  annonce  qu'une  nouvelle  division  ,  qui  doit  faire 
partie  de  rarniée  des  Alpes,  se  forme  actuellement  il  Dijon. 

Lord  llardinge,  commandant  en  chef  des  forces  réunies 
en  Irlande,  e-i  de  retour  en  Angleterre,  sa  |iii-eiii c  n  étant 

plusjugec  nece-Mllle  daUS  les  provinces  irl:illil,ll-e- 

Les  joli  ma  11  \  belges  ont  annoncé  l'an  iMeen  liclgiqiiede 
.M  Louis  lilanc;  il  aurait  été  arrêté  |iendaiit  ipielques  heu- 
res, r.iiile  de  passe-port,  puis  remis  en  liberté  par  ordre  du 
f^oiiM'inemcnt  :  M.  Louis  Blanc  aurait  annoncé  rioleulion 
de  .se  rendre  en  Angleterre;  réalisant  ainsi  une  prédiction 
de  V Illustration,  impriméB  quelques  jours  après  la  révolu- 
tion de  février 

On  assure  que  M.  Caussidiere  a  ('gaiement  passé  il  Gand 
la  nuit  de  dimanche  ii  jeudi. 


■iii  Heaiice  du    S 5   août. 

Mémorable  séance!  D'autres  la  jugeront;  nous  nous  con- 
tenions de  la  peindre. 

On  -axail,  dès  le  début,  (pie  le  eoiuenieincnl  et  le  pn''- 

-iilenl  de  1  \-. milice  (■■laienl  d  .lecord  | ■  e|iiii-' r  l;i  dis- 

(  II--1..1 1  d  une  haleine,  dii.-s  ail  lis  i,'|iiv-,ail,iiil-  rester 

sur  leurs  sièges  jiisipi'a  niinuit  :  mais  on  el.iit  bien  loin  de 
]in'Miir  (|iie  cetle  séance  vraimeni  re\ohili(inniiire  durerait 
dix-huit  heures  cl  (judo  en  sortirait  au  grand  jour,  a|ires 
toute  une  nuit  d  incidents,  de  luttes  fébriles  et  d'émotions 
dramatiques. 

Dès  le  matin,  des  dispositions  militaires  extraordinaires 
sont  prisî^s  sur  tous  les  points  de,  Paris  l'ne  léL'ion  deiiarde 

nationale,    un     reL'imeill    de    Iilmic    el    des   delacliemelils  de 

toutes  iiniics  lien  mail  lmi  lu-ini .  >,i  ii> -:'  ni  ici  ,  aiiloiir  du 

palaisdela  rcpre-enl.ili i.ilieiiale   dont  I  ,i-peel  exlcrieiir 

lioirrcdii  reste  aiieiin  (Ml  aelele  in„,lile  La  lonledescu- 
riiaix,  solhcil.inla  inaiii-  |oiiile-,  in,i i<  iiiiirilemenl ,  rentrée, 
est  seidemiail  plus  eoinp.iele  ipie  d  li,iliiliidc  I  es  blllcls(h'S 
Iriliiincs  haiilcs  el  b.is-e-  on!  ele  reelier,  lus  depuis  huit 
jours  avec  un  eiiipre-senieiil  siii-iiliei-,  cl  Imn  a\anl  l'heure 
■|ix(''e  pour  I  ouxerliirc  (le  l.i  sciiice  Imile-  le-  places  réser- 
vées au  corps  diploniatiipie,  iiii  con-eil  d  II, il,  aux  anciens 
pairs  ou  députes,  aux  journalisles  .ms  -i,  noeiaplies  et  au 
|iiiblic  sont  envahies  par  une  atlliience  piodiuieuse  d  hom- 
mes niari|uants,  pour  la  plupart,  el  de  h'mmes,  tilles  ou 
mères  de  représenlanis  parmi  lesipiels  on  remaniue  entre 
autres  maihiine  Ledru-Uollin,  ainsi  ipiela  mère  et  les  siriirs 
de  l'ancien  préh'l  de  police  Caussidiere. 

Le  commencement  de  la  séance  justifie  assez  mal  celle 
avide  curiosité,  .\  midi  et  demi  le  pr(''sident  Marrast  dé- 
clare lii  discussion  ouverte.  Il  recommande,  dans  ipiel(|ues 
paroles  pleines  de  conv(Miance,  l'alteulion.  le  rccueilleiiient 
cl  le  silence  a  .ses  collègues.  Mais,  tout  d'abord,  une  foule 
de  (piestiiuis  incidentes  et  personnelles  S(iule\ees  par  di- 
verses deposi  lions  ou  faits  énonces  dans  les  pièces  d'cinpir'le, 
se  produisent  a  la  Irilnine,  l'Assemblée  avant  décide  (pie 
ces  débats  subsidiaires  seraient  ininiedialei'iienl  Miles, 

Voici  en  premier  lieu  M,  Uicrosse  (pii  reproche  ou  a  re- 
proché il  MM.  Cazy  et  ('.barras,  l'un  l'ex-minislrede  la  ma- 
rine, l'aulre  sous-'.secrétaire  d'Flal  au  département  de  la 
guerre,  de  n'avoir  point  été  vêtir  leur  uniforme  et  faire 
battre  le  rappel  au  l."i  mai,  au  lieu  de  rester  sur  leur  banc 
de  ministres  en  lialiit  noir,  en  face  de  l'invasion  Ces  deux 
rcpirs'Utanls  se  defendenl  euergiipiemeni  d'un  tel  repro- 


che ;  ils  allèguent  surtout  l'uuile  du  (duiniandcment  alors 
confié  il  M.  Courtais,  eldansle(iuel,  disent-ils,  ils  n'avaient 
point  il  s  immiscer. 

C'est  ensuite  M    Ovra»,   un  orateur  ipii  «était  déjii  fait 

lenianpicr  ihins  1  allaii'e  du  million  pour  le-  eanipagnes.  el 

n,l  |i,i-  de  peine  ,,  lepnil-el  laceii-allon  ipioli  loi  iuipUte 
d,non     slIlM    a    I  Ilolel^le-Ville    liaibes    el    -e-    adheicols  . 

tandis  ipiil  est  allé  le  reprendre  sur  eux  ,  avec  .MM,  1  edru- 
Uollin  et  Lamartine,  ce  qui  est  un  peudiherent  .M  Oyras 
a  de  la  verve  :  mais  il  est  un  peu  trop  [ilaisiint,  vu  la  nature 
du  sujet.  11  se  plaint  qu'on  1  ait  changé  en  route  el  s'écrie 
comme  Sosie  :  «  L'enquête  a  fait  de  moi  un  moi...  qui  n'est 
pas  du  tout  moi  !  « 

Voici  venir  maintenant  MM.  Portails.  Landrin  et  .\rago. 
qui  se  livrent  un  duel  il  trois  il  propos  de  ce  que  ce  dernier 
ajipelle  les  conciliabules  nocturnes  du  ministère  de  l'inté- 
rieur. 

Signalons  en  passant  une  petite  pantomime  expressive  de 
M.  Marrast ,  lequel ,  en  entendant  parler  de  jeter  I  Assemblée 
par  où  vous  savez,  mesure  narquoisement  de  l'oul  la  hau- 
U'or  desdites  fcniHres ,  situées  il  quelques  trente  pieds  au- 
dessus  du  niveau  du  .sol. 

Il  lut  un  temps ,  el  ce  temps  n'est  pas  loin  ,  où  la  question 
était  fort  a  Tordre  du  jour;  où  il  n'était  si  mince  candidat 
il  un  grade  dans  la  garde  nationale  qui  n'eut  à  s'expli- 
(pier  sur  le  poinl  de  savoir  ce   ipie  l'on  devrait  faire  de 

l'\-eiiililee-i  elle  ne  Inariliail  pa-illoil  (  '  e.|  ce  (pii  sem- 
blerait n-,illeidise\plicaliiiii-e,  I L'ee-iailre  MM    l.edru- 

KoUiu  et  Ar:ig(i,  celui-ci  tenant  le  pu. pu-  de  celui-là  el 
l'ayant  répété  en  y  attachant  plus  d  importance  que  de 
raison. 

Autre  combat  à  trois.  —  MM.  Edgar  Quinel  et  Baune 
prennent  le  citoyen  Turck  il  partie  pour  certains  cancans 
nieurliiers  qu'il' aurait  tenus  sur  leur  compte.  Le  commé- 
rage, en  ce  qui  louche  M.  Baune,  est  sanguinaire.  Il  s'agit  de 
([iiatre  ou  cinq  cents  têtes  ii  retrancher  de  l'Assemblée,  à 
droite,  il  gauche,  un  pou  partout.  M.  Baune  se  fàclie  tout 
rouge  :  il  y  a  de  quoi.  Nous  tenons  jusqu'il  preuve  con- 
traire ce  ti"i lible  exieiininateur  pour  incapable  de  charger 
sa  couse  leiiee  piilil  npie  de  lassassinat  d'un  insecte.  M.  Turck 
aura  eei  l.iiiieinent  111, il  entendu. 

Apres  une  iiielee  assez  confuse  ,  il  laquelle  prennent  suc- 
ccssivemenl  part  M.M  Denjoy,  Larabit ,  Alex.  Martin  ,  Bac. 
liaiichait,  rapporteur  de  la  commission  ,  Pierre  Lefranc  et 
Jules  Favrc,  la  série  (les  incidents  pei'sonnels  et  acccs.soires 
est  (lelinitiNcmcnt  close,  et  M.  Lcdru-RoUin  a  la  parole  |K)ur 
présenter  sa  jiisliticalion, 

M.  Leihu-Kollin  n'est  certainement  pas  un  grand  ora- 
teur, tant  s'en  faut,  mais  il  a  la  fougue,  l'action  ,  le  tempé- 
rament oratoires.  Aoilii  plusieurs  fois  depuis  quelques  se- 
maines qu'on  lui  fournit  en  l'amenant  sur  le  terrain  brûlant 
le  la  (leleiise  pei-oiiiielle  I  oeea-ion  d'un  trés  véritable 
siicecs  lue  arme  ilelen-i\e  ipu  lin  e-t  familière  .  c'est ,  je 
ne  (lirai  |i:is  1  iiiNccIne,  mais  1  all,n|iie  Aujourd'huisurlout, 
il  rciii|iloie  avec  élan  ,  avec  hardiesse,  11  ne  daigne  pas  si- 
ilisenlper,  —  Ce  ipi  il  a  fait,  dit-il,  il  la  fait  pour  fonder  et 
poiirsanvei'  la  Hcpiililhpie  .  ce  que  ses  adversaires  ne  veu- 
lent pascompreiidic    on  ce  ipi  ils  ne  lui  p  irdonnent  pas. 

Il  s'att,i(|iie  a  I  op|Hi-iih)ii  d\  ii;.-liipieile-,li\-huit  années, 
lui  reproche  son  iiideei-niii ,  s,i  -lialeuie  iiie-ipiineel  sa  sté- 
rilité d'idées.  Il  termine  par  i c  lui  leiix  coup  de  boutoir  con- 
tre le  chef  de  1  ancienne  gain  lie  prc-idenl  de  la  commission 
den(|iiêle.  au  milieu  des  .ipplaiidissenients  du  coté  gauche 
de  lAssemblée.  Le  cote  droit  attend,  dit-on  .  une  autre  oc- 
casion pour  rcndrejusticeà  la  fécondité  d'idées  de  la  Répu- 
bliipie  rouge. 

.M.  Ledru-Rollin  a  été  passionné  el.  .sinon  mesuré,  du 
moins  sobre ,  ce  dont  il  faut  lui  savoir  gré.  Il  a  tenu  à  peine 
une  heure  la  tribune. 

On  n'en  pmitdire  autant  ileM.  Louis  Blanc.  Dans  la  pre- 
mière partie  de  son  discours  .  ipii  a  dure  plus  de  trois  heu- 
res ,  il  prend  a  tâche  de  jusiilier  ses  doctrines  du  Luxem- 
bourg,  iviiudie  l'organisation  des  mouvenienlsdes  1"  mars 
et  lu  avril,  et  deliiiit ,  dans  un  langage  fini  remarquable 
assuréiiicnl ,  mais  entaché  de  rhétorique,  les  trois  dogmes  . 
les  trois  svmboles  du  calechisnie  républicain,  ipii  peut-être 
n'avaientquefaire  encelle  ihe-e  I  il.erle  Igalité,  Frater- 
nité, Cela  estions,  lent  ,  de.  i.im.iioii  e  .l.l.iie  sur  un  Ion 
emphatiipie  elsur  un  diap.i/oii  tr..p  el.'ve  iiiii  épuise  l'ora- 
teur et  l(>  force  a  kmI.iiiici  de  lauditoire  ,  déjii  fatigue  lui- 
même  ,  une  suspeii-ion  .1'  -e.ince, 

1  adeuxiemepaitiede  son  discoui-s,  quiouvrcii  luiilheures 
la  séance  de  nuit,  (^sl  inliniiuent  supérieuri'  il  la  première. 
Autant  .M.  Louis  Blanc  a  été  nuageux  et  ampoulé  à  son 
début ,  autant  il  devient  iirecis.  clair,  faïuilieret  naturel  lors- 
ipie,  suivant  l'enipiélepied  ii  pi(Hl,  il  rehileavec  une  modéra- 
lion  ,  une  mesure  ipiisont .  très  malheureusemeul  pour  lui  , 
peu  habiluellesii  cet  orateur,  les  accus4itionsdirigirsconln' 
lui.  Son  argmnenlalion  est  spécieuse:  sa  narration  habile  el 
digne  de  liiistorien  des  Dix  Années.  Il  la  fait  suivriMliine 
C(iiirli>  et  véhémente  péroraison  où.  proleslanl  desim  inno- 
cence, il  se  défend  avec  énergie  de  la  lAchelé  insigne  qu'il 
v  eût  eu  pour  lui  a  ne  pas  prendre  part  dans  une  insur- 
rection il  laquelle  il  aurait  pous-siv 

l'ne  vive  agitation  succihIc  il  ce  discours  dont  la  set-onde 
moitié  a  plusieui-s  fois  obtenu  l'adhésion  pr(>siiiie  unanime 
ih'  rAssemblee. 

Apres  un  court  débat  entre  M.  Trclat  el  l'oralour  au  su- 
jet do  propos  très  grave  de  M.  Kniile  Thomas,  signalé  par 
le  rapport  d  enquête  ,  le  pivsidcnl donne  la  parole  au  ri- 
lineii  Caussidiere. 

I.'ex-piefel  de  police  dechiffi'e  avec  peine  .  mais  dune 
voix  forte  el  avec  beaucoup  d'accentuation  el  de  vivacité  , 
le  volumineux  manuscrit  pour  la  rédaction  duquel  un  ami 
la  aidé  ,  dit-il .  mais  (lui  est  en  («riieson  œuviv .  on  même 
temps  (pi  il  est  la  lidèle  expn^ssion  de  sa  |>eusée.  Bien  que 
ce  plaidover  habile  porte  en  elTel  la  trace  d'une  main  exer- 
cée, il  n'a  pas  la  luoilié  du  succi-s  qu'oblienl  M.  CiUissidièn- 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


lui-même,  iiiterronipanldc  temps  en  temps  sa  lecture  pour 
lancer,  avec  ce  naturel  et  cette  bonhomie  admirables  qui 
lui  valaient,  il  y  a  deux  mois  à  peine,  tant  de  suffrages 
iourjcois;  pour  lancer,  dis-je,  quelqu'un  de  ces  traits  im- 
prévus, quelqu'une  de  ces  boutades  piquantes  et  naives 
qui  font  de  lui  un  type  si  tranché,  un  orateur  à  part,  po- 
pulaire, excenlrii|U(''  et  (pielquefois  si  émouvant.  11  y  a  cer- 
tainement |ibis  que  (lu  ilrinusu  dans  ces  improvisations 
parlielles;  abrupte  et  iui|)nipre,  le  mot  n'est  pas  toujours 
parl;inentaire;  mais  ce  dclaut  devient  une  qualité  même 
et  les  cffels  surtout  abondent  d'autant  plus  qu'ils  ont  l'air 
d'être  moins  cherchés.  — Citoyens,  sécrie-t-d  dans  une  de 
ces  expansions  oratoires,  j'ai  amené  ici  ma  mère  et  mes 
sœurs  :  elles  sont  l,\-!iaul  (pii  m  écoulent.  Je  n'aurais  pas 
le  cœur  de  mentir  devant  elles.  Citoyens,  vous  devez  me 
croire.  »  —  Et  plus  loin  «  —Je  n'ai'  cependant  pas  fait 
les  circulaires  de  .M.  Jules  Kavre,  et,  quand  j'ai  été  préfet 
de  police,  bien  que  je  n'eusse  aucune  force  régulière,  on 
n'est  pourtant  pas  venu  me  faire  des  barricades  contre  mon 
nez!  »  (Ceci  pour  M.  Trouvé-Chauvel).  —Explosion  d'hi- 
larité 

Il  est  minuit  lorsque  M.  Caussidière  quitte  la  tribune. 
M.  Marrast  annonce  alors  une  cmnmunicalion  impor- 
tante. Il  donne  lecture  it  l'Assemblée  d'un  réquisitoire  de 
M.  Corne,  demandant  l'autorisation  ilediri,L;er  des  poursui- 
tes contre  Louis  Blanc  et  Caussidière.  Cette  communication 
soulève  dans  la  salle  une  véritable  tempête.  La  gauche  se 
récrie  et  proteste  en  masse.  Les  spectateurs  des  tribunes  , 
dont  aucun  n'a  quitté  la  place ,  cni:.!!;!')!!  eux-mêmes  de  vifs 
collo(|ues  Le  tumulte  est  e|i(in\;Mii,il.|r  On  se  croirait  re- 
porté a  soixante  ans  en  arnnr  in  iilcme  Convention,  dans 
la  nuit  du  .31  mai,  ou  celle  du  N  llierniidor.  —  C'est  un  as- 
sassinat politique!  s'écrie  une  voie  forte  partie  de  la  Mon- 
tagne.—C'est  un  coupde  tliéàlre!  dil  M.  Bac. 

Cette  dernière  parole  appelle  a  la  tribune  M.  le  général 
Cavaignac.  Il  proteste,  de  ce  ton  net  et  incisif  qui  lui  est 
propre,  contre  l'idée  de  surprise  et  l'intention  d'effet  dra- 
matique que  l'on  semble  inqiuter  au  gouvernement.  11  ne 
fait  point  difficulté  de  déclarer  que  la  demande  en  autori- 
sation de  poursuites,  fondée  non  sur  l'enquête,  mais  sur 
l'instruction  judiciaire  qui  a  marché  concurremment,  a 
l'entier  assentiment  du  pouvoir  exécutif,  et  il  émet  le  vœu 
que  la  Chambre  statue  sans  désemparer  sur  la  demande. 
Celte  déclaration  ferme  et  catégorique  impressionne  vive- 
ment l'Assemblée. 

Auparavant  M.  Lagrange  a  prononcé ,  d'une  voix  lugubre 
comme  un  tocsin  d'alarme  ou  un  glas  funèbre,  une  longue 
harangue  à  peu  près  inintelligible,  que  l'Assemblée  a  inter- 
rompue par  ses  cris  d'impatience. 

Une  discussion  animée,  une  sorte  de  mêlée  s'engage  sur 
le  point  de  savoir  si  l'incident  judiciaire  sera  vidé  en  lais- 
sant son  cours  il  la  question  politique.  M.  Ledru-RoUin  se 
prononce  dans  ce  sens.  M.  Louis  Blanc  demande  qu'il  y 
aitjonction.  M.  Gontays,  un  orateur  intrépide  qui  se  cram- 
ponne il  la  tribune,  malgré  les  violents  orages  qu'excitent 
ses  mercuriales  maladroites  à  l'Assemblée,  désire  savoir  où 
sont  les  preuves  recueillies  par  l'instruction  judiciaire.  M.  le 
président  du  conseil  fait  connaître  qu'elles  sont  dans  l'en- 
quête même. 

.M  l'Inron  demande  une  contre-en(|uête  sur  les  menées 
bnii:i|i;iiii-ir-  li'';;iti!iiislcs,  (irléanistcs,  (pii  ne  paraissent  pas 
avdir  |ii'i-("cu|ii'  l;i  l'iiiuiiiissiiin.  Il  Uni  ressortir  ce  qu'a  de 
graM.'  une  mesure  qui  tendrait  a  dépouiller  de  leur  inviola- 
bilité deux  représentants  dans  la  situation  actuelle  du  pays, 
sous  létatde  siège  dont  l'effet  serait  de  les  rendre  justicia- 
bles des  conseils  de  guerre,  et,  à  la  rigueur,  même  passi- 
bles (l'une  transportation  sans  jugement. 

M  Ma  ne  explique  qu'en  effet  l'autorisation  des  poursuites 
aurait  cette  portée  en  ce  qui  touche  les  journées  de  juin , 
mais  non  laltentaldu  13  mai. 

On  entend  encore  plusieurs  fois  MM.  Louis  Blanc  et  Caus- 
sidière. Le  premier  a  la  voix  brisée  et  presque  éteinte,  mais 
l'énergie  ne  paraît  faire  défaut  ni  il  l'un  ni  à  l'autre. 
M.  Caussidière  allègue  que  l'on  n'a  pas  pris  connaissance 
des  nombreuses  pièces  énoncées  dans  sa  défense  et  déposées 
sur  le  bureau  du  président.  Il  produit,  dans  quelques  paro- 
les, qui  cette  fois  sont  bien  exclusivement  do  lui,  un  grand 
effet  sur  l'Assemblée. 

Enfin  ,  M.  Dupin  propose  et  fait  adopter  l'ordre  du  jour 
sur  la  question  politique.  Ainsi  éhuiile  et  allégé,  le  débat 
marche  rapidement  à  une  solution  pii''viie  M.  Marie  de- 
mande il  son  tour  et  fait  déclarer  l'urgence  de  la  discussion 
et  du  vote  sur  le  réciuisitoire  de  M.  Corne.  Le  scrutin  de 
division  récl;i;iié donne,  sur  7.S,")  votans,  493  voix  pour  l'ur- 
gence conire  2!I2  qui  la  rejettent. 

Ce  résultat  produit  une  sensation  profonde.  11  est  trois 
heures  et  demie  du  matin.  M.  Bac  monte  il  la  tribune  et  pré- 
sente, à  l'aide  des  notes  recueillies  par  lui,  dit-il ,  comme 
membre  de  la  commission  chargée  d'examiner  la  première 
demande  de  poursuite  la  défense  de  Louis  Blanc.  Il  s  acquitte 
de  cette  tâche  avec  talent  sans  doute:  mais  il  ne  fait  guère 
que  reproduire  ce  que  M.  Louis  Blanc  lui-même  a  développé 
avec  plus  de  force  quelques  heures  auparavant.  Son  plai- 
doyer—car c'est  le  mol  —  tient  beaucoup  plus  de  l'avocat 
que  de  l'orateur  politique.  Cependant,  l'Assemblée  subit  la 
réaction  des  émotions  et  des  fatigues  de  la  journée  cl  de  la 
nuit.  A  une  surexcitation  fébrile  ont  succédé  un  silence 
qnasi-lélhargiqueetun  accablement  profond  BciiocoiiiMl'l  lo- 
norables  membres  succombent  ii  un  somiiKil  im'>isiililr  , 
et  l'épidémie  narcotique  sévit  parliculièrcmcnt  sur  li'>  Imiics 
(lu  i:oiiviTnement  où  elle  ch'it  les  yeux  de  M  Bastide,  courlx^ 
la  l,ii;:i'  tête  (le  M.  Goudchaux  et  ne  respecte  même  pas 
cclli'dii  -[•iicnd  Cavaignac. 

Un  se  reveille  pour  voter  après  le  discours  de  M.  Bac,  et 
trois  scrutins  de  di\  isinn  ont  lieu  consécutivement.  Le  pre- 
mier autorise,  ii  une  majorité  de  bOi  voix  contre  2S2,  les 
poursuites  contre  M.  Louis  Blanc.  Le  second  accorde ,  en  ce 
qui  touche  M.  Caussidière,  l'autorisation  de  poursuite  rela- 


tive aux  événements  du  13  mai ,  :i  une  majorité  de  477  vo- 
tants contre  2G8.  Mais,  avantqu'il  y  soit  procédé,  M.  Flocon 
a  prononcé,  en  faveur  de  celui  qu'il  appelle  son  vieil  ami 
de  vingt  années,  son  coreligionnaire  politique  et  son  coni- 
■pagnon  d'infortune,  quelques  paroles  chaleureuses  et  biiMi 
senliesqui  obliennent  l'adhésion  sympathique  de  l'auditoire, 
et  ne  sont  assurément  pas  sans  iniUience  sur  le  sort  de  Vc\- 
préfet  de  police  ;  car,  consultée  sur  la  demande  en  autori- 
sation de  poursuite  relative  aux  événements  de  juin  ,  et 
dont  l'effet  serait  de  livrer  les  représentants  poursuivis 
aux  commissions  militaires ,  l'Assemblée  décide  il  une  très- 
forte  majorité  ([u'elle  ne  donne  pas  l'autorisation  demandée. 
Entre  CCS  deux  .scrutins,  nous  ne  remarquons  pas  sans  sur- 
prisr  M CiMis^idicii.'  s'approchant  du  banc  des  ministres  et 
y  (jiisiiit  lonj:ti'mps,  du  ton  en  apparence  le  plus  calme  , 
avec  io  clu'l  du  pouvoir  exécutif. 

M.  Marrast,  qui  a  présidé  les  débats  avec  énergie  et  ta- 
lent, a  voté  ostensiblement  contre  cette  deuxième  demande 
en  autorisation  de  poursuite.  Le  gouvernement  a  voté  pour. 
11  ne  l'a  fait ,  dit-on ,  que  sur  le  vœu  formel  de  M.  Corne  qui 
aurait  déclaré  au  momentdu  vote ,  qu'il  ne  voulait  pas  être 
abandonné  commeMM.  Landrin  et  Portails  et  donnerait  sa 
démission ,  si  le  ministère  ne  soutenait  pas  ses  deux  de- 
mandes. 

Il  est  six  heures  du  matin ,  lorsque  le  président  proclame 
le  n'siillat  du  dernier  vote,  et  un  jour  triste  et  gris  éclaire 
enlin  le  ternie  de  cette  formidable  séance  qui  n'a  pas  eu  de 
pré'ci'dont  etiiui  n'aura  pasdesuite,  souhaitons-le  du  moins 
ardemment,  dans  les  annales  parlementaires  de  ce  siècle! 


AUX  ABONNES. 

Quelques-uns  de  nos  abonnés  ont  mal  compris  l'avis  par 
lequel  nous  accordons  il  titre  de  prime  les  Journées  illus- 
trées de  la  Révolution  de  1848  à  ceux  qui  s'abornent  ou 
qui  renouvelleront  leur  abonnement  pour  un  an  jusqu'au 
13  septembre.  Il  est  bien  entendu  que  le  renouvellement 
doit  partir  de  l'époque  où  finit  l'abonnement  en  cours  de 
service  et  non  du  l"'  septembre,  ce  qui  ferait  double  em- 
ploi avec  l'abonnement  courant.  Ainsi  tousceux  qui  s'abon- 
nent pour  un  an  ,  quel  que  soit  le  départ  de  l'abonnement 
ou  du  ren(iii\('ll('ment  d  abonnement,  ce  départ  fùt-il  il  un 
an  de  date,  reccNront  les  lllll  livraisons de^  Journées  i//«s- 
Irées  de  la  Itéculution  de  1848,  sans  augmentation  de  prix 
|iour  Paris  et  sans  autre  augmentation  pour  les  déparle- 
menlsipie  les  frais  d'affranchissement  du  volume  des  Jour- 
nées  illustrées  ,  affranchissement  calculé  ;i  5  francs  les  lOU 
livraisons. 

Cela  veut  dire  que  l'abonnement  ou  le  renouvellement 
doivent  être  faits  dès  aujourd'hui,  ou  d'ici  au  13  septembre, 
pour  donner  droit  il  la  prime. 

Plusieur  abonnés  qui  ont  renouvelé  pour  un  an  à  partir 
d'août  I84'J,  terme  d'expiration  de  leur  abonnement  cou- 
rant ,  l'ont  compris  ainsi.  Ils  ont  reçu ,  en  conséquence,  les 
livraisons  en  vente  et  recevront  les  suivantes  à  mesure 
qu'elles  paraîtront. 


Courrier  «le  Paris. 

Les  menus  propos  de  cette  semaine  ne  devraient  pas  être 
de  notre  domaine  puisqu'ils  appartiennent  il  la  politique.  On 
retrouvait  partout  cet  hôte  inévitable;  il  était  assis  à  tous 
les  foyers,  il  s'associait  aux  occupations  les  plus  contradic- 
toires et  parlait  toutes  les  langues,  depuis  le  jargon  raffiné 
dessalons  et  l'argot  de  la  Bourse  jusqu'à  ce  beau  langage 
parlementaire  qui  a  toujours  fleuri  à  l'ex-Palais-Bourbon. 
Voici  cependant  l'Opéra  ressuscité  d'entre  les  morts  ,  qui , 
dans  la  même  soirée,  vous  joue  un  mystère  à  grand  or- 
chestre et  danse  un  nouveau  ballet.  «  Mais ,  dites-vous  en 
secouant  la  tête,  voyez  la  belle  surprise  et  que  l'Opéra  a 
bien  pris  son  temps  ,  comme  si  nous  n'avions  pas  nos  affai- 
res, c'cst-ii-dire  l'enquête!  »  C'est  donc  en  vain  que  la  pré- 
sente quinzaine  aura  vu  s'accomplir  les  petits  faits  les  plus 
piquants  par  la-propos  ou  l'imprévu  ;  il  quoi  bon  ,  par 
ex(Mnpl(> ,  sdcc'uper  de  l'ouverture  de  la  chasse,  des  prix  de 
peinture  ou  de  la  prochaine  élection  académique?  A  vrai 
dire,  cette  quinzaine  n'aura  eu  qu'un  jour,  le  jour  de  l'en- 
quête, et  qu'un  seul  genre  d'illustrations,  les  illustrations 
de  l'enquête. 

Un  nom  principalement  s'est  trouvé  dans  toutes  les  bou- 
ches ,  un  iiom  auquel  le  caprice  public  attachait  récemment 
encore  l'auréole  de  la  popularité.  Maison  France,  a  dit  quel- 
qu'un qui  s'y  conn;ii,^-.;(il  Kicholieu,  le  cardinal) ,  rien  ne 
tient  bon,  et  nulle  (  liii>c  n Cst  jamais  prévue.  QuoHe  idée 
nous  ferons-nous  doue  iuijoiird  hui  de  M.  Caussidière,  puis- 
que c'est  de  lui  qu'il  s'agit  ici  et  de  son  portrait  1  M.  Caus- 
sidière est-il  un  républicain  de  la  bonne  trempe  ,  une  âme 
antique  et  sto'i'(iue  ?  ou  bien  ne  faut-il  voir  on  lui  qu'un 
brouillon  et  qu'un  factieux  ?  Il  n'a  probalilrnu'nt  hi('/((c  ni 
cet  excès  d'honneur  ni  cette  indiijiiilé.  (  l  ili  <  i|i'li;il...  pro- 
chains auront  pour  but  d'éclairer  le  ni\-lnv  jnsi|u  ,i  pré- 
H'iit  inexplicable  (le  la  conduite  de  ICx  |iiclcl  ilc  police. 
l'iHir  le  iiioiiiciil  .  M  ('aussdicic  reste  il  nos;  eux  un  vrai  ar- 
h-li'cii  i('\olution  .  uni'  ligure  originale,  un  type  Dans  ce 
tl■.lll|i^o(l  Ic^  iinilalioii-  sont  si  tort  en  Migiic.  ou  celui-cisinge 
Danton,  on  n-\  .luin  tiiinclicdii  Rolicspicnc  ,  on  presqiie 
tous  chercliciit  il  iniiiM'iit  uiiocaniiiigiiolc  a  l(Mirtailk-(hins 
le  vestiaire  des  grands  et  pelils  lioniiiic- ronges  du  pa.ssé, 
M.  Caussidière  n'a  emprunté  la  driidiini' lie  |"'i-onne. Pendant 
quatre  mois,  ses  manières,  son  ;Hliiriiiisii,iiioii,  ses  maximes 
et  sa  conduite  ont  été  pour  les  l'.iii.-icii-  une  grande  nou- 
veauté Groshomme,  partant  bon  homme  ,  comme  dit  Cer- 


vantes ,  doué  d'un  bon  sens  trivial  et  d'une  éloquence  pitto- 
resque, faisant  de  l'ordre  ii  sa  manière  dans  le  désordre 
universel,  il  aspirait,  ce  semble,  au  titre  de  Ma itre-Iacques 
de  la  IU''piil)liipie  et  d'arbitre  de  tous  les  dillcnnils  ;  il  eût 
fait  vdIoiiliiTS  (le  la  capitale  un  grand  caiiiir,'t  on  Io  partis 
se  fussent  allablés  pour  le  salut'de  la  iialne  II  (  si  cMilent 
d'ailleurs  (|ue  sa  politique  procédait  du  système  liomœnpa- 
tliique  et  opposait  le  mal  au  mal  ;  jamais  empirique  ne  pro- 
céda plus  résolument  dans  ses  cures,  et  il  semblait  attendre 
chaipie  démêlé  de  la  rue  comme  une  crisesalutaire.  Les  plus 
sé\ eii's  vont  jusqu'il  dire  que  l'habitude  des  conspirations 
lui  avait  eijlevé  la  faculté  de  les  discerner,  et  qu'en  vrai  fa- 
naliipiede  son  art  il  eût  fait  volontiers  de  In  police  jusqu'au 
bout  et,  comme  le  juste  d  llonicc,  >ur  l.s  riiiiio  du  monde. 
Il  va  sans  dire  que  les  esiints  lii(Mi\i'ill;iiil<  et  lcsani('s(''(pii- 
tables  n'ont  pas  oublié  les  serxices  rendus  a  notre  Paris 
dans  ses  jours  sombres,  et  il  font  des  vœux  pour  que 
l'ancien  édile  sorte  de  l'accusation  la  conscience  nette  et 
l'honneur  sauf. 

Du  portrait  d'une  célébrité  nous  passons  à  un  tableau  de 
mœurs  qui  n'est  plus  vis.lile  maintenant  que  dans  nos  co- 
lonnes ;  le  Marrhé  aux  journaux.  Cet  échange,  vente  ou 
trafic  se  faisait  l'autre  jour  encore  dans  la  rue  Montmartre, 
et  plus  d'un  Parisien  a  pu  s'en  procurer  le  spectacle,  en 
allant  voir  lever  l'aurore  ,  sur  la  grande  ligne  des  boule- 
vards. Le  jour  où  nous  nous  passâmes  cette  fantaisie ,  une 
fraîche  brise  matinale  soufflait  sur  la  chaussée,  et  de  rares 
oiseaux  chantaient  joyeusement  dans  les  arbres  encore  plus 
rares  de  la  porte  Montmartre.  Tout  à  coup  des  cris  confus 
retentirent,  c'était  nos  industriels  qui  procédaient  au  libre 
échange  sur  l'asphalte;  c'était  l'esprit  parisien,  toute  sa 
pass;(ui  et  ses  colères  qui  circulaient  de  main  en  main. 
coiiiiiii'  lii  salade  et  les  caroltcs  au  iiKirclié  voisin.  Il  y  avait 
des  liottesdc  Conslilulionnel  et  des  cliarretées do Preise.  I! 
fallait  voir  ces  feuilles  encore  humides ,  s'échappant  du 
grand  panier  ou  elles  seront  bientôt  replongées,  et  heurtant 
dans  les  airs  leurs  arguments  et  leurs  Premiers-Paris. 

Quant  il  notre  deuxième  ou  troisième  dessin  (  car  aujour- 
d'hui nous  ne  sommes  guère  que  montreurs  de  figures  et 
descripteurs  de  vignettes),  il  vous  représente  une  distribu- 
lion  de  vivres  faite  par  les  soldats  de  la  garnison  aux  indi- 
gents de  Paris.  Que  si  vous  demandez  dans  quel  temps  et 
dans  quel  endroit  de  la  ville  cette  bonne  œuvre  a  eu  lieu, 
nous  répondrons  que  c'est  une  scène  de  tous  les  jours,  vi- 
sible il  toutes  les  heures  et  qui  se  passe  partout  où  il  y  a 
un  camp  et  des  soldats  dans  Paris.  La  bienfaisance  et  l'es- 
prit d'humanité  qui  anime  le  soldat  français  sont  aussi 
écliitants  que  sa  valeur  ;  on  en  pourrait  citer  mille  preuves, 
une  seule  suffira  :  Depuis  la  mise  en  état  de  siège,  la  gar- 
nison de  Paris  distribue  journellement  aux  indigents  trois 
mille  soupes  et  autant  de  livres  de  pain  Le  pauvre  ,  l'in- 
firme ,  l'éclopé  ,  la  veuve  ,  l'ouvrier  sans  travail  ,  ont  leur 
part  du  brouet  militaire  et  sont  les  convives  de  cette  provi- 
dence en  tunique  et  en  képi,  Charlet,  dont  le  cravon  fin  el 
rieur  a  si  bien  peint  les  pelilcs  misères  des  gens  de  guerre, 
a  oublié  leur  (-('itésplendide  et  bienfaisant.  Personne  encore 
n'a  songé,  peintre  on  iiutre  ,  a  reproduire  un  camp  volant 
dans  son  déshabillé,  tel  ipidn  peut  le  voir  aujourd'hui  aux 
quatre  points  cardinaux  de  la  ville. .Quchpics  heures  pas- 
sées au  quai  Morland  ou  sur  l'esplanade  des  Invalides  don- 
nent une  haute  idée  des  efl'ets  de  l'association  quand  elle 
est  dirigée  par  la  discipline.  La  nécessité  oblige  le  soldat  ii 
se  faire  successivement,  comme  Robinson  dans  son  île,  ter- 
rassier, maçon,  tailleur,  cuisinier  et  le  reste  Cette  main 
qui  manie  le  fusil  et  l'outil,  s'assouplit  dans  l'occasion  et  se 
prête  aux  travaux  d'aiguille.  Mais  ce  n'est  rien  encore  que 
le  vivre  et  le  couvert ,  le  soldat  n'est  pas  seulement  archi- 
tecte de  sa  demeure,  il  en  devient  le  décorateur;  des  or- 
nements guerriers  ii  tendance  patriotique  sont  disposés 
dans  l'intérieur  de  ces  cloches  de  toile.  Le  sol  a  beau  être 
ingrat  et  tenir  de  l'espèce  marécageuse ,  comme  au  quai 
Morland,  notre  troupier  saura  bien  en  venir  à  bout.  Tout  ii 
l'heure  il  se  faisait  architecte,  le  voilà  maintenant  jardinier 
et  ingénieur  hydraulique.  Il  connaît  l'art  de  créer  les  jar- 
dins, et  c'est  un  rival  de  Fourret,  qui  au  besoin  inventerait 
une  autre  machine  de  Marly  ,  seulement  ils  ont  placé  une 
sentinelle  pour  garder  leur  cascade  ;  un  brave  trop  altéré 
la  boirait  en  un  clin  d'œil. 

Le  soldat  français  est  sensible  et  galant,  et  l'on  peut  dire 
qu'il  a  toutes  les  mémoires  du  cœur.  Le  beau  sexe  obtient 
ses  hommages,  et  plusduii  glori(;ux  mort  a  emporté  ses  re- 
grets. Le  terre-plein  de  rarchevêché  est  émaillé  de  petits 
Jardinets  en  forme  de  (»  m  ulus.  consacrés  aux  citoyens  moris 
pour  l'ordre  et  la  Repulili(pie.  Les  intervalles  des  tentes 
figurent  des  rues  ipii  tontes  rappellent  des  noms  héroïques  : 
rue  Duoivier,  rue  Bréa,  rue  Négrier.  Jocrisse  deniiinderait 
assurément  où  le  soldat  prend  le  temps  de  ne  rien  faiire, 
car  sans  compter  l'exercice,  les  revues,  les  appels,  la  cui- 
sine, l'astiquage  du  fourniment  et  les  autres  menues  occu- 
pations dont  nous  avons  parlé  ,  au  camp  tout  s'importe  et 
s'exporte  à  dos  do  héros.  Cet  ouvrier ,  ce  chaussetiier,  ce  • 
guerrier,  cet  ingénieur  et  ce  poète  (car  notre  brave  fiiit 
aussi  des  verses) ,  dans  l'occasion  il  se  charge ,  comme  un 
dromadaire,  de  bois ,  de  paille  ,  de  cordes  ,  de  matelas ,  de 
biscuit,  de  gibernes  et  de  haricots. 

Une  vie  si  pleine  et  si  chargée  aboutit  parfois  à  la  mé- 
lancolie et  même  au  suicide.  Dans  son  dernier  rapport  sur 
la  situation  de  la  capitale  et  des  environs  ,  M.  le  préfet  de 
police  enregistre  dix  suicides  .  au  iioiiibre  d('S(piels  figurent 
trois  soldats.  L'un  doux,  dans  un  ('"crit  p(.islhujiie,  ;(  donné 
pour  cause  détcrmiiiiinti'  de  sa  mort,  ce  motif  bizarre  cl 
touchant  :  Il  ii\ait  (lis|>osé  de  cinq  francs  qui  ne  lui  appar- 
tiMiaiciit  point,  et  on  il  trouvé  sur  luila  somme  même  moins 
(pi[|(|iics  siiiis'  S  ('lier  la  vie  pour  un  déficit  de  cinquante 
(■(■iiiiiiic^ ,  js~iiréinent  le  point  d'honneur  ne  saurait  être 


■  iichimIIi' encore  plus  lugubre  et  qui  a  causé  une  pé- 
emotion ,  c'est  la  mort  fatale  de  M,  de  Sainte-Alde- 


pnll- 

Cl 
nibic 


\ 


l.'II.IXSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


|i;him'i!S  suiiout  lu 
ciii'  ils  perdent  en 
liiili'ur  el  un  piTc. 
llllr     ilr     IVlM|iirli' 


iluiii'  i^ninilc  ri'iiiiliili 


(Ir   l;i  luiljil 


l;ill,iiiv 
qui  i)0.-le 
■i  la  ban- 
!■  notaire 
•nd'hon- 
Sa  con- 
'•-  et  mis 
u\  grief» 
(iuinie  si 
l'irp  res- 
niv  .l'un 


(liM'rillr.-imnl.nn-,  Ir- ,i,,t;uiv> 
'I;'  l'.ins  se  di.-<lin,^u. lient  pur 
I  iiiic;;iilé  de  leur  vie ,  ils  se 
l"'i  n:iii'iit  à  recevoir  les  acies 
'1  .1  ;^iirder  leurs  notes,  de 
sorte  que  les  charges  avaient 
peu  de  valeur.  Aujourd'hui 
que  le  prix  en  est  fort  élevé, 
les  mêmes  mal -intentionnés 
prétendent  que  les  salaires 
du  travail  ne  suflisent  plus  ii 
i'ajiiiétit  do  quelques-uns,  et 
i|u  ils  demandent  à  la  spécu- 
ialiim  ce  qu'elle  leur  reprend 
ensuite. 

Nous  voici  au  spectacle  pour 
nous  égayer.  Life  Mobilier  de 
Rosine  (  théâtre  Montansier  ) 
ciui.^liiiii'  une  de  ces  joyeuses 
('\li'iiv;ii^an(i'.-i  dont  on  ne  sau- 
rait rendre  tuinptc,  mais  dont 
on  rit  toujours.  Les  amours  de 
Uosine  el  de  Bougival ,  tel  est 


l'épisode  dans  sa  plus  concise 
expression;  il  a  servi  et  servira 
encore  il  loiites  sortes  de  vau- 
deville.s  (j-pendani  voici  quel- 
que I  liii-p  (Je  moiIl^  prévu,  la 
Rosine  de  laventure  est  une 
grisede  quasi -sentimentale, 
et  Bougival  veut  l'épouser ,  la 
doter  et  faire  son  bonlicurpour 
la  rareté  du  fait.  Un  oncle 
inapprécialjle  souscrit  au  pro- 
jet et  le  cautionne  de  sa 
bourse.  Mais  quel  motif  rend 
cet  oncle  aussi  coulant  sur  un 
article  où  les  oncles  ne  le 
sniii  -mil..'  M  Ijadjnguel  a 
lu  1.- .)/,/,(,,,-.,  de /'urw,  elle 
pii-.iiii.iLMMliUi^'oletlerasé- 
duit  parsim  invraisemblance. 
I.'m  rêve  à  la  Rigolelte,  c'est 
Uosine  (lui  va  le  réaliser;  seu- 
lement il  veut  en  juger  de  fi»u. 
(In  n  ot  pas  oticle  de  conlé- 
dii'  [iiMir  rien.  Je  vais  voir  el 
adniiriT.  se  dit  le  lîadinguel, 
le  nidliiliiM-  de  Kit;olette .  la 
vertu  de  liij;nleHe,  la  cham- 
liii'llr  it  liiinocence  de  Rigo- 
li'ltc  H(i-iii(_.  a  du  cœur,  mais 
SI  v(  riu  ii'(..,t  pasdesplusraf- 
linri-:  le  chapeau  de  rosière 
la  roiUrrail  mal,  toute  Rosine 
qii  illr  i-t  ;  en  outre  son  mo- 
liilirj  a  disparu  dans  une  Icm- 
péle  de  créances  et  de  Créan- 
ciers Ou  reirouver  le  fauteuil 
alisent,  la  lalile  de  palissan- 
dre et  la  harpe  de  Rigolelte? 
.\  lors  voici  venir  l'e.xtravagant 
et  le  fantastique ,  mais  on 
n'en  rira  que  davantage.  Trois 
créanciers  ,  trois  barbons  . 
amoureux  évincés  par  Rosine, 
remplaceront  le  mobilier  que 
détientleurindéliealesse.Lun 
s'arrondit  en  table,  l'autre  se 
disloque  en  fauteuil  el  le  troi- 
sième sera  pincé  sous  forme 
de  harpe.  Badinguel  est  ravi , 
puis  il  découvre  la  ruse,  puis 
il  pardonne,  et  tout  s'arrange 
a  merveille  pour  Rosine  cl  l'es 
a'ilrcs  inléressi's 


ans  l'h.Smii  vcIp  do  l'hiolule»  Beaiix-AiU,  He^,  léconip.-nscs  ace. 


iircti^ps  MU  .irlislcs  |i. 


L'ILLUSTHATION.  .lOUP.XAL  IMYCnSEL. 


L^  .M;ucliO    ;,ii\  Junr.L.ux,  ru.;  .M..iilnia.  L. 


() 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


;i(Jmi'  , 
iiiiMit    i:i 

a  l(Mii  I  , 

c\>l  .Mirlirl  (|l 
V(lll;i  n.i>;iiiLV 
lini^M'nl,  M  lu 
(|y  lanl  il|.  Iirll 


Mais  voici  bion  une  autre  historiette  :  Deux  Anges  gar- 
diens, c'est  Baptiste  qui  eanlc  Michel  et  Micliel  (jui  \cil|c 
^ur  Haptisle.  I  c  premier  i>l  un  ;iiii;r  ii.ipu  ri  jhuIIIm  ,  I.'m'- 
cond  a  (les  rides  et  porte  nion^hn  lies  nuirnij  I  ari;;c  Miel»'! 
a  trop  l)u ,  ou  qu'il  n'a  plu.,  de  quoi  iii;iiiLTr  mi  ipie  la 
l^outte  le  travaille,  c'est  l'ange  Baptiste  ipii  mihI  :,  ^.,u  si- 
cours,  il  la  déroliée,  en  catimini,  l'ange  d  >on  I m  iii.ni  dc- 
ii:eiireiit   parraileiiieiit   invisililes  et  iil  l'hil    .le    iii\,|(mc' 

aillM.lr  lî;i|ill^lr     Inl-.pi,.  le   ilialllc  Mil  l:i  ,„;,hH|,r  .-...'  t  a 

se>  linii-.r<,  il  -,■  \,,ii  iloili.li' ,  renie,  lelc  pur  >uii  anv'e 
U'arilifo  ,1  li.nlir  L'M-:'  I ,r  Ni; sliTC  (1  luvrii 1 1  C iic, ,M ■  cl  !,.>,.- 
MJr  M  Michel  n'avait  uni^  lillc  i|iii'  li.ipiiste 
lii\  -lilv  et  qu'un  lion  poliivli:i~-c  miimmIc- 
il  c>l  jeune,  vif,  pattes  vernies ,  lunneli.  cii 
^ielie~,i  I  ;ivenant,  si  bien  ipie  .Mulieliiie  muik 
leinlier  diin  instant  il  l'aiilrc  (hiiis  les  an^'cs 
e  iiiiiieni ,  i-'est  Baptiste  qui  délie  le seilucteoi- 
Il  pK  leiMl  rroiser  le  ter  pour  .sa  lille,  et  puis 
s  ipii  s  expliquent ,  qui  pleiiicnl  et  qui  s'em- 
jiie  .Michiline,  s'iiUeiiiliis,aiit  au  récit 
cliNiis,  re-arde  ISaplisIe  ;i\,.e  inlT'ièl, 
piMsdeliiileiei  Mil  v,i  |,inil)our  ballaiil  a  I  ,Miienr  el  de  I  a- 
moiir  au  iiiari;ii:e  II  \  a\aiL  Ijcaucoupde  ninmle  ,i  .es  deux 
noirs  de  ItoMiie  el  de  Micheline,  et  les  théâtres  ont  deci- 
ilémeiU  retrouvé  leurs  habitués,  leurs  beaux  jours  et  de 
lionnes  recettes, 

.\inside  la  lilléraliire  qui  se  réveille,  des  écrivains  qui 
reprennent  coiiia-e  el  ili>  Irujiix  seneir,   (|iii    leprennenl 

faveur.  Histoire,  rnniaiis. i  ilsel  ie\el,ii  hm,  |,n|iiii|iiis 

le  prochain  aiil,,inlie  neiis  n-ene  d  ,ii;i  e:il,le~  siiriMises  ci 

d'eMvIlelilesleelnres     NMs|e >  dm  les  ,1    Mellles  relluni- 

""■e,-,.  leiiielteiil    ,,    lieiuic,    el    h,    ,  imI  |s,,  I  „  ,„  i,„    ,,1-lant 

""'"■"■'''• -■ri'"'!''  ■•'   > ■Icndrc  ;uee  l.^s  ,„ mes  |i;,ei|i,|nes 

et  ^ es, le  -e,  pliis  uni  îles  ,^„r,i  n  I  s  |l,in,  c  1  I  e  ;..ra  l.de  le- 
vée il,'   l.ni„.|,e,.  ,1,1   e-l    lie, lieux    (le    M, Il     lieeellnr    lin    pre- 

iniei-  laii^'  les  (,|iis  eliKpii'iils  ,.|  les  plus  halnles  ,  <■  Vsi  a\oir 
noninié  AI.  Thiers,  dont  le  li\  re  De  ta  Proinirlr  ^rr.i  piihlio 
prochainement.  En  répondant  avec  le  plus  len.ilile  empivs- 
senient  ii  l'ajmel  de  ses  collègues  des  .scieiK  es  inmales  et 
|iolili(pies,  1  ilhislre  ('crivain  croyait  n'écrire  qu'un  livre  do 
circoiislance,  mais  par  le  fait  il  aura  doté  son  pays  d'un 
miiiiniliipie  ouvrage  de  |ilus.  Ces  bonnes  fortunes  de  l'im- 
pro\isalion  n'arrivent  jamais  qu'aux  orateurs  émincnts  et 
qu'aux  ('rrivains  d'élite. 

Voila  ipid  nons  reste  tout  juste  assez  d'espace  pour  une 
iiicnlion  (lui  aurait  du  trouver  sa  place  plus  haut  et  que 
iiécessile  hi  plus  grande  de  CCS  vignettes,  il  s'agit  de  la  dis- 
IrilmlKin  des  prix  et  médailles  faite  aux  élév(''s  (le  l'école 
des  beaux-aris  dimanche  dernier,  La  distinction  des  tra- 
vaux couronm'^sajoutait  ii  l'éclat  de  la  solennité  ,  et  VIllus- 
tralion  ne  l'ait  (lu'acquiltersa  dette  en  la  célébrant. 


EieKres   il'iiit  Flâneur. 

VIH, 

.1  oïdi  PEUT  seuvir  use  nr.i.NE, 


lia-s 

la  lidiii 


'pelle 
ll-p,.e 


Ils,  iiHuisienr  leDirecteur.— piii- 
iiis  mil  resser  il  moi  ,  — je  ne  - 

I ii'iiil    ,li'  desin  siiieetenient  que  la  KraiN  e 

bien  que  le  c/™,r /;,/»,  H,-;  el   je  m,,  seii-  InnI 
|irendre  noire  i',n  i  .-i.niHl.uiei'  -nliiteiiienl  ml 

('•(■rire,  c'est  que  j  ai  du  devoir  lain.  a  I  étranger  un  jietil 
Miyage.  dontje,  vais  avoir  l'honneur  devons  eiitrelenir.  Du 
reste  ,  j'ai  constaté  avec  plaisir,  ii  mon  reloiir.  que  vos 
ahoniii''s  avaient  piolet  gagné  ipie  perdu  a  mon  absence 
Un  critique  plus  ingénieux  ,  pins  savant  et  plus  malin  ipie 
moi  les  a  tenus  au  courant,  beaucoup  mieux  cpie  je  n'au- 
rais su  le  faire  ,  de  toutes  les  publications  —  livres,  bro- 
chures et  journaux  —  qui  ont  vu  lejuurdepuis  mon  d'é|iart 
.le  I  en  remercie  en  reprenant  aujourd'hui  possession  de 
mes  ancienni\s  fondions  :  mais  j'ai  ponrlant  un  reprochi.  a 
loi  adresser  :  il  a  iilui-e  ,1e  si,  si,|„.,.iei  ,ie:  ,i  je  me  deniande 
avec  anxiété  si  ces  i-iniN  ,1  l'Iih^  ,{ii  il  ,,  «i  iii,iL'iiili,nii'nieii| 
ri:'gali'>sseconlcntcr,iiil  ,ks,,Miiais,l,' iiuui  niodest,' ordinal le. 
Vous  \oiis  i,ip|K'liv  -ans  doute  ([u'apres  le  I,";  mai  je 
m  elais  réliigi,'  a  .'^.nnll  loud ,  me  promettant  bien  de  passer 

eu  ,\niéri(pie  I,- j,,iii  m, ii  M,  T.  Thoré  deviendrai!  piV'si- 

ili'iit  dune  répnhliipie  ipielconque,  A  la  suite  des  événe- 
inenlsdi^jnin,  bien  iiue  je  n'eus.se  Jilus  aucune  crainte  de 
\oir  kylrapeau  rouge  remplacer  le  (Iraiieaii  tricolore  ,  j'ai 
cmigir  Je  me  suisemliaripié,  non  pour  les  filats-Unis.'mais 
pour  r,\nglelerre.  Loin  de  moi  la  pensée  de  (piilter  sans 
rclour  ma  chère  Krance.  Je  l'aimais  d'autant  plus  (pie  je  la 
cro\ais  —  ainsi  (pic  je  la  crois  encore  —  di'^harrassée  pour 
un  cerlain  nombre  d'ann(''es(le.ses  plus  grands  eniieiiii,s  Je 
n  a\  ais  pas  non  plus  l'inlenlion  de  conspiivr  conire  la  liépu- 
bliqiie  ipi  cil,'  s'e-l  donni'.e,  on  pour[iarler  pins  exad, 'nient 
M"  elleaac'pl,,'  ,  mais  qu'elle  préicnd  c,,nser\ er  el  iprello 
coiisciMMa,  |,.l,-|,ei,.  .■,„i,in,.|efiliisrali,winel,  1,'pliis  pisie, 
lephisloil  ii'plusprogressiti'l  h'  pins  liaii, pull,.,  en  ienips 
"rilin.mv  d,' le.i- lis  gonvernemenls  possiblivs   Monbulelad 

'"'"  I''"' 1'"'    'leesl  pour  cela  ,pii' je  me  permels  lie  vous 

di  nd'iiiiier  ,l,is|,.nicnl  affligé  et  indigne  de  ivl  ordre  qu'on 
laisait  a  Paris  avec  du  désordre,  selon  l'expression  du  ci- 
toyen Canssidiere,  j'eus  l'idi'-e  d'aller  éludier  a  Londres 
celte  admirable  organisation  de  la  police  ihml  j  axais  ap- 
précie par  moi-même,  quelipies  anm'-es  auparavant ,  les 
merveilleux  résultais.  Je  pensais—  et  peiil-élre  n'avais-je 
pislorl  —  ipi  il  y  avail  quelip».  chose  ii  apprendre  en  l'ait 
il  ■suivie  et  lU-  Iran.piilliié  pnhliquesde  l'autre  coté  du  i\('- 
Iroil;  mais,  iioiirélri'  xerilalilement  utile,  ce  travail  que  je 
me  proposais  il  enireprendre  demandait  à  être  nouveau  et 


complet.  Il  me  fallait  m'attaclier  il  recueillir  lesdocumonls 
aiillMiiliiines  ipii,  bien  qu'iniprinu'-s,  ne  sont  pas  dans  le 
coiimiiii  e  II  -mloiil  l'aire  causer  sur  une  série  de  ques- 
li'i'i-  |H,  |i,ii,r-(|iielqiies-iins  des  hommes  tiratiques  les  plus 
n,iiipel,.iils(ii-,-,.||,.,|,,ul,l,.e,„i,lili,„ij,.  ,„■  puiu,iis|„,sla 
remplir  sim-,  die  im-n,  ,m  qniiph'  -mie  ,|  m,  ,  ;,,  ,,,i,.re 
"ni,ael  Jeiiiiidi,^-;Miimi,;m,mnv,,immi-l,v,|,.|,,  |„-|„.,, 
lui  deinaiid.ml  iimi  p,is  un,'  im-simi,  mais  ,les  li'llivs,lr  re- 
commandai i, m  ipii  me  hjiirms,seiil  les  mmensile  compleler 
dans  un  inli'rèl  gi'iieial  des  l'iudes  parlii-'iiliens,  pour  les- 
quelles je  ne  sollicitais  irailleuis  aucune  espèce  de  ii'coni- 
jiense,  Kiirt  et  lier  de  mes  intentions,  je  bravai  les  odieux 
venis  d'ouest  qui  couvraient  toute  la  surface  (lu  déiroit 
d'une  éciune  nienai.'anle,  et,  a  peine  débarqué  a  I''olki'sl,ine, 

,-eMllu,led'N    llMinereli  lini\,llll   unelepmise  1,  m,,  ,„',|,||,,„' 

Huit  jours  s,'emil,'rent.  el  celle  repiuLs,' ,i,i,'  les  i.xcu,i,i.x- 
(;i:s  du  (i/i'uii  déchu  se  fussent  empressées  de  m'eiivo\er, 
malgré  mes  opinions  politiques,  moi  réiiiMieainûc.  la  i-c'Ule, 
éprouxe  depuis  dix-huit  ans,  je  ne  l'obtins  pas  du  citoxen 
ministre  ii  ipii  je  m  clais  adcssi' telle  est  la  vie,  mon- 
sieur le  Directeur,  pi,  in,'  de  I - 1 /.a rreries  et  de  déceptions. 
Toutefois,  n'allez  pas  cmin'ipie  ce  soit  par  esprit  (le  ven- 
geance que  j'aie  pris,  pmii  siijel  de  ma  lellre,  ce  Ihi'uie 
un  peu  vieux  de  r»^/i7c'  dis  rrnirs  (Jii,  l,pi,'  mauvais  tour 
que  me  joue  la  liepiihlnpii'  liam.aise,  ji'  ne  cesserai  jamais 
de  l'aimer,  de  la  défendre  et  de  la  louer! 

Je  suis  rt-publicuin,  je  le  suis,  je  veux  l'èlrel 

Si  j'essaie  de  vous  démontrer  que.  dans  l'état  actuel  de 
l'Europe,  une  reine  —  remarquez,  je  vous  iirie.  (pie  je  ne 
parlepasdesrois— peut  encore  être  bonne  a  quelque  cho.sè; 
c'esl  nimpieiiienl  parce  que,  ;;race  a  riniliri,'iii,r,'  peu  |„,|ié 
d,'  M  le  miiiislri'de  lajnsliee,  je  nai  dirent, tI  pendant 
mon  séjour  a  Londres  aucune  xeiilé  nuuxelle  utile  a  ré- 
véler, 

La  capitale  de  la  Grande-Bretagne  est  toujours  la  ville 
que  vous  connaissez  el  ([ue  tous  vos  abonnés  connaissent. 
J'en  ferais  une  description  détaillée  que  je  n'apprendrais 
rien  à  personne.  Elle  ne  m'a  pas  semblé  toutefois  aussi 
brillante,  aussi  animée  et  aussi  gaie  que  messieurs  les 
r(\ictionnaires  se  plaisent  ii  la  re[irésentor.  On  s'y  ennuie 
tout  autant  que  par  le  passé;  faut-il  l'avouer,  on  s'y  ennuie 
davantage,  caria  misère,  la  fumée,  la  boue  ont  augmenté 
avec  la  popnhilion,,'!  ces  rues,  si  monotonemcnt  semblables, 
qui  ne  conimencenl  el  ne  linisse.nt  pas,  La  misère  surtout 
\  (lexienl  de  plus  en  pins  alTieiise.  Pour  moi,  je  ne  puis  pas 
la  conlempler  un  insliiiil  s.ms  iMie  ému  jusqu'aux  larmes. 
Les  classes  paiiMvs  pi.i  ,ii-si'iil  d  miliinl  plus  mi.si'rablcs  en 
.\iigldem'  qu  elles  -enl  xdii,  -  ix.id,  nient  coiiime  les  clas- 
ses riches,  L  hoii ipii  inendii'a  un  haliilit  et  un  pantalon 

noirs,  la  reiinne  qui  tend  la  main  porte  un  chapeau,  un 
chtile,  et  quelipiefius  une  rulie  a  lalbalas.  liien  de  plus  usé 
de  plus  rapièce,  de  plus  troue,  de  plus  crasseux,  de  plus 
boueux,  de  plus  froid,  de  plus  mouille,  de  plus  |iiiaiil,  de 
plus  navrant  a  voir  que  ces  deliris  informes  de  xélemènls 
de  luxe,  ipii  l'xidemnieiil  niml  pus  ,'li'  l'ails  pmir  les  mal- 

hdiieiixilonl  ils, a, II,. m  a  i,,'  |i  s  memlnvs  dedi.iinés 

le  corps  ,Mii,ii:_.ri  .li.m.iis,  „,„,,  jumiii,  |r  i,  eiiUie:  ,ii  une 
se,. ne  eiiraderisliipie  a  laquelle  le  hasard  me  lit  as.sisler  la 
\eill,.  ,1,.  mon  départ. 

(.  diiii  \m  diiiianche,  vers  quatre  heures,  La  pluie  venait 
pm  exila, irdiuaiie  de  suspendre  sa  descente  sur  la  terre; 
el  i|ii,.l,pii.s  eliauils  laMiiis  (le  soleil,  perçant  une  couche 
e|i,iisse  ,1e  mi.igi's  gris,  ,.ssiiMiient  commc  par  enchante- 
nidil  les  ilallis  des  Imiimis  lleja  de  brillants  équipages 
se  dirigeaient  de  tous  coli's  \,.|s  l,.s  parcs.  En  ce  mo- 
ment je  me  promenais  peiisd  d  snliLni,.  dans  l'un  des  plus 
beaux  ipiarticrs  de  la  jeun,.  \  dl,.  ,1,.  Imsiiis  le  tour  de  Bel- 
graxe-Square,  Les  arbres  du  |iii,li,,  sicmnii,  ni  surlei;azim 
louflu  leurs  feuilles  i  iiisseliinl.s  ,1  cm.  ,i  diimi  déniants, 
les  oiseaux  d'alenlmii-  leliiiMiiini  en  l',i/ Il, ml  sur  le  lur'f 

humid,',    les    n,.||is  ,1,.-  ,.,i,l„.i||,.s,    a'iH.lIle    leelMldle,.-     s,. 

;'';'l''''""''"l    I"' "■'d-im  leurs  liges  ln,pln.|es  ,1    ,seiii- 

blaieiil-,.||.,i,ei,|,.|,i\n,.|  11,11, 1-1. mil,, ,|,s,,,,,ui, .111, -,.|emi..s 

'■''II'' '■'■■-""'■,■ in,.sp,.re.'il,.|a  n.iliire  coi,l,a-lail  ,sinL.ii- 

lidcinent  axi'c  I  asp.'cl  .les  palaisipii  liordi'iil  celle  place  que 
l.i  legilmiile  lr.ine,,ise  a  n'udii..  laineuse  depuis  .piel.pies 
années.  l'Iiis  le  ciel  devenait  riant,  plus  1(«  oiseaux  se 
montraient  joxeux,  plus  les  arbres  et  les  fleurs  se  rani- 
maient ,  plus  cette  grande  et  monotone  ligne  d'habitations 
princiér(>s, semblait  triste  et  morte    l'as  une  léle  aux  fené- 

Ires-pasmcm,.  I.s  p.iii-  x..„\  |i,.|v s  duii  enfant  ciiri.-iix 

derrière  h's  gLees  I,  ,.|i,|,i,.ii,.  ,„,  |  usie,','  ..e  .slupide  l\ran 
ijui  Irouxe  a  I  „n,l|..,s  ,|es  su|,'ls  si  ,s..,\il,.s.  le  defeni'l.  et 
joiit  le  monde  obéit,  surtout  dans  ce  ipiarlier  L'cneral  de 
aristocratie  et  de  la  sottise.  Aucunexoix  liiunaiiie  ne  trou- 
blait le  silence  solennel  de  cet  insipide  di'sert  On  eût  cru 
voir  une  rang  e  de  riches  tombeaux  bâtis  a  des  distances 
égales  sur  un  modèle  iiniforine  par  le  même  architecte 
Certes,  je  n  enviais  |ias  le  sort  des  haliitanls  de  ces  iiiau- 
solecjs,  mais  je  me  demandais  comment  et  pourquoi  il  v 
a  (Micorc  en  Anijlotcrre  un  nombre  si  considérable  de 
forlunes  cnlossahîs,  car,  pour  vivre  dans  de  pareilles  di^ 
meures,  il  faut  avoir  au  moins  un  revenu  ceuluiile  du 
mien,  .  ' 

Tout  il  coup  un  cri  de  douleur  vint  me  tirer  de  ma  rêve- 
rie. Je  hnai  la  tête  et  je  \is  ii  cinquante  pas  de  moi,  s'a- 
van(,'ant  a  ma  rencontre,  un  homme  et  deux  enf.mts.  Nous 
nous  lûmes  hienlot  rapjiroches.  Cet  homme  devait  être  tout 
jeune  encore.  .Mais  sa  ligure  était  si  maigre,  si  pAle,  si  f,i- 
li  II  e:  sa  barbe  si  longue  et  si  inculte,  son  dos  si 
voûte  qii  on  1  eût  pris  pour  un  vieillard.  Il  n'avait  ni  sou- 
liei-sni  bas.  Son  pantalon,  compose  de  vinït  morceaux  de 
(Irapdecimh.ursdilïerentes,  el  d,'elii,piet,''a  l,i  partie  in- 
f  rieure.  ne  ten,iit  ,pie  p,,r  un  seul  hmilon  a  un  xieux  in.ir- 
coau  de  corde  ipii  lui  ser\ait  de  bretelles.  Quelques  lam- 


beaux de  grosse  toile  pendants  sur  ses  l'paules  en  guise  de 
chemise  laissaient  voir,  entre  leurs  trou»  aussi  larees  que 
nombreux  ,  une  poitrine  os.seuse  et  enfoncée ,  d'un  blanc 
mat.  Les  manches  de  son  habit  de  drap  noir  trop  étroit 
pour  sa  taille  et  usé  jus<iu'ii  la  coriJe  ,  dépassaient  ii  [leine 
ses  coudes.  Enlin  son  chapeau  était  trop  [lercé  pour  mettre 
sa  tête  il  l'abri  de  la  pluie.  .Mais  ce  qui  me  frappa  surtout 
ce  fut  sa  phvsionomie.  A  xoir  ses  yeux  on  sentait  que  cet 
h.iinm,'  s.iulli.iit  iion-si'ulenieul  de  la  faim  el  du  froid,  mais 
d  allieus..s  douleurs  moral,-  Jamais  regard  plus  expressif 
eimi  II  .  i,nt,.,i,pla!l  ;uec  l'amour 
.  la  plu-, le,. 1,1,1, nie  un.'pc.tilehlle 
il  liii.iil  d.ii,-  .-..-bi,,.-.  et  dont  la 


e  m  axait  plus  vivemei, 
'  plus  tendre  et  l'anxii't 
e  trois  ans  environ  qu 

■le  inanimée  n'| 


,.|  ,1 


d.il.i 


\diail--il  reii.iil'e.i  l„ 
même  pas  sans  doute 
semblait  égarée,  tant  sa  d 
derrière  lui  une  autre  pi  li 
de  haillons,  et  (pii.  -e,  ,,,i, 
poussait  des  crisd,.  .1.  -  -i 
be,au  s'agiter  le  ] 


onepauh-.  Une  calèche,  remplii! 

idants  paré'S,  venait  de  la  ren- 

Imirdiinc  rue.  Était-elle  morte  :  la 

,■ .'  il  lignorait  encore.  11  ne  savait 

il  len, portait  ain.si,  tant  sa  raison 

était  profonde   11  traînait 

le  six  ans  au  plus  ,  vêtue 

Il  aux  pans  de  son  habit. 

-  p.'iiis  pieds  nus  avaient 

pe— iiil..  sur  les  dalles  encore 


(h^nlelle,  d 
pas  une  n 
épouvantable  misère 


mouillées,  elle  ne  pouvait  pas  suivre  son  malheureux  père 
courant  au  hasard  c(mmie  un  insensé... 

Pas  un  ('qiiipage  ne  s'arrêta  ;  pas  une  porte  ne  s'ouvrit  ; 
pas  un  xisiig,.  Iiiimiii,,  ne  -e  n, outra  sous  les  ritleaux  de 
- .1,  ,1  -  palais  de  Belgrave-Square; 
n,' ji  I.,  une  faible  aumône  il  ccIIjî 
Ah  .' .si  jetais  peintre,  monsieur, 
quel  tableau  instructif  et  saisissant  je  voudrais  faire  avec 
une  pareille  scène  qui  ré'sume  si  bien  la  situation  actuelle 
de  ci^tte  Angleterre  trop  riche  el  trop  pauvre  pour  pou- 
voir subsister  longtemps  encore  telle  qu  elle  est  eonstiluée 
aujourd'hui. 

Mais  je  vous  ai  promis  —  je  ne  l'oublie  point—  de  vous 
prouver  l'utilité  des  reines.  Tout  chemin  mène  à  Rome  dit 
le  proverbe.  Un  peu  de  jiatience,  vous  arriverez  au  but  sans 
vous  en  douter. 

Il  y  avait  jadis  ii  Londres  un  théâtre  qu'on  ap|X!lail  de- 
puis l'avènement  au  troue  de  mademois^'lle  Victoria  ,  Her  s 
Mnjesly  théâtre,  ou  en  français  :  Théâtre  de  Sa  Majesté.  Ce 
théâtre,  situé  dans  le  plus  beau  quartier,  avait  pour  direc- 
teur un  nommé  Liimley  ipii  y  faisait  chanter  et  danser 
pcniliiul  h,  s.iis.in.  c'est-a-dire  (l'avril  à  août,  les  chanteurs 
et  Ils  .l,,,,,se,,,, ,  l.s  cantatrices  et  les  danseuses  les  plus 
jusl.iiienl  I  ,.|,.|,,i.s  du  monde  entier.  On  assure  que  ce  com- 
merce lui  rapportait  bon  an  mal  an  d'assez  jolis  bénéiiciv. 
Ce  qui  est  po.sitif,  c'est  c|ues'il  ne  s'enrichissait  pas,  il  ne 
ruinait  pei-sonne  ;  au  contraire,  il  faisait  vivre  autour  de 
lui  plus  de  deux  mille  individus  ,|e  i,,,,i  ,me  et  dy  tout  sexe 
Par  malheiirpoursonélaMi-  ,iii.,ii  |,  -  iheoriesdeM,  Louis 
Blanc  en  inaliere  de  conçu  i,  m  ,  .1, m  ni  alors  ou  complè- 
tement inconiiiies  ou  mal  .Diupi.M^s.  ou  même  définitive- 
ment jugées  en  .\ngleti-rrc  comme  elles  le  sont  aujour(J'hui 
en  France.  .Suit  jalousie  ,  soit  avidité  ,  soit  mauv  ais  carac- 
tère ,  soit  tout  autre  motif,  un  jour  les  principaux  artistes 
de  M.  Lumiey,  refusant  de  travailler  plus  longtemps  a  l'c- 
dilice  déjii  fort  élevé  de  s;i  fortune .  l'onder('nl  ;i  peu  de 
distance  et  il  grands  frais,  un  théâtre  rival.  L'entreprise 
était  téméraire;  elle  fut  mal  dirigée:  elle  échoua.  La  pre- 
mière société  ne  vi'icut  qu'une  année  De  son  côté  le  theiltii- 
de  la  reine,  plus  heureux  cependant  ipie  le  royal  Italian 

opéra,  f'oiei>t (larilcn.  vit  diminuer  considérabl eut  le 

nomliredesesabonnés  Ils  allaient  peut-être  mourir  tous  les 
deux  d'une  mort  tragique,  ou  se  voir  obliges  pour  ranimer 
leur  existence  menacée,  d'adopter ,  il  leirr  grand  rcgrol,  le 
sxstème  Louis  Blanc  ,  lorsque  deux  cvènemenls  imprévus 
les  sauvèrent  en  même  temps.  L'un  s'assura  la  possession 
ex(  lusive  d'une  cantatrice  sui'^doise  et  qui  obtint  un 
de  ces  succès  d'engouement  (pie  les  artistes  vocaux  ne 
jieuvent  guère  espérer  qu'il  Londres.  L'autre  fut  relevé. 
s,,,,|.^n,i  p.,,  un  j,',i,ii'  amateur  ipii  ne  sivait  trop  comment 
.  i,,|ile\ ,.,  se,,  Il  ,,i|.s  .1  1,1, e  iiiagiiih.iue  fortune  ipie  son  père 
1,11  .,\,,,1  l,\^,,e,.  I,,,  ,1,  -,,nt  actiielleuient  lescho.ses?  Hi>- 
l.,>  '  je  snis  Inr.i'  d  eu  convenir  :  un  seul  théâtre  ci'it  pros- 
père, deux  thi'^àtres  huit  de  niau\aist>s  affaires.  Je  ne  con- 
nais pas  le  budget  de  M.  I.umh'y  ,  mais.  nial,gi-c  Jennv 
l.iuil.  d'après  l'opinion  publiipie,  ses  Recettes  doivent  rester 
inférieures  ii  ses  dépenses,  pliant  il  M.  de  La  Field .  le  d- 
recteur  de  t'ovent  (iardcn.  il  perdra  cette  anni'e  plus  de 
KMI,OIIO  fr  L'(-\ènemeut  m'a  donné  raison  .  s'écrierait  ici 
M.  bonis  HIanc  s'il  nie  faisait  riioniieur  de  me  lire,  el  11 
reciterait  pour  la  millième  hiis,  a  ipii  voudrai!  recoulcr.  s;i 
plus  éloquente  iniprov  isalioii  sur  les  épouvantables  consi''- 
quences  de  cette  abominable  coucurnuice  qu'il  antipalhe, 
—  comme  dit  Arnal  —  si  conlialemeul.  et  il  ne  manquerait 
pas  d  entonner  en  terminant  ce  refrain  trop  connu  :  Écra- 
sons l'infilme  ! 

Je   n'éprouve  pas.  je  vous  l'avoue  rranchenient .  mon- 

si(>ur,  une  vive  ten(lres,se  pour  la  concurrence:  elle  abus:' 
(pieliiuefois  au  detrimeni  du  pauvre  de  la  libellé  illiniiliH' 
qu'on  lui  lais.se  :  aussi  la  verrais-je  avec  plaisir  soumis;'  en 
certains  cas.  par  des  lois  s  vères.  il  une  prudence  e!  a  une 
(liarité  (ju'elle  n'a  pas  toujours ,  qu'elle  n'aura  peul-iHrx' 
jamais,  j'en  conviens,  si  on  l'abandonne  trop  ii  ellesmênie 
Mais  il  ne  faut  pas  ipie  des  esprits  mal  faits  ou  des  larlufes 
sociaux,  comme  celui  dontje  me  propose  de  vous  esipiisser 
un  jour  le  périrai!  s'armenl  de  si\i  ern'ui-s  et  de  ses  fautes 
poura!!a(pier  ses  bienfads  Ilaisiuinonsdoncun  peu  sj'rieuse- 
nient  .  nionsii^iir  rorg.iiiisaleiir  du  travail .  monsieur  l'ami 
du  peuple  en  général  et  de  m.ssieurs  les  garçons  tailleurs  en 
parliculier:  et  ii'cherchons  ensemble,  s'il  vousplail.  il  ipii. 
dans  cet  exemple  qui  m  Occupe,  a  pu  nuire  Vinfame!  Pour 
moi .  j'ai  beau  rellecliir  et  compter,  j'arrive  il  une  conclu- 
sion lolalemeiit  opposis-  il  la  vi'itn-,  el  au  lieu  de  crier  : 
Mort  ù  lu  coneurreiiccjo  crie  :  Vive  Ut  concurrence.  Quels 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEF,, 


iTsullats  n-t-cUe  produits,  en  effet?  Elle  a  ruiné  ou  emptVhé 
lie  s'cnrifliir,  et  encore  le  fait  n'est  pas  iirouvé  ,  deu>c  spé- 
t'ulntevirs  ou  deux  sociétés  d'aclinnnnin's ,  sortes  de  gens 
i|ui .  vous  ne  iiouvez  le  nier,  viiii>  in-piiinl  pou  d'intérêt. 
La  ih'slruclion  d'un  capital  no  \nii-  ,i  jjiii.n-  ipieje  sache, 
arraché  une  larme.  Je  ne  pleur('r;ii  lu^imn  plus  liss"omim'S 
d'argent  imprudrinm^'iil  ili^^ipi'c-,  djiis  co  lioiix  cnln'- 
prises  .  car  ,  en  di'liiiiliM' ,  i'llc<  cmi  ilnniif  de  r.iis;incr  cl 
du  pain  à  un  noiulin-  mr.ilriihiMi' il  nuvricis  :  c-li.iiilcois, 
danseurs,  chorislos,  ligin'.iuls,  iiiu.-;irH'ns,  pi'niln'<,  ilcrora- 
tours  ,  machinistes,  lampisUs.  cn|iisli's.  onipliiycs ,  mar- 
chands de  billets,  sans  faire  culrcr  en  ligne  lic  coinplc  tous 
Iej3  frais  de  toilette,  de  voilure,  de  souper,  etc..  (pi'ellesont 
rendus  nécessaires,  sans  parler  enfin  des  progrés  dont  l'art 
musical ,  l'art  chovégraphique  et  ceux  qui  en  dépendent 
l.^ur  sont  redevables. 

Ces  réiloxions  je  les  siumettais  à  l'un  de  mes  compa- 
triotes ,  qui  avait  eu  la  générosité  de  me  gratifier  d'.un  bil- 
let pour  le  théâtre  royal  italien.  Nous  étions  assis  à  côté 
l'un  do  l'autre  dans  deux  excellentes  stalles  du  prix  de 
'î")  francs,  trop  élevé  ])Our  ma  bourse.  On  venait  de  termi- 
ner le  qu.ilriêim'  .nie  îles //«(/ucnots.  Jamais  cette  belle 
musiqiir  ne  m  :i\;iii  ciii^r  .iiii.int  de  plaisir,  car  jamais  je 
ne  l'jN.iis  ciilrndiii  cvrciiirr  |iarun  orchestre  aussi  nom- 
breux ri  ,iii-;-,i  |iarlail,  des  cliœurs  aussi  exercés,  des  ar- 
tisli'.-  ;iii-.-i  Mi|ii'rieurs.  Tamburini  représentait  le  comte  de 
Siiiil-lii ,.  \  jlfiitine  et  Raoul  avaient  pour  interprètes  ma- 
dame r.iidiiir  Viardot  et  il  signer  Mario.  Nourrit  lui-même 
cl  iiiad.iiiuij.'ll,!  Falc'on  étaient  surpassés.  A  la  chute  du 
rideau  l;i  salle  entière  séUiit  levée  en  poussant  des  accla- 
niiiliniiN  livni'liques  et  en  battant  des  mains  avoe  un  l'n- 
IImii-  ,i-:ii  ■  d;llicile  à  décrire.  Tnns  (,„<  II, m, ni  d  \";ilci,iiii,. 
a\;m'iii  rir  iililiL'csde  reparaître  [hmii-  ivrrMnr  dr  nniucinx 

Ici L'ii  1,^;-   iU\    l'admiration    puliliqur    M.iifnu:'   \iard.i| 

surtout,  qui  a\  ait  atteint  dans  ce  rôle,  connue  cantatrice  et 
connue  actrice,  les  dernières  limites  de  l'art,  s'était  vue  en 
un  instant  entourée  de  plus  de  bouquets  qu'elle  n'en  pou- 
vait pnrlrr:  mais  aussi  cpieson  jeu  et  son  chant  avaient  été 
sublimes  :  cpicls gestes  vrais!  quelles  poses  irréprochables! 
quelle  [ihysiiinoniie  saisissante  et  variée!  quelle  voix 
étendue,  forte,  habile  et  sûre!  quels  aiicnls  tour  ii  tour 
tendres  et  déchirants  !  et  comme  .Miirm  ra\:iii  bien  secon- 
dée! avec  quelle  âme  et  quel  limlne  i.i\;ssant  il  s'était 
écrié  :  Tu  m'ami,  lorsque  .  pour  lenq.ièclier  de  courir  il  la 
mort ,  elle  lui  avait  fait ,  dans  un  moment  d'égarement  et 
de  désespoir,  l'aveu  de  son  amour. 

—  Heureux  ,  disais-je  a  mon  voisin  ,  le  maestro  qui  crée 
do  pareils  chefs-d'œuvre,  et  qui  trouve  de  tels  iiiler|irelrs  , 
et  bénie  soit  l'ennemie  mortelle  du  citoyen  Louis  Bl.inc. 
Sans  la  concurrence,  les //«^«eKotiou.Gii't'i/oHfiHi,  comme 
dit  le  livret  italien  ,  n'auraient  jamais  été  si  parfaitement 
exécutés. 

—  Vous  n'avez  raison  qu'à  demi,  me  répondit-il  ;  ajou- 
tez et  sans  la  reine. 

—  Sans  la  reine  !  ni'écriai-je.  Qu'a-t-elle  à  faire  dans 
une  p.iivillc  aM'iilurr?  ir  i-nnais  (|u  rlli'  nr  s'iiccupait  pas 
plu?  du  IhiMlic  i|ii.'  du  u..u\riiHiiiriii  .sr-  Iniici  nms  princi- 
pales niTdii-isleul-cMcs  pa- ,i  |iiol(>lrr  cliaque  annéecon- 
tre  la  dociniiede  .Mallhus,  au  risque  de  se  faire  adorer  par 
le  citoyen  l'riiudliun  ? 

—  Détrompez-vous,  la  concurrence  a  créé  ce  IhéAtre; 
pour  y  attirer  les  habilui'S  du  llu  aire  de  la  Reine  ,  elle  l'a 
décore,  trop  richemenl  |iriil-riii  :  illr  a  réunion  une  seule 
troupe  les  artistes  les  plii.s  riiuncnls  et  les  plus  chers  du 
monde  entier,  ii  part  Jenny  I  nul  ;  elle  dépense  résolument 
des  milli  ts  de  livres  sterling  dont  elle  sait  bien  qu'elle  ne 
retirera  jamais  un  penny,  aucun  sacrifice  d'argent  ne  lui 
coûte,  ma-s  il  est  d'autres  sacrifices  auxquels  elle  ne  se  fût 
jamais  décidée  si  la  reine  ne  les  lui  eût  pas  imposés. 

—  Je  ne  vous  comprends  pas. 

—  La  chose  est  bien  simple  cependant.  A  votre  air  étonné 
je  devine  que  vous  n'avez  jamais  connu  d'artistes  un  peu 
intimement. 

—  Jamais. 

—  Tant  mieux  pour  vous  alors,  car 

Ils  ne  sont  pas,  liébs  1  ce  que  le  public  pense. 

la  plupart  n'ont  pas  pi  us  de  mérite  que  les  chiens  qui  jouent 
aux  dominos,  ou  les  perroquets  ([ui  demandent  il  déjeûner, 
—  bien  entendu  que  je  ne  parle  pas  des  exceptions.  On 
leur  a  appris  tout  petits  il  souffler  i  ans  un  inslrunient  ii 
vent,  ou  il  chanter  un  air  quelconque ,  et  tant  qu'ils  ont 
assez  d'haleine  ilsrépétent  la  même  irrdu  incipulilr-qu'ils 
Svuit  d'eu  .ippriMiiIre  une  autre.  Il  \  ;i  i|iirli|u(-  ,ii,ii,t^  l'.n  i^ 
s'en  èlail  eiignué  outre  mesure;  iiiai-  il  c.iminiiMr  ,i  r-vim- 
nailre  et  a  aiijiirerson  erreur.  —  L)  .lillcm-  1(<  ,ir(;-ii^  luil 
en  gi''iieral  ledefaut,  fort  grave  il  mon  aM>  dVh  i' rL'Mi,|rs. 
L'haliiliidc  qu'ils  roniractent  forccmeiil  d.-  Imi  I  ,i-  àgo 
de  changer  sans  cesse  de  résidence  les  eiiipèclie  do  luijiier 
des  r.'lalions  durables;  ils  n'ont  ni  patrie  ni  amis;  ils  ne 
s'intéressent  un  peu  vivement  (|u'ii  leur  larynx  ou  à  leur 
cornet  il  ]iiston.  Mais  ils  sont  surlout  envieux  et  jaloux... 
Il  allait  achever  ce  portrait  i]u  il  iniiinienriiit  je  le  lui  re- 
prochai, avec  trop  d'animalion  pmiM'Iie  ju^le.  lorsque  le 
rideau  se  releva.  Nous  ap|ilaiiiliiue>  .uee  d  aiiiapil  plus  de 
transport  le  trio  du  cinipiieme  acte  que  madame  Viardot . 
Mario  et  Marini,  —  un  excellent  Marcel  que  MM.  Dupon- 
chel  et  Roipieplan  devraient  engager  a  l'tlpéra  ,  —  avaient 
rivalisé  de  perfection.  Quelques  minutes  après,  nous  rega- 
gnions ,  bras  dessus  bras  dessous ,  notre  domicile. 

—  Quelle  belle  représentation  ,  disais-je  il  mon  compa- 
triote, j'iui  g.Miliiai  loii^ieiiips  le  souvenir  !  Ce  sont  lii  de 

—  Vous  pi  m  I  M,-  11.  I  1.  Il  Mm...  Il  s  procurer  il  Paris  si  vous 
y  reloiirnez.  Madame  Viaidni  diiil  débuter  il  l'Opéra,  dans 
les  Hiigiicnols,  la  prunier,' s. Miiaine  de  uoven:bre. 


—  Je  le  sais,  mais  Mario... 

—  Vous  aurez  Roger  qui  le  vaut  bien  : 

—  Le  croyez-vous! 

—  J'en  ai  eu  la  preuve  il  y  a  ileux  jours. 

—  Oii  donc? 

—  -\u  Ihéàtre  d'où  nous  sortons.  Mario  .  qui  avait  chanté 
le  oi.udi  et  qui  vient  de  chanter  ce  soir,  n'a  pas  voulu  chan- 
ter le  jeudi ,  parce  que  c'était  le  bénéfice  de  madame  Viar- 
dot. Mario  est  un  adorable  lénor,  un  joli  gariam  et  le  re- 
jeton d'une  bonne  famille.  .M.iij  il  a  en' le  ili.dlieiir  de  faire 
il  Paris  une  mauvaise  ((lunais.s'iiiee  ipii  I  en!  raine  dans  bien 
des  fautes.  Il  cousent  tnip  ïiiu\ent  a  s'  dire  m.il.iile  ipiarnl 
on  ne  veut  p.i,  ipid  .e  pnrle  liieii  Jeudi  ,  pur  exemple  il  a 
refusé  di^elmnler  pivlexi.inl  un  euriiiienieul  .snliil  dan-  ie<- 
poird'eniperlier  lelieneliee  aiimince,  qui  pnini.'ll.iil  d  être 
aussi  brillant  que  lucratif.  Mais  il  avait  compté  sans  Roger 
et  la  galanterie  française.  Bien  qu'il  n'eût  pas  eu  le  temps  de 
répéter  un  seul  morceau.  Roger  consentit  il  se  charger  du 
rôlede  liaiiul  Sun-;  l,i  seule  londiliim  ipi'il  h' chanterliit  en 
Irine.iis    Nui  dexiairmenl  a  eli.  récompensé.  Accueilli  dès 

^'""'""■' nMvnep.irnne  triple  s;il\c  d'applanilissements, 

il  a  (iliteiin  il, MIS  tous  ses  muive.inx  un  suive-  de  bon  au- 
gure pi.nr  Klpera  de  Pans  el  qui  uihtiim  .M.nmde  tousses 
maux  de  gerge  Inliirs  Le  |)ublic  .i  diiniii'  ee  Miir-lii  ii  l'im- 
poli et  ca|iricieux  Italien  une  leçon  qu  il  n  oubliera  pas  de 
sitôt ,  je  vous  en  réponds.  Il  est  vrai  qu'elle  était  bien  mé- 
ritée. 

—  Mais  vous  ne  m'avez  pas  encore  appris,  lui  dis-jo.  pour- 
quoi je  dois  remercier  la  reine  Victoria  du  plaisir  que  j'ai 
éprouvé  ce  soir-lk. 

—  Vous  allez  le  savoir.  Le  théiilre  royal  italien  a 
éli'  l'nndi'  el  il  e-i  siiulenu  [lardes  spéenliilenis.iiiLdais  mi 
benelire  excliisit  de.-  Il.diens  ipii  ferment  la  m.iinni,'.  de  sa 
li-iiiipe  el  qni  enmpii.-enl  une  ligue  tellement  furie  ipic  .son 
chef,  il  signer  Costa,  le  directeur  suprême  de  la  musique 
s'est  réservé  dans  son  traité  le  droit  fabuleux  d'interdire 
aux  bailleurs  de  fonds  l'entrée  de  leur  salle  pendant  les 
répétitions  Or  civile  ligue  entasse  intrigues  sur  intrigues, 
pour  empêcher  de  chanter  les  artistes  français  engagés 
par  les  direeleurs  el  pour  s'opposer  il  l'exécution  des  ôu- 
vragi's  ri;iiii:m>  el  .dlemands    I,lii>lnire  sirivle  de  l;i  saisim 

delSiXMili-edilM.iil  -il,:_.lllirlvilH'lll.-lirleri,liiplede  me-, 
SlellIS  el    de  Iiir-Jimr-  le-  ,iili-|es  enrnles  S.lll.s  la    bannière 

Cii-la  .liisipi  au  mois  d  août  leurs  machinations  eurent  un 
plein  -II, ,  e-  Kii^cr,  qui  avait  un  engagement  de  30.000  fr.. 
n  a\,iil  (  haiile  que  trois  fois.  Les  Huguenots,  pour  lesquels 
ou  depensiil  de-  sommes  considérables  et  qui  promettaient 
a  inadanie  \  i.inliil  un  de  .-es  plus  grands  trionqihes,  étaient 
toujours  retailles  snii-  un  prelexte  ou  sous  un  autre.  Peu 
imporlail  .i  la  liijiie  h mmiilianle  que  la  direction  se  ruinât 
Elle  avait  des  ;i|ipiHnlemi.|il-  lises  el  earaiilis:  il'aillcurs 
elle  eût  sacnlie  penl-eliv  -r-  mlirels  ,i  la  -alislaclion  de 
son  amourqiruiire  el  a  s,i  jiiliiu-ie  Tel  l'iaii  fei.n  des  choses 
lorsque  la  reine  intervint  l'nl-re  de-ir  irenienilreun  chef- 
d'œuvre  admirablement  exe,  uie  liii-i  ee-|i,iii  d  être  agréa- 
ble il  son  royal  époux,  en  pnili'LiMiil  Li  mii-iqiie  allemande 
Victoria  I'"  déclara  que  tel  jimr.  ,i  telle  liem  ■  .  elle  \  oulait  as- 
sister à  la  première  represintalinn  de  n-  l'i;, molli  depuis 
si  Jongtemps  promis  Tonle  icsi-taure  ileMuiail  nuilile.  On 

se  si.umit    Cene-I  |m-  que  l,i   reini I   le  dinil  d'exiger 

i|U"iired,il  ,1  -,in  iMprne  m,  pi,ii\,i,l  lui  de-nlieir ,  car.'en 
matière  de  L'nuvememenl.  elle  n  exeire  p.is  plus  d'autorité 
que  la  dernière  de.-,-  -iijeiie-    M,,i-  m,  i|i,,,ii,v  abandonné 

par  la  reine  I  eût  ele  ieili,iie il  p.i,-  r.mslocratie  qui 

seule  peut  le  faire  \  i\  le,  m,ii-  un  iipera  que  la  reine  a  dai- 
gné ili-iier  ,  deiiiandir.  écouler,  applaudir,  toutel'Angle- 
terre  lii-liinn.dile-  lellessont  les  mœurs  de  ce  singulier  pays 
—  se  I nul  iililigee  de  venir  l'entendre  au  plus  vite;  à  la  se- 
conde represeiil.iliiui  le  prix  des  placesfiit  triplé,  et  lesama- 
leurs  — si  on  peut  diinner  ce  lilre  a  de  pareils  (ajurtisans  — 
se  dispulaieul  les  billels  aux  eneheies  ..  Depuis,  lesuccèsa 
loujours  éliTi-iiis-mil:-  cèliiii  eesi.irla  .seplieine  représen- 
tation:—un  Il  eu  ,1  j ;iis  \ii  un  pareil  a  I, 1res;  mais  ne 

1  allribuez  pi-  iiiiiqiiemnil  ,i  l,i  l,e,inle  de  lu  musique,  il  la 
perfection  de  l'execuliuu ,  an  talent  merxedleiix  des  prin- 
cipaux artistes;  la  sottise  des  sperlalem-  en  ,i  -;i  liunne 
part;  et  si  vous  croyez  devoir  un  p  ■n  de  n  rniiun— imee  a 
la  concurrence,  remerciez-en  aussi,  iiininie  |e|ier-i-le  n  muis 
le  recommander,  lu.id.ime  Alherl  ,  en  -nnirninl  ,iM','  mm 
qu'une  reine,  inè eiuisliluliiuiiielle    peiii  eneme  iviiilivde 

temps  à  autre  quelque-  ser\  lees.iL'Ie.il.le-  ,1   -e-  sn|els     ,■ 

Il  était  deux  heiinsdn  imilin    Nmi-  iinii- -epariimes,  et, 

avant  de  nienilnr je  medilai  liuiLmenienl  -nr  les  plus 

graves  ipie.-; H III-  de  Imilie  |ii.liii,|iie  M.h-  IIh'u  me  garde 
de  viin-  enirelenir  j.iiiim-  de  p.iivil-  siijels    D'ailleurs,  j'ai 

'''"piele  dejii  ,-nr  le  In  r; le  me-  \  i,i,-iiis.  Agréez donc  pour 

aai"oril  liiii  .  i -iriii  le  liireeleur,  1  .issurance  de  la  con- 
sidération de  votre  tout  di'voué 

Le  viEcx  Flâneur. 


itlbuni  JMoIflo-Valaqiie. 

(4"^  .\rlicle.) 

BIJOCX    ET    VASES    d'oH    MASSIF    TBOCVÉS    EX    VAl.AClllE. 

A  lieux  ou  trois  lieues  N.-O.  de  liouzéo  ,  petite  ville  de 
la  principauté  de  Valachie,  située  sur  la  route  de  Bucliarest 
il  Ja— X    lies  p.iy  siins.  Irav.iillanl  à  la  terre,  dans  un  champ 

il   mi-eiiie  de  1 les  inimLiLines  tenant  à  la  chaîne  des 

(',ar|i:illie-.  hiMueieni  ,  Ml-  Il  lindel838,pliisieursobjels 
qui,  offrant  d  alimd  i|nel,|ne  i e-islauce  â leurs  inslrumenls 
de  travail,  dureni  l'ti,' e\ii  ni-  de  la  terre  avec  leurs  mains. 
Bien  loin,  cependant .  ileMiiipmnner  la  valeur  matériellede 
ces  objets  qui.  ii  la  première  vue,  leur  parurent  être  d'un 
métal  ordinaire  ,  ils  vendirent  à  vil  prix  le  plus  massif  de 


tous  à  une  de  ces  troupes  de  Bohémiens  faisant  mélier  de 
ferrer  les  chevaux  et  d  étamer  le  cuivre. 

Ot  ustensile,  qu'à  sa  forme  on  aurait  pu  prendre  pour 
une  grande  aiguière,  fut  fendu  à  coniis  de  haches  par  les 
nou\eaux  acipiérenrs  :  ils  voulurent  ainsi  s'assurer  et  de  la 
nature  du  métal  et  de  l'usage  qu'ils  en  pourraient  faire. 
La  terre  qui  le  recouvrait,  sa  configuration,  ot  plus  encore 
la  modicité  du  prix  auquel  il  leur  avait  été  concédé,  éloi- 
gnerent  Inul  a  l'ait  de  leur  esprit ,  même  après  qu'ils  curent 
piiHede  ,1  relie  opération  ,  la  pensée  que  ce  vase  fût  d'un 
aiilie  mii.d  que  de  plomb  ou  d'étain. 

Il  l'iiiit  d'ur  pur!...  ainsi  que  les  autres  objets  trouvés 
el  i|iii  demeurèrent  en  la  possession  des  inventeurs. 

Itieniiit  informé  de  tous  ces  détails ,  le  gouvernement  va- 
liipie  senquit  du  lieu  où  ces  précieux  objets  avaient  été 
lioines  el  lii  innnédiatemcnt  procédera  l'arrestation  des 
p,i\-,ins  el  l!i  il  lemiens  mêlés  aux  moindres  circonstances  de 
celle  deriiuverle. 

Les  objets  qu'ils  livrèrent  se  composaient  de  deux  an- 
neaux ou  grands  cercles,  un  hausse-col,  quatre  lampes  dont 
une  représente  un  faucon,  deux,  lafigured'lris,  laquatriènw 
n'a  pas  d'ornement  figuré,  trois  vases  à  anses,  un  plateau 
et  une  patère  ou  coupe  très  évasée. 

Sur  un  des  anneaux  se  trouvait  une  inscription  qui  de- 
vait être  d'un  indice  précieux  :  bien  qu'elle  fût  on  langue 
grecque,  chacun  dans  lesdeux  principautés  eut  la  modestie 
de  se  déclarer  incompétent  pour  la  .solution  de  l'énigme.  A 
Vienne  même,  où  la  reproduction  lithographique  exacte  du 
dessin  de  ces  objets  a  été  ordonnée,  l'inscription  a  été  dé- 
clarée, ainsi  que  les  objets  eux-mêmes ,  d'une  origine  im- 
|inssible  il  délerininer. 

Imil  1  lioiiiienr  delà  description  et  de  l'explication  de  ces 
l'ie.  leiix  iilijeis  était  destiné  à  l'un  dos  membres  les  plus 
ilL-liiigui>  de  lAcadémie  des  inscriptions  et  belles-lettres  a 
Paris,  M.  Berger  de  Xivrey. 

Ayant  reçu ,  par  M.  Saint-Marc  Girardin  ,  communication 
d  une  lettre  détaillée  que  lui  écrivait  sur  cet  intéressant 
sujet  M.  Adolphe  Billecocq.  agent  et  consul  général  de  France 
dans  les  principautés  du  Danube,  M.  Berger  de  Xivrey  ne 
tarda  pas,  à  l'admiration  et  à  la  plus  grande  reconnaissance 
du  pa\s  moldo-valaque  tout  entier,  à  donner,  des  objets 
que  liiMis  reproduisons  ici,  la  description,  puis  l'explication 
si  lenliliqiie  qui  suivent  : 

Luniement  du  cou,  s'élargissant  au  milieu  comme  nos 
hausse-cols,  est  doublé  d'une  plaque  d'or  unie,  et  la  partie 
de  dessus,  en  or  travaillé  à  jour,  a  les  vides  remplis  avec 
des  pierres  taillées  (cristal  de  roche  ou  pâtes  vitreuses  co- 
lorées). La  portion  du  cercle  disposée  pour  s'adapter  der- 
rière la  nuque  est  jointe  à  celle  du  devant  par  des  charniè- 
res et  n'est  qu'en  or  uni.  Les  dimensions  de  cet  ornement 
sont  :  diamètre  supérieur,  ISO  millimètres;  inférieur,  200- 
épaisseur,  2.  Il  pèse  15/32  de  livre  de  Leipsig.  ' 

Les  rfcH.r  anneaux  sont  tout  unis ,  ouverts  et  susceptibles 
de  se  fermer  par  l'insertion  du  crochet  d'une  desextrémitcif 
dans  une  on\eilureou  porte  d'agrafe,  pratiquée  à  l'autre 
bout.  L,  un  de  ces  grands  anneaux  est  strié  à  ses  extrémi- 
tés :  c'est  celui  qui  porte  l'inscription  dont  je  parierai  tout 
à  l'heure.  Son  diamètre  est  de  153  millimètres:  son  épais- 
seur de  12;  il  pèse  I  livre  7/IG.  L'autre  plus  large,  mais 
beaiieiiiip  plus  mince  (diamètre,  170inilliinèt.;  épaisseur  5 
1,,.-,,  J\,'i;i  ,io  i;,.,.n  '    '^  '    " 


e.  IKj  millimètres;  petit  diamètre,  165.  A  la  base, 
id  diamètre,  00;  petit  diamètre,  75.  La  profondeur esi, 
05  millimètres;  l'épaisseur,  d'un  millimètre.  Il  pèse  5 


pesé  ii.'v'lii  de  livre. 

La  coupe  est  un  vase  octogone,  en  forme  de  coriieille  et 
un  peu  ovale,  le  bord  supérieur  prolongi' a  plal  aux  deux 
extrémités,  de  manière  à  offrir  un  poinid  .qipni  .mx  p.illes 
de  deux  léopards  qui  s'élancent  du  bas  de  hi  eoiqie  et  for- 
ment ainsi  les  anses.  Un  des  deux  léopards  manque.  Le 
corps  du  vase  est  travaillé  à  jour  par  di\erses  combinai- 
sons de  vides  carrés  et  ovales,  remplis  par  des  pierres  di^ 
crislal  de  nulle  et  de  pâtes  vitreuses  colorées,  qui  s'en- 
clià-seni  ,111  iiHiumde  rainures  pratiquées  dans  l'or  Les 
diineiL-iiin-  de  eelte  coupe  sont  ;  à  l'ouverture,  grand  dia- 
melre.  \Ki  millimètres;  petit  diamètre,  165.  A  la  base 
.rand  -i-— •■'—    ""     --■-■  ^-      -■       —    -  -     • 

de  10.1 

:;'32. 

le  dernier  des  ustensiles  reproduit  par  ces  dessins  est  de 
lieauemip  le  plus  intéressant  ;  car  il  ne  représente  pas  moins 
de  dix-lluit  figures  humaines.  C'estune  patère,  ou  coupe 
lie-  r\,i-ee.  avec  cette  particularité  qu'au  milieu  de  l.i  con- 
eiiMle -e  trouve,  comme  omp/iafos,  une  peliie  slalue  doi- 
assi-e  I  1  loule  en  relief,  qui  sert  di' boiilnn  piinrenlexer  ce 
plal  parle  indien  La  m,'. ili-pn-iiinn  exi-le  dan-  quel- 
ques-uns de  nus  ii-leii-des  de  Lilile  |i,iiir  le  ser\  ire  du  des- 
sert. La  petite  si. due  a--i-e  e-l  une  ligure  de  teninie,  leii.int 
des  deux  mains  un  pot  ou  amphore  sans  anses.  A  ses  pieds 
dans  un  cercle  intérieur,  sont  représentés  en  bas-reliefs  six 
animaux  fort  mal  figurés,  et  un  homme  couché  près  d'eux. 
Le  cercle  du  bord  est  orné  deuninlenieiils,  de  feuillnL'es  et 
de  perles.  Le  cercle  intcrmeili.nre  lie.iiirniip  plus  Im-e  qui' 
les  deux  autres,  contient  seize  liLmie- delmni  iiuii--i-:,s  a 
peu  pies  ilég.ile  ^randem-el  uii'l  mieiil  i.m  de  repiv-nh'r 
desdieux  du  p,iLMni-iiie  piii  ail  eMilimie  li.iix  de  re- lemn.- 
Sonlniie-:uerl,i,h|,,nni|epi,-,,.n  p,.,,  p,,.-  n  riinliqiie:  les 
autres  s pin-  nu    mnin-  \nlnes    lliin-  d  lllin  manière   inii 

rappelle  (le-di-pn-ilinn-eiinnii. '-lie  I  ,,M  ,ii,rie„.  I  :,,||,.  |„.||e, 

paiere  a   un   dnid.le  l 1  en  nr  uni     Le-  ilinieiisinns -mil  ■ 

dlailiel|-e2.'.7  imllllnelles  ,  ep,,i-eii|-  •_>     ||   pe,e    i  lis  ,-es  ,'i/:!2 

élanl  sépare  de  I,,  pehie-l ■.l.iqii.'llepe-el.-i.dSdelivre 

Elle  est  IhiiiledeT,'.  mdlimel n-  l;ii-e  il,-J(l  L'or  v  a  on 
milliiuelrç  il  epai.-,-rur.  Nous  ne  saxons  pas  si  les 'li;;ures 
sont  ciselées  ou  repoussées  au  marteau. 

Les  monuments  dont  on  peut  ainsi  apprécier  l'exécution 
par  (a^s  dessins,  offrent  un  singulier  contraste  entre  l'ex- 
Iréme  paiiMeli'  du  shledeeel  art  et  la  richesse  du  mêlai 
En  i.qi|ii,irli,iiil  ces  deux  eiir, instances  et  Celle  dis  sujets 
liaieiis  ie|ire.-eiili's  sur  le  dernier  vase  que  nous  venons  di> 
décrire,  on  est  embarrassé  d'assigner  une  époque  à  la  fa- 
brication de  ces  ustensiles.  On  ne  peut  guère  supposerquils 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


IJijoiixctv.isesiror  massirdetrivailb 


furent,  commo  l'admirahlo  colluclioii  des  vasîs 
ilari^Hnl  il»  lii'niny,  les  uslcn.'îik'.s  sacns  il'uii  ti>m- 
|ile  païen,  onlouLs  par  la  (lé\<it,ion  déediiragée  d'un 
des  dernior.s  prôtrna  du  paganisme.  Car  alors,  le 
slyle  de  l'ornementation  aoeuserait  une  épofjue  de 
l'art  antérieur  à   la   complète  décadence    Ce  qui 


restait  encore  de  pn'Tieii\  fl;iii>  h'-  tciii|ilr.  p.iî 

lor.sque  le  oliristi;iiii^iiir  cniiMiinii 

remontait  à  une    rpnipir  licj.i  jh 

iiisme  n'aurait  pu  m  numIu  t;iiic  i 

cet  ancien  culte  à  une  é]iuqiie  di 

prononcée  que  celle  des  scnlpliiii 

>iles:  e.ir  il  est  inipossilile  d'iillrilii 


nph, 


rine.iirecli 
Irop  rere,, 
.lipl„,ne>,. 

'm  ce  st\'le 

idilM 


(-   I.. 


Illlill  V 

iioniKri 

nllerlinl 


(les  I 

fort  1 


Mtl" 


r  1,1  repre-eiihilion 
es.  En  rapprocliant 
lie  la  matière,  ne 
pie  ae  si  riches  us- 
Constantinople  vers 


tensili^s  auraient  été  faliriqué 
le  sixième  ou  le  se|itième  siècle .  pour  être  donné 
vn  présent  a  quelque  chef  de  ces  liordes  barbare 
ipii  des  rives  du  Danube  piuis>;iieiil  lems  exeiuxion 


inenai.anles  juscju  a  peu 
Hom(\  ?  Li'S  dons  offerts  i' 
,ivnnt  tout  s;ilisr,iiiv  lein 
lai  ,  et  enuieinr  Innp-p 
coup  d'ornriiiinl-  .M;ll^ 
Hyzance  eut  eoiiii 
nation  en   livrant 


de  (li>l,i 
di' 


elle 


MIT  jMiliie  p;ir  le  prix  du  mé- 
-  pljiir  ,1  liMirsyeux  parbeau- 
l^  1,1  (leNoliiin  des  césars  de 
lie-  ^riiluilement  une  i^'ofa- 
ces    barbaies   méer(''aTUs  des 


sculplures  a  sujc^ts  elu-éliens,  sujels  ({tu  d  ailleurs 
S'seraieni  mal  aeeonle^  :.\er  le^  -eene- dnrjie  ,)ii 
devaieni  sans  doiiler  IrjuiiT  ilr,  \,i-r~  d  .,r  iilTeiN 
pi'Ul-élri'  a  ipielque  rhrl  ,lr-  lliin-  mi  d-  Ammts 
l)n  V  lit  donc  représenter  de.>  li^iav>  iii\liiul(ii;iques 
ou  Ton  reconnaît  l'intention  de  rappeler  tant  bien 
que  mal   certain.^  attributs  caractéristiques.  C'est 


priili;dil;'iucnt  Apollon  qui  joue  dr  l,i  Kiv.  N  piune 
qui  e-l  ^k-isis.sur  un  poisson.  Mar>  qn  ■  !■•.  mum.-  nne 
eollede  mailles  et  qui  lient  une  e-peecl,.  tn>udeou 
d(^  massue .  etc. 

(Juant  aux  caractères  gravé.s  sur  un  des  ijrands 
anneaux,  s'il  faut  y  lire  la  salutation  bachique  kœré 
kœ piné,  prends  et  bois!...  (la  première  syllabe  de 
ce  dernier  mot  étant  écrite  par  un  epsilon  el  un 
i.ota,  genre  de  faute  qui  se  rencontre  même  dans 


de  fort  b( 
|ilace  de  l'i'l 
sur  la  eon, 
,1  e\pli(|uer,> 
sanl  qu,.  r 
mer,  el.iil   | 


is),  on  doit  avouer  que  la 
iipiien  sérail  bien  plus  naturelle 
-m  (('  cercle  ou  anneau;  mais 
lii/:irn^  circonstance,  en  suppo- 
'  !  fer- 


LatourdeColtzi,bdtiealiu(,in  i.  tparles>u    lo    deCharlesXII.d'aprèsJI.Doussault. 


pu  peut  s  ouvrir  et  se  I 
s  anses  de  [ilusieurs coupes 
lit  manière  à  pouvoir  offrir 
toutes  ens?mble  au  donataire  les  coupes  d'un  cer- 
tain nondire  do  convives. 

L.l      TOI  B      DF.     r.OLTZ.\  ,      B.ITIF.     PA»     LES     Sl'KDUIS 
-\    IIlT.HAnEST. 

iN  etait-ee  point  assez  pour  cette  terre  il  la  fois  si 
riehe  el  si  iidortunée ,  ipielle  fût  succes.-ivement  dc^ 
venue,  [lendani  tant  de  siècles,  le  lieu  détape  de 
toutes  les  inva^iiuis  funnidabli'S  dnnl  nous  avons 
p:irli''?  Nnii  ,  lin  ilr-lin  m'x.t,.  liML'ird.iit  |)0Ur  der- 
nière epreiiM'  ivllc(|ni  ,  HMn  |,|n--Hn-  r.ispeel  brute 
de  l;i  ciiriqui'le,  ni;ii>  Inrn  -hii-  le  \..\l-  île  la  confra- 
lernite  religieuse,  devrait  bientôt  résumer  tous  les 
iinillirurs  ! 

Nous  \oulons  parler  du  protectorat  des  Russes. 

Celait  en  vain  que,  des  l'année  1709,  un  im- 
mortel Suédois  était  venu  placer  sa  valeureuse  épce 
en  travers  du  chemin  qui  menait  de  Moscou  a  Con- 
stanlinoplo  ;  aux  instincts  fauves  des  hordes  niosco- 
viles  deuieuréis  affamées  et  sanglantes  .sur  le 
c  hamp  de  baladle  de  Pultawa.  une  terre  promise 
s  était  tout-a-cou])  révélée  abondante  et  prochaine: 
et  de  même  (pic  la  baguette  miraculeuse  de  Moïse 
avait  ouvert  devant  Us  Hébreux  les  llols  de  la  mer 


Ll>  Aoi-.i,    >J.in«.-.  Éi.ili.,li,il^.>  v.d.i.UKï,  ,r,.iiiv>  .\l.  l)^Hl^».l 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


<t 


lîouge  ,  do  niiMiie  l'aflinile  ilt^s  croyances 
orthodoxeji  ouvrit  à  l'ierre-le-Giand  ,  ii 
sa  politique,  l'accésdcs provinces  nioldo- 
valaques  I  Lo  miracle  aussi  s'opéra 
donc  I 

Mais  il  nous  reste  à  dire ,  et  c'est  là 
la  vérité  historique  dont  cette  tour  de 
(jjltza  'monument  élevé  ]iar  les  Suédois 
au  milieu  de  la  ville  de  Bucharost)  est 
11'  symbole  !  il  nous  re?te  à  dire  com- 
mejit  un  Dieu  venijeur  referma  hicnlôt 
après,  sur  la  politiipie  drs  lînssos,  lo 
Ilot  qui  était  destiné  a  eni^luulir  leurs 
cliimériques  calculs? 

La  Russie  ,  en  généra! ,  si  âpre  et  si 
rude  dans  ses  allures  asiatiques  au  mi- 
lieu du  mouvement  des  intérêts  euro- 
[«V^ns  ,  na  cessé  depuis  cent  vingt  ans 
a  lieine  quelle  conqite  pour  quelque 
cJiose  dans  réi]uilihre  univei'sel  ,  de 
Hionlrer  une  àiiri'le  jiarlicnliiTC'menl 
éludié*' ,  des  resscntimenls  |iaiticuliérc- 
nient  systématiques  a  légard  îles  peu- 
ples et  des  nations  ipii  ont  cnUiuré  son 
berceau,  qui  ont  ainsi,  pins  ijoe.  d'an- 
tres, assisté  à  ses  velleiti's  enfa'ntinrs 
de  réveil  iiolilicpie,  et  ipii  plus  t:ird  enfin. 
jKiusses  jiar  une  mission  sainte  .  par  un 
pressentiment  tout  propliélique  ,  ont 
<lierclié  à  ctrcindre  et  ii  terrasser, 
dans  son  adolescence,  un  colosse  dont 
les  proportions  pouvaient  ellectivoment 
donner  grandement  à 
]ienser  d'abord  à  des 
voisins  !  ^__ 

Ces    peuples    appar-  ^ 

tenant  tous  à  des  Etals 
swondaircs,  étaient  1rs  ^ 

Polonais,  les  Lettes.  les  ^^, 

Turcs  et  les  Moldo-Va-  —s 

laques. 

Parmi    les    nations ,  ^ 

une  surtout  a  longtemps  _ 

marqué  par  ses  colli- 
sions et  ses  duels  avec  — 
U^  géant  des  (pi'il  ap-  _ 
liariitCesl  la  nalionsué-  _ 
doise.  Et  Charles  XII ,  .==_.= 
il  Narwa  ,  descendant , 
comme  David,  de  rois 
souvent  armés  par  la 
main  de  Dieu,  apprenait 
au  monde  que  le  nou- 
veau Goliath  était  ce- 
pendant vulnérable  au 
front  ;  et ,  soldat  .de  la 
|)ensée  libre  et  ■  géné- 
reuse contre  la  matière, 
contre  la  matière  oppres- 
sive, le  successeur  glo- 
rieux des  Gustave  le  fai- 
sait rouler  dans  la  pous- 
sière des  vaincus,  en 
s'ccriant  :  Qui  vivra 
verra  il"! 

Que  s'est-U  passé  ef- 
fectivement depuis  prés  f 
quanta  années  que  ni  r-| 
a  été  jeté  à  la  face  ili>  |u 'nm'ics  con- 
vulsions guerrières  île  l.i  Russie .  par 
l'antagoniste  glorieux  du  czar  Pierre-k- 
Grand?  La  matière  russe,  incessamment 
fécondée,  vivifiée,  entioblie  par  ta  pensée 
constamment  rentie  du  dehors  de  l'em- 
pire, n'a  cessé  de  peser  sur  l  équilibre 
européen!  Depuis  Ic's  rlrarin'ntiers  de 
Saanlani  jumiujun  pi',iir'>  ilr  la  phi- 
losiipliie  liii  ili\-liii]iirii  r -ii'iliv  Pierre- 
Ic^Grand  cl  ^;  s  siircr--  iiiv  ii  mit  ccs.-;é 
de  recruter  partout  on  Europe  .  pour 
leur  enqiire  conmie  pour  e.ux-mén-.cs  . 
d,\s  précepteurs  de  tout  genre! 

Lesterons  venues  dcl  étranger,  il  faut 
CJ>|iendant  f"  hâter  de  le  reconnaître, 
araicnlétéquetque  fois  fort  rudes!  Et  les 
plus  rudes,  celles  enlie  ;iulrr.-.  que  Char- 
les XII  avait  prodi.L'un-  r.innne  précep- 
teur dans  l'art  de  m'  ImIIiv  m  guerre, 

n'avaient  ]ia>|irér>r m  iiniic  Ir^  l'iiiils 

les    plus    miiiT,-'       niir  ~i     I--  lin-  - 

avaieni  éli'liin-'lriii|i>  iii.|nh-i.'~  li:iri  rlr:- 

par  tant  il 

mençaient 

l?s  cnseigi 

de  colère 


Pleiesches,  chasseurs  dans  les  montagnes,  d'après  M.  Doussault. 


Halte  de  chasse  dans  les  steppes,  d'après  M.  DinissauU. 


nt  cin- 
lero'ique 


>lirilli 


ll> 


l'pi'jHl.ilil  ;i  llirMlT  il  profit 
urnl.-.  ivi;n-  iIjil^  îles  jours 
Ll■llelo^  suédois  avait  eu  lo 

sort  de  tons  les  grands  capitaines...  Il 

avait  formé  .  dans  Pierrc-le-Grand  ,  un 

di.sciplo  qui  l'avait  battu  ! 

Mais,  il  cette  phase  même  des  annales 

du  Nord  ,  ouvrons  l'histoire  ,  et  à  l'une 

(I)  A  quarante  licuis  ilc  Piler-bourg,  ou 
l'^signe  encore  à  chaciue  vo)a;;ei;r  le  relaU 
de  poste  de  H''((iy(ir(i,  api  es  .Narw.i,  comme 
liranl  son  nom  de  celle  exclain.iliou  :  qui 
vi\ia  verra!...  arrachée  à  Cl.arics  XII  au 
iiiomeiil  où  il  allait  entrer  dans  la  lice  de  son 
iinuiorlellc  vicloire  conlrc  les  soldats  de 
l'ieire-le-Giaud. 


des  pages,  il  est  vrai,  tes  moinscounues 
des  Français,  nous  y  trouverons  un  de 
CCS  exemples  extraordinaires  par  les- 
quels il  plait  parfois  à  Dieu  de  conl'nndre 
les  surii-^  Ir-i  pins  fjiils  pniii- l'hlnuir  ; 
nous  \  iiiiii\rinii,~  un  lie  11'- l'xrjiiples 
exlraorilinaiirs  p.ir  lisqurls  il  pliiil  a  ni 
toute-puissance  de  briser  les  plans  hu- 
mains qu'on  croyait,  en  les  formant,  lu 
plus  à  l'abri  de  la  faiblesse  et  du  néant! 
Nous  y  verrons  que  si ,  dès  ranné'C 
17U9,  il  avait  suffi  au  farouche  czar  de 
trouver  en  travers  du  chemin  qui  mène 
il  Conslaiiliniiplr  ,  pour  le  réduire,  ce 
Suédiii.<  ,  qiir  les  Turcs  d'aujourd'hui 
appellent  eiirnrr  dans  leur  reconnais- 
sance du  nom  de  Heniirbash  ou  Tète  de 
fer  :  —  \  ingt-ipuitre  lieures  ne  se  pas- 
saient pas  sans  que  le  vainqueur  enivré 
ne  rencontrât  cumme  prisonnier  sons  sa 
tente,  au  lendemain  de  la  victoire  de 
Pultawa  (encore  une  fois  lliisloire  est  la 
pour  l'atlester»,  cet  astucieux  Moldo- 
Valaqne  Di'ini'liiiisCantemir.  le  dernier 
des  pniiios  indigènes,  qu'un  Dieu  ven- 
geur |ieut-étri'  tjui  vivra  verra  !  ) .  aji- 
pelait  il  montrer  aux  Russes,  pendant  la 
paix  .  le  chemin  qui  devait  les  conduire 
à  tant  de  guerres  nouvelles! 

Démétrius  Cantemir ,    enfin  .  faisant 
entendre  pour  la  première  fois ,  il  l'o- 
reille du  barbare  étonné ,  le  langage  de 
la  haute  diplomatie  le- 
vantine ,    lui  déroulait 
tous  les  trésors  sédui- 
sants de  cette  action  po- 
litique qu'il   j    avait  il 
exercer   au  lïioyen  du 
lien  religieux  ,   et  par 
l'esprit  des  dogmes  eux- 
mêmes,  sur  lésinasses 
conipacles  de  ce*  Grecs 
orthoiInM's  ,  Miuiiiisaux 
sultan>  ilr  l'.iiii-l.inlino- 
ple.  Ce  n  est  point  im- 
punément alors  qu  héri- 
tier d'une  race  mêlée  de 
sang  polonais  et  de  sang 
byzantin,  et  liii-mémesi 
longtemps  mêlé  iv  tous 
1rs  inneiiiis  de  Pierre  , 
iir.li.iilr>  Ml.  iiJl.  zep- 
|i.i    Diiiirliios Cantemir 
liii'rrli.'i  .1  agir  sur  l'es- 
prit et  sur  l'avenir  de 
Picrre-le-Grand   et    de 
ses  successeurs    Démê- 
lant bien  vite ,  chez  le 
czar  ignorant,  sa  manie 
d'apprendre .  il  ne  tarda 
pas  il  exercer  sur  lui  le 
presliLre     d'un      savant 
joni.ssant    déjà    sur     le 
Irone  d  un   crrl.iin    re- 
nom coiiiiiir  liiiiiinieéru- 
dit  cl  Irliri':  cl  M'iiina- 
rant  au  plus  vite  de  toutes  ces  \ieilles 
théories,  qui ,  de  la  part  des  riches  et 
astucieux  possesseurs  des  vastes  et  fer- 
tiles provinces  du  bas  Danube,  avaient 
toujours  consisli' ,  ilrpiiis  des  sircles ,  à 
lancer  contre  1rs  uwitrrs  ilr  Ih/ance. 
ijuels qu'ils  fiis-i  ni,  1rs  li.n  Ii.iits  rampes 
aux  steppes  du  litlor.il  de  la  mer  Noire  . 
ilrpnisles  Huns  jusqii  aux  .Mongols  de- 
puis les Gotlis  jusqu'aux  Ciisaques-Zapo- 
ili'monslrations 
lie  mépris  et  de 
iM^rs  et  tous  les 


|iiv-rnl  ri  sut  iii/hi  itllumer 
'l,l„  czar  rc  in  rmwr  senti- 
rottisc  à  i  cf/ard  deConstun- 


Dornb\utz,  districts  deRomanatz,  — Tirgoriclis,— Shtiiia,  d'iprOs  M.  .M.  Itouquel 


rogues:  il  .iiipi 
d'un  fonds  inrp 
haine,  mêla  Im 
danijrrs.lr  I'.im 

du  111" ni  |iiv- 

dans  I  cprild; 
ment  de  l 
tinople! 

Il  ne  s  en  tint  pas  la  .  il  accompagna 
Picrre-le-Grand  clans  pliisiiMirsdesvilles 
de  son  empire;  et  dans  millr  entretiens 
.subséquents,  qui  de\iiiirnl  plus  lard  la 
substance  de  longs  mi'iiini  11 'S  iiiaimscrits 
remis  an  larniirr  rnipriviir  ru~s|. .  il 
préseiil.i  .'^,iiiilr-S.i|iliir  (niiiine  un  nou- 
veau liinilii'iin  a  ileli\rrr  îles  mains  des 
infidèles;  il  trouva  facilement ,  au  sein 
argenté  des  aurores  boréales  de  tant  de 
nuits  polaires  qui  protégeaient  les  glo- 
rieux bivouacs  de  Pierre  ,  un  nouveau 
labarum  il  faire  espérer  à  ce  nouveau 
Conslayitin  ;  et  par  la  plus  profonde , 
comme  par  bi  plus  habile  perfidie  poli- 
tique, introduisant  au  cœur  des  lau- 
riers recueillis  récemment  sur  les  Sué- 
dois vaincus  ,  le  ver  qui  était  destiné  à 
les  réduire  un  jour  en  poussière,  il  sa- 
Miit  en\elopper,  dès  ce  moment,  l'ave- 
nir de  la  jeune  capitale  qu'une  main 
niir.iinleu.se  venait  de  faire  surgir  des 
eaux  de  la  \e«a  .  d'un  inextricable  ré- 
s;au.  en  mariant  pour  toujours  ses  de.-- 


10 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


lijiws  et  cuile  (lo  l'cMiipiro  (lu'cllc  était  appelée  ii  com- 
Miiinder  à  ces  insolubles  questions  de  Constantinoplc ,  du 
(  aucase  et  des  DardaneUes. 

VX  c'est  ainsi  ipic,  |iirri<i''mi'nt  an  bas  dos  colonnes 
,1  llnriili'  d(^  I  hi>h,ire  nulil.uir  ,\r.  Snnlnis.  un  Mnldo-Vu- 
la(|ne,  Déniclrins  Caritcniir,  |MirHv  ilr.aniK-,  prinrc  prison- 
niiT,  prince  dcclin  :  en  e\rill,iHl  cl../  le  M..sco\ile  vain- 
ipieui-,  chez  le  prenuer  iMMp.Mi'ni-  aiitnciale  i  iiss.v  la  llirorie 
si'diiisiintr,mais  pàillruse  des  jirnlerluidts  piAiliiiues  et  re- 
liiiini.r,  loi  L'i'.iil  ivl  anni-in  an.pii-l  un  sii'cle  et  denn  après, 
,\r\  ,1.1.1  .II.'  ii\.-  (l.uislaiiiiistiiiiid'Oricnl,  Ions  li's  eni- 
l,;ii,,.>  ,].•  1,1  |,.,lili.|...'.l.i  ,al..nil  lie  SainM'elersIjourii. 

I  li.i  ,  la  \oila  celle  i  uili;  \erilé  dont  la  tour  de  Coitza  est 

Klevi'c  au  milieu  do  la  ville  de  Bucliarest  par  des  ingé- 
nieur suédois,  compagnons  de  la  captivité  de  Charles  Xll  a 
liendor,  elle  résume  là,  les  plus  grands  enseignements!.... 

Un  terrililo  tremblement  de  terre  renversa,  en  1802, 
Imite  sa  partie  supérieure...  Mais  Dieu  permet  qu'elle  soit 
assez  dehiuit  |iour  nous  dire  encore  aujourd'hui  que  cent 
années  déjà,  .ivanl  IKI2,  un  immortel  capitaine,  comptant 
nnssi  de  nonilireu>:  et  valeureuv  Polonais  dans  les  rangs  de 
s's  soldats,  jetait  du  haut  de  son  sommet,  et  de  manière  à 
ce  qu'il  fût  entendu  sur  toute  la  ligne  européenne  etasiali- 
(jiie  do  la  longue  frontière  russe,  ce  cri  de  :  Xun  procèdes 
<imptius:...iifu  n'iii-diiirids  jias  davanla/je!  ..  »  que  Dieu 
aiis.>i .  dans  un  jour  .1.  .  i.l.  iv  .1  de  miséricorde,  avait  op- 
poséau\  Ilots  de  la  i.i.T  en  c  ..iiiroux  !,.. 

Oui,  latourdeCollza  ie>l.- i.i. -vnihnle  vi\anl  de  l'accord, 
.le  la  corrélation  ,  de  la  piii-.ii..v  il.'  .-.'H.'  |.iil-.ili..ii  .pii ,  à 
partir  de  la  rivière  de  Torn.,.  jii-i|ii  .m  l.a.il  .1''  I  \-i.',civ 
p.issant  ]iar  Stockholm,  Var,M.\ie,  la.s.^j ,  liuclKl^e^l,  C.on- 
>lanrmople,  le  Caucase ,  le  Liban  et  Alexandrie,  bat  dune 
foire  a  l'aire  trembler,  ch3(|ue  jour,  sur  son  trône,  oùeffec- 
liMMiiiMil  il  y  Iremliln,   renipereiir  Nicolas'  ,. 

l'iii.-seilonc  I  iil.'v  .|iii'  iv|,n-iMil!-  (.■  ilel.ri^  fivl.'  .'I  déjà 
niiilil,'.  parle.ael,  i.lei'  .^  mmi.'.mi  |...ii.l  il.' \  ...■  .1,.  I  l.i-l.iire, 

i.lée  si  consiilaiile  pour  la  cim1i>: n  .1  p.. or  1  h.ini.inité  , 

pi iis,-e  celle  iilé(\  telle  que  je  la  lu  re  a  un.' p..lil  i.|ii.' /lon- 
iii'le  cf  pur  conséquent  iiulinniile  ,  inérilia  ,.\.'.  l.'  I.'inps 
lalli'iilion  el  les  n.i'dilalions  il.' ipK^lqiH'S-niis  il.'  c.s  LTands 
pri'ciirseurs  des \éi liés  éternelles!  Puis,se-t-elle ,  à  un  jour 
qui  n'csl  |ias  loin,  ins[)iier  il  Victor  Hugo  une  épopée  nou- 
\elle,  à  Lamartine  un  manileslo,  à  l'radier  une  statue, 
a  ('outure  un  lableau!...  lit,  Hin>i  coniliais.'.' ,i\.'.' I  inspi- 
ration divine,  dans  les  hautes  spl.ei.-^  .1.'  1  n.l.Hii;.'!..  .•  Im- 
maine  ,  puisse-t-elle bientôt  reloinl..a  .'n  .un'  r.w,'.' ,-.,il.il,.in' 
.sur  ces  race-,  inli'ro-anl.'-    .pii  ,    ..pie~   ,-i\  ..ir  .'1.'  p.'i..l,ii.l 

lanlde  sie.l.'.  1  ..l.|.l  .l.-  | I.!.'.-!...!.-  .1.'   la   IV,.M.l.'n.'.' . 

snnt,  an  ii...i.h'iiI  ...ij.'  In..'.'.'.-  liLai.'>,  li\  ces  a  il.'>  appi.- 
hensions  si  teirihles  !  .. 

LE    DOllOU.ANTZ. 

Honneur  soit  rendu  au  souvenir  militaire  que  représente 
ce  paysan  soldat!...  il  est  aussi,  lui  I  un  débris  respectable 
.le  ces  milices  hardies,  qui,  du  treizième  au  dix-septième 
sieile  .  il.'li'nilirenl  l'occident  contre  les  terribles  invasions 
\eiuies  de  l'Kst  et  du  Midi, 

IncessamnieiU  n.clé  a  .'.'s  pli;.lani;.s  .■.in.p;icli's  il.'s  H.'n- 
grois,  des  Lithuani.i.-. ,  .!.■>  r.ili.n.n^  il  ii  ;.  l'.'-v.' .1  .i  |-.'  nu 
lies  anneaux  de  ce-  cl.,iii.;  -  l..riiiiil,.ljle>  ,  .pu  ,  |,.ii;.'is  >.,.is 
les  coups  d'une  f..i  i.lii;ieii-i'  .il.irs  mililanle  et  vive,  servi- 
rent a  |iré.server  la  .l.i  .'I  leiil.'  '    , 

Son  nom,  tout  sm'ilnis  .  .ninonee  qu'il  combattit  aussi 
dans  les  rangs  ile^  -'.M,.i-  .!.■  I  ha  ries  XII,  et  que  l'Europe 
du  dix-neuvicm.'  .-a.  li'  p...irr.iil  encore  songer  à  l'opposer, 
au  besoin  ,  au.r  iiiro^lnns  moscovites! ...  Le  mot  «  Doro- 
lianl:  ,  »  n'est  qn  en.'  ill.'i  .lii.ii  de  l'appell.ilion  guerrière 
de  ces  (rflfcu»<s  iiM/".,>.  I.iaiil  l.nr  non.  ilii  \  .'i  1,,' /raia 
'aller  au  Irotjl  i  .1,1.1  .'Ile.!. \. 'in. 'i.l  s.iii- celle  ,.lliin' pe- 
sante qu'au  ciiupueiiie  acte  de  loulcs  le^  L'i,.nil.'v  ....'li'i's  de 
la  guerre,  de  Trente-Ans,  ces  corps  de  ^i..--.'  .,i\,!l.iie 
.  leslrabants  suédois,  »  donlle  dorobani/  \  .l,i,|..,' . -i  n- 
pendant  resté  une  image,  avaient  la  repnlaiii.n  .1  ,111. \.r 
loiijoiirs  pour  décider  des  dénoùments  I,.. 

Longtemps  condollière  de  la  force ,  parfois  bandit  par 
ilé.ses|ioir.  toujours  fameux  comme  pandour,  la  politiipie 
d'aujourd'liui  a  trouvé  moyen  de  faire  de  ce  «  dorobanti  » 
issu  de  tant  de  choses  grandes  et  valeureuses ,  un  invalide 
ipii  est  tour  à  tour  employé  à  servir  le  fisc,  la  police  ou  à 
composer  l'escoile  d'Iioiineiir  des  consuls  de  ces  mêmes 
pnis>ances  (/»■//.>■(>»/  secourues  autrefois  et  quiles  ahandon- 
uenl  uujourd'liui! ... 

I.  .\    c  11  .\  s  s  E    A  c  X    s  T  E  P  P  r.  s . 

(  In  yaudiis  faustw  venulionis,  sodatitus  el  amicis, 
testimoniunt  ! .  ,  i 

L  un  des  nlaisiis  les  plus  vifs  qu'un  élrang.'i-  piii-M'  L'onler 
au  pays  niiildo-\alaqne.  c'est,  sans  coiili.  .1.1    1,.  .li;.--!' ' 

La  'raison  en  est  simple  :  le  giliier  y  cM  ,il:..i..l,...l,  \,iii,. 
et  les  pnipriélaires  y  sont  rareniciit  cha.-.s.  nis,  La  guerre 
conire  renniini,  on  coiilre  les  bandes  de  brigands,  a  oc- 
cupe la  peiiilant  loiiLliMiips  une  place  si  sérieuse,  qu'il  n'y  a 
pas,  il  prnpreinenl  |)arl(U'.  jilus  de  dix  ou  douze  ans  qu'on 
est  arrivé  a  coin|iieiidre  qu  une  arme  à  feu  pouvait  être  un 
inslriimcnt  de  plaisir. 

La  chasse  élaut.  d'ailleurs,  comme  la  musique  ou  l'arl 
de  travailler  les  niélaux  .  dans  lesatlribiilions  habiluelles 
dos  Bohémiens ,  celle  dislracliou  ,  si  puissante  dans  le  reste 
do  rKuropo.  est  généralenient  méprisée  des  boyards;  et  tel 
grand  seigneur  chez  lequel ,  vous,  passionne  po'iir  ce  plaisir. 

vous  NOUS  pré.si'iilezpour  cliasscr,  vous  supplie cl  cela 

de  la  meilleure  gr.'ice  du  monde  ,  »  de  ne  pus  rous  donner 
■■  celle  peine... Si  cous  vouiez  absolument  dcsiièrres  ou  des 


"  oisenuT...  il  enverra  ses  (/en  s...  qui  sont  luiliiles...  en  at- 
'truper  pour  vous!...  »  l-.i.l  ..'l  .•  .er.  ..■.■  l.ii  .-.'ii.ble  clios.' 
ridicule  !...  A  ses  yeux  ,  c  .■-!  p.. '-.p..-  ,.1.  —  .  .■  .Irannlinaire 
qu(^  d  aller  à  pied,  el ,  daii.>  s,,  bonté.  dan^^oIl  extrême  po- 
litesse ,  il  serait  porté  à  vous  proposer  de  faire  atteler  la  plus 
belle  de  ses  voitures. .  .  pour  vous  mener  chasser  au 
marais  !.  . 

D'un  autre  côté,  perdrix,  cailles,  bécassines,  lièvres, 
coqs  de  bruyères,  bécasses,  pluviers,  outardes,  loin  d'être 
comme  dans  le  reste  de  l'Europe  et  à  l'octroi  des  villes, 
l'objet  des  rivalités  ,  des  inquisitions  les  plus  jalouses  ,  y 
sont  "  primo  occupanti ,  »  e'estrà-dire  ,  au  plus  adroit  ! 

Dans  cet  élat  des  choses  ,  on  comprend  tout  de  suite  de 
ipi.'ll.'  a.ln.n.ible  ressource  est  la  Moldo-Valacliie  pour  un 

(has-.'sile  in.intagnos,  chasses  de  bois,  chasses  des  step- 
pes y  aboiiileiil. 

Les  deux  premières,  moins  bien  entendues  que  partout 
ailleurs,  ne  méritent  guère  qu'on  s'y  arrête  ,  a  moins  que 
ce  ne  soit  pour  dire  bien  vile  que  le  paysan  roumoun  ,  en 
général  beaucoup  pins  l.i'..\.'  .  I.  .--.'.ii  qu'il  n'est  habile 
tireur,  se  trouve  .pielqiier...-  la  pi..i.'  .le  l'animal  carnassier 
qu'il  poursuit  !  C'est  ainsi  q.i.'.|e  p.ii>  .erlider  avoir  eu  dans 

les  plus  hautes  monl.igiiesdes  Carpalhes,  pour  c pagiinns 

de  chasse,  d'inlrépi.l.'s  iiteicsclics ,  ou  i/itrde-fronlicrcs,  sur 
Icsquclsj'aurais  pucompter,  comme  par  faite  ment  absentes, 
jusqu'à  soi.raiile  livres  de  chair  qui  leur  avaient  été  man- 
ijées  par  des  ours  ! 

CupetU  incident  n'arrêtait ,  toutefois,  pas  leur  vocation 
pour  ce  gi'in.'  ilex.'i.ice  :  on  les  voyait  retourner  de  iilus 
belle  à  la  rha^-r  .l.'ii's  terribles  animaux,  et.  parfois, 
dans  le  seul  biil  dj  d. 'fendre,  d'y  préserver  la  vie  des 
chasseurs  élraugers  qu'on  a\ail  pla..'-  s.ai-  l.'iii  ^ai.le 

La  chasse  des  bois,  bi.'i.  .|ii  ,.li..i..l..iil.'  .■..  -,.i.:jIi.'i>  ,  en 
loups  ,  en  lièvres  et  en  b.'.  ,.--.■-  c  pi  .il  pas  l..iiji.iirs  a 
rai.son  du  danger  que  In..'  p..  ...r "  .les  paysins  moldo- 
valaques  à  manier  les  an...".  ..  .  .[.-..le  ,  vous  fait  la  plu- 
part du  temps  courir  !  One  .1.'  .  I...>s.'s  des  bois  n'ai-je  pas 
vues,  apresle-,.  |.i.'lles..n  avait  à  regretter  la  mort  dcplusd'un 

bon  et  iiil.'.'pnl.'  l;.i.. lin  !... 

C'est  il.....   (le  I  .  .liasse  des  steppes  que  nous  pourrons 

parler  a\.'.'  !.' i.-.l.'  l'eL'vcIs    ,a\e.-le  plus  ilepl;.i-ii'  ' 

car  elle  r.i.i.i.'  ell.'  ..n  .1.'- ~.,.i\.'iiii>  l.'~  pi..- ..ui.',.!.!.'- 
qu'un  eh,.--.'...-  d.'l.'i  i.j.i.e     .piui.  ami  p,i.-.-ii.nn.'  .1.'  1,.  ..,.- 

I..1.'     p. .!->.' pl.'i  .laiis  sa  vie  !...  (Juel  bonheur  pour  un 

l.,.b.l...i  .1.'-  ;j...i..li'-  Mlles...  pour  un  enfant  de  Paris,  par 
.',.'... l'ii'  .1.'  .-.'  Ii.i.aer  lout-à-coup  devant  deux  ou  trois 
.  .'i.l-  Ile. les  carii'cs  d  admirables  terrains  de  chasse,  et  de 
s.'  .lu.'  :  ici  je  suis  roi ,  seigneur  et  maître  ;  j'ai  là  mes  chiens 
iii.p.ii.enis  et  fidèles  ,  mes  beaux  fusils...  et ,  devant  moi , 
tout  les  animaux  de  la  création...  moins  le  Garde  Cham- 
pêtre!.... 

Le  [laysan  roumoun  ,  n'ayant  commencé  à  possédei-  on 
même  a  cimnailie  les  armes  a  feu  que  dflpuis  les  dernières 
giieir.':-.!.'-  li.i— .'-,  .'-I  1... la  1.1. 'a  ..p|...-.'i-,  a  l'avance,  a  tout 
gil.i.'.-  .|.i.'l.|...'  .  ho-.'.li'  l.i.'.i  pl..>  pr.'.i.'.i\  pii.irson  compa- 
gnon lie  ili,.,--e  .'li'.L.L'.'r,  .p.e  I  ...li.'-se  a  liier  le  fusil  ;  ce 
sontscs  inslincls  naturels  de  braconnier...  c'est  sa  ruse  !... 
Alors,  sa\ez-\ons  ce  ipii  s'est  passé  dans  les  dernières 
années  :  de  brilla  iilsilipl.nniles  gens  qui  ne  laissent  pas  que 
il'èlr.'  aiis-i  p,.^s,il.l.'iiieiil  iii-.'s,  et,  de  plus,  ceux  dont  je 
pa.l.'  II. Il  ,..l....u  .!.,.--.■...-  ont  tout-à-coup  transformé  la 
S..I1I11.I.'  .1.',-  H.'|.p.'-  .'Il  nue  \asle  école  de  tir  !  Là  ,  sous  les 
couiis du cliassenr cosmopolite,  s'aidant ,  ilcsl  \rai  desniille 
et  un  secrels,  des  mille  et  une  rubricpi..-  .I.i  p,n>,iii  i...i~ 
moun  ,  tombent  en  plein  vol  des  myriades  d  oi-.'ans  donl  le 
moins  i.'ii.inimé,  pendu  à  la  devanture  de  Chevel  ou  de 
(  "I.  .1.1  ,  .11.  l'alais-Royal ,  suffirait  déjà  pour  former,  seu- 
leii.eiil  .11  .  li,..-^eurs  et  en  gourmands,  les  plus  inolîensifs 
allionpenieiils!.,. 

Les  premiers  jours  d'avril  ne  se  passent  donc  pas  sans  ipie 
par  l'une  des  portes  orientales  de  la  ville  de  Bucliarest,  on  ne 
voie  cheminer,  à  grands  renloris  de  surudgis  et  de  che- 
\a..\  de  poste  ,  maints  cl. '^..iiN  l.i.irgons  portant  fusils. 
.I.i.'.is  ,  tentes ,  cantines  l.,.!!....'-  .le  cuisine  et  attirails 
(léchasse!...  Ce  sont  Jl.\l  les  Agciils  et  Consuls  généraux 
de  l-'raïu'O,  d'Angleterre  et  ilAiilriche  .  allant  secouer,  à 
l'air  frais  el  embaumé  des  premiers  beaux  jours  de  prin- 
leiiqis ,  cet  amas  de  trilnilations,,.  de  déceptions...  de 
soucis  qu'a  accumulés  sur  eux  la  Politiiiuc. 

Arrivé  après  quatre  ou  cimi  heures  de  marche  à  un 
village  qui  a  nom  Tamadéo,  el  où  résident ,  de  pèn;  en  lils 
depuis  ile>  leiiip-  iiiiiiiemoriaux  ,  lesfournis.seurs  ordinaires 
delà  bourhi  :lr^  l...-p...l,irs,  on  revoit  avec  bonheur  les  chas- 
seurs de  1  , innée  d  ,i\ant...  on  SC  prépare  ii  de  nouveaux 
jilaisirs;  en  un  mot ,  on  ne  tarde  pas  à  prendre  possession  du 
steppe. 

Tout  n'est  cependant  pas  «  roses  »  dans  la  chasse  que 
j'entreprcuds  de  vous  décrire.  D'abord  ,  pas  d'autre  abri 
qu'une  pauvre  charrette  recouverte  d'une  iiatle...  plus  île 
visages  féminins,,,  quelquefois  pas  de  feu,,,  parlant  pas  de 
noinrilure  chaiiile  ii....>  ,.n--i  ,  lu  belle  cloile...  àdiscré- 
lion  pen.lani  lie.-  s.'.i.,i..i.'s  '  p..-  1111  -eiil  i;ibier  que  vous 
pnis.-icz  \oir  anlicii..'..!  .pi.'  p,ii  \r>  \vu\  .!.■  \olre  guide,,. 
l.inl  ilaiiscevasleil.'.serl  uni  comme  bi  surlacc des  mers,  est 
la,  lapi,,  ,  blolli,,.,  au  gite.,.  toutse  rase  et  selerre!...  Le 
gibier  que  vous  pouvez  voir  debout, . ,  et  vous  en  voyez, , ,  vous 
Miil  aussi  et  alors  il  fuit  ou  s'envole;  et,  dans  ce  cas,  il  n'csl 
jamais  alioid.ible  !  Celui  ipii  \a  devenir  voire  proie,  est  celui 
ipii.  obeissani  a  l,i  douce  loi  du  prinleinps.  règle  en  pais  les 
plus  chers  inlerêls  de  sa  future  lune  de  miel.  Le  steppe, 
c'est  le  grand  marché  des  amours,  la  foiredelleaueairede 
tous  les  cœurs,  marchant  sur  deux  on  quatre  pâlies  .  L'art 
du  chasseur  con.sisie  dimc  il  sa\iiir  ap|)rocher  doui-emenl 
tout  gibier,  à  celle  époque  des  grands  ra.ssemblcmenls  qui 
précèdent  la  saison  des  noces...  Or.  son  accès  n'est  possible 
qu'avec  la  pauvre  charrelle  du  pav  san  des  steppes  ;,.  encore 
faul-il  ipie,  bien  caches  sous  une'n.alle  large  cl  épaisse    vo- 


ire compagnon  et  vous  vous  ayez  bien  soin  de  ne  révéler 
\olie  |iie,Mni  c  paraucun  geste,  par  aucun  cri  humain  ;  une 
aiilre  condilion  du  succès  de  cette  chasse,  c'est  autant  que 
pi." ibic  lie  ne  pas  arriver  tout  droit  sur  sa  [iroie,  mais  de 
l.i  iMiirn.r  .-1  il.-  1  .-n.  .'indre  dans  un  cercle  .pie  léquipage 
cri  lu... .  h, .1.1  1.  11.1  l.i.ijiiiirs  de  plusen  pins  pclit 

ll.-l.'  al.ir-1  irislinci  merveilleux,  incroyable,  unique  de 
votre  guide  qui  est  à  la  fois  pour  vous,  pendant  tout  le 
temps  de  votre  séjour  dans  ces  vastes  déserls,  votre  ro- 
cher ,  votre  ami ,  votre  valet .  votre  chasseur  ,  votre  cuisi- 
nier... souvent  votre  camarade  délit!  (;'estdans  ses  yeux, 
c'est  dans  ses  moindres  gestes  que  vous  aurez  a  lire:  plai- 
sirs de  votre  temps,  succès  de  vos  coups,  syinpalhies  d(- 
vos  chiens,  émotions  inallendues,  bonheur  enfin  de  votre 
existence...  C'est  sur  voire  cocher  que  tout  roule!    . 

(Chaque  chasseur,  nonchalamment  étendu  dans  un  iM'tit 
équipage  à  trois  chevaux,  non  sus[icndu,  des  plus  agrestes, 
n'ayant  pour  uonqiagnie  que  son  cocher,  se-  1..-.I-  -,  -  eara- 
binës  el  son  chien,  destiné  à  lui  rapport,  r  Im.iI.-  p...  .•  qui 
tombe,  va  pa-ser  la,  ainsi  que  nous  lavons  dit,  M'ion  sw 
loisirs   de  q.iinz.' jonr^  a  trois  semaines. 

Dans  h'  ilroil  ili'>  g.'ns  d.'  ces  pays.,,  il  est  généralement 
ailniis  et  rei.ii  que  ,  c'est  dans  celte  position  horizontale  , 
(ju'on  transporte  régulièrement  en  avril  les  dignités  consu- 
laires. 

Si  canintus  sylviis,  sytvœ  siiit  consute  dignœ  I 

Personne,  d'ailleurs,  ne  s'en  plaint!,..  Nos  chasseurs  di- 
plomates en  effet  jinisent  dans  le  s[ieclacle  de  cesvaslesel 
ri.'he-  -..lihi.l.-  .•i.r,.p.'.'i.n.'sde  grands  enseignements  poli- 
ll.|.l.'-'  La  l.l.l',.p|,,.r,..l  la  solution  lie  phi- il  nue  ili'sques- 
li.n.- q.ll  a;jil '1.1  I.'  in.ai.l.'  ..  »  Ici  demain  se  ilisi'iil-ils,  fe 
»  clinmp  (les  batailles! ...  oui,  mais  après-demain  sera  làle 
••  rhanipdesiravailleurs...  »  Et  puis  nos  brillants  diploma- 
tes se  mêlent  aux  pauvres  habitanlsde  ces  déserts,  y  porlcnl 
les  noms  de  pays  grands  et  glorieux...  y  laissent  quelque 
[leu  d'or  dans  dé  misérables  chaumières  qui  Wnissenl  leur 
mémoire  ,  la  terre  qui  les  vit  nallre...  el  puis,  et  puis.  . 
eiilin,  ne  l'oublions  pas,  nos  chasseurs  sont  de  si  liabiles 
tireurs,  que  la  capitale  valaque  n'ignore  pasipic,  pendant 
tout  le  temps  de  leur  absence ,  elle  va  être  régulièrement  ap- 
pr..\isi.  innée,  et  c«(a  j)orco«cricri  «jfraordi'nai'rM,  des  rôtis 
1.-  pi..-  lins. 

I  .  p.ndant  la  chasse  commence...  ileslà  peine  petit  jour. 
(li.iqiie  tireur  ,  parti  sous  la  tutelle  de  son  Roumoun  ne 
sait  |ias  d  abord  où  il  est ,  ce  qu'il  fait ,  où  on  le  mène:  il 
sait  s.'iileiiienl  que,  vers  midi ,  ou  sur  le  soir,  à  un  pointde 
lliorizon  il. ml  son  giiide  a  le  secret,   il  doit  retrouver  ses 


■oinpagn 


eh. 


liienini  .|.-p,.r,.i--.  ni  toutes  habitations  humaines  ;  apris 
quelques  JOUIS  oueïldejà  à  une  trentaine  de  lieuesdesplus 
r.qipnichées. 

Placé,  ainsi  que  votre  chien,  dans  une  douce  position  ho- 
rizontale ,  vous  vous  apprêtiez  à  jouir  dans  un  lé.gcr  som- 
III. 'il  .!.'  h. ni. 'S  l.'s  .'..ns.'.piencesde  la  position,  lors(prii  Ta- 

gilal 1.1. 1.1. '  lie  M. Ire  aulomédon  vous  vous  apercevez 

qn  une  pi.'ce.l.'  gibi.T  est  proche. 

Le  cocher,  cn'effet,  n'a  pas  seulement  un  regard  d'aigle, 
l'oreille  alerte,.,  il  est  bien  clair  aussi...  qu'i/  a  du  nez. 

Domnule!  Monsieur,  vous  dit-il,  uich  ics  le  iepori!  Ici  il 
y  a  un  lièvre!  Le  chasseur  se  lève  amollie,  tout  heureux 
de  penser  que  la  chas.se  commence,...  et  régulièrement  il 
ne  voit  rien  du  tout!  car  le  lièvre,  dont  la  couleur  se  con- 
l'on.l  exaclenicnl  avec  celle  de  la  terre  ou  des  vieux  débris 
il.'  \.'u.'i,.ii..ii .  est  admirablement  tapi,  que  dis-je!...  il  est 
cl..ii.'il,iii>  M.ngile, 

Vous  commencez  à  exprimer  tout  votre  désappoin- 
tement au  cocher ,  qui  vous  lance  un  regard  de  mépris 
et  qui  .  tout  en  continuant  à  vous  indiquer  le  lieu  où  gil 
l'ennemi,  se  met  à  faire  tourner  sur  eux-mêmes  équipages 
et  iliev  aux  .  jusqu'à  ce  qu'après  avoir  fasciné  et  enveloppé 
laniinal  par  un  cercle  maaique,  il  arrive  avec  l'une  des 
idiics  de  devant  jusque  sur  les  oreilles  du  patient  Le  Roii- 
moun.  alors,  vous  conseille  de  le  tirer  .  et  dans  la  tète; 
c'est  ce  qui  lui  |iarail  le  plus  logique  au  double  pointde 
vue  de  la  charge  ii  économiser,  et  de  la  peau  a  ménager,  la- 
quelle doit  ('Ire  rendue. . .  Mais  vous  étestléner.'iiv ...  d'aulanl 
mieux  .pie  vous  n'aïu'rcevez  rien  encore:,,  bientôt,  toute- 
fois, vous  allezjonii-  d'un  spectacle  ineffable... 

Le  Roumoun  ,  parfaitement  impatienlé  de  votre  inexpé- 
rience et  qui  connaît,  lui.  touleslcs rubriques  de  l'ennemi, 
vous  fait  lout-à-coup  signe  de  descendre...  il  descend  avec 
vous...  puis,  prenantsonfouel.il  le  claque  à  loiir  de  bras... 
Cesl  alors  seulement  que  vous  comnieniez  à  voir  le  lièvre: 
vous  êtes  d'autant  plus  confondu  de  la  scène  donl  vous  êtes 
rendu  tcnioin.  qu  a  chaque  coup  de  fouet,  l'animal,  au  lieu 
de  quitter  son  gile  s.'inble  entrer  plus  avant  dans  la  terre., . 
cl  a  celle  quesl  ion  :  (lie  face?  Qm'  fais-tu?  leRoumour,  im- 
passible, vous  repond,  mais  en  ayant  bien  soin  de  claquer 
toujours:  «  Monsieur,  c'est  un  vieux  lièvre:  le  bruit  de  mon 
»  fouet  lui  fait  croire  à  la  pirsence  des  lévriers...  cl  il 
»  mourra  plutôt  sur  place  que  de  prendir  la  course .  au 
»  lioul  de  hupiclle  il  sait  le  .sort  inévitable  qui  l'allend.  . 
L'inb.'Iligencede  la  pauvre  bêle,  alors,  vous  louche  au  point 
que,  loin  de  vouloir  la  tuer,  vous  lui  faites  la  \  ie  sauve,  en 
lui  cnjoignanl.iin  début  de  sa  coui-se  que  vous  pnnoquez 
d  lin.'  m.iniere  ou  il  autre.  A  aller  pcupterle  steppe  de  gail- 
lards aussi  iniclligenis  .. 

Le  Honnionn  .  peu  ravi  de  voire  excès  de  philanlhropii'. 
remonte  a  sa  place,  vous  à  la  votre,  vous  regaixle  d'un  aird  • 
parfait  dédain  mêlé  d'un  atroce niéconlenlement .  el  cepen- 
dant vous  l'ait  signe  de  vous  préparer  à  des  émotions  nou- 
velles /)omni//c",ai'r/i.' Monsieur,  p.nr  ici!  vous  dit-il:  vous 
regardez.  .  mais,  cette  fois-ci,  vous  voyez  bien  moins  que 
l'autre,  car  il  s'agit  d'une  outarde  pi'/ij.  e'esl-à-iiiro  fOMcArV, 
iC'esl  même  du  mol  valaque  pitil  que  nous  avons  fail  le 
mot  français  peut,  couché,  qui  se  fait  ;)f/i'f,donl  l'élvmr- 
lo!;ie  n'cxisL'  dans  aucune  des  lamiucs  mères  de  la  noir,  . 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVKRSEN. 


11 


Vous  o\|iriine/.  |inr  une  panloiiiiuie  iilfrouso,  et  toujours  ho- 
rizontale que  vous  voudriez  bienvoir,  liir  voire  fusil  de 
Lepago  osl  nicrvcilleusemcnlcliargc,  la  poudre  est  du  Lon- 
dres, In  capsule  brijlanle,  mais  dàidéineiU  vous  ncvoyez 
rimda  tout!.-  . 

L'i  iiuipaïe,  alors,  commence  a  tourner  sur  lui-même, 
nuand  eniin  ,  au  beau  milieu  d'une  touffe  d'herbes  scelles 
vous  vi)\i'z  crfi'clivenient,  rasé  p:ir  terre,  un  oiseau,  iirand 
comnic  'iinr  jiiliiulie,  qui  vuii<  i ciarde  d'un  air  bienveil- 
lant cl  ilnuv  :  Mille  .iiiic  s  aUriiilrit,  car  le  Roumouu  vient 
do  vous  r  peler  de  tuer  dans  lu  lilc.  Non,  vcms  vous  levc^z. 
l'oiseau  en  fait  autant...  niai>  :iu  Innil  .illrcuv  ipie  son  vol 
produit,  il  la  poussière  qu'il  siiiilr\c,  ;i  I  niuiiinn  ipi  il  vous 
donne,  vous  tirez  avec  un  fivinis.M'niciil  sjiis  |i:iivil,  et  bien 
qu'a  vini;l-cinq  pas  de  lui ,  vous  ne  lui  enlevez  seulement 
pas  une  plume. 

Le  Rounioun  se  rasseoit  près  do  vous  avec  une  expression 
inouie  de  déconsidération  pour  votre  personne,  et,  tout-ii- 
coup,  il  un  signe  qu'il  a  vu  il  l'horizon ,  il  met  réquipaa;e 
au  grandissime  galop.  Les  secousses  atroces  auxquelles 
vou.s  êtes  en  butte  vous  portent  naturellement  k  deviner 
au  moins  de  quoi  il  s'agit;  vos  armes  se  choquent  entre 
elles,  le  chien  grommelle  ;  on  croirait  qu'en  proie  ii  une  vi- 
sion VuImIc  au 'milieu  de  ces  grandes  solitudes .  chevaux  et 
thasN'iii^  -r  «nilrnl  irrésistiblement  emportés  par  le  vnisi- 
naccilr  quelque  deuion  ;  mais  non,  «  c'est  un  énorme  louji 
«q'ïii,  celle  lois,  s'est  levé,  vous  dit  votre  guide,  a  cin(] 
..  cents  pas  devant  vous.  »  Un  éclair  de  jubilalion  illumine 
la  phvsiononiie  de  votre  guide;  la  marche  de  l'équipage  se 
ralentit,  vous  vouiez  vous h-asarder à  voir,  tout  a  disparu... 
le  hiup  s'est  lapiconlre  terre.  ^ 

Yuusdire  alors  lesjoies  de  votre  Roumoun,  ses  agitations, 
.ses  gestes  ^loul  cela  cependant  très  silencieux] .  ce  serait 
prélendr(^  saisir  au  daguerréotype  un  galop  du  grand  bal 
de  l'tlpér.i  un  jour  où  Musard  le  dirige. 

C'est  maintenant  qu'il  va  falloir  ajuster  la  victime  dans 
la  iéte ,  la  pantomime  de  votre  compagnon  vous  l'indique  ; 
puis  il'se  signe,  il  jette  ii  l'ennemi  tous  les  sortilèges  qu'il 
connaît.  Survient  enfin  l'inévitable  Domnule.aich!  et  l'e- 
(luipage  commence  à  tourner. 

Je  vois  tout  d'un  coup  (car  enfin  je  dois  le  dire,  c'est 
l'histoiie  de  mes  premières  heures  de  chasse  aux  stejipes 
(lue  je  décris...  de  mes  chasses  it  moi,  qui  arrivai  il  ac- 
(luérir  lii  une  vraie  renommée),  je  vois  tout  d'un  coup  une 
énorme  béte  couchée  tout  de  son  long  dans  l'herbe.  Mais, 
au  poil  enlierementblanc  quila  couvre,  mevoilii  convaincu 
quiMc  n  csl  pas  le  loup  que  je  vois,...  que,  la  fatigue  l'ayant 
etounliment  delerminé  a  prendre  place  dans  le  voisinage 
de  quehuK!  troupeau;...  me  voilà  convaincu  que  l'animal 
que  j'ai  lii  sous  mes  yeux  n'est  que  la  plus  belle,  la  plus 
inoffensi\e  des  génisses.  Erreur  grossière ,  mirage  impar- 
donnable! je  suis  en  présence  d'un  vieux  loup  tout  blanc, 
l'eiTroi  des  patres  transylvains,  connu  dans  le  steppe  par 
mille  batailles  rangées  contre  les  plus  belles  brebis  de  la 
noblesse  d'Hermanstadl  ! 

11(111  naxsaii,  (|ui,  lui,  voudrait  avoir  la  foudre  on  main, 
pduriiKîla  !:iiicer  d'abord,  puis  pour  suppléer  il  mes  h  si- 
latioris,  a  mes  relirds,  se  pr  pare  il  me  battre,  si  décidé- 
ment je  ne  lais  pas  preuve  cette  fois  de  plus  de  discerne- 
ment Vt  d  habileté.  Je  me  lève  donc  tout  debout  sur  la 
charrelle  ;  a  ma  vue  l'animal  s'enfuit;  je  prends  ma  cara- 
biiKi  (le  Itenette,  et,  à  soixante-dix  pas,  une  balle  dans  lé- 
iiaule  droite  fait  rouler  parterre  le  Nestor  des  loups  avec 
un  bruit  horrible...  Mon  chien,  qui  ne  sait  pas  de  quel  gi- 
bier il  s'agit ,  saute  de  la  voiture  pour  aller  ramasser  la 
pièce  tombée.  Le  Roumoun,  auquel  mon  coup  triomphal  a 
rendu  tous  ses  sentiments  naturels ,  nie  crie  de  ra[ipeler 
mon  chien,  que  le  loup  n'en  va  faire  qu'uni-  liom  lii'c  .Mais 
dt^a  la  senteur  fauve  de  l'énorme  loup  a  pend iv de  leiicur 
mon  chien,  qui  vient  reprendre  sa  place.  .\nii>  ii.iii>  cip 


après  avoir  fait  le  bonheur  et  la  fortune  de  mes  anciens 
unis  de  Tamadéo  ,  et  riches  eux-mêmes  des  plus  di\ertis- 


sante  souvenirs  de  sport  qu  on  puiss 
Europe  ! 


avoir  aujourdhui  en 


Des  fermes-écoles. 


el  mis  en  \alcuc  un  domaine  de  laiules  de  000  licclaics.  On  ne 
dira  pas  (pie le  Iravuil  a  iiianf|U(i. 

n  Voyous  d'apri-s  cela  quelles  s(-roiil  les  receltcs  el  les  dispenses 
d'un  jeune  upprcnli  dans  une  furme-école. 


rrilurc. 


loj;emenI,    blaiicliis^oRe,  ù  80  cent.  202  fr. 
enlrelicn ^-^ 


P" 


eluins  alors  doucement  et  prudemment  du  teriain  ou  la 

ctiiiie  se  débat  contre  la  mort:  pour  moi,  je  me  réjouis 

•  dans  une  seule  minute  toutes  mes  écoles  de 

l'snérance  vaine'  le  vieux  loup,  ipii.  on  mor- 

,.|  en    1,1   n.nlinl  il.ili>  la  pnl,,.iere    a   el.inché 

,,,;i,.|,ecie,ili-K    ^nii  allieii-eMe-iiiv    irineild 

i  111,1  pl;ice,  I  e.|iiquige  le  g,ilu|i,  et,  a|)ies  plus 

de  trois  heures  (lu  plus  lanlasli(pie  sleeple  chose  (chasse  aux 


Idcheis'  sans  rlorhers,  j'arri 


la  halte  du  soir  où,  dans 
mon  paysan  raconte  il 
me- iiiiiii'.iL'niins  de  rli-i--i'  d  ''n  l'i'i'sence  de  moc/caiîs  (les 
ii.dre-  ir,  111- \  l\.  1111^  '  qui  reeuuliiii ,  eiimnie  une  légende  du 
boa  Mcuv  leiiips,  1  Itisliiirede  miin  luiip. 

.^joutez  a  ces  émotions  tout  le  charme  de  cette  vie  aven- 
tureuse et  il  ciel  ouvert,  les  récits  de  vos  compagnons,  les 
hasards  d'une  chasse  abondante  et  variée ,  les  ouragans  et 
1rs  irombcs  qui,  de  la  manière  la  plus  inattendue,  se  for- 
ment autour  de  vous  comme  au  sein  des  mers,  les  grandes 
miL'iatiiins  de  tous  les  oiseaux  d'Europe,  les  histoires  des 
bn'û.iniK  \eiiiisla  la  veille  el  dont  on  voit  encore  les  traces, 
les  .'iiinii.Mi-  qiK^  VOUS  donne  souvent  la  nuit,  dansées 
iiraiiiie^  Milihiiles,  le  passage  fréquentde  loups  enragés  qui 
metlcnl  parfois  en' moins  d'une  heure  plus  de  quarante  pi^r- 
sonnes  hors  de  combat;...  et  puis,  ayez  soin  d'ajouter  eiilin, 
les  doux  revers  de  médaille...  le  retour,  après  tanl  de  jours 
de  votre  vie  de  Mongol,  vers  quelque  riche  village  ou  vos 
chasseurs  vous  prient  de  permettre  qu'ils  conmiandent  le 
bal  joyeux,  bruvant,  pittoresque,  au  milieu  du(iuel  vous 
retrouvez  et  les  danses  romaines  des  prêtres  saliens,  et  les 
pas  belliqueux  el  nobles  des  guerriers  du  moyen  âge...  H 
ces  recils,  tout  rapides  el  ni-gligés  qu'ils  sont,  pourront 
l'ouniir  il  plus  d'un  lecteur,  et  notamment  ii  de  jeunes  et 
riches  .Vnylais,  l'inspiration  nécessaire  [unir  aller  aussi  au 
loin  yiiùtiM-  ces  plaisirs...  tenter  ces  curieuse,  ;i\eiilures. 

Combien  d'entre  eux,  en  effet,  qui,  s  ils  pouMiienl  soiqi- 
eonner  l'attrait  de  ces  chasses  des  steppes  moldo-valaques, 
arriveraient  dès  la  fin  de  mars  dans  le  Danube,  montés  sur 
leurs  élégants  jackts,  pour  n'en  repartir  que  deux  mois 


Nous  avons  rempli  un  devoir  en  fournissant  quelques  do- 
cuments qui  sont  de  simples  faits  recueillis  sur  la  (piesli(in 
de  l'aiiprentissage  agricole  (voir  le  n"  du  M  août  ISi.S', 
afin.reclaiier  lé|,inm„piil,li,|iie;u,iiill,i(li-.eii.M(in  ;i  1' \s- 

SOmblee  NiillS  ;i\nn,  eile  ,|llelqiie-i  elulllv-  1M11|  iMl  nies  ;i 
M.  (le  (.:iS|i:inn  (11. m  le  lloni  liill  ailhinle:  M  .lllle- HielTel  , 
dont  le  savoir  et  l'expérience  méritent  une  égale  conliance, 
proteste  contre  l'exactitude  de  ces  calculs  :  comme  nous 
cherchons  avant  tout  la  vérité  et  le  bien  du  pays  ,  nous 
nous  empressons  de  lui  ouvrir  nos  colonnes, 

0  Bien  des  fois,  en  lisant  Vlltuslrnlinn,  j'iii  su  Rféil  rc  journpl 
de  nous  eiilretciiir  d'agricullure.  C'e^t  oirrii-  la  connaissance  des 
choses  rurales  ù  une  classe  de  leclcuis  qui  n'y  auraient  proba- 
blement jamais  pensé  sans  cela.  J'ai  surtout  lu  avec  un  vifin- 
lérôt  tous  les  arlicles  portant  la  signaluce  de  M.  Saiiil-Genuain- 
Lcddc.  Mais,  enfin,  tout  le  monde  ne  peut  pas  aller  i  f.orinlbe, 
cl  M.  Sainl-Germaiii-Lcduc  ne  peiil  pas  tout  savoir.  Je  lui  de- 
mande donc,  au  nom  de  la  sympalbie  que  j'ai  toujours  éprouvée 
pour  lui,  la  permission  de  l'éclairer  quelque  peu  (1  l'endroit  des 
fermes-écoles,  où  son  cxrellenl  esprit  a  fait  fausse  roule  par  man- 
que de  connaissances  spéciales. 

n  M.  Sainl-Germain-Lediic,  en  parlant  de  l'apprenlissaîîe  aRri- 
cole  dans  I  lUusIrali-ii  du  5  eouraiil,  nous  cile  trois  exemples 
d'insiitulions  de  jeunes  apprenlis,  dans  lesquelles  l'enlrelien  cl 
l'instiuclion  de  ces  jeunes  gens  coûleraicnl  moins  cher  que  dans 
les fermes-iicoles, projetées  par  le  niinisliede  l'agriculluie. 

»  Eli  bien,  je  n'Iiôsilc  pas  à  dire,  n]ircs  dix-huit  minées  d'ex- 
périence dans  la  direction  d'une  fcrmc-rcule,  qu'il  est  impos- 
sble  de  prendre  une  mesure  générale  de  ce  genre  en  France, 
d,ins  des  conditions  autres  que  les  conditions  adoptées  par  le 
ininistie. 

»  Dans  les  premières  années  de  ma  direction,  j'ai  fail,  mol  aussi, 
comme  M.  Balson,  lequel  ne  compte  pus  le  lait,  ni  le  logement, 
ni  la  boisson,  ni  les  livres,  et,  dans  mon  enthousiasme,  je  disais 
comme  lui:  «On  va  loin  dans  ce  genre  avec  une  guinée.  • 

I)  Mais  c'est  lu  de  la  charité  chiclienne,  ce  n'est  pas  une  insli- 
lulion  que  l'on  puisse  généraliser,  et  la  preuve,  c'est  que  pres- 
que rien  n'a  été  fait  en  Krancejus(|u'iiu  jour  où  le  gouvernement 
s'c-t  décidé  ù  avancer  lui-même  quelques  fonds. 

»  M.  Turck,  cite  par  M.  Saint  Geimoin-Lediic,  fait  de  la  cha- 
rité, ou  s'il  renonce  à  la  charité,  je  soutiens  qu'il  ne  pourra  pas 
marcher  dans  les  conditions  indiquées. 

1)  A  Hohenlieim,  le  bon  marché  de  la  vie  et  l'adjonction  de 
l'inslilul  pcrmcllenl  seuls  une  marche  normale.  M.  S.iiiil-G(T- 
maiu-Leduc  nous  dit  lui-même  que  les  jeunes  apprentis  de  llu- 
benhcim  Irouvent  ù  se  nourrir  moyennaiil  soixante  centimes 
par  jour.  J'ai  vainement  tenté  ù  Grand-Jouau  riiistallalion  d  un 
aubergiste  dans  le  genre  de  celui  de  Hohenlieim,  divers  essa  s  mit 
été  fails,  mais  on  a  successivement  renoncé  à  65  cenlimcs,  ù  70. 
a  75;  on  me  demande  aujourd'hui  qaaire-vin^jts  ccifimes  par 
jour  cl  par  létc. 

n  On  sait  que  M.  Ridolfi  s'est  retiré  après  un  sacrifice  de 
40,000  francs  qu'il  a  dit  ne  pas  regreller.  Je  comprends  cela 
pnrriiilciiienl.  Un  cœur  généreux  peut  soutenir  à  ses  dépens  une 
création  donnée  pendant  longues  années  ;  mais  ce  n'est  pas  là  une 
instilulion  normale. 

»  Il  y  a  déjà  huit  années  écoulées,  j'ai  publié  une  note  dans 
r  Agriculture  de  l'Ouest  où  je  provoquais  les  comptes  de  l'école 
d'iiollwil  cl  où  je  soutenais  que  l'école  ne  payait  pas  ses  frais. 
Personne  ne  m'a  répondu. 

»  Après  avoir  parlé  de  la  dépense  principale,  car  il  y  en  a  en- 
core d'autres  dont  nous  parlerons  plus  loin,  il  faut  voir  les  re- 
celtcs. 

M.  Sainl-Germain-Leduc  évalue  la  journée  de  l'ouvrier  agri- 
cole à  1  fr.  61  c.  cl  conclut  pour  celle  de  l'ouvrier  de  18  ans,  âge 
moyeu  d'un  jeune  apprenti,  ù  I  fr.  40  c. 

»  Il  y  a  d'abord  une  première  erreur  à  reclifier,  c'esl  que  ."ou- 
vrier agricole  qui  gagne  1  fr.  61  c.  travaille  douze  et  quatorze 
heu res^p.ir  jour  L'élève  d'une  ferme-école  ne  travaille  que  .se|il 
à  huit  heures  par  jour.  Le  lele  du  temps  est  consacré  à  l'ctnile. 


Mobilie 
Libres,  plumes,   papier.  . 
Médecin,  médicaments,  so 
Véle(nents  el  récompenses. 


Travail,  2  il  journées  il  50  cenlimcs. 
Indemnité  de  l'État  au  directeur.  . 
Don  de  l'Étal  à  l'apprenli.  .  .  . 
Perle 


402   Ir, 


Eupii 


lit  le 


el  du 


l.cilii 
■  f.Kit  il  snpp( 


.1  a  ccl 


del'hoiiu 
[■si  la  seeoi 


le  Irai 
le  fait. 


hiirro  de  M.  .Saiilt-Gcr- 
iière  <|ue  90  c.  ù  compter;  en- 
du  jeune  lioinnie  soit  propor- 


n  Mais  la  est  la  seconde  erreur.  Quiconque  a  bien  observé  les 
hommesfails  cl  l,s  jeune-  gens  dans  les  travaux  d'une  exploitation 
rurale,  y  a  ccrlaincmenl  trouvé  une  énorme  dilTcicnce  an  poinl 
de  vue  de  la  production.  Quand  il  n'y  a  qu'un  ou  deui  jeunes 
gens  au  milieu  d'un  groupe  d'hommes  d'un  ûi.-e  mûr,  la  dilfe- 
reiice  n'est  pas  lies  sensible;  elle  le  devient  énormément  dans 
le  cas  contraire,  c'est-ù-dire  quand  il  y  a  un  ou  deux  hommes 
f.iits  au  milieu  d'un  groupe  de  jeunes  gens.  Au  poinl  de  vue 
unique  de  la  production,  je  préfète  dix  hommes  de  treille  ans  à 
vingt  ieunés  gens  de  dix  huit  ans;  el  les  premiers,  au  bout  d  une 
année,  anroul  lait  plus  d'ouvrage  que  les  seconds,  cl  la  besogne 
sera  mieux  faite. 

■    '    ,1,  est 


n  Ce  que  je  dis  ici  des  jeunes  ouvriers  agricoles  en  général,  est 
encore  bien  plus  vrai  quand  il  s'agit  d'appreiilis.  Après  mut  n'.  n 

esl-il  pas  ainsi  dans  loules  les  classes  de  la  société  ?  L  liumi e 

est  la  même  partout,  .1  Dieu  nous  a  faiis  tous  égaux  bien  avanl 
h,  république.  Con.p.uez  le  travail  el  la  manière  de  vivre  d  un 
éludianl  de  dix-huit  ans,  avec  le  travail  cl  la  mauicrc  de  vivre 
dnn  homme  de  Ireute  ans,  ayant  reçu  a  même  éducation  pre- 
mière. 

„  Par  tous  CCS  mntifs  el  d'autres  qu'il  serait  véritablement  lr(ip 
long  de  détailler  ici,  je  pose  en  fait  qu'on  ne  peut  pas  évaluer  1., 
iournéc  d'un  jeune  apprenti  agricole,  ûge  de  dix-huil  ans  dans 
'les  conditions  que  j'ai  éaiis.^s,  à  plus  de  50  ecnUincs.  ht  re- 
marquez bien  que  chez  moi  les  jeunes  élevés  ont  eu  lonjours  ■- 
travail  des  plus  sérieux,  puisque  c'est  a 


i>  Tels  sont  les  chilTres  réels;  et  celle  peilc  de  fr.  31  50  est  le 
stimulant  du  directeur,  soit  pour  bien  faire  travailler  les  jeunes 
gens,  sod  pour  trouver  un  plus  grand  nombre  de  jnurnées.  J'ai 
pris  le  nombre  de  jours  donné  par  M.  Saint-Gcnnain-Leduc, 
mais  je  pense  qu'on  peul  l'augmenter;  de  luèiiie  qu'avec  beaii- 
coupde  soins  et  de  peines,  on  peut  ariivcr  i  ne  pus  éprouver  de 
déficit. 

»  Maisces  chilTrcs  expliquent,  d'un  autre  coté,  pourquoi  plu- 
sieurs directeurs  de  fermes-écoles  ont  trouvé  que  rinilenin  lé 
de  fr.  175  était  insunisanlc.  J'ai  soutenu  dans  \fJournol  d'nijr  - 
culture  pr  tique,  n'  dedécembre  18!i7,  que  c'étaitlii  lechiffrc  lé- 
rilable,  et  le  minisln  l'a  maintenu  avec  raison. 

»  Si  je  ne  craignais  pas  de  trop  allonger  cet  arlicle,  je  dirais  eii- 
coreà  M.  Saint-Gerinain-Leduc  que,  dans  le  projet  du  ministre, 
le  nombre  des  élèves  sera  lonjours  proponionnê  ù  l'étendue  de 
l'exploilatioii.  Je  lui  prouverais  qu'il  se  trompe  élrangemeiit  en 
disant  que  les  jeunes  apprenlis  seront  l'élite  de  la  population  ;  el 
(|u'il  se  trompe  encore  eu  croyant  aux  nombreux  avanlagis 
qii'apporlcronl  les  prorc-sscurs-adjoiiils  Le  seul  bénéfice  clair  et 
iicl,  ce  sont  lesfr.  2,400  d'appoinlemcnls.  Mais  en  vérité  esl-ce 
Irop?  Vous  ne  savez  pas  toute  la  responsabilité  qu'assume  le 
directeur  d'une  ferme  école,  et  tout  le  travail  auquel  il  est  as- 
treint s'il  veut  agir  consciencieusemenl.  Celui  qui  écrit  ces  ligues 
n'a  pas  pu;  depuis  vingt  années  d'absence,  revoir  sa  rjiiide, 
parce  qu'il  lui  faudrail  quitter  sa  ferme  pendant  un  temps  impos- 
sible ù  trouver. 

.  Dans  un  autre  ordre  d'idées,  je  dirais  de  plus  que  le  momcnl  est 
venu  d'honorer  el  même  d'enrichir  tous  les  hommes  qui  sevouenl  à 
l'ao-ricuHure.  Offrez  leur  des  places  nombreuses  dans  les  cam- 
pr"ues.  Comment  voulez-vous  que  les  intelligences  s'élèvent  dans 
uire  rude  carrière  qui  ne  mène  à  rien,  ni  à  la  gloire,  ni  aux  hon- 
neurs, ni  à  la  fortune.  Aussi  dès  qu'un  paysan  a  quelque  instruc- 
tion, il  fuit  vcrsla  ville. 

»  Le  projet  de  M.  Tourrct  en  faveur  de  l'enseignement  profes- 
sionnel de  l'agriculture  csl  un  pas  immense  vers  un  ordre  de 
choses  nouveau,  et  la  presse  entière  devrait  soutenir  ce  (u-ojcl  à 
cause  de  ses  tendances  agricoles  cl  sociales.  La  royauté  a  tout  fait 
pour  atlirer  la  noblesse,  la  r  chessc,  l'iiilelligence  dans  les  villes; 
il  faut  que  la  République  relourne  le  mouvem.  ni,  il  y  va  du  salut 
de  la  France. 

D  Jules  Uieffi'.l.  » 


Ouverture    de    In   durasse    «léniocpraticuie 
tiniis  Ira  forêt  de  Suiiit-fteraiirain. 

Oui  ne  connaît  cette  majestueuse  terrasse  ,  célèbre  d'un 
bout  à  l'autre  de  1  univers  civilisé,  du  haut  de  laquelle  I  œil 

embrasse  un  des  plii>  beaux  poinis  de  vue  du  monde?  Qui 


.Mil 


ne  s'est  sur|iV 

(|ui  Idmbragent,  re\,iiil 

l-'ayette,  ou  a  Louis  XIV  el  a  l.i  leiidn 

évoqué ,  le  soir  il  la  clarté  amoureuse 

voilée,  les  ombres  des  beaux   geiilil; 

(■■eiiiilés  ,  murmiinint  des  paroles  | 


rlin 


1.1   1 


eiiiliipies 
La 


plu.    ,11.1,1 

l„larm;,l,les.  |",eles, 
il  Paris  toute  laimee 
saut,  il  n'existe  pecM 
pèlerinage,  sa  C(„n> 
sur  la  majestueuse  le 
Quant  au  chiteau 


le  l'i 


'  V( 


lient  en  pas- 
eursion  ,  sou 
■r  champêtre 

sformé  en  pénitencier  militaire  . 


\  tout  au  plus  s'il  existe  à  l'état  de  souvenir . 
n'est  ini',avec  une  diniculté  extrême  qu'on  peut  ree- 


1  cstini  .avec  uneuniicune  uwieon;  >iu  "■■  [-i'" ■ ^. 

hisKiire  de  son  passé  en  leparcom-anl.  Une  espèce  de  geo- 
ier  vous  v  montre  bien  encore  le  cabinet  d'.\iine  d  .\utri- 


:  eux  que  j'ai  défriclié 


I 

elle  ètTonitoirëdë  ïa^'reîne'd'.Vnglelerre  .  femme  de  Jac- 
ipiesll;  mais  dans  les  pices  (|i.  .u,  v,,,,-  Mgiiale  par  c(s 
indications  pompeuses,  on  ii.'  i,.,.!.,,.,,!  p,.  \.,lonliers  l  ,i-- 
sile  favori  delà  femme  la  plus  elei^miede  >-,.,  temps,  dont 
Mazarin  disait,  un  peu  indiscia-tement  peiil-elre  ,  ipuj  son 
supplice  en  purgatoire  consisterait  a  (■oiiclierd.nis  do  draps 
d(,  line  toile  de  Hollande  ;  et  on  se  demande  si  c  elait  bien 
(1  ii,s  cet  humide  el  odieux  caveau  que  venait  prier  cotte 
,,,'., ,ie  ,.i,,-erile  ,li'V,uil  h-s  iiir,„lunes  de  laquelle  s'était  iii- 
,.1„„,,  I,,  ,„,i,esle<lu  plus  t:,Mml  el  du  plus  herde  nos  rois 
Mais  si  le  château  de  Sainl-Cei-main  a  siili,  les  imlrages 
des  hommes,  ces  aveugles  auxiliaires  du  le,,ips,  il  i,  en  est 
pas  de  même  do  sa  magi,,liq,ie  lorél,  -\iiires  seeul.ures: 
lonsues  avenues  allant  se  perdre  (Uns  des  Imnlain.  vapo- 
reux ;  ndrailes  u,vsl('M-ie,i-r- :  |.aMll.„,s  e,,q,„is  ou  le  ren- 
dez-\o,H  (le  chasse  ne  l,,i  m  -",i\e,il  q,"'  ie  pret(-xle  du 
rendez-vous  d'amour  ;  vieux  div-eois  ,pii  tressaillirent  peut- 
être  en  écoutant  les  savants  accords  de  la  trompe  de  Char- 
les IX,  ce  maître  en  vénerie ,  tout  a  été  respecte  au  mi- 


L'ILLUSTRATION,  .lOLRNAL  LMVF.RSLL. 


Iu;u  des  péripctios 
(1(>  l'histoire  dp 
iioàsoi\:into  der- 
nières années,  et 
le  parc  immense 
de  Saint  -  Ger- 
main reste  tou- 
jours un  des  pins 
he.nu  llriiniTisd,. 

(■|.||C  I   ..IlIMnillMll' 

vu'illc'S  rnriMsi|iip 
lEurope  envie  i 
la  France. 

Toutefois,  ce 
merveilleux  état 
de  conservation 
eut  cessé  d'exister 
a  dater  de  cette 
année  .  s'il  ne  se 
fiittrouvéunliom- 
inedinli'IliLTccri 


le.-  1,1 
d'un. 


rllel. 


nel^-  , 


spirees 
liarlesperpelnels 
lii'Sdins  d  ari;en'., 
()u  éiirnuvc  notre 
économe  Uépu- 
liliijue.  La  forêt 
deSaint-Gennain 
a  \  u  son  droit  de 
chasse  mis  en  ad- 
jiidicalifin  le  Hdu 
niiiis  dernier.  Lo 
cahier  des  char- 
ires  la  divisait  en 

trois  lots,  clause  démocratique  s'il 
en  fut ,  car  il  suffisait  de  la  coalition 
de  trois  marchands  de  \iil,iillr  pour 
faire  toniher  entri'  \r-  in,i;H>  ilr-  >:'i- 
Luenrs  de  la  Valh;-  h-  i„)M  do- 
iii;iine  dont  nous  a\ons  lait  I  lll^lori- 
((ue  en  ipielipies  mots.  M.  l.éon  lier- 
Ir.inil  directeurduyournnfdM  Chas- 
snirs,  s'est  in<lii;né,  en  noble  fils  de 
■•^ainl  Hubert  qu'il  est,  à  la  pensée 
de  cette  profanation  .  et ,  sans  con- 
idl(<r  persoiuie  .   sans  appeler 


.-nll  ,    U 


cul  ,    ni 


-1   rendu 


ipie  a\riiliireii.-ienieiil  .  .i(l|iHlii:il.nre 
de  la  forêt  de  S.nnl-iici  in.nn  .  .ni 
uioyendelasûumis-Hin-nr,  c--i\i'(les 
trois  lots  ,  ainsi  renni>  d.ni-  iinr  srnh' 
main,  Otte  première  victoire  oblenun 
cl  eheiement  achetée  ,  M  l.éon  lier- 
tranil .  fermier  pour  neid'années  d  Un 
des  pins  beaux  domaincsde  France,  a 
.11  I  hi'ureuse  idée  d'y  fonder  un  club 
ili'ichiisxriirs  pour  sauver  la  science 
de  la  vénerie  du  vandalisme  do  nos 
mœurs,  comme  il  avait  sauvé  la  foriH 
de  Saint-Germain  de  relui  de  la  spé- 
culation ,  11!  plus  implacable  de  tous 


t    Muette    d  ns  U  lo  et  de  -^•llnt-Ge  ni 


sans  conir.-dit 
Le  Club  des  chas- 
seurs, en  partie 
constitué  aujour- 
d  liui ,  se  réuni- 
ra pour  la  pre- 
mière fois  le jeudi 
7  seplenibre.  et 
fera  l'ouverture 
de  11  rh'i'is''  .i 
tir  .1  1  is-uc  (I  un 
joMux  dijiumr 
pu  doit  ivoirin  u 
lu  paiilliin  delà 
Muille  rldiiiiu- 
-  lui  it  ilii  n  ^- 
liiK  111  (ciitn  de 
Il  f  ri  t  (  i  SI  ra 
la  (juc  se  ri*- 
si  inbltronl  deux 
I  IIS  |i  ir  M-m  une, 
du  1"  s(pum- 
bn  au  1"'  mars. 
Il-  'OCHliire*  de 
.Saint -Oernuiin  . 
souslapri'-sidena? 
de  .M.  Léon  Ber- 
trand .  fondateur 
du  club. 

IJu   f.'ibicr  en 
abondance  .   une 
meute  excellent»- 
pour    la    chasse 
a     courre ,    une 
l'Onnelablcà  bon 
marché,   la    CJ- 
n:aradeiie    noble 
et   facile. d'hom- 
mes   bien     cli*- 
vés.  des  moyens 
de  transport  d'une  promptitude  pres- 
que fabuleuse,  tels  sont  les  avan- 
ta'jes  que  nous  avons  été   il  même 
de  constater  en  examinant  les  statuts 
d  une  entreprisedoni  nous  ne  saurions 
trop  louer  l.i  i>ens  cet  l'exécution. 

L  un  de  nos  dessins  représente  le 
pa\ilinii  de  la  .Muette,  au  iiiomenl=du 
ili  part  dis  Micii  laires  et  de  leurs  amis 
piuir  l.i  chass,-  a  lir  du  jeudi  7  si!p- 
lenilirr:  le  Hcond  donnera  une  idi'c 
de  ce  que  -eront  les  rcndez-vous  de  la 
ch.isse  a  courre  lorstiue  quarante  vig- 
ueurs, revêtus  d'un  costunVe  élépanl 
et  uniforme,  s'élanceront,  il  la  suils- 
d,'  livnlr  iliicns  nM^nifiques  Ci  ex- 
irll  m-  -Uf  le-  II. in  -  iliin  su|x'r!>e 
ili\-ri.i ,.  (  iiliii  M'iliv  linisleme  plan- 
clie  ninnlicr.]  k>  N.iiiiipieurs  du  jour. 
oubhant  leurs  l'alii;ues  et  buvant  ii 
Il  iirs  sucées,  dans  le  vast?  salon  du, 
pa\illoii  de  la  Muette  d'oii  l'on  aper- 
çoit Tint  rieur  de  la  salle  ii  inanjier. 
que  la  presse  parisienne  doit  être  in- 
\  itée  il  inaiisiurcr  samedi  2  s;'pteinbre 
par  un  brillant  dijeuiicr  servi  dans  1.-" 
n  yjl  pavillon. 

M  '  fT.  FnpfR.is 


.-'/V.>.--^-.~    ~   "  . 
S.1I0D  du   Pavillon  de  la  Muette 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


i:i 


Algérie. 

COLOMSATION     PAR      L  LTAIlI.ISSKMKNr     DE     ri*::MTF.NClKRS     Fr.RMES- 


M.  Alexandre  Bouiln,  nrcliilcrli'  iii^'riiii'vu' ,  a  présente. 

au  mois  de  mai,  a  M    li'  inini-h;'  ilc  \:i  ;_■ ic,  un  mémoire 

Mir  la  colonisation  dr  1  Aliici  ic  |..ii   l.i  niMUon  de  colonies 
pénitentiaires,  agricoles,  iiulustnelles  el  imlitaires.  ou  pé- 


nitenciers fermes-modèle*,  ("e  travail ,  ré>iill:il  il  ■  ("ii-rien-  I    maines  l'As-ii^nilili':'  nationale  ,  et  méritera   ce  titre   une 
cieuses  invi>slij;ations  pendant  un  voy;i:.''  iti  Aliinic,  e:i      mention  pu  IhuIhiv  chms  l'Illustration. 
18Ki  el  1847,  nous  a  semblé  sortir  dé  l.i  rl.i--  ■  .ihluiaiic         M.  Boiui.i  a  i-u  r>i  p,is  à  faire  ses  preuves  :  il  a  conduit 
des  propositions  dont  le  déluge  inonde  depuis  quelques  S3-  |  lui-même  de  grands  travaux  et  connaît  parfaitement   la 


clas.<e  ouvrière,  l.e  0  mai  dernier  il  avait  remis  au  direc- 
teur des  .■ih'liers  nalionaux  ,  M  Kiiiile  Tliom.is  ,  en  iirojet 
(ror;;ani.<;ili.iii  ,!.■  |(iii>  [■sniuri.Ms  ih'  ImIiiuciiI  [nrliri- 
pidcs  .  ipi  il  s  ciiLj.i,^!':!!!  a  diri,^ri'  Mir  Ir-  i!r|i,ii  icincnls  ijui 
manquaient  de  tel  ou  tel  corps  d  état,  et  piiucipalrinrnt  sur 
IWlgérie ,  où  tout  est  a  faire.  A  ce  projet  d'organisation 
était  jointe  la  nomenclature  d'un  grand  nombre  de  travaux 


utiles  et  urgents  à  entreprendre  à  Paris  :  corps-de-garde  ; 
jardins  de  la  colonnade  et  de  la  cour  du  Louvre  :  fimtaines 
'sur  les  cotés  de  la  place  de  la  Bourse;  liàliivient  destiné  à 
réunir  les  Tuileries  au  Louvre,  el  élevé  seulemi-nten  char- 
pente, pour  être  affecté  â  l'evposilion  des  produits  de  l'in- 
dustrie qui  doit  avoir  lieu  l'année  prochaine.  Cette  dernière 


ment  en  pure  perte  aux  Champs-Elysées,  permettrait  de  ju- 
ger l'effet  définitif  de  l'achèvement  du  Louvre,  de  la  place 
ilu  l'.:iir(m-i!'l  cl  lies  Tuileries,  de  la  fondation  du  Grand- 
()prr:i  sur  ri'iiipl.iceinent  du  Château-d'Eau  ,  el  du  prolon- 
^eiiieul  de  la  rue  de  Rivoli. 
Tous  CCS  travaux  auraient  offert  un  bien  plus  grand 


construction  ,  en  économisant  les  dépenses  faitiS  précédem-  |  avantage  ,  celui  d'occuper  30  à  -10,000  ouvriers  el  d'assurer 


•dl  du  péuitencier. 


Costumes  des  colons  hiver  et  été. 


leur  existence  pendant  deux  ans  ;  les  sommes  qu'ils  au- 
raient coûtées  n'auraient  pas  du  moins  été  infécondes  et 
stériles  ,  comme  les  douze  ou  quatorze  millions  si  déplora- 
blement  absorbés  par  les  ateliers  nationaux. 

Les  vues  de  l'auteur,  en  ce  qui  concerne  l'Algérie,  sont 
également  conçues  dans  un  bon  esprit  et  dignes  des  encou- 
ragements do  l'administration 


Chaque  colonie ,  exploitée  soit  par  des  enfants  trou\és  de 
France  ,  de  l'flge  de  IS  a  20  ans  ,  ou  de  jeunes  détenus  du 
même  Sge  ,  soit  par  des  cniiil.unni's  civils  ou  mililaircs  a 
des  peines  correclionnellcs  -iiini  runipiisrc  de  I  2iil)  |iim'- 
sonnes  ,  savoir:  i, 000  colons  -Hiit  liiunmes  de  troupes  pour 
niainteiur  l'ordre  ,  la  discipline  ,  et  assurer  la  sécurité  de  la 
cohune  .  et  (ÎO  administrateurs  el  cmployés- 


La  création  de  ces  colonies  ne  préparerait  pas  seulement 
la  (irospérité  future  de   l'.Mgérie  .  par  le  défrichement  des 

li'iTi'-;  iiis(|ii  ICI  ri'sh''i's  inciillrs  :  rllr  lnrnicriit  avant  tout 
ilr  lion-  iMu  riiT>  |iiiiir  h-  lr,i\:iii\  ilrs  rh;iinps,  en  leur  ap- 
prenant un  l'Ial  hdnor.ililr  qui  Irur  pinrin-ciait  des  moyens 
d'existence  beaucoup  mieux  que  ne  le  feront  jamais  les  mi- 
sérables états  auxquels  sont  assujettis  les  condamnés  dans 


[        t     0      e  o       i-,r    oie 


l/l 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL 


nos  maisons  de  détention.  Car  la  culture  manque  de  bras 
(Il  France  comme  en  Ali;érie  ;  les  bras  intelligents  et  exer- 
ces trouveront  partout  et  toujours  de  l'emploi ,  et  par  cela 
iii'Mne  les  moyens  de  pourvoir  aux  premiers  besoins  de  la 
\ii'. 

Siii\ant  la  disposition  de  ses  projets,  M.  Borda  voudrait 
|ir>nvoir  construire  cliaqne  colonie  avec  les  élèves  colons  et 
l 'S  siil(l;ils,  de  manière  il  n'avoir  pas  besoin  des  ouvriers 

du   (Icllnis. 

i.rs  IIHMI  pénitenciers  seront  divisés  en  40  bripades  ,  de 
£',  iHiiriMics  chacune  ,  suivant  l'use  et  la  force  physique,  et 
siiiiiiiis  au  n'-iiimo  militaire,  La  paye ,  fixée  il  un  franc  par 
jiHir,  suliira  une  retenue  pour  former  la  niasse  du  linge,  de 
1.1  ili.uissnre  ,  de  riialiijlenient,  de  la  nourriture  II  y  aura 
par  briLMdi'  i|u,'ilre  appointés  et  un  serjjenl.  Ces  grades  se- 
Kiiilcniil'éiéscnnniuM-éciimpensede  bonne  conduite  et  d'ap- 
liliiile  ,111  travail  ;  et  c;t!e  récompense  ,  indépeiuiaininent 
d'un  encoiirafieincnt  pécuniaire  ampiel  elle  donnera  droit, 
srra  mentionnée  sur  le  !i\rrl  du  colon  et  sur  le  registre 
diirdre  et  déliit  ci\il  de  l;i  colonie. 

I.e  plan  arcliili(liir:il  ,  csaiiiiné  parles  membres  compé- 
tenls  lie  la  ,'^nrii'li'  liliir  dis  licaux-arts ,  à  Paris ,  leur  a 
paru  f;r,-inil,  \asle  cl  l.icii  iri-.|.(i>r  : 

A  l'cnlrée  ,  le  paMllim  il  jiliiiiiiislralion  ,  entièrement  in- 
(lépenil.-ilit  des  aiiliis  liàliiiiiMiL-.  :  de  ili;ii|iie  n'ilé,  1rs  issues 
pour  péni'trerdansla/'ccmf-Hioi/i'/f  1)11  ru Mipa«nfo/c,  issues 
ti'iniéi's  par  des  fjriiles:  a  leur  extrémité,  deux  pavillons 
silues  latiTalemcnt  et  pouvant  contenir  chacun  cent  honi- 
nics  de  troupes ,  avec  (oj^ements  pour  les  officiers ,  cantine 
ri  accessoires. 

Kn  ailes  ,  deux  vastes  corps  de  bâtiments  devant  conte- 
nir Il  s  loijrmenls  pour  les  nulle  colons,  disposés  en  cham- 
lirérs  lie  \ini;t-cini|  personnes,  ceux  des  médecins  .  chirur- 
yiriis,  pliarmacinis  rni|,I.MTiiM.|il  |MMir  riiiliniiprie  :  siillcs 
(l'ellHlespimrl'.'liM'rjiicniciil  mul  iirl  m  Ir.inc.ii,-.  ri  ,-ii  .ii;ili". 
ilrsalrlirrs  piiiir  Ir  > 'iMrr  iiMlii-liirl  ilrs  rIrM's  i  (.luiis  :  iiii 

liind  lie  rrs  luIinimN    Ir-  rm-iiir>     rrirr rs  ,  boulan  c- 

rirs,  lilMllilri  M-     .a\\-    .!.■  Ii.mi.  s.illr  ilr  polirr  rt  toutes  les 

déprniliinrrs  nrrrsSiiiiT-    riiliii    niini ■uiii|ilrment ,  une 

chapelle  adossée  au  pavillon  d'administration ,  des  salles 
pour  les  armes  et  des  fontaines  pour  le  service  général  de 
la  colonie. 


Ollc  pi'lilr 


■il,.    iMlisI, 


,lle  p, 


rt  défendue  par  un  pre- 
mip.ile .  avec  corps-de- 
nt li>  écuries,  lesbouve- 


l.is  déprnilances  de  la  colonie  seraient  également  défen- 
dii's  par  un  dniviéme  fossé,  en  dedans  duquel  les  fermes 
grandes  et  iniiynues  seraient  assez  éloignées  les  unes  des 
autres  pour  ne  pas  se  nuire  soit  dans  leui-s  divers  services  , 
soit  en  casil'incendie. 

i-ji  lnir:iiit  son  plan  trénérnl  de  la  colonie  sur  une  aussi 
^nn.lr  ri'lirlj.  M  lliinil.i  ;i\,iil  un  iloiilih'  but  D'alinril  , 
pruil.iiil  riiii|  .iiis,  rcl  rl,ilili>-.i'iiii'nl  serait  ralimir  prnilen-. 
liane  et  cenlr;'  il  une  |iupnliilioii  aL'rii-nlr  :  mais  |)his  tard  , 
lor.sque  ,  les  terres  étant  en  plciiir  rnliinc  les  colons  se- 
raient transférés  dans  une. autre  paiiic  ilc  I  Al^éiie  ,  les  bâ- 
timents pourraient  servir  comme  icnlieirune  commune,  et, 
au  moyen  de  queh|ii(  ^  c  linuiiiieiits,  on  trouverait,  réunis 

et  bien  di.sposés  ,  un    .  jh   ■     mairie,  un  hôpital  ,  une 

caserne,  un  manlie,  ili~  r,  olr^  ijr  toutgenre,  des  magasins, 
(les  ;ili'liris,  ilrs  l'erines  même,  parla  disposition  des  grands 
bâliiiicnls  ^■niiipés  alentour. 

La  l'iiiislnirniin  d'une  colonie  de  ce  genre  devra,  autant 
que  pos.silile.  se  faire  sur  un  terrain  d'un  seul  tenant,  d'une 
élendiie  lie  ;i,!2(IO  hectares,  au  centre  des  terres  à  défricher, 
alin  d'éviter  une  trop  longue  course  aux  cultivateurs,  et  à 
la  proximité  des  voies  de  communication  déjà  ouvertes. 

Une  fois  toutes  les  cultures  achevées ,  les  3.200  hec- 
tares .  en  cas  de  déplacement  de  la  colonie  ,  pourront  être 
conci'dc'ssoit  il  des  colons  libres  ou  a  des  militaires,  à  titre 
de  rc''compensi'  de  leurs  services,  soit  même  à  des  colons 
du  ]iénilencier  (huit  le  temps  serait  terminé  ,  et  qui,  par 
li'ur  bonne  conduite  ,  auraient  mérité  ces  concessions.  Un 
règlement  particulier  déterminerait  les  différents  travaux 
.luxipiels  ils  auraient  à  se  livrer. 

Les  dessins  que  nous  publions  représentent  des  colons  dé- 
IVichant  des  p.ilmiers  nains.  Costume  d'hiver  ■  un  pantalon 
lileu  large  ,  une  ve.ste-calian  ,  avec  souliers  et  guêtres  ,  et 
une  casquette  portant  un  mmiéni  ro.sd/mc  (/'c(c' .•  culotte 
(le  zouave  en  toile  grise,  guêtres  srrranl  la  jambe,  bourge- 
ron  en  laine  blanchâtre  ;  un  graiiil  rliapeaii  Je  paille  portant 
un  numéro,  a\ec  un  ciiinre-iiiniiie  en  étoile  de  laine. 

D'après  les  calculs  de  M.  lioiirl.i  ,  le  .succès  des  colonies 
pénilrntiairrs  projetées  ne  présenterait  aucune  chance  diiii- 
leu.M'  Os  calculs  portent  l.i  dépense  priiihinl  cin(|  ans.  tiiiis 
Irais  f. Ils  de  materii^l  ilél.ibli.ssement,  île  culture  ,  de  ni.iir- 
nliiir,  etc,  a  l,  li'i.lKKI  lianes.  t,indi>  que  le  revenu  sele- 
MMMit  a  ."i.iriO.IHHl  lianes  ;  ce  qui  iliinnerait  .■lo  i;nuveine- 
ment  un  bénélice  de  I  .SA'i.IMMHr.incs  Lt  pendant  cette  pc- 
iiodc  riOataura  hiil  exécuter  dis  tia\.iii\  importants  qui  ne 
lui  cririteniul  (|ue  la  \aleiii-  de-  maliMiaiix  :  il  .iiira  soldé  et 
enlirti'iui  nu  per.-nnnel  de  l.ilill  iniliMiliis  ,  crée  un  mati'- 
nrl  consiilerable.  (h'S  liuiiNrii.-,  lie-,  X  aclicnes,  drs  bergeries, 
nus  eu  euMure  et  en  plein  r,r|iiHiit  lî.iOO  hectares  de  terre, 
fondé  enfin  un  centre  de  population  et  de  commerce. 

("es  avantages  ne  sont  pas  h^s  seuls  qu'offrirait  le  sys- 
tème de  colonisation  de  M.  Itourla.  Kn  ciîdant ,  autour  du 
[.1  n.iencier,  il  des  colons  libres  d(^s  parties  de  terrain  que 
le  Miisinagede  létalilissement  inel  trait  il  l'abri  d'un  coup 
de  main  contre  1rs  .Vralirs,  on  ne  tardera  pas  à  attirer  une 
nombreuse  piipiilation  eiirnpi'enne  ipii  répandra  l(>s  bienfaits 
de  I  agrieiiltiiiT  perfectionnée,  et  léiissira  il  conquérir  mo- 
laliMiieiil  les  indigènes  ii  une  assimilation  plus  jirompte  et 
plus  coniplete.  Notre  colonie  africaine,  en  effet,  ne  de- 
mande que  des  travailleurs  pour  devenir  la  plus  prospère 
cl  la  plus  riche  de  toutes  nos  colonies  fran(;aises. 


Clironiqiie  ■■■■•sicale. 

Le  zèle  des  théâtres  lyriques  ii  persuader  ciuc  tout  est  pour 
le  mieux  dans  le  meilh'ur  des  mondes  possibles  ne  s'est  pas 
ralenti  .  [lour  ain>;i  dire  un  seul  jour  depuis  notre  dernière 
chriiniipii'.  Nous  ;,\. III- ilii  |,n.iivl..|riiMriil  a\rc'  ipirllr  acti- 
vité surprenante  la  iiiii-iiini.  -  e-l  |,;iilniil  miiiiliei'  pendant  le 

courant  du  moi.- il. I     el  Miii.i  .pie  ,  Mml.mt  être  de  tunl 

point  digne  du  cnliillieiireiniiil  et  du  milieu  ,  la  lin  de  ce 
mémo  mois  nous  ih  m  ne  ,i  \  mi-  remlre  eiimpti!  aujiiiird  hiii  de 
Iroisd'.uvnw  nouvelle-  a  l.i  lois;  un  ballet ,  un  opéra-comi- 
que et  un  niystiM'e. 

Un  mi/stire!  Il  a  pour  titre  I'Éden.  On  y  voit  et 
entend  chanter  Adam  et  Kve  .  le  démon  et  le  Père  éternel 
lui-même;  mais  toute  leur  art  ion  -e  linrne  a  -e  lever  pour 
dire  leur  morceau  de  chaiil  .  el  ;i -e  li-miui  .i|iie-i|u  ilslont 
dit.  Du  reste  .  leur  costume  e-l  p.iil.nleijienl -emlilalile  ii  ce- 
lui que  tout  être  civilisé  a  l'habitude  de  mettre  lorsqu'il 
veut  se  présenter  décemment  devant  le  monde,  Ddii  vous 
devez  commencer  ii  croire  qu'il  ne  reste  du  prélimdn  nns- 
ti're  autre  chose  que  le  mot ,  et  qu'il  s'agit  tout  imiml'nt 
d'assister  ii  un  concert.  Mais  ce  concert  él.inl  compo-é 
de  musique  de  M.  Félicien  David  et  de  vers  de  M.  Met  y. 
vaut  bien  sans  doute  un  peu  d'attention  particulière,  inéme 
par  le  temps  qui  court. 

On  a  si  souvent  reproché  il  M.  Méry  l'abus desa  verve  poé- 
tique ,  son  in-.iliable  lantaisie  d  innovations  .   qu'il  semble 

façon  a  r.ijeiiiiir  un  .-iijet  pour  le  eiiiip  all^^i  \  ieux  (pie  le 
monde.  Nous  na\iins  donc  pas  a  raconter  de  quelle  manière 
il  a  compris  Ifolen  et  avec  quelles  couleurs  nou\  elles  il  l'a 
reiiilii.  Vous  avez  sûrement  lu  la  picmiere  (jage  ilii  livre  de 
Moïse  ,  ou  tout  au  moins  les  pn^niei-  alnieis  du  Discours 
XII  r  l  liisliiire  uninersMe  :  vous  .-a  m/  iilnr-  l'iilii'icmenl  ce 
lient  il  e-t  i|iiesliiin.  Toutefois  1"  ]Hirle  n  :i  p.i-  entendu  sa- 
crilier  I  iilii'rrnirlil  >.-  illi.il-  I..1  -lene  -e  p,i— e  ,  COUime  On 
sait  MilLMiremenl  ilii  lein|i-  mi  li>  hete-  parlaient;  dans 
ILilen  de  .M  Mer\  ,  il  ;  a  iiueiix  ipii'  cela  :  des  chœurs  et 
des  il;in-e- lie  l'ieiirs  ,  c'c'st-ii-dire  que  ces  odorantes  cho- 
risle-  Mini  ren-ees  danser,  car  au  vrai ,  dans  ce  que  nous 
avoii-  \  11  ,  .iiieiine  n'a  bougé  de  dessus  sa  banquette  ,  pas 
plus  les  Fleurs  jiremier  et  second  soprano  ,  que  les  Fleurs 
ténor  et  basse.  A  cela  prés,  l'idée  est  ingénieuse  et  neuve. 
La  nouvelle  partition  de  M  Félicien  David  ,  disons-le  de 
suite,  renferme  de  véritables  beautés.  On  y  reconnaît  aisé- 
mentl'autenrilii  Di'sert  et  de  (Itrisliiplie  Coloiiib,  a  un  cer- 
tain cacliel  de  di;tincti(iii  dans  le  tour  des  phrases  qui  lui 
est  tout  particulier  a  de  eerlaiiie-  liiies,ses  de  détail  dans 
l'orchestralion  qui  lui  app.ii lieniienl  aussi  en  propre,  enfin 
à  cette  teinte  tmit  iiidi\  iiluell"  ileilmiee  rêverie  ,  de  poésie 
tant  suit  peu  entachée  île  ni\-lirile  qn  on  trouve  générale- 
ment ilan-cliaeuiieile-e- \  le-  importante-qiii  ont  preci''dé 

celle-ci  Cependant  1  iiiipre— uni  que  le  publie  en  a  leeiie  n'a 
pas  été  aussi  ra\iiialile  qii  on  aurait  dû  lattendre  ,  d  après 
lo  talent  et  la  renommée  du  compositeur.  Cela  tient,  croyons- 
nous  ,   bien  moins  an  mérite  intrinsèque  de  l'œuvre  i^pi'au 


choix  du  sujet  lui 
été  présenti'  Non- 
par  ce  que  iniii-  a 
rait  rien  cunceM 
nant ,  que  celle  i 
ce  genre.  I..1  inn- 
barbarie  el  il  ilih 
rituels ( /»(/,, M r;ii 

il  voir.  Lllllerel 
complet 


rhriili 


et  surtout  à  la  manière  dont  il  a 
is  assez  fait  comprendre,  sans  doute, 
lit  plus  liant.  En  effet ,   on  ne  sau- 

pliis  froid ,  de  plus  désillusion- 
•  ilexpiiser  une  œuvre  musicale  de 
n\ele  de  ce  (lue  ,  dans  les  temps  de 

un  appelait  lesjeuxscéniqiiesspi- 
ihlilli    eut  été  peut-être  pivlelalile 


nt    ete 


.lll- 


liilllt  a  cela  qile,(le|unte,-le-  -alle- 

enlrnil  liiihitiiellement  de  la  musique  ,    celle  de  I  U- 

iil redit  la  iiinins  propice  il  l'audition  de  ces 

-  Kriques,  qui  ne  sent  franchement  ni  mor- 

t  .'ni  pièces  de  the.'itie    C'est  a  ces  diverses 

I  il  tant  atlrilmer  I  . 


reni  qn 

Kll  il  ,r 


ennie.-  qi 
l-'l- 


■il  pi 
liait  a  YKiIrniU'  MM   F    I), 


,pi,-l,,,.nienl--enl, 
iil,iudi,-jemeiil>  Ce 
;A(him),  la  cavatii 
{E\e) ,  le  chœur  et  I 
reste,  comme  toute 
doute  besoin  délie 
comprise  et  miei 


•,l|,l,l-ile 


liplli 


e-qile 
l.lMlll 
e-,|e 

indifli 
1  Mer 

irin 

,, 

i.i|ller 

M 

le-  Fil 

lll  lin 
nr-   ,\ 

r 

lue  j.lii-ieni-  1,11-  piMir  être  bien 

t.lni.i  qn  il  en  - mus  rêpele- 

ronsa  M.  F.  Da\iil  ce  ,|ne  inni-  lin  iimui- .lej.i  dit  dans  ces 
même-  ci.liiiiiie-  :  qu'il  iloil  Songer  eiiliii  a  almrder  toiil  de 
liim  leilranie  iMiijue,  Fn  l'ait  d'art  musical,  le  drame  ly- 
rique-ml  e-l  leellemeut  dans  nos  mœurs  actuelles,  d'il 
Il  e-l  |i.i-  il  iiile  -Miiphiuiie,  d'oratorio,  de  mystère  qui  l'en 

pni—e  ilei.ii r   D'.iilleurs  si  l'ode-symphiinie  était  une 

heiiieu-e  iiiiii\ eaiite  ,  il  n'iMi  cst  pasdc'mêiiie de  l'espèce  de 
diame  iiuenti'e  par -aiiit  Philippe  de  Néri .  encore  moins 
parcoii-eqiieiildes  repie-entalions  Spirituelles  du  tempsdes 
ciiiiNiilcs  .  et  TiiitieMiciete  prï'sente  ne  se  IrouM' guère  dans 
aucune  th'S  conditions  voulue- pour  bien  apprécier  le  mérite 
des  œuvres  de  ces  deux  deruiers  genres 

A  tort  ou  à  raison  ,  notre  monde  parisien  ,  frivole  quand 
même,  iiréfère  momentanément  des  ouvrages  comme  Itsi- 
finor  l'asi-iirrllii;  il  fuit  bien  l'avouer  Ce'litre  est  celui  de 
I  "pera-comique  nouveau  représente  la  semaine  dernière  au 
théâtre  de  la  rue  Favart  C'est  un  opéra  comique  véritable , 
ni  plus  ni  moins,  La  .  pas  de  vaine  preteni  ion  au  stx  le  ré- 
trospectif, pas  (l'ambitieuse  tendance  non  plus  aux  fiinnes 
encore  inconnues.  Le  but  des  auleursest  simplement  d  a- 
iiiiiser  le  public  pendani  une  soirée:  ils  v  reus.-iisseut  .  el 
Miilatiiut,  M. lis  bien  que  de  prime-abord  ci'la  u  ail  l'air  de 
rien  ,  c Cst  cepenilant  beaucoup  .  au  teiiip-ou  nous  .■sommes, 
(jue  de  l'.iire  passer  une  soirée  amusante  a  des  gens  ipic 
tout  semble  MHiliiir  éloigner  des. iniiiseuients.  Il  signer  Pas- 
carello  est  donc  un  de  ces  héros  de  boulToniierie  connue  il 


ne  dé'plait  pas  <\^n  rencontrer  parfois.  C'est  un  bon  vieux 
profess<!ur  de  chant,  une  variété  de  l'espèce  de  ces  fameux 
mailles  de  chapelle  •  dînant  de  l'autel  el  sounant  du  théà- 
tn^ .  »  aimable  vaurien  dans  sa  jeunesse,  philosophe  com- 
plaisant après  l'âge  mùr  .  excellent  homme  au  demeurant 
.Si  bien  que  pour  tirer  deniliiiria-  -mi  -enlinieiilal  filleul, 
ipii  n'a  rien  eu  de  plus  pre--e  que  il  1  nleverdo  couvent  une 
fort  tendre  novice  ,  il  pou--e  I  hênn-me  jii.-iju'a  epous<,'r  SJ 
\ieille  bonne,  acariâtre  et  dcspolu  a  légal  de  toutes  les 
\  iedli- bonnes  connues  deiiuis  l'invention  de  l'opéra-corai- 
qne  Comment  et  pouniuoi  cela  se  passe  ainsi,  nous  ne 
nous  chargeons  pas  de  l'expliquer;  M>I.  de  Leuven  cl 
lirunsvick  peuvent  seuls  le  faire  bien  comprendre,  au 
moyen  d  une  suite  cf>ntinue  de  mots  et  de  situati(ms  copii- 
fpies  très  agréables  à  voir  se  succéder  comme  dans  une 
lanterne  magique. 

Venons  à  la  musique  qui  est  plut('it  noire  fait.  Olle  à'[l 
signor  l'ascarello  e-tile  la  ciimpo-ilinn  de  .M  Henri  Potier, 
lil's  de  l'acteur  célèbre  ilmii  li  nieinmie  e-l  -1  chère  a   Ujul 

bon  rieur.  .Sur  un  c. \,i- lie- le^ei  1er pu-iteura  brodé 

une  niusiipie  non  iiioin-  leuere  .  écrite  avec  simplicité,  se- 
mée de  t il- gracieux,  nullement  fatigante  a  écouter;  l'une 

portant  1  autre,  enfin,  la  [lartition  et  la  pièce  ont  légitime- 
ment réussi  Fntre  autres  morceaux  qui  ont  été  1res  ap- 
plaudis, nous  citerons  la  romance  de  Paula  :  Sous  séparer 
c  est  impossible,  et  le  trio  final  du  premier  acte.  Au  second 
acie.  ipii  est  aussi  le  meilleur  de  1  ouvrage  ,  nous  signale- 
rons plus  -pici.ilenieiit  II'  cliariiianl  duettino  d'introduction. 
I"s  ciiiqilets  lie  i'iiM  iiiellu  .  cou(;us  avec  beaucoup  d'esprit 
et  qui  mit  en  le-  liuiineiiis  du  bis.  ainsi  que  c(;ux  de  Paula, 
dan-    la   -cène    lie-  eliii-.inle   lin  la  |eniie  pensionnaire  se 

lliillM-  ile^lii-|.e  en  finilai le  .li  ill\  rlire,  -celle  pendant  la- 
quelle le  nie  ne  ili-ciinlinne  pa-,  el  qui  -e  termine  par  un 
fort  bon  trio.  Enfin,  au  troisième  acte,  la  romance  de  Gae- 
lano,  morceau  d'expression  d'une  mélodie  et  d  une  liarmo- 
nie  également  distinguées. 

Nous  avons  fait  la  part  de  l'éloge,  la  critique  réclame  la 
sienne.  Nous  dirons  donc  que  la  partition  de  M.  H.  Potier 
pèche  par  un  excès  bien  rare  aujourd'hui,  lexces  de  sim- 
plicité. Son  instrumentation  manque  d'attrait  et  de  variété. 
Etre  clair  et  intéressant  à  la  fois,  c'est  la  le  secret  des 
grands  maîtres  ;  secret ,  il  est  vrai,  très  difficile  à  pénétrer, 
el  qu'on  peut  reprocher  à  l'auteur  de  la  musique  d'il  si- 
gnor  J'ascarello  de  n'avoir  pas  assez  pris  la  peine  de  cher- 
cher. 

La  pièce  est  jouée  avec  l'ensemble  le  plus  satisfaisant 
.M  Mocker,  par  le  rôle  de  Pascarello,  est  entré  dans  un 
genre  de  nile  tout  nouveau  pour  lui.  11  fa  joué  d'un  bout 
a  I  antre  en  (excellent  comédien  ;  et  c'est,  pour  lui  comme 
pour  le  tliiàtie,  une  nouvelle  source  de  succi'-s.  Made- 
m  ii-elle  l,i\ii\e  a  chanté  comme  ii  son  (ordinaire ,  par- 
laiteiiieiit  bien  Les  progrès  de  M  .lourdan  sont  de  plus 
en  |iliis  iiiilalili-  -iiii-  liais  les  rappnrls  F^nlin  nommons 
emaire  inailaine  ■|'liib:iiil,  très  benne  ilnegne,  ipii  rciii- 
|ilit  dignemenl  ilcpm-  peu  1111  1  inplni  qui  était  demeuré 
\acant'a  ce  théâtre  ilepiiis  la  retiaile  de  l.i  spirituelle  ma- 
dame lionlanger  .M  (iri.Lnon  et  lune  lil.inchard  con- 
courent cmnenablement  a  la  bonne  cxeriilinn  du  nouvel 
opéra-comique  de  IIM.  Pottier.  de  Leuven  cl  lirunsvick. 

Revenons  maintenant  ii  l'Opéra  où  nous  convie  une  foule 
d'autres  séductions  Le  sujet  du  nouveau  ballet,  si  tant  est 
qu'il  y  en  afl  un.  parait  avoir  pour  but  dedcinontrcr  qu'il 
n'est  aucune  des  inventions  modernes  qui  n'ait  été  inventée 
bien  avant  nous.  Ainsi,  sans  remontera  l'antique  Scylhie 
a-i,itii|iie  I  auteur  de  Msida  a  découvert  que.  ii  uneé|K)que 
pi-  lrii|i  I  l.iejiiee  de  la  nôtre,  une  phalange  de  JVsiii'ieniif* 
e-p,i.jniile-  ,i\.iit  héroiquement  franchi  les  mers  et  était  alK-e 
liiiiili  1  il. m-  nue  île  île  1  Wniiipel  des  A(;ores;.  une  républi- 
que 1  m  elle.i  m.  11  pln-iiin-  -lecles  affranchie  du  joug  (îdirux 
des  li.nnnie-  i;ile  -  .i|i|iel,iii  l.i  Képublique  de  Graciosa.  el 
a\ait  pus  peur  tilre  :  la  .■'ucietê  des  femmes  indépendantes. 
Ces  miiilenies  Amazones  sont  donc  les  hermiiesilu  baMel  de 
.\(M'(/(i.el  Nisida  est  la  |ierle  de  1  ile,  Vuiis  n  attendez  pro- 
bablement pas  (pie  nous  vous  racontions  I  action  d  un  ballel 
(|ui  ,  après  tout ,  n'est  (ju'un  prétexte  a  pirouettes,  enlre- 
chals  ,  pointes,  ronds  (le  jambe  et  mille  aulrcs  évolutions 
féminines  plus  ou  moins  fascinantes  (>  qui  caraiteris<>  par- 
liciilierenienl  celiii-n  el  le  lait  lin  peu  ililleivr  île -e-  pareils. 

ce  sont  lie  uenlll-ca-ipies    lie  le-eie-lilne-    île  x  i  iln  |il  llcUSeS 

ciiiras.ses.  de  Imigiies  el  Unes  Ir.unpelle-  le  liiiit  lies  bril- 
lamment dore  :  |'iuis  des  alliires  gi.irieiiseiiieni  martiales  et 
des  jupons  de  la  hmgueur  la  pins  exi^ne  |.M-iblc,  Dans  les 
pas  (le  danse  mademoiselle  Fiiocu  a  ele  peiilLinle  de  viva- 
cité :  ses  pirouettes  sont  tellement  prodigieuses,  qu'on  peut 
dire  que  pei-sonne  n  eut  jamais  autant  d'esprit  jusqu  il  la 
|ioinle  des  pieds  Mailemoi-elle  Plunkelt  est  d'une  grâw 
charniaute  dans  se-  pn-e-  ni.nlemoisellc  Maria  d'une  ra- 
vissante lierte  (l.iii-  -e-  ^e-ie-  lie  reine  des  Auiazoïiesi.  Ma- 
demoiselle l.nigi.i  l.i-liiMii,  lie  1,1  célèbre  l.imilledece  nom 
a  débute  par  un  pas  seul  ipu  lui  a  valu  de  bons  applaudis- 
semeuls  l.es  houuitfs.  cmnnie  on  le  pense  bien  .  occu|ionl. 
d.ius  un  b.illet  de  celte  nature,  un  rang  tout-a-fail  secon- 
daire; aussi  n  en  avons-nous  rien  à  dire. ii  notre  grande  sa- 
lisfiction  ('ependani  de  sévères  arist.irnues  en  matière  clii»- 
régraphique  semblent  prelendre  que  le  ballel  de  Xisida 
annonce  la  décadence  du  genre  Si  l'on  n'y  prend  larde. 
assureiil-ils.  la  dan--  sera'av;int  peu  delnmce  par  la  plas- 
liqiie,  (M'I  art  seilncteiir  récemment  introduit  eu  France  par 
M  et  inail,ime  Keller,  Nous  ne  nous  prononcerons  |vis dans 
iineaiissi  grave  ipieslion  ol  laisserons  agir  le  temps  suivant 
ce  qn  il  croira  bon  a  cet  cgard  .Seulement  .  si  la  plastique 
veut,  en  eflet,  usurper  le  luuivoir  de  la  danse,  nous  lui  con- 
seillons de  s  %  mieux  prendre  qu'elle  ne  la  fait  dans  colle 
malencontren.se  .scène  de  natation  Transporter  les  bains 
Lambert  sur  le  plancher  de  l'Opéra,  l'idée  était  assez  pi- 
(piaute  ;  mais  elle  n'y  a  pas  réussi ,  et ,  franchement,  m  la 
plasticpie  ni  les  .Xmiizones  des  Açores  ne  se  sont  n.ontrée.- 
en  celle  situalion  avec  avantage 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


lô 


La  miisiqiip  dr  Msida  est  d'un  cnniinisili'ur  i|ui  .1  |ikis 
<rinK'fni>  donne  dos  prouves  de  talent  à  r(_)|iérii  DmiMieles 
(hi  Uiiiblediiwiireux  et  les  airs  de  danse  de  l'Apinirilinn, 
déjà  sortis  de  sa  pUiine,  assuraient  d'avanee  ([ue  nons  n'au- 
rions que  des  éloges  à  donner  a  la  nouvelle  |)artitiiin  de 
M.  Benoît.  Aussi  est-elle  écrite  réellenienl  av<>e  \ine  loua- 
ble franchise  de  mélodie  et  une  grande  richesse  dinstru- 
meutation. 

Les  deux  premières  représentations  de  Nisida  ont  été 
liréeédées  du  premier  acte  du  Comte  Ory,  dans  lequel  a 
déliule  madame  Mulder-Duport,  par  U'  rôieihipage  Isolier. 
Toute  IreniManlela  [iremiere  fois,  plus  rassurée  la  seconde, 
madame  Mulder,  (pi  on  a  souvent  ap|ilau(lie  il  y  a  deux  uu 
trois  ans  dans  les  salons  sous  le  nom  de  niadeniuiselle  Lia 
Duport,  a  obtenu  un  succès  très  honorable,  qui  ne  fera  sans 
doute  que  s'accroître,  lorsqu'elle  sera  appelée  h  remplir  des 
rôles  plus  importants. 

Enlin,  pour  achever  dérégler  nos  comptes  avec  l'Opéra, 
disons  (pie  M,  Marié,  qui  s'en  était  retin''  il  y  a  quehpie 
temps  avec  une  voix  do  ténor,  vient  d'y  rentrer  ces  j(uus 
passés  avec  une  voix  de  baryton,  et  que  le  changenient  pa- 
raît devoir  tourner  à  son  plein  avantage.  C'est  par  le  rtile 
de  Charles  VI  qu'il  a  reparu  devant  le  |ud)lic  de  la  salle  do 
la  rue  Lepelletier,  (pii  lui  a  fait  le  meilleur  accueil. 

M.  Duprez  et  madame  .hilian  Van  (icliler  ont  fait  aussi, 
dernièrement,  leur  rentn  e  dans  les /fujuenof»  et  ont  reçu, 
principalement  au  beau  duo  du  quatrième  acte,  de  bruyan- 
tes et  nombreuses  marques  de  sympathie. 

G.  B. 


Académie  des  Sciences  morales   et 
liolitiqiies. 

rnEMIER    SEMESTRE    DE    1848. 

L'Académie  des  Sciences  Morales  et  Politiques  vient  de 
recevoir  un  de  ces  hommages  publics  (jui  sont  trop  rare- 
ment d(''cernés  aux  corps  savants  N'.aguere,  le  chcrdu  pou- 
voir e\-eiUif,  (laiisiuie  \  isile  ollieielle  (|iii  lui  était  faite  par 
rinslilut.  deniand.iit.au  président  de  cette  .Vcademie  le  con- 
cours actif  de  ses  membres  pour  l'aider  à  r  tablir  l'ordre 
moral  si  deplorahlement  perverti  depuis  plusieurs  mois,  et 
sans  lequel  la  stahilile  de  l'ordre  matériel  ne  saurait  être 
que  passagère.  Les  titres  de  1' .académie  sont  incontestables, 
et  on  ne  peut  qu'applaudir  à  l'invitation  qui  lui  a  et'  faite. 
En  attendant  ce  nouvel  enseignement,  il  n'est  pas  sans 
intérêt  de  reprendre  les  travaux  aceom|ilis  pendant  le  pre- 
mier semestre  de  la  jirési'nte  année. 

—  Dans  un  Mémoire  sur  Y  Im'gdlilc  des  richesses  et  les 
causes  (juilcs  prodiiisnit.  M.  H.  Passy  s'est  ]iniposé  de  d  - 
montrer  (pie  si  dans  lUrdre  social  le  soin  d  en  n  ;;Iit  I.i  plu- 
part des  dévelôppenienls  appartient  il  la  sa-r^se  liiiiii.iine, 
il  existe  cependant  des  lois  primitiv(>s  (]ui  en  déterminent 
les  parties  essentielles  et  des  faits  fondamentaux  qui  de- 
meurent les  mêmes  sous  toiiles  les  fiirnies  comme  il  tous  les 
âges  de  la  civilisatiiui.  Parmi  ces  faits  il  n'y  en  a  pas  de 
plus  apparent  et  de  plus  incontestable  que  l'inégalité  des 
richesses.  Jamais,  en  aucun  lieu  ni  ii  aucune  épo(pie,  les 
hommes  n'ont  eu  la  même  part  aux  biens  de  ce  monde, 
jamais  pareille  somme  d'aisance  ou  de  misère  ne  leur  a  été 
dévolue;  de  tout  temps,  il  y  en  a  eu  de  plus  riches  ou  de 
moins  pauvres  que  les  autres,  et  avant  mémo  qu'ils  fus- 
sent sortis  de  la  vie  sauvage  ,  l'indigence  dont  nul  d'entre 
enx  ne  pouvait  se  défendre,  avait  ses  degrés  et  ne  pesait 
pas  ('gaiement  sur  tous. 

C'est  que  d(^s  causes  nombreuses  et  diverses  trav.-iillent 
sans  cesse  à  différencier  les  conditions  et  les  foilunes.  <  es 
causes  sont  primordiales,  et  il  n'est  pas  donné  aux  homnus 
d'en  supprimer  ou  d'en  contenir  l'inflexible  et  persistante 
aclivit'''. 

La  première  et  la  principale,  c'est  la  disparité  des  qua- 
lités natives.  La  nature  ne  dispense  p.is  .-ies  dons  d'une 
main  impartiale;  elle  a  ses  (  lus  et  ms  délaisses  :  aux  uns 
elle  prodigue  toutes  lesdistinclions,  toutes  les  supériorités 
du  corps  et  de  l'esiirit:  ii  d  autn\s  elle  refu.sejus(praux  ap- 
titudes les  plus  vulgaires;  elle  produit  des  forts  et  des  fai- 
bles, des  insensés  et  des  sages ,  des  idiots  et  des  g  nies  uni- 
versels, et  des  lioninies  (iii'ellc  ciéc  (li^.^cnililaliles  ne  sont 
capables  ni  des  in(''iiie<  cllnii^  m  dr^ini' ,-  -ii(c(''s. 

A  cette  cause  toiilc-|im-^,iiilc  d  inci-.ilitc  >'en  joignent 
d'autres  in  peine  moins  ellieaces.  .\insi  la  vie  humaine  est, 
durant  tout  son  cours,  sujette  à  des  accidents  dont  la  va- 
riété infinie  .se  reproduit  dans  les  situations.  Ni  les  malaises 
ni  les  inrirmil('S  ne  sont  également  le  lot  de  tous.  11  est  des 
hommes  (pi'ils  épargnent;  il  en  est  d'autres  ipi'ils  acca- 
blent et  mettent  ihins  limiiuissance  de  sulisister  sans  ra>- 
sistanee  d'autrui.  De  même  la  mort  frappe  au  hasard,  et 
souvent  ses  coups,  en  tombant  sur  des  chefs  de  famille, 
vouent  il  d'affreuses  misères  ceux  dont  ils  étaient  les  in- 
dispensables soutiens.  Dans  cet  ordre  défaits;  il  n'y  a  pas 
jusqu'à  l'inégale  fécondité  des  mariages  qui  n'ait  sa  part 
d'innuenco  et  ne  contribue  sensiblement  à  semer  dans  les 
fortunes  de  nomlireuses  et  considérables  diversités. 

Ce  n'est  pas  tout  :  le  sort  aussi  a  ses  caprices,  et  sur  les 
inivres  de  l'homme  pèsent  des  éventualités  dont  la  pru- 
dence la  ])lus  éclairée  ne  saurait  toujours  tenir  suffisamment 
compile.  Pas  d'entreprise,  pas  d'affaire,  ]ias  do  spéculation 
industrielle  ou  mercantile  dont  les  résultats  soient  jamais 
complètement  assuivs.  Vainement  une  opération  .'<einble- 
t-elle  réunir  toutes  les  conditions  de  succès  d(  sirables,  un 
sinistre  impossible  il  prévoir  peut  la  faire  échouer  et  en- 
traîner la  ruine  de  ses  auteurs.  En  revanche,  une  cause  de 
fortune  lient  couronner  une  témérité  folle  et  donner  l'opu- 
lence a  (pii  n'a\ait  pas  droit  de  l'attendre.  Voici  des  cam- 
p:ignes  ou  miiiissenl  de  riches  moi.-,.-ions;  survient  l'orage 
ou  l'inondation,  et  sur  le  même  sol  ne  s'étendent  pas  des 


ravages  semblables;  bien  plus  ;  le  fléau  ipii  dévaste  et  sté- 
rilise quelipies  points  du  territoire  peut  ne  faire  iiue  déposer 
sur  des  ehiiiiips  voisins  de  nouveaux  éléments  de  fertilité. 
.\insi  encore,  on  voit  I  (iur,i.u:in  (pii  engloutit  les  vai.^-eaux 
d'un  armateur  en  en  |loll^s,llll  d'.nilivN  plH>  lapidement  au 
port.  Partout  l'homme  n  .il-iI  ipie  .^oii>  l,i  ijn'ii.ice  d'acci- 
dents dont  le  principe  (m  li,i|i|.c  ;i  ^,  ,s  i,vard>,  et  qui  ,  sous 
le  nom  de  hasard,  viennent  se  jouer  des  calculs  de  sa  pré- 
voyance et  répandre  de  toutes  parts  des  prospérités  et  des 
disgrâces  également  imméritées. 

Abordant  une  autre  face  de  son  sujet,  M.  Passy  montre 
comiiicnt  la  richesse  tout  entière  est  de  création  Humaine. 
•  L'Iiiiniiinite  tout  entière,  dit-il,  a  commencé  par  subir  les 
misères  de  la  v  ie  sauv.ige.  A  chaque  |irogrès  de  son  activité, 
de  noiiM'Iles  riche.s.;es  vinrent  alléger  le  poids  de  sis  m;uix 
et  donner  laisanee  a  ceux  dont  (>ll  'S  étaient  liiiiN  r;ige  .\iiisi 
s'éle\erenl  siiccessivenieiit  au-dessus  de  l'indigence  com- 
mune et  primitive  des  familles  investies  des  avantages  de 
la  iiropriélé.  Kieii  (l;iiis  le  niouvenient  ifascension  de  ces 
familles  ne  fut  préjudiciable  aux  intérêts  de  celles  qui  ne 
surent  pas  aciiuérir  ce  bien-être.  Loin  de  là ,  les  éléments 
de  prospérité  acquis  par  les  riches  fructifièrent  au  profit  de 
tous  ;  les  capitaux  et  les  connaissances  recueillis  descendi- 
rent éclairer,  féconder  le  travail  des  masses,  et  de  nom- 
breuses améliorations  se  réalisèrent  dans  leur  condition. 
Tels  sont  les  faits  dégagés  de  toutes  les  complications  qui 
en  ont  voilé  l'essence.  A  mesure  que  la  civilisation  a  né- 
ployé  sa  puissance,  on  a  vu  grossir  les  rangs  en  ii(jsse.ssion 
de  l'aisance,  s'édaircir  ceux  où  se  fafsaient  sentir  les  pri- 
vations, et  dans  ceux-lii  même.  Ic^s  pii\.ilioi,isdii]unuerd  in- 
tensité et  de  rigueur.  Eh  bien  !  l(Hd  ailoïc  ,|u  i|  on  sera  de 
même  dans  l'avenir,  (^'est  a  la  science  a  degagei  les  sociétés 
du  joug  des  misères  qui  assiégeaient  leur  berceau,  et  plus 
la  science  multipliera  ses  conquêtes,  plus  croîtra  le  nombre 
des  hommes  appelés  aux  jouissances  do  la  richesse,  plus 
s'amoindriront  les  souffrances  de  ceux  qui  ne  parviendront 
pas  à  les  obtenir. 

—  Chaque  année,  l'Académie  charge  l'un  de  ses  membres 
de  la  mission  d'étudier  en  Erance  ou  à  l'étranger  les  ipies- 
tions  sociales,  économiipies  ou  industrielles  qui  lui  parais- 
sent mériter  de  fixer  .--on  attention,  (.l'est  ainsi  que  la  Corse 
et  la  Bretagne  ont  été  réceniuK^iil  visitées  par  des  acadé- 
miciens, diplomates  pour  ainsi  dire  de  la  science.  En  1841J, 
M.  Blanqui  a  été  envoyé  en  Espagne  [lour  faire  un  raijport 
sur  la  situation  économique  et  morale  de  l'Espagne.  C'était 
une  mine  curieuse  et  intéressante  a  ex|iloiter.  Car,  comiiie 
le  fait  observer  le  rapporteur,  l'Espagne  passe  depuis  long- 
temps pour  un  pays  inuiiobile,  en  dépit  de  sa  m()bilité  ap- 
parente, et  l'Europe,  qui  la  visite  peu  dans  son  isolement, 
la  suppose  toujours  aussi  arriérée  que  la  Turquie.  Il  n'est 
pas  do  contrée,  en  effet,  qui  ail  conssrvé,  d  une  manière 
plus  évidente,  les  traits  les  plus  saillants  de  son  caractère, 
et  qui  paraisse  être  restée  plus  semlilable  il  elle-même  mal- 
gré les  révolutions  qui  l'ont  bouleversée.  Mais,  au  travers 
des  vicissitudes  agitées  de  son  histoire,  l'Espagne  a  subi; 
comme  les  autres  États  de  l'Europe,  la  loi  du  mouvement 
social  qui  les  emporte  tous  vers  des  destinées  nouvelles  et 
inconnues.  Les  recherches  du  rapporteur  se  sont  principa- 
lement fixées  sur  l'agriculture  ,  et  de  l'exposé  des  progrès 
remarquables  faits  par  l'Espagne  dans  ces  deux  éléments 
de  richesse  il  est  arrivé  à  signaler  leur  influence  sur  les  ha- 
bitudes et  les  mœurs  de  la  nation.  Les  changements  sont 
de  deux  natures  ;  ceux  qui  se  rapportent  ii  la  vie  physique 
et  ceux  qui  ont  modifié  plus  ou  moins  profondément  la  vie 
morale  des  Espagnols.  Les  premiers  frappent  tellement  le 
regard  de  l'observateur,  qu'il  suffit  de  les  énumérer  pour 
ajiprécier  le  chemin  que  la  civilisation  a  fait  en  Espagne 
dans  ces  dernières  années.  Le  peuple  espagnol  est  aujour- 
d'hui mieux  logé,  mieux  vêtu,  mieux  nourri  qu'au  commen- 
cement du  siècle.  épo(pie  il  laquelle  do  notables  progrès 
s'étaient  déjii  réalisés.  Et  quoique  le  mouvement  d'amélio- 
ration varie  d'intensité  et  de  profondeur  selon  les  provinces, 
plus  rapide  et  plus  complet  sur  le  littoral  que  dans  l'inté- 
rieur, dans  les  montagnes  que  dans  les  plaines  ,  dans  les 
villes  que  dans  les  campagnes,  on  le  retrouve  partout  ii  des 
degrés  divers,  florissant  et  croissant  tous  les  jours. 

La  suppression  des  coineids  ,i  ci  •  Miuic  de  l;i  ilisp;iri- 
tion  ]irogressive  de  la  mcndicilc,  (|iii  c|,hI  ahmcidcc  sur 
une  échelle  immense  par  les  lilieijlne-  udi'iosee.^  de-  moi- 
nes. Une  fouled'honimesoi-d's -mil  ;iiii-i  re',  eues  l'ucccnient 

au  travail,  pendant  ipie  le-  \a-lcs  d .niies     ijin  étaient 

soumis  au  régime  iiiiprodiiclii  de  l,i  iiciiii-inoite.  i-eidi'.iient 
peu  il  peu  dans  la  circulation  et  leeeMiient  une  iioiiNelle 
vie.  La  grande  excitation  produite  en  i'.spaLeie  |iciidanl  l;i 
guerre  de  l'indépendance,  les  e\eni|ilcs  ineiiHnvdiles  d  ('■- 
nergie  donnés  en  même  temps  sur  le  ineine  linei-  p.ir  trois 
m-aiides  nations.  l'Espagne,  l;i  l'i.inee  ci  r.\n-|e|eiTe ,  ont 
iie;iuconpconlriliU('' a  y  développer  re-|,i]l  deidirpiise,  le 
tr.ivail,  les  éléments  de  production.  \\  elliniiton  ,  d  une  |iart, 
les  maréchaux  Soult  et  Sucliet,  de  l'autre,  ont  rendu  de 
nombreux  services  ii  ce  pays,  et  il  faut  lire  leur  vaste  et 
glorieuse  correspondance  pour  apprécier  la  véritabli^  part 
qu'ils  ont  prise  dans  la  transform.ilion  exlraonlm.iin^  de 
l'Espagne  dans  ces  derniers  tem|is.  L;i  pliqcnl  des  essais 
exécuti''S  depuis  la  paix  de  181  i  avaiiuit  ele  conimences  ou 
indi(pies  p:n' eux  et  on  en  trouve  la  trace  brillante  dans 
lent  .idininistialKin  iiiilil;Mre  Mais,  si  au  point  de  vue  ma- 
t'.'riel  I  Espagne  est  en  voie  de  progrès  évident,  sa  richesse 
morale  n'a  p.as  suivi  le  développement  de  ..-a  nidicsse  indus- 
trielle. Le  progri's  des  honnnes  ]\'c-\  p.i-  encore  .i  l,-i  liaii- 
teur  de  celui  des  choses  Lii  ila-se  nioM'iine,  iiueslic  du 
pouvoir  politiiiiie  cl  (pii  L'oiueriie  rcell ni  [kic  -e,-  in- 
fluences, niampie  de-  Iciiile-  (|ii,ililrs  inoiide-  (|hi  rendent 
seules  le  pimvoir  re,-pe(  t.ilile  .iiiv  iH,|,iilali,.n.-.  I.:i  liherté, 
dans  ce  pajjs,  coiisiMve  cucore  Iroii  les  allures  du  despo- 
tisme. Néanmoins  il  est  juste  de  reconnaître  que  les  Esp;i- 
gnolsont  fait  un  pas  immense  dans  la  carrière  morale.  Ils 
s'attachent  de  plus  en  plus  ii  l'ordre,  et  ils  se  iirennenl 


facilement  d'une  sainte  colère  contre  les  hommes  (pii  es- 
saient de  la  troubler.  Us  ont  une  bonne  ;irniee  qui  tend 
complètement  ii  perdre  les  habitudes  iireliaiennes.  Ils  es- 
saient de  mettre  de  la  clarté  al  de  1  économie  dans  leurs 
finances  Iju'ils  ;iclie\eid  l'œuvre  si  bien  conunencée  et  si 
visild  '  de  leiM  reueiiei.iiion  par  la  création  d'un  bon  sys- 
tème d  ('  lia Miiiiji  |Hilil  ipie  ,  et  dans  vingt  ans  d'ici  ils  au- 
ront lait  du  clieniin  pour  un  siècle. 

—  JI.  Mignet  a  communiqué  un  mémoire  sur  la  formation 
politique  et  territoriale  d'Espagne,  qui  fait  suite  il  ses  pré- 
cédentes lectures  sur  la  formation  politiipieel  territorial,' d;' 
la  France,  de  l'.MIemagne,  de  l'Italie  et  de  l'Angleterre,  .^i, 
comme  la  France,  l'Kspiiene  se  constitua  p:ir  la  c(ui(picle  et 
eut  pour  l'iiniie  (r;iiilonle  l:i  monarchie,  des  dil'fcrences  es- 
sentiidles  cxisleiil  |.niir  ces  deux  |ia\ s  (fins  l;i  nature  et  la 
(lireclioii  de  l;i  c(iii.|iiele  (pu,  pour  [Espagne,  r.'ndircnt  la 
ro\  aille  pin-  .iNsoliie  cl  l;i  colicsion  leriilonale  moins  forte. 
Sim.iid  la  r,'iii;iii|iie  de  .M    .MilmicI,  celle  c(MH|iiéte,  au  lieu 

d'être    eveclllce     p;ir    des     rta-    colllre    de-    lelld.llailTS  ,     U 

fut  par  de-  Européens  contre  des  (  Irienl.iiix.  par  des  chri'^ 
tiens  contre  des  Arabes.  Au  lieu  de  rajonner  uniquement  du 
centre  ii  la  circonférence,  elle  s'avança  du  nord  au  sud  sur 
trois  lignes  parallèles  mas  séparées.  De  lii  vient  qu'elle  eut 
pour  objet  1  assimil.ilion  (hideux  races  ennemies  par  l'é- 
tablissement de  riiniformilé  de  croyance,  et  pour  résultat 
l'incorporation  partielle  du  territoire.  La  guerre  étant  reli- 
gieuse, le  principe  de  la  monarchie  fut  catholique,  et  la  dé- 
possession  des  Arabes  se  poursuivant  par  trois  endroits,  il 
se  forma  trois  Etats  distincts.  L'esprit  exclusif  de  la  crov.ince 
victorieuse  domina  dans  le  gouvernement,  et  la  séiiaratiou 
des  royaumes  d'Aragon,  de  Castille  et  de  Portugal  se  main- 
tint dans  la  Péninsule;  il  y  eut  moins  d'unité  et  plus  d'au- 
torité qu'en  Eranco.  Le  récit  des  luttes  subies  par  l'Espagne 
pour  arriver  à  sa  constilntioii  polili(pie  occupe  la  plus 
grande  partie  du  mémoire  et  explapie  comment  le  peuple 
espagnol,  avec  un  esprit  rendu  eiitreiirenant  par  l'habitude 
de  la  conquête,  opiniâtre  par  la  lon.ueurdeia  lutte,  altier 
par  la  continuité  de  la  victoire,  implacable  par  la  nature 
particulière  de  la  résistance,  déborda  sur  le  monde.  Sa 
croyance  religieuse  ,  étroitement  confondue  avec  sa  natio- 
nalité, le  réservait,  dans  le  seizième  siècle,  à  offrir  l'expres- 
sion la  plus  obstinée  du  système  catholique  dont  il  allait 
être  le  gardien  fidèle  on  Espagne  et  le  soutien  armé  c'u 
Europe. 

—  La  séance  publique  annuelle  de  l'Académie  a  eu  lieu  le 
23  août.  Elle  a  été  signalée  par  un  discours  de  M,  Charles 
Dupin, dans  lequel  l'auteur  a  retracé  un  peu  longuement  l'his- 
toire et  les  travaux  des  principaux  membres  de  sa  compagnie, 
et  par  une  notice  de  M.  Mignet  sur  la  vie  et  les  travaux  de 
Jl.  Bignon.  Personne  n'ignore  avec  quelle  sûreté  de  jugement 
et  quel  éclat  de  style  le  secrétaire  perpétuel  de  l'Académie 
sait  périodiquement  et  ii  la  grande  satisfaction  de  ses  audi- 
teurs mêler  le  récit  des  détails  lexicographiques  au  tableau 
des  événements  politiques.  La  vie  de  M.  Bignon,  sans  avoir 
l'importance  historique  de  quelques-uns  des  portraits  tracés 
précédemment  par  M.  Miguel ,  de  Merlin  ,  de  Tallcyrand  . 
de  Sieyès,  etc.,  se  recommande  cependant  par  sa  participa- 
tion aux  événements  diplomatiques  des  dernières  anniia's  de 
l'Empire.  Le  nom  de  M.  Bignon  doit  surtout  son  éclat  au 
témoignage  suprême  que  lui  laissait  le  glorieux  exilé  d(! 
Sainte-Hélène  en  le  chargeant  par  son  testamnient  du  soin 
de  transmettre  ii  la  postérité  l'histoire  des  traités  et  des 
négociations  de  son  régne.  Dans  cet  oiivra;je,  M.  Bignon 
s'est  montré  narrateur  lideU^ ,  compilatimr  exact,  mais  ses 
conclusions  ne  sont  pas  toujours  ai ceptables.  ou  du  moins  il 
ne  sait  pas  leur  donner  l'empreinte  d  une  logique  irrésis- 
tible et  entraîner  les  coinictioiis  Notre  époque  n'a  [las  ou- 
blie la  p.irl  (|iie  M  lliL'noii;ipri-'  ;iii\liilles  lil.er.ile-  de  la 
ItesMliiali.ill  S;i  |i,irMle  reccN.id  un  c;n,ielere  d  ,iii|i  n  ili' de 
l;i  part  ipiil  avait  prise  :iiix  tniilés  de  ISi;i,  |ioii]|  de  départ 
du  gouvernement  de  la  Kestauration. 

Cesl  il  celte  même  séance  que  l'Académie  a  proclamé  U 
résultat  du  concours  ouvert  devant  elle.  Dans  la  section  de 
philosophie,  M.  B.  Haureau  a  obtenu  le  prix  sur  \  examen 
critique  de  la  pliilosophic  scolastique.  Dans  la  section  mo- 
rale, r.\cadémie  demandait  de  recherchcset  d'ejposercom- 
paraticement  les  conditions  de  vwrali  té  dis  classes  ouvrières 
agricoles  et  des  populations  vouées  ai  industrie  manufactu- 
rière. Deux  mémoires,  l'un  de  M.  E.  Bertrand,  l'autre  de 
M.  Edouard  Mercier,  ont  obtenu  des  mentions  honorables. 
Dans  la  section  de  législation,  de  droit  public  et  de  juris- 
prudence, le  sujet  propose  i'[;i'dlarecherclte  de  l'origine  des 
actions  possessoires  et  de  leur  effet  par  la  défense  et  la  pro- 
tection de  la  propriété.  Deux  mentions  honorables  ont  été 
accordées,  l'une  a  M.  .T.  Shnv/.vl,  l'autre  a  M  A  .Seli^mann. 
Le  prix  (piinquennal  de  la  lonilation  ik'.  .\..  de  Morogues. 
offert  au  meilleur  ouvrage  sur  l'état  du  paupérisme  et  le 
moyen  d'y  remédier,  n'a  pas  été  décerné.  1  , Vcademie  s'est 
bornée  a 'déclarer  (piCllc  avait  ili-lingue  deux  ouvrages,  le 
premier  de  M  M.iilc  ni  inlilidc  du  l'uiipérisme  en  France 
et  des  miDjeiisd'ii  lemi'dier.ini  pi  iiinjirsd' ecomimie  chari- 
table ;  le  Si'coiid  de  .M  liiuard.  a;.iiil  pour  titre  lissai  sur 
l'étal  du  paupérisme  en  France  et  sur  les  moyens  d'y  remé- 
dier. Le  concours  relatif  au  prix  quinquennal  de  j.UOU  Ir 
de  la  fondation  de  M.  Félix  de.Beaujour,  et  dont  le  sujet 
était  Y  examen  critique  du  système  d'instruction  de  Pesta- 
lozzi,  considéré  principalement  dans  ses  rapports  avec  le 
bien-être  et  la  morale  des  c/tM'sc»  pniieri'.s ,  s'est  terminé 
avec  plus  d'éclat  Onze  iiiémoireMMil  ele  adressi's  il  l'Acadé- 
mie, el  1,1  soinnie  (le  :;  (1(111  l'r.  a  ele  |ui  i.r^ee  enirc  M.  Rapet, 
ipn  ;i  (ililenii  un  premier  |irix  de  :i  miil  li  ,  i  I  .\l.  Pompée, 
qui  a  obtenu  un  second  prix  de  -2  (loil  li- 

Des  éludes  non  i n>  nides  pro\(i.pienlde  nouveaux  ef- 
forts de  la  part  des  c(iiiciiriciils  liins  les  sujets  (]iii  leur 
sont  actuellement  proposes,  r.Vcadenne  a  su  concilier  l'iii- 
tcrêt  .siacntitiipK^  a  l';iclii;ililé  des  solutimis  C'est  ;iinsi.  et 
]i(iiir  n'en  citer  ipie  (piehpics-uns,  (pie  dans  la  section  d'é- 
conomie p(jlitiipicet  de  statistiipieellea  demandé  de  détcr- 


;r, 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVF:iiSEL. 


viiiin-,  d  iipii's  irs  j}!  iiiciiKs  (le  lascicnce  et  les  (loniu'ei)  de 
l  e.ijiéiietire.lesioii  (jiii  diiiornt  régler  le  rappurt  priipiir- 
tiuntieldc  Idcirnihiliiin  en  bitletstirecla  cirrulalian  nulul- 
liijiie,  afin  que  l'Èlal  jiiidsse  de  tous  les  aiatiluges  du  rrr- 
dit.sansavoirà  en  reiloiitertesabus  :  dans  la  suftion  d'his- 
toire grnéi'ale  cl  |iliil"Mi|iliii|iii',  de  démontrer  comment  les 
progrès  de  lajuslieervimiiielle.  dans  ta  poursuite  et  la  pn- 
nilion  des  attentats  contre  hs  personnes  et  1rs  propriétés. 
suivent  et  marquent  lesàges delacirilisation.depniit'état 
saiirage  pHi/u'à  l'état  des  peuples  1rs  mieti.r  policés.  Dans 
ci'lk'  lifiiiorali',  l'Arail/'iirn'  a  i\i'm;\ni\(:  i\ examiner .  an  point 


de  vue  de  l'intérêt  public,  comment  et  dans  quelle  mesure 
l' iitat  peut  intervenir,  dans  les  associations  indnsirieites. 
entre  tes  entrepreneurs,  /«(  capitalistes  et  les  ouvriers:  s  il 
e<t  deseas  où  l  intervention  directesernit  conciliablcurccla 
justice,  et  aurait  des  résultais  aussi  bons  ou  meilleurs  que 
ceux  qui  naissent  de  la  liberté  dis  Iriinsnctions  indiciduel- 
les  ;  jusqu'à  quel  point,  enfin,  tendent  nuturellenient  a  se 
former,  sous  le  régime  de  la  liberté,  les  association  réri- 
tablement  utiles,  et  à  se  dévelonper  parmi  les  hommes  les 
sentiments  d'union  et  de  sociabilité. 

A  laiiahrc  rapide  di'S  tiawiin  dr  rAcadriiiio  pendant  les 


six  iiiiiis  cpii  \ienni'nt  de  s'ecoider,  d  ciiru  iendrail  encore 
d  ajouter,  au  moins  a  titre  d(;  iricnlion  :  un  Miénioirc  de 
M.  Tropjon;;,  sur  T esprit  dcinocraticpie  du  (jjdc  civil;  un 
niénioiro  de  M.  Uunoyer.  sur  la  liberté  du  commerce  int<T- 
nalional;  une  lecture  dn  M,  H.  l'assy,  sur  la  liberté  en  ma- 
tière de  travail  et  d'indusiric;  une  communication  de  M  (Cou- 
sin ,  sur  l'histoire  de  la  |ib;losopiiie  morale  au  di\-huiti<'me 
siècle;  enfin  un  mémoire  inédit  du  duc  de  (Jioiseul  rtynis 
au  roi  Louis  XV  en  nii'i.  et  ipii  contient  de  curieux  détails 
sur  l'adininistration  et  la  politique  de  l'ancienne  monarchie 
l'ran.ase. 


.lacnb  TiiT/éliii-  n;H|uil  en  Siirdi'  \.t>  l'.innée  177:;,  Son 

nptihiilr  pniii'  l.i  il "  M' lil  ^{ii(  r  il<-  iHiiine  heure,  et 

il  aclir\;i  ,  >  chhlrxl.iii^  rcllr  MU  iK  r -nu- le  patrona^edu 
célebie  (jalio,  sim  coUipaliKili-,  p(jui'  lr(piel  il  professa  tou- 
joui'S  une  grande  admiration,  lierzélius  nous  a  laissé  un 
};rand  nombre  de  ti-avaux  qui  sont  des  preuves  ii'récusa- 


llerzëliiiD. 

blés  de  ses  vastes  connaiss.inics  en  minéralo.ie  et  en  nia- 
lliémaliques,  et  il  est  pi'U  de  sa\ards  plus  leinriils  (|ue  lui 
en  iniiénieuses  supposilions.  et  <'n  applications  plus  rii;ou- 
reuses  du  calcul  a  la  chimie.  De  moitié  avec  llisin  er,  il  fit 
des  recherches  sur  un  minéral  trouve  dans  les  mines  de 
cuivre  do  la  Wcstmanie,  en  Suéde,  et  d,!couvrit  l'oxvde 


don  nouveau  mêlai  auquil  il  donna  le  nom  de  cciinni.  du 
nom  de  la  planele  ilc  Cerès  ,  ipii  \eriait  d'élre  découverte 
par  l'iaz/.i  II  a  établi  des  lois  cimslanles  sur  la  eiuuiiosi- 
I  ion  des  owdis,  et  en  a  prouve  l'evacliUide  par  des  anal\.-es 
complètes  lU-  ces  conqio.V's,  Herzélius  dérouvrit  le  scié 
nium  en  IrailanI  la  pyrile  de  l'aldun  ,  et  constata  la  pré- 
sences du  lithium  dans  les  eaux  de  Carlsbail.  I.is  travaux 
de   Berzélius  sont   si  notnbreux   qu'il   e.-l  impo.ssible  d  en 


diiiiner  ici  menu 

1,1  II 

inii'uclatur,'    qu  il  n 

aissul'liededir.' 

(pi  il  est  peu  d  ai 

aivsi 

s  que  cet  illustre  si 

anl  n  ait  faites 

cnniinn  es    ou    i 

•Cllli 

rs  avec   l'aide  du 

•al  ni.   Par   une 

suite  d'experienc 

■s.  il 

1  montra  ipw  les  ipi. 

liles  proporlion- 

nelles  du  soulre 

élaie 

it  les  nuVues  dans 

li-s  sullales   que 

dans  les  sulfures 

Celr 

vail.  qui  lui  a  servi 

le  ba-e  pour  des 

considérât i(ms  in 

liiirl: 

nte>.  est  un  de  ceux  i 

uii  r,.nl  placé  le 

plus  haut  piiiMiM 

LUiislcs  d,'  son  lenq 

s   lai  isni.  lil- 

lustre  Suédois  (it  un  vn\.i.^i-  a  l'aris.  La  gloire  de  notn- 
Académie  lui  faisait  une  nécessite  de  venir  s'inspirer  à  ce 
centre  qui  rayonnait  sur  tous  les  iioinlsdu  globe.  Pendant 
son  séjour  en  France.  Berzélius,  oar  l'afi'abilité  de  son  ca- 
ractère ,  sut  captiver  tout  le  monde ,  et  il  conserva  jusqu'à 
sa  mort  un  souvenir  bien  agréable  de  l'accueil  qu'd  avait 
reçu  ries  snvnnls  français  Les  salons  de  Bcrthollet  à  Ar- 
cueil  el.iii'îii  ,1  I  {'tir  epncpie  le  rendez-vous  de  ce  que  les 
scienic^  Il  le-  |(!Im~  axaient  de  plus  illustre.  (Vcst  la  que 
Berzeliii-  inniimiir.i  des  relal  ions  avec  Laplace.  Gay-Lussac, 
,\r.ig(p.  Aiiipeir.  Didiing,  l'rcsnel,  etc.,  relations  qui  n'ont 
ele  iiilenniiipiies  ipie  par  la  mort 

I)i'  ivloiirdanssa  patrie,  notre  illustre  Suédois  fut  nommé 
secrétaire  de  l'Académie  royale  de  Stockholm;  puis,  enfin, 
baron  et  sénateur.  Outre  un  grand  nombre  de  mémoires 
[lubliés  dans  les  journaux  étrangers,  et  particulièrement 
dans  A.fliandl'ingari  fisik,  journal  suédois,  on  possi'dc  de 
lierzeliiis  plusieurs  ouvra.a'S  traduits  en  français.  Lesprin- 
(  ip.iiix  MUil  :  Essai  sur  la  théorie  des  proportions  chimique» 
cl  su  ri  inpnencc  chimique  d  r  i  électricité.  Xouveau  système 
de  ininéralof/ie.  De  l'emploi  du  chalumeau  dans  l'analyse 
chimique,  éléments  de  chimie,  etc.,  etc. 

t,)uoique  la  faveur  royale  ait  élevé  Berzélius  au  rang  de 
sénateur,  il  ne  devint  jamais  homme  politirpie:  son  labora- 
toire ne  fut  pas  négligé  jKrnr  sa  nouvelle  dignité.  Il  resta 
.-impie  el  h.r, .lillriir  eomme  par  le  passe;,  et  par  cette  sage 
riiiHJiiiie  il  l.ii-.-i'  ,1 -:i  patrie  un  nom  illustre,  inattaquable 

Il  lesp.irii-.i  le-  i.Mciioiis  politiques.  Utile  enseignement 
piiui  l(^ssa^a^l^  de  notre  pays! 

Berzélius  est  mort  il  Stockholm,  le  7  août  1848. 


F.Xri.lC.VTlIlN    DC    nEBNIEB    IltDCS. 

lu  se  gciidirnie  eoiitie  \o.  prix  iJIcmï  ili'S  denrée»;  lo  remids 
est  il.iiis  les  inaiiis  île  l'Assemblée  tialionale. 


t)n  s'abonne  diretlcmcnl  aux  bureaux,  rue  di'  Uiclieliou . 
n°  (ill.  par  l'envoi  franco  tUtn  mandai  sur  la  poste  onire 
l,;'ch,ivalicr  et  C'.  on  piès  des  diivcteiii-s  de  poste  et  de 
Messageries,  d;>s  principaux  librairies  do  la  France  et  de 
rctraiiger.  et  des  cumxspondancesde  l'agence  d'abonucmcDl 


Paius  . 


PV111.1  —  l»Pl\ia    Ult  l't  10>M1N,   UCK   PC    FOVll     AlST-CtRlIJIS,  (3. 


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SOUMAIRR. 
Histoire  de  la  semaine.    U  if/iii'ral  Cmaigutic  etsoa  t'Iil-majur  à  l<t  renie 

</n  3  ftpitntbrt.  ~  Corre»ipoiiflance.  —  10,000  franc»  de  renie 
pour  25  rraiicM.  —  Di^slnti^ressenieni,  par  M.  Francis  Wey.  — Cour- 
rier de  Paris.  Cérenwxûil  de  l'entrée  du  pr^sUlcnt  de  t' Assemblée  nationale; 
ViK  r^'c^plion  à  ta  Prtlsnlence  ;  Prtjjecliles  diiiers  provenant  des  insurgés  de  Juin, 
Il  une  séance  dex  conseils  ie;/»ertr.  —  Rapport  de  U,  Armand  Alarrasl 
Mur  le  projet  de  CoustKiiilon.  —  K&quiftse  d'une  liutolre  de 

laïuOdedepuUun  siècle.  Kmpire,  (9'ariiele.)  10  gravures. —Econo- 
mie domestique.  Le  passé  el  l'avenir  de  la  euisijieen  France.  —  Adleuià 
<:llAleaul>rluud-  PnK.le^  et  Riii'iqunleM  Aristide  Je  Laloiir.  —  Lettres 


d'un  flâneur.  IX.  te*  crieurs publics  ;  La  houchc  d'acier.  Ucilnuen  Primdlio 
Madame  de  Girardin  ;  M.  de  Lamartine.  —  Bulletin  lllbliogrupllique  - 

George  steplienson  Portrait.  —  l'iébus. 


Ilii>,toirc    (le    lu    H«i»uine> 

Les  actes  du  gouvernement  provisoire  s'en  vont.  Il  est 
bien  quelques-unes  de  leurs  conséquences  qui  se  font  et  se 
feront  loni;tenips  sentir  encore,  mais  les  abrogations  de  ses 
décrets  se  succèdent.  .4  la  fin  de  la  semaine  dernière  c'était 
d'abord  le  rétablissement  de  l'ancien  droit  d'octroi  sur  la 


viande  au  profit  de  la  ville  de  Paris,  impôt  dont  l'abaisse- 
ment n'avait  pas  profité  à  l'ouvrier  consommateur,  et  met- 
tait la  municipalité  parisienne  dans  l'impossibilité  de  pour- 
suivre ces  grands  travaux  qui  en  provoquent  tant  d'autres 
et  font  vivre  des  milliers  de  travailleurs.  Puis  venait  le  tour 
de  la  contrainte  par  corps.  Son  abrogation  prononcée  par 
décret  du  9  mars  a  été  défondue  par  quelques  orateurs  qui , 
du  point  de  vue  des  principes  abstraits  plutôt  que  du  point 
de  vue  des  faits  et  des  n  sultals  ,  ont  disserté  sur  la  ques- 
tion au  lieu  de  chercher  à  la  résoudre.  Un  représentant 
qui  s'est  prononcé  en  sens  contraire  a  procédé  tout  autre- 


^7^  Um  I  ^^ 


Le  général  Cavaignac  et  son  état-major  à  la  lievue  du  3  septembre  1848. 


IS 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


iiipiit  M  lîonjc.nn  a  juslilii';  la  contniinle  par  corps  par  ili's 
liiii^dc  >l,ili-iiiiii(;  (lonl  la  moralilé  n'est  pas  conlestable  ; 
((>!  (|ii  III  iiiililé  la  conlrainle  par  corps  a;;il  surtout 
Kiiiiiiii;  iiiiiMii  roiniiiinalnii'c,  pt  ipii'  le  noiiiliri'  dos  ili'ihi- 
Icurs  (piClIr  iniM'il:'  l.i  lilurlr  r-l  inlinniinil  ii-liviiit.  A 
Paris,  sur  siil\:inlr-i|iiMi/i'  inllli'  lii.Tliirlil-.  lililiilrllrlliont 
rendus  cl  unipoilinil  l:i  l'niilr.nnlr  |i,irrMi|i>,  di\-liuit  cents 
seulement  sont  remis  pour  I'cm'i  ulmn  ;iii\  ;j:inlcs  du  com- 
merce, et,  dans  ce  nombre,  quahavr  cnil.-.  m  moins  se  ré- 
solvent en  arrangements  (pu  nicilrni  .1  iiiiiMTl,  la  personne 
des  débiteurs;  de  sorteipi  m  ili''iiiiiii\r  lu  minrnnr  ilrs  dé- 
biteurs incarcérés  ne  di''|i:i>-r  |i:i-  rli.ii|ilr  .ililirr  I'  rllilVro 
de  iOO.  Ce  qui  résulte  inrnii'  ilr-  iliniiiics  |iniiliiilrs  |)ar 
M.  Bonjean  ,  c'est  que  la  durée  mnyi'nne  dos  délcnlions 
n'excède  pas  cinquante-cinq  jours.  Voilà  à  quoi  se  réduit 
une  sanction  pénale  sous  la  protection,  sous  l'iniluence  de 
laquellesemeutun  fondsdn  inidriiirnl  qui.  imiii  li  riiiiuiierco 

d(!  la  France,  no  peut  élu-  i'\;iliir  .\  m -  ih   y,  imlliards. 

C'est  en  ce  sens  que  la  i|iir>lHiii  ,i  rir  ir-nlnr  [.n  I  Assem- 
blée. L'abrogation  du  dii  irl  du  il  iii:irs  i  rir  Mih'e  par 
4t>G  voix  sur  093  votards  M;iw  il:i\,iil  vlv  ilmilr  il  avance 
(]u'on  renverrait  au  cmniir  dr  Klji.-I.iIiiiii  Ii  ir\ir  du  Code 
de  rnnimi'ri-c  rcl.ilifà  la  i miliauiLu  rcl.dplie,  piiur  Icu  faire 
suliir  liiiili'.s  li's  uiiidiliriiliniis  commandées  par  l'équité,  par 
I  riiii  .iriuri  ilr  11  ri\  1  li-,ii  1.  m  et  des  mœurs  et  par  l'esprit 

de  nos    lll-lllllllnlls  p,i|lll(|lll'^. 

C'est  Ir  inii]  ilii  ilriiri  II  iliiisant obligatoirement  la  duréc 
du  trav.iil  ilr^  i.NMin-  ;i  ili\  heures  il  Paris ,  ii  onze  heures 
dans  les  ilrpinli  nient.-.  I,  .\>si'iiibli'T  a  subi  de  loniis  dis- 
murs      inl.is    rlli'  rn    a    l-\r   ili'iInnilnllL'i'n    |i,ir    1,1    ri'M'Iation 

d'un  InIrnI  niiiiM'iin,  M    Itnllrl  .  i|iii  ,- r- rs|,irUuel. 

UlL;/'liirii\    cl   haliilr  a  rajeunir    1rs    ,nili liLs^  qu'il    avait 

à  "emprunter  aux  économistes.  Chacun  est  d'accord  que 
cette  lixation  est  trop  restreinte.  Mais  faut-il  se  borner  à 
l'élargir,  ou  toule  fixation  doit-elle  être  repousséc?  Voilà  ce 
qui  parta;:e  l'.Assi'mlik'r  et  ce  dont  la  solution  a  été  ren- 
vovee  à  la  fin  dr  rnir  smiiiirie. 

Un   crédit  esliinnli r  de  000,000  francs  demandé  à 

liliv  dr  siiliMiilion  pour  lebénisterie  et  pour  la  fabrication 
dis  linin/rs  ;i  l'aris,  a  été  voté  à  la  presque  unanimité.  Il 
n  ;i\,iil  iriiriinlré  qu'un  adversaire  et  qu'une  objection 
M  S.iiilr\i,i  si'  iiI.iIl'iijiI  (!:■  M.ir  li'ssMnpalliii'sdnuiiUver- 
riniirnl  iriilmnrr^  iLiii,  !;>  linnl.-ilr  I  niivinlr  dr  la  ca- 
lai,ilr    M, lis  ,1  |ii'iiir  I  I r.ililc  iv|iii-riit.iiii  ili.  I,i  Urôme 

ctait-il  drsrrn.lii  iK-  la  liiliniii'  i|iir  .M  Ir  ininisirr  de  l'in- 
térieur y  ,ip|iiirl:iil  un  ilimlilr  |irii|rl  di'  Im  .  qui  ;i\,iil  la  va- 
leur d'u'iir  |iriili'sl.iliiin  ilr  lail  nnilrr  Ir  rr|iiiirlu'  adressé 
au  gouverueincnl    l'.ï'l.nl  l,i  diniianiliMle  ilrii\  iiiilliuns  pour 

secours  aux  misrlrs  dr  l'.iris  ri  dr-  lli'|i:iliclll('nlS. 

Samedi  une  piii|iiisiiiiiii  m  m  r,i|i|ini  Ir.' ,  nlirée  même  par 

son  auteur  a  suiihAr  nr nniii-  nnr  i|iir~liiin  L-ravo,  cel|e 

de  savoir  si  I  ri. il  dr  sir^r  sniiil  lr\i'  |iiliii,i  ni  l;i  durée  du 
vote  de  l.i  l'.iin-iiiniiiui  I  rilr  |)rn|iii-]i  n  m  ,i\,iii  rtr  primiti- 
vement   prcsrnliT    p;ir    M      i.lrrlllrlllirl  l'     Il    n-l    \rliu    faire 

conuaitro  les  motifs  qui  l'ont  décidé,  non  sans  lui  laisser 
des  regrets,  à  retirer  sa  proposition.  C'est  un  sacrifice  qu'il 
a  fait  à  la  grande  et  irrésistible  raison  du  salut  public. 
M.  (jémieux,  au  nom  du  comité  de  la  justice,  qui  avait 
examiné  la  pro|)osition,  a  conclu  dans  le  même  sens.  Enfin 
M.  Lcdru-liollin  a  pris  la  parole  pour  se  borner,  a-t-il  dit, 
à  faire  ciilniilir  uni'  pnilrslation.  Son  ton  a  été  modéré, 
mais  les  aniliiijir-  liisiiii  ii|iH's  qu'il  a  fait  servir  de  base  à 

ses  rais nrnU  ii.iiini  irritantes  pour  l'Assemblée  et 

pour  11'  ^cniial  C.iMiigiiac.  Selon  lui  la  Convention  avait 
plus  qiir  lins  ir|iii'snulants  le  sentiment  de  la  modération; 
car  bien  i|ii  ilK' ini  a  lutter  contre  l'ennemi  au\  frontières 
et  déjà  siii  imiir  hii  iiniir  ,  contre  la  Vendée  en  feu  ,  elle 
ne  ciins.in.i  |i,i-  !,i  (unsiiliuii  de  93  par  létal  de  siège.  A 
cela  .\1  le  ^rnri.il  I  ,1  \ .1  i;jn,ic  a  répondu  par  un  mot  et  un 
mot  dècisil  :  La  (.nn\enlioij  n'avait  pas  l'i'lal  de  siép;e  sans 
doute,  mais  elle  avait  la  terreur,  et.  .1:1.1.  r  .1  In.  n  la  com- 
paraison est  à  l'avantage  de  la  siliialinn  .hIih  llr  M.  Le- 
dru-UoUin  a  cherché  par  delà  les  l'\  niHis  I  assuiiilalion 
qu'il  opposait ,  comme  une  condamnation  .  aux  déposi- 
taires actuels  du  pouvoir;  il  nous  faisait  voir  un  Nar- 
vaez  à  la  tôto  des  affaires.  Le  ])résidcnt  du  conseil .  sans 
laisser  voir  de  dépit ,  a  facilement  récusé  toule  assimila- 
tion entre  les  coups  d'État  frappés  par  une  camarilla  de 
caserne  et  une  mesure  de  salut  public,  imposée  a  un  pou- 
voir délégué  par  la  volonté  d'une  Assi'inlilceipu  représente 
la  nation  tout  entière.  Un  lîspagne,  celle  mesure  a  été  un 
moyen  d'oppression  omployé  par  la  diclal  are  militaire  contre 
la  souvcrameté  des  chambres  et  du  pays;  chez  nous,  elle 
n'est  qu'une  arme  défensive  spontanément  remise  par  la  re- 
présentation nationale  aux  mains  du  gouvernement  dans 
l'intérêt  do  sa  propre  liberté  et  de  la  liberté  de  tous,  lin  se 
résumant,  M.  le  général  Cavaignac  a  déclaré  qu'il  était  prêt 
à  déférer  aux  ordres  de  la  cliaiiiliri\  ipii  a  voulu  I  état  de 
siège  et  à  qui  seule  il  a|i|iaiiiriil  iTm  iii;iri|iii<i'  le  tenue; 
mais  sa  profonde  c(ui\  himn  r-i  i[ii..    il.msl.i  -iIii.iIium  ac- 

luello,  la  lovée  de  létal  d.' su-,'      i.ni  nn  11 nisrd.ingcr 

pour  le  pays,  pour  la  liepiililii|iie  ri  pimr  I  .\ssninlilee  elle- 
même.  —  liien  (|u'uue  proposition  de  .M,  Cresprl  de  La  'l'ou- 
clie,  relative  à  la  suspeusinn  des  journaux  .  ne  lut  pas  en 
cause,  le  prèsideni  du  conseil  ,  a\aiit  de  descendre  do  la 
tribune,  a  cru  dcMiir  aborder  cette  (pa^stion  et  lègitiiner 
ses  mesures.  Mil  \ étants  contre  1  ilt.se  sont  prononcés  pour 
le  maintien  de  létal  de  siège:  ipianl  a  la  question  des 
journaux,  le  comité  de  législation  a  présenté  un  projet  de 
(lècTOl  qui  règle  leur  sort  pendant  l'état  de  siège  et  donne  , 
durant  ce  temps  cNceplionnel  .  au  p(nivoir  c\èi-iitiriedroil 
do  citation  à  (piaraide-huil  lii'ures  ,  el  aux  tiiluiiiaux  le 
droit  de  proncuicer  la  suspension  exiTutable  iuiuiedialeineril 
et  même  sur  jugemeid  pardef,iul  cinnuic  sur  jugement  eeri- 
tradictoire.   " 

Luiuli,  l'Assemblée  a  ouvert  l'ère  très  courte  dis  deux 
séances  par  jour  volée  la  semaine  precedeiile  peur  liuit  le 
temps  que  durerait  le  vote  de  la  Censtitulion,  Il  n'a  fallu 


qu'un  jour  d  épreuve  fiour  ipie  l'AssiMiiblée  fût  aineiièeà  re- 
coTiiiailre  iinaiiuiieineiil  qiiiinr  Iiiiil'ih-  -i- '■  rl.iil  infini- 
ment prèlènilile.  Les  seanres  dm  rnml  ilnnr  dr  nmli  a  six 
heures,  cl  plus  tard  quand  les  tia\aux  a  terniiiier  l'exige- 
ronl.  Les  ipiatre  premi(us  jours  de  chaque  semaine  seront 
consacrés  à  la  Constitution ,  les  doux  derniers  à  l'ordre  du 
jour  ordinaire. 

M.  le  uiinistre  des  finances,  ne  pouvant  se  flatter  de  voir 
rAsseniblées'iieiuper  en  ce  moment  du  budget  pour  IS49, 
lui  a  pn'senli''  un  prnjet  de  loi  ipii  en  flètaehe  ,  pour  en  faire 
l'objet  diin  m.Ic  s|ie'rial  rliinr;:rmv.  loiil  ce  qui  esi  relatif 
aux  emilriliiilHiiis  ihieiirs   Cri.ui   !..  srni  in..\en  il.'  meltre 

prochaineiiienl  li'-  rniisrils  L'iaiei  .mx  a  me le  iiinrliniiner 

et  d'éviter  rexpèdient  toujours  fâcheux  des  ilouzieuies  pro- 
visoires. Le  chifl're  des  impôts  directs  pour  18-49  reste  ce 
qu'il  était  pour  18.i7. 

Avant  d'aborder  la  discussion  de  la  Constitution,  l'Assem- 
blée a  été  appelée  à  résoudre  une  question  préliminaire, 
celle  de  savoir  si ,  après  le  vote  de  la  Constitution  ,  elle  en- 
treprendrait de  faire  les  lois  organiques  on  si  elle  laisserait 
cette  tàcbe  à  la  législature  ipi  ■  I  ■  -nlliiur  universel  lui 
donnera  pour  liéritièÊ'e.  D'exerll.  ni  -  mi-ius  ont  été  don- 
nées |)0ur  l'ajeurnement  d'une  ilrrisimi  que  la  nécessité 
peut  justifier,  (expliquer,  enininaiider  même,  mais  qui  est 
exposée  a  lieaucinip  de  critiques  quand  on  la  prend  d'a- 
vance el  sans  savoir  si  les  i'\e iinits  iiinèneront  l'elte  né- 
cessité ou  en  feront  reninn.nlir  nnr  riiiilr.nri'  N.ms  ne  di- 
sons pas  comme  nous  l'aMnis  rnlrniln  dur  :  I  r-l  lii  une 
question  de  salaire.  "  in.ns  nmis  rrnyms  qnr  I  \-srinblée 
n'eilt  riiMi  penlii  dr  smi  aiilnriti''  rimr.de  a  ne  pas  tniiiclier 
dèsàprrsrnl  mllr  i|llesliiin  de  Inliglie  \ie  l,"a|i.iirnenient 
a  été  reiMinssé  par  .'i'ii'  voix  enrilre  LSI),  el  enlin  lAsseinhlèi' 
a  proclamé  sa  volonté  de  compléter  de  ses  propres  mains 
l'œuvre  que  le  pays  l'a  appelée  à  édifier  par  580  voix  con- 
tre 1H4. 

Les  discours  se  sont  siieeèdé  lundi  el  manli  dans  la  dis- 
cussion générale  sur  la  I  .iiisiiiiilniii  I,  \-~.ni|.ir,.  ;i  patiem- 
ment laissé  épuiser  la  lisir  dr- iii.ii.iiis  irsi  ni- il  nnutéun 
volume  tout  iiii|iriiiie  dr  .M  l'inir  Leroux,  qui  a  déclaré 
que  l'Ialiin  el  ,\iisiii!r.  .'\liiiiir-i|iiieu  et  J -J.  Rousseau  , 
rAsseinble.' Ciaislilnaiile  el  la  llenvention  n'avaient  rien 
entendu  a  la  science  |)olitique.  L  orateur  parais.sait  très 
convaincu  que  lui  seul  l'avait  trouvée,  mais  rien  n'a  pu  lui 
faire  livrer  son  secret.  —  La  discussion  générale  close,  on 
a  passé  à  celle  du  préambule.  M.  Gatien-Arnoult  deman- 
dait que  le  vote  sur  celte  partie  fût  reporté  à  la  fin  de  la 
discussion  de  la  Constitution.  M.  Dufaurc  par  un  discours 
plein  de  verve  a  fait  repousser  cet  ajournement  Mais  alors 
une  bille  |ilii-  iiii|iortanle  ,  plus  grave.  sVsl  niL-aL'rr 
M.  rè\ri|iir  .1  (  Il  I. Mils  a  conclu  à  la  Sli|i|iir— n.n  lin  |iivain- 
bule  en    l.ii-.ml    1  nlmdre  quelques  ci  in, pi. ■- dr  i|,.|. ni  que 

M.    le    pa-lriu    i:ii.]nrrrl  a  r.inili.lllllrs  a^r.'  .iiliv- r.'l  eour- 

toisie.  .Mai-  .a^llr  (l.'.lara -|irrl.ir..  ilail  dr-luirr  n  rece- 
voir de  pliis  rnilr-  iain|.-  In  Irr-  jriinr  1  .■|.i  .■-riilaiil  , 
M    Fresneaii,  ipii  pis.pi'iia  n'avail  iprnnr  -mie  Ims  almide 

la  tribnnedanslineidenlrelalifa  L s-N.qmlruii,  M    Lrr- 

neau  s'est  |)nrté  on\ertenienl  l'adversaire  de  Imile  espèce  de 
préambule ,  et  la  fait  avec  un  talent  qui  a  toujours  com- 
mandé l'attention  de  l'Assemblée,  l'a  souvent  émue  et  par- 
fois entraînée.  L'argumentation  de  M.  Fresncau  est  nerveuse 
et  vive,  sa  parole  partiripe  des  im^ines  qnalili's  et  il  sait 
la  faire  valoir  par  une  ai  rrnin.iiinn  r\|iir— i\r  II  ,1  tiré  le 
plus  habile  parti  des  lirsiiaii.m-  ri  il.  -  1  riiii.iilii  iinns  qu(? 
l'on  trouve  entre  le  priMinlinlr  du  prnji'l  |ii  iiiiil  il  ri  celui  du 
projet  rèvi.sé  ,  el  sa  InLi.iiir  iiinsnr  ,  s-s  liiils  aii:iiiscsonl 
a  la  l'ois  vivement  iuipirs-iniinr  ri  li.'.|ii.aninriil  ilrnde  l'.Vs- 
semblèe.  —  Un  discours  brillant  de  .M.  de  Lamartine  a 
néanmoins  fait  trioiBpher,  le  lendemain ,  la  question  du 
préambule. 

Dans  le  cours  de  cette  même  séance.  In  cliarnbre  avait  pro- 
cédé à  l'elertiiin  inen-iirlle  dr -.-  M.  r-|iir-  driil-rt  de  deux 
secrétaires.  MM  Hixni  ,  fin  l"iii  ,  la.i.i-.',  I  ici -es  de  La 
Kavette  ont  été  réélus  vire  j.resiil.'nlsOn  leur  ,1  dnniié  pour 
col'IeriiesMM  de  M.dleville  el  l'a^'iierre  en  reuiplacemeni 
de  MM.  Ciist.ivede  Iteaumont  et  île  Ciirnienin.  MM.  Landriu 
ellierard  oui  èle  appelés  de  iiiiii\eau  au  sern-l,mat. 

Les  troubles  ipii  ont  agité  .Miinl|i.'lli.  r.  .|iii  mil  même  en- 
sanglanté cette  ville  ,  sont  an[riir.l  liiii  a|i,ii-,  (  In  ne  dit 
pas  que  l'instruction  ail  fait  de. mn  1  n  Ir-  ir.i.r-.l  nn  com- 
plot et  qu'on  doive  voir  autre  chose  il, m-  rr-  .Lphnaliles 
événements  qu'une  collision  entre  des  p.is-i.in- |iiililii|iirs 
surexcitées  par  une  lutte  électorale  ;  le- nii'niiiihles  diiiie 
part ,  le  triomphe  de  l'autre.  Nous  verrions  un  puis  impuè- 
tant  syniptoiue  dans  le  renouvellement  des  violences  dont 
quelques  agents  des  contributions  directes  ont  été  l'objet 
(tans  plusieurs  dè]iartemenls  à  l'occasion  de  la  perception 
de  riinpol  des  l.'i  eenlinies.  Hs|iérons  que  la  fermole  du 
gouveriuniient  et  I  intérêt  du  salut  public  feront  ces.ser  ces 
oppositions  et  ces  résistances  eeupabh's. 

Nos  vaisseaux  cinglent  vers  lAdri.ilique  ,  el  .  a  Iheiire 
qu'il  est,  noire  pa\ill(Mi  llnlte  pent-êlreen  vue  de  \enise  ou 
d'Aucoue.  Notre  armée  des  Alpes  voit  le  nombre  de  ses  di- 
visiniis,  ses  a  ppriivisiouneinenls.srs  m  uni  lions  s'augmenter. 
Nos  pro\  ini-esde  l'Lst  vont  avnir  eg.driuenl  leur  corps  d'ar- 
mée. Nous  siiinines  prêts  a  l,i  gui'ire.  Hieu  nous  conserve 
la  paix  ! 


M.  B.  iiriisie  pcinirc  a  l'nrmce  des  Alpes.  Nous  altciidoni^ , 
moiiïit'ur,  l'elTil  du  vos  promesses.  Vllluslrution  vcul suivre  no- 
ire armée;  elle  veut  s'ouvrir  ii  loules  tes  seines  de  noire  gloire 
nalioiiale;  signaler  ii  l'admiralion  el  ù  la  reconnaissance  de  ses 
kcleurs  el  de  la  poslérilc  les  grjudes  actions  et  les  figures  htroi- 
(|ue5.  Vous  avez  promis  de  nous  y  aider.  Nous  faisons  appel  pour 
le  même  bul  il  lous  ceux  qui  auront  des  dessins  el  des  rcîcilt  k  nous 
communiquer. 

M.  D.  à  Ount:erque.  Nous  n'avons  pu  être  prêts  pour  ce  numéro  ; 
mais  allendez  le  numéro  prochain.  La  Flandre  sera  cotileule 
de  nous. 

M.  Y.  à  liuchnresl.  Nous  recueillerons  sous  la  forme  d'un  album 
les  articles  el  les  gravures  qui  conrerneut  vulre  pays,  l'uissiez-vous 
dire  vrai  en  annonçant  le  succès  de  celle  pulilicalion  ! 

M.  Alherl  N.  a  l'iiris.  Vous  Irouverez  loule  celle  Ijisloirn,  leilc 
cl  dessins,  dans  les  Juurnces  iUustrées  de  ta  liêvoiution  de  18i!5. 


<^orrcs|iuiiilniire. 

pn'sse  pour  rrcc\oir  en  prime  les  Jociix'khs  illcstiikhs  de  ta  lîévn. 
iulion  de  ISiB,  c'est  que  l'aboniu-inonl  nnuxeau  ou  le  rrnou\cl- 
lemenl  d'abounentenl ,  à  partir  de  l'expiriilion  de  rabnnno«n-ii( 
rouraiit ,  soit  f.iit  el  jun/è  ininuHlialcnt.  t.'enc.ngciuoiil  de  remui- 
\eler  ne  sallu  pas.  Kii  itrlinilec ,  iniis  m. us  r.iiti'-  piulilir  plus  on 
moins  ili-  t'.n.inri' d'uni' li.'-s  prlilr  M.iiinii'  cl  iinns  Mm- ili.iuiniis 
(ir'tlis  nu  vnliiinr  itiiiil  le  prix  r;;,di'  un  abeniii  nient  de  six  mois, 
ijui  est  le  gOiieieuv  ? 


Dix  mille  francs  de  renie  pour  rlnpl-clnq  francs. 

Ils  sont  jeunes  encore  ceux  qui  se  souviennent  de  la  lo- 
terie ,  supprimée  ,  je  crois ,  sous  le  ministère  .Marlignac ,  en 
1828.  Ils  priiM'iil  rnlrndrr  enriire,  dan-lrnr  niéiuoi're,  le  cri 

de  cesMi'illr-  Irii.iiii-  .i-i-r-  an  r.iin  dr-  iiir.  populeuses, 
offrant  an  p.niMr  ili.i   imllr  frunrs  jitiiir  iiiii/l  sous.  C'était 

le  bon  lrni|isdi'-j 11!-   I,iii.ind  un  uv.iil  a  peu  près  perdu 

tout  son  aiiirni  ,1  l.i  i.iiiliiir  ,  un  achetait  un  de  ces  billets, 
et  on  avait  piniLint  Mii^|.|iialre  heures,  l'espoir  de  relever 
sa  fortune.  Notre  époque  est  plus  morale,  lille  ne  tente  pas 
le  pauvre,  et  si  elle  accorde  aux  riches  le  droit  de  jeter 
2o  francs  sur  cette  roue  que  le  hasard  tourne  en  fermant  les 
yeux,  elle  y  met  plusieurs  conditions  : 

1"  Kllr  \riii  qnr  r,i|.|,.it  du  ^'ain  serve  ceux  qui  travaillent, 

et  prolitr  a    I   inlrll,;_'rlirr  |iillili(|ue. 

2''  Si  la  ihancr  duil  enrichir  quelqu'un,  il  faut  qu'elle  ne 
rende  personne  plus  pauvre.  En  d'autres  termes,  on  veut 
bien  que  quelqu'un  gagne,  mais  on  ne  veut  pas  que  quel- 
qu'un perde. 

C'est  le  problème  que  résout  le  prospectus  que  nous  al- 
lons reproduire  ; 

Son.icriptinn  ouverte  en  Librairie  arec  participation  des 
Souscripteurs  aux  bénéfices  de  l'opération  à  répartir 
entre  eux  par  la  voie  du  sort,  autorisée  par  le  Gouver- 
nement, sous  le  patronnyr  Je  M  le  Préfet  de  ta  Seine, 
et  sous  la  surveillance  de  MM.  les  .Maires  des  10'  et  II' 
arrondissements  de  Paris. 

LES    ItCRKACX    SONT    ÉT.^BLIS    AU    COMPTOIR    X.\TI0S.VL    d'eSCOMPTK 


«  Unedes  plus  importantes  industries  de  la  ville  de  Paris , 
la  librairie,  fait  un  appel  à  la  bienveillance  el  à  l'intcrêl 
du  public. 

»  Cette  industrie  qui  embrasse  dans  ses  niovcns  de  pro- 
duction l'imprimerie,  la  papeterie,  la  fonderie,  la  brochure 
la  reliure  et  une  foule  d  iiidiisliie-  aerissoires,  occupant 
dans  les  temps  ordinain-  plus  dr  mhuI  nnlle  travailleurs. 
toujours  atteinte  la  pieininr  p.ii  Ir-  1  iis.'s  commerciales  , 
est  aussi  la  dernière  a  .se  relever  |iar  le  retour  de  la  con- 
fiance et  du  crédit  ;  s'adressant  aux  intelligences  elle  ne 
peut  prospérer  que  dans  les  temps  calmes,  après  les  Siilis- 
i'actions  plus  pressantes  qui  sont  la  condition  même  de 
l'exislence. 

"  Ces  circonstances  exceptionnelles  devaient  la  porter  à 
chercher  des  secoui^  par  des  voies  également  exception- 
u elles. 

»  Elle  a  fait,  par  l'entremise  de  ses  délégués,  desdémar- 
clies  auprès  du  gouvernement,  à  l'elTet  d  obtenir  laulorisa- 
tion  nécessaire  pour  réaliser  une  combinaison  qui  doit  don- 
ner, à  son  profit,  comme  au  profit  de  l'intelligence  publi- 
que, un  seciniis  suffisant  pour  la  sauver  dans  le  pivsenl . 
pour  rendir.  diii-  un  avenir  prochain,  le  mouvement  à  ses 
opécitiim-  p.iiir  assurer  de  travail  à  ses  nombivux  colla- 
boratenis,  el.  -an-  aucun  doute,  pour  réagir,  par  le  jeu  na- 
turel de  la  circulation,  sur  d'auln-s  industries  nationales. 

»  La  sollicitude  du  gouverncmcnl  pour  des  intêit^ls  res- 
pectables, sa  vive  svmpathii'  pour  les  travailleurs  qui  souf- 
frent ont  rendu  facile  le  zèle  de  ceux  qui  ont  poursuivi , 
dans  un  intérêt  public,  le  résultat  de  celle  opération. 

»  Les  délégués  de  la  librairie  ont  rencontre  dans  les  plus 
hautes  spherks  de  ladministiation  une  bieuveillaïu'e  el  un 
accueil  (pi  il  .-iera  de  leurde\"ir  de  signalera  la  reconnais- 
sance de  ceux  cpii  vont  être  secourus  et  soulages 

L'opération  consiste  dans  leuiission  de  1 20,000  billets  de 
2o  fr.  chacun  ,  dont  les  pixMieui'S  recevront .  sans  distinc- 
tion ,  au  moment  de  la  sousiription  ,  2,'i  franc» de  il» ces 
choisis  par  eux  dans  un  Catalogue  di-ossé  ii  col  elTel .  com- 
po.sé  des  meilleurs  ouvragc-s  de  la  librairie  ilans  lous  les 
aenitis,  dans  toutes  les  branches  de  la  lillératuro  el  des 
sciences  ;  Catalogue  dont  M  le  ministre  de  l'intérieur  s'est 
réservé  l',ipprelialion. 

Ces  billets  av  aut  déjà  reçu  leur  valeur  on  livres ,  partici- 
peront a  un  l'irage  de  MILLE  LOTS,  répartis  ainsi  qu'il 
suit  ; 

Le  Tremier  Numéro  sortant  gagnera  une  inscription  de 
10.000  francs  de  renie; 

Le  Deuxième  Numéro  sorlanl,  une  inscription  de  ri,000fr 
de  rente  ; 

Les  3'  et  i'  Numérossorlanls,  une  inscriplion  de i,»H1  fr 
de  rente; 

l.es.'i',  0',  7'  et  8',  chacun  une  inscriplimi  de  l,(XX)  fr. 
de  rente; 

Les  Numéros  de  9  à  UM) ,  chacun  une  Bibliolliotine  en 
acajou,  renfermant  au  minimum  :i00 volumes  relii^el  do- 
res sur  tranche,  chaque  loi  du  prix  de  5,000  francs. 

Les  Numéros  loi  a  500.  une  Bibliolheque  reufermani 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


19 


<nu  niininiuiii  :iOO  voUmu'S  \/t  reliure  ,  cliaqiio  lot  du  prix 
de  8,000  francs. 

Les  miniéros  de  201  à  500,  une  Bibliothèque  renfermant 
environ  200  volumes,  chaque  lot  du  prix  de  1,000  francs. 

Les  Niniiéros  sortants  de  501  ii  000  auront  droit  chacun 
à  400  francs  de  livres; 

Les  Numéros  de  601  à  800  auront  droit  chacun  à  200  fr. 
de  livres. 

Enfin  ,  les  numéros  do  801  ii  1,000.  chacun  100  francs 
do  livres. 

«  Cette  combinaison  est  fondée  sur  le  même  principe  que 
le  tirage  des  Obligations  de  la  Ville  de  Paris. 

»  L'opération  est  placée  sous  le  patronage  do  M.  le  pré- 
fet de  la  Seine. 

»  Elle  est  administrée ,  sous  la  surveillance  de  MM.  les 
maires  des  10'  et  11"  arrondissements,  dans  l'étendue  des- 
quels se  trouvent  les  principaux  établissements  de  librai- 
rie et  d'imprimerie,  par  une  Commission  comiiosée  de  mes- 
sieurs : 

P.\UL1N ,  libraire-éditeur. 

PLt)N,  imprimeur-éditeur. 

FIHMIN  DIDOT,  imprimeur-éditeur. 

LABOUL.^'i'E,  fondeur  en  caractères. 

BAILLIERE  (Je.»n-Baptiste)  ,  éditeur. 

PAGNERRE,  libraire-éditeur. 

HINGRAY,  libraire-éditeur. 

FUUNE,  libraire-éditeur. 

"  Le  produit  de  la  vente  des  billets  est  versé  chaque 
jour  au  Comptoir  Xational  d'Escompte. 

»  Pour  la  garantie  du  service  des  primes,  il  est  laissé  en 
caisse  la  nidilié  des  sommes  versées;  et  l'autre  moitié  est 
employée  coiiinu'  à-compte  pour  l'achat  des  livres  à  remet- 
tre aux  souscripteurs  et  le  payement  des  objets  relatifs  à 
l'opéralidn. 

»  Le  tirage  sera  fait  publiquement  à  l'Hôtel-de-Ville,  dans 
les  premiers  jours  de  novembre,  sous  la  présidcncede  M.  le 
préfet  de  la  Seine,  en  présence  des  maires  des  10'  et  1 1'  ar- 
rondissements,  des  membres  administrateurs  de  la  Sous- 
cription et  d'un  délégué  de  M.  le  préfet  de  police. 

»  Le  Catalogue,  dont  on  s'occupe  en  ce  moment,  sera 
adressé  franco  il  tous  les  maires  des  communes  de  France, 
ainsi  qu'aux  personnes  qui  enverront  leur  souscription  au 
moven  d'un  mandat  sur  la  poste  à  l'ordre  de  M.  Lebov,  se- 
crétaire-caissier de  la  souscription ,  rue  des  Petils-Augus- 
tins,  n"  ti,  au  Cercle  de  la  librairie. 

»  Les  demandes  et  envois  d'argent  et  de  mandats  de- 
vront être  adressés  franco.  Les  lettres  non  affranchies 
seront  rigoureusement  refusées. 

»  Un  magasin  contenant  un  échantillon  des  livres  portés 
sur  le  Catalogue  est  ouvert  rue  de  Grammont,  n"  28,  au 
coin  du  boulevard  des  Italiens.  On  y  trouvera  aussi  le  mo- 
dèle des  Bibliothèques  il  donner  en  primes. 

»  Les  noms  les  plus  considérables  dans  le  gouvernement, 
dans  la  finance  et  dans  l'industrie  ont  voulu  donner,  par 
l'exemple,  un  encouragement  à  cette  opération  dont  l'objet 
direct  est  de  venir  en  aide  ii  une  industrie  respectable  et 
dont  l'effet  prochain  sera  d'assurer,  par  la  reprise  des  tra- 
vaux, la  subsistance  d'une  classe  d'ouvriers  dignes,  en  leur 
qualité  d'instruments  de  la  production  intellectuelle,  d'un 
intérêt  tout  spécial. 

L' lUiistralion  publiera  le  portrait  de  l'heureux  bénéfi- 
ciaire du  gros  lot. 


nésintéressenient. 

Etre  désintéressé  .  c'est  consentir  avec  connaissance  de 
cause  au  sacrifice  de  son  propre  intérêt;  c'est  s'effacer  au 
profit  de  la  chose  publique  sans  aucune  restriction  person- 
nelle. 

Comme  le  vulgaire  n'attache  au  mot  intérêt  qu'une  idée 
fort  matérielle,  il  en  résulte  que  l'on  acquiert  sans  trop  de 
peine  un  renom  de  désintéressement  au  prix  d'un  sacrifice 
pécuniaire  fait  à  propos  et  avec  bruit.  Cette  générosité  est 
parfois  une  bonne  spéculation. 

Etre  désintéressé,  c  (•>l  iiiuiinler  au  besoin  son  ambition  , 
son  orgueil,  en  un  imil  loulcs  les  passions  dont  la  satisfac- 
tion nous  paraît  prrli-i.ililr  ,\<\\  jiiuissances  de  la  fortune. 

L'intrigue  se  rcviH  piiifuis  ilr^  apparences  du  désintéres- 
sement. Quand  on  ciii  lie,  iili' (|ii!'  Ii's  icprésenlanlsdupeu- 
iile  recevraient  une  nidciiiiiiU'  .lunlidienne  de  2.5  francs, 
nous  avons  vu  des  candidats  hiigiier  l'honneur  du  mandat 
législatif  en  offrant  de  renoncer  a  l'indemnité. 

Ce  désintéressement  se  réduit  à  un  marché  dont  voici  les 
termes  :  —  Eaites-moi  député ,  je  vous  donnerai  25  francs 
par  jour. 

De  telles  transactions  détruisent  l'égalité  au  profit  de  la 
richesse  ;  elles  jettent  de  la  défaveur  sur  un  concurrent 
pauvre  qui  ne  peut  consacrer  gratuitement  son  temps  à  la 
patrie;  elles  séduisent  et  corrom|jent  fopinion  publique. 
Ces  prétendus  désintéressés  étaient  tout  bonnement  de  très 
mauvais  citoyens. 

Parlez-moi  du  désintéressement  de  ce  ministre  enivré  du 
pouvoir  qui.  dédaignant  d'enrichir  sa  famille,  sortirait  pau- 
vre de  l'administration  :  mais  qui ,  voulant  y  rester  ii  tout 
prix,  prodigue  les  deniers  de  l'Etat  à  la  corruption,  afin 
d'opposer  a  son  impopularité  croissante  une  majorité  par- 
lementaire salariée.  Son  désintéressement  ruineux  assure  le 
succès  (le  son  égo'iste  ambition. 

X"**  a  des  prétentions  modestes;  il  sait  tout  ce  qu'il 
vaut  et  ne  s'en  fait  point  valoir  davantage.  Retiré  dans  l'hé- 
rilage  de  ses  pères,  il  vit  sans  faste  et  sans  parcimonie.  Sa 
philosophie  douce  à  lui-même  n'a  rien  d'importun  pour  au- 


trui. Embellir  son  asile,  distribuer  des  eaux  vives  a  travers 
l'émail  d'un  parc,  aplanir  des  sentiers,  greffer  des  arbres, 
défricher  les  terrains  rebelles,  tels  sont  les  paisibles  amuse- 
ments de  son  repos. 

Mais  X....  apprécie  d'autant  mieux  les  grâces  du  loisir, 
que  son  principe  a  connu  des  orages  dont  il  prétend  exeinp- 
ter  son  automne.  Son  génie  a  sauvé  l'Etat,  son  habileté  a 
entassé  l'or  dans  les  coffres  de  la  République  ;  le  désordre 
expirait  à  son  approche;  son  nom  qu'il  cache  sous  des  mas- 
sifs de  verdure  avec  la  coquetterie  des  sages,  est  demeuré 
dans  tous  les  souvenirs,  et  les  échos  du  forum  ne  font  pas 
encore  oublié. 

Que  le  peuple  soit  menacé ,  que  les  passions  ennemies 
fomentent  la  discorde  et  lancent  les  affaires  publiques  sur 
le  penchant  d'un  abtme,  soudain  la  foule  des  citoyens  dési- 
gnera son  sauveur,  et  le  nom  de  X...  sera  invoqué  comme 
celui  d'un  demi-dieu. 

Déjà  le  tumulte  de  ces  acclamations  a  franchi  les  campa- 
gnes, et  porté  jusqu'à  l'oreille  de  X...  un  avant-goùt  du 
triomphe  qui  va  l'atteindre.  Vain  espoir:  X...  reste  sourd 
aux  prières;  sa  gloire  l'obsède,  sa  faiblesse  l'épouvante;  les 
honneurs  ne  le  touchent  plus;  les  trésors  qu'on  lui  ouvre 
n'ont  pas  de  prise  sur  son  âme  ;  il  aspire  au  repos  et  de- 
meure invinciblement  retranché  sous  le  majestueux  rempart 
de  son  humilité. 

Lui  seul,  cependant,  pouvait  sauver  la  République;  on  le 
sait,  chacun  se  relire  attristé,  déplorant  l'excès  d'un  désin- 
téressement que  cent  voix  admirent  et  célèbrent  à  l'envi. 

X...  estime  son  repos  plus  qu'il  n'affectionne  sa  patrie; 
il  n'aime  que  sa  précieuse  personne,  et  il  n'a  pas  eu  la  fer- 
meté de  se  désintéresser  d'un  égoïsme  affreux. 

Cette  maladie  est  si  rare  en  notre  siècle,  qu'il  a  fallu,  pour 
la  caractériser  avec  vraisemblance ,  emprunter  la  forme  et 
le  style  d'un  écrivain  de  l'ancienne  roche. 

Toutefois,  la  conclusion  morale  do  ces  exemples  divei-s 
apjiartient  à  tous  les  temps  :  c'est  que  le  vrai  désintéresse- 
ment consiste  à  immoler  à  son  devoir  tous  les  autres  senti- 
ments, et  à  l'accomplir  sans  faiblesse  comme  sans  excès. 

Ce  fonctionnaire  qui  a  brigué  un  emploi  très  lucratif  et 
qui  consent  à  se  défaire  dune  moindre  charge  afin  de  s'assu- 
rer la  conservation  de  la  plus  productive,  risque  de  paraître 
désintéressé  lorsqu'il  n'est  qu'habile. 

Cet  autre  qui  recherche  des  fonctions  honorifiques  et  re- 
fuse tout  salaire,  est  avide  d'importance,  à  moins  qu'il  ne 
prête,  pour  un  temps  donné,  ses  heures  à  l'Etat  et  qu'il  ne 
donne  le  grain  des  semailles  à  la  condition  de  moissonner 
plus  tard." 

Exploiter  à  long  terme  le  loyer  de  la  reconnaissance  ,  ce 
n'est  pas  être  désintéressé. 

Parlerons-nous  du  désintéressement  qui  recule  devant  des 
honneurs  dangereux,  du  désintéressement  qui  s'éclipse  au 
second  rang  pour  briller  au  premier  ;  du  désintéressement 
qui  se  fait  entrevoir  sans  cesse  et  va  se  cacher  partout  où  il 
est  exposé  à  souffrir  une  cruelle  et  douce  violence  !  Les  pois- 
sons qui  passèrent  impunément  sous  le  bec  aigu  du  héron  de 
La  Fontaine  durent  trouver  l'oiseau  fort  désintéressé. 

Méfions-nous  de  tout  désintéressement  qui  s'affiche  et  re- 
court à  la  publicité.  La  publicité  est  toujours  un  moyen,  un 
appât,  et  ce  n'est  pas  en  vain  que  l'on  tend  des  amorces. 
La  plupart  de  ces  hommes  désintéressés  se  résignent  à  l'ab- 
stinence à  bon  escient;  ils  attendent  et  convoitent  un 
poisson  à  la  mesure  de  leur  appétit. 

Fbascis  AVey. 


Courriel'  de  Paria. 

Pour  cette  fois  no  dites  plus  que  nous  manquons  d'un  été 
pour  nous  amuser  et  prendre  l'air;  voici  des  journées  ra- 
dieuses, des  nuits  sereines  et  toutes  sortes  de  plaisirs  à  la 
belle  étoile;  le  ciel  nous  devait  bien  ces  dédommagements. 
On  n'entend  que  des  bénédictions  d'un  bout  de  la  ville  à 
l'autre,  et  des  éloges  sans  restriction  à  l'adresse  de  ce  beau 
soleil ,  de  cette  nature  souriante  et  de  cet  honnête  calen- 
drier qui  a  tenu  toutes  ses  promesses.  Oui,  les  promenades 
sont  des  fourmilières  et  les  maisons  des  solitudes  ,  tant  le 
Parisien  sent  le  prix  de  sa  bonne  fortune  et  veut  en  user  ! 
Les  joies  du  grand  air,  les  délices  du  plein-vent,  ce  n'est 
pas  lui  qui  le^  répudiera  jamais,  encore  faut-il  néanmoins 
((uelipie  aiitie  ;i-.~;ii>(iniie)uent  à  celle  félicité  de  moineau 
l'iMiii-  peur  i|ii  il  l'ii  >,,\(inre  l,i  ilniiceur;  l'art  pour  l'art , 
ce-l-,i-(lire  l;i  piiHiieii.iile  pour  II  promenade,  qui  s'en  con- 
lenlrr;iil  :iu|(Hiiiniur.'  Car,  sans  compter  que  le  temps 
pré^'iii  l'-l  A—i-/.  |ieu  favorable  à  la  rêverie,  notre  Parisien 
ne  fui  p:i-M  l"'n  marché  de  son  imagination,  jamais  il  ne 
lai>M'  lelle  /'"//(•  ilii  Int/is  ,nu  logis,  c'e-l  sa  compagne  insé- 
par;ilile  .lui  p,iiliiul  l'iMHile  en  eniiipe  et  galope  avec  lui. 
Aux  r,li;uiip-l-'.h  N'e<  iiienie.  s:i  \ilhi  iiiirii-muros,  ces  vieil- 
les amours  du  l'ini-icn  uu  il  courl  luujoiirs  avec  fempresse- 
ment  et  l'émotion  d'un  premier  rendez-vous,  il  a  besoin  du 
tumulte  des  cavalcades,  des  chars  fuyant  vers  la  barrière  et 
du  spectacle  de  la  roue  en  feu  rasant  la  borne  fatale.  Les 
moins  exigeants,  les  plus  champêtres  ne  se  contentent  pas  à 
moins  de  l'orchestre  du  café  Xlorel  et  du  théâtre  de  Gui- 
gnol. C'est  ainsi  que  sans  sortir  de  la  ville  notre  homme 
trouve  la  campagne,  comme  il  est  dit  dans  les  épltres  de 
Boileau. 

Il  est  vrai  que  dans  les  grandes  occasions,  et  nous  y 
sommes,  le  cercle  étroit  des  bonheurs  champêtres  s'agran- 
dit passablement  ;  Septembre  a  ramené  la  célébration  des 
plus  charmants  anniversaires,  les  vastes  parcs  et  les  grandes 
foréis  c|ui  enliHiirnl  l;i  ville  d'uni'  ceinture  verdoyante  ou- 
vreiil  Iriu'-  n.iiile-  rl.iinrri'S  aux  piipic-niipie  du  d'imanche, 
chacune  de  ri>  el.i|ii'>  ;igrestes  de  i.i  iiio\eniie  propriété  a 
sa  fêle  du  village  ^ol^ill,  avec  accompagnemcnl  de  rosières 
et  do  mirlitons.Voùtos  ombreuses  de  Saint-Germain  ,  cas- 
cades diamantées  de  Saint-Cloud,  et  vous,  maigres  bouquets 


de  verdure  de  la  plaine  Saint-Denis,  la  séduction  que  vous 
exercez,  est  toujours  la  même,  mais  quels  efforts  d'imagi- 
nation ne  faut-il  pas  à  nos  citadines  pour  s'y  laisser  pren- 
dre !  on  a  tant  de  fois  suivi  cette  route,  parcouru  ces  sen- 
tiers, gravi  cette  colline,  on  a  tant  de  fois  cueilli  des  pâque- 
rettes dans  celle  prairie  et  mangé  du  melon  à  l'ombre  de  ces 
chêne- inilolriirubles! 

Vuii.i  (lune  ou  nous  en  sommes  pour  le  moment  en  fait 
de  plaisirs  cl  de  distractions.  Nous  avons  les  plaisirs  et  les 
distractions  de  la  banlieue  ;  bien  plus,  la  chasse  est  ouvertes 
et  c'est  un  peu  beaucoup  la  petite  pièce  qui  se  joue  à  côté 
de  la  grande  Aux  cris  de  joie  de  celte  population  qui  arpente 
honnêtement  la  grande  route  et  suit  paisiblement  les  sen- 
tiers frayés  à  travers  les  vignes,  le  chasseur  a  mêlé  sa  \oix 
rauque  et  lancé  sa  brutale  fanfare.  Depuis  le  2i  août,  jour 
de  la  Saint-Barlhélemy  ,  date  sanglante,  le  chasseur  s'est 
mis  en  campagne  dansson  attirail  connu.  Ce  grand  tapage 
d'explosions,  de  capsules  qui  partent,  de  roquets  qui  aboient 
et  de  volailles  gémissantes,  c'est  le  chasseur  qui  en  est  l'au- 
teur. Prenez  garde  à  lui  et  à  son  cortège;  prenez  garde  à 
son  chien  et  à  son  fusil  ;  en  voila  un  qui  dépoétise  furieuse- 
ment le  paysage  qu'il  emplit  de  bruit,  de  poudre  et  de  fu- 
mée. Voyez-le  courir  dans  les  guérets  et  s'y  conduire  en 
vrai  Proudhon.  l'ennemi  de  la  propriété.  Il  a  mis  la  ban- 
lieue en  état  de  siège,  il  la  bouleverse,  il  traque  par  ci,  tire 
par  là  et  se  livre  à  une  fusillade  sans  trêve  et  sans  rémission, 
il  crie  :  Gare  aux  lièvres,  aux  perdrix  et  aux  bécasses  !  et  ce 
sont  les  promeneurs  qui  s'enfuient.  Il  y  a  beaucoup  de 
chasseurs  cette  année ,  mais  à  vrai  dire  il  n'y  a  plus  de 
chasse,  et  c'est  un  spectacle  que  le  Parisien  oisif  ne  saurait 
plus  se  (irocurer  aux  portes  de  sa  ville. 

En  effet  ipii'  sent  devenues  ces  grandes  fêtes  de  Saint- 
Hubert  qui  ^e  célehrjieiil  a  r.li.inldly  ou  à  Grosbois.  et  dont 
l'appareil  seul  l,iis;nl  l;iMe;iu  !  l,  .'Lifenl  les  fins  genêts  mon- 
tés par  les  bnlliuilM  .i\.ilieis.  1  IiiIhI  éi:irlate  et  galonné,  les 
poires  à  poudre  siuipiees,  le..  centiMUMle  chasse  et  les  fusils 
damasquinés,  c  clail  lliurmonieu-e  laiil'are,  et  puis  on  par- 
tait suivi  de  la  meule  aboyante;  alors  malheur  au  cerf,  mal- 
heur au  renard  et  au  sanglier  !  Au  lieu  de  la  chasse  splendide 
et  giboyeuse,  aujourd'hui  vous  voyez  nos  Robins  des  bois 
rentrer  au  logis,  éreinlés,  poudreux,  les  mains  noircies 
mais  innocentes.  Ils  n'ont  guère  massacré  que  des  crapauds. 
Notre  gibier  n'est  plus  qu'un  gibier  vulgaire  qui  échappe 
aux  coups  du  chasseur  citadin  et  se  fait  tuer  sottement  au 
gîte  par  le  chasseur  rustique  ;  si  bien  que  le  gibier  féodal  a 
disparu;  c'était  un  ennemi  de  nos  institutions  elle  progrès 
politique  en  a  fait  justice. 

Changeons  de  terrain.  Nos  mœurs  tendent  à  s'uniformi- 
ser, et,  dans  notre  société  tirée  au  cordeau  et  tondue 
comme  les  eli.iiiiiilles  de  Le  Nôtre,  le  tableau  de  genre  de- 
vient iiiipessihle;  mais  nous  aurons  toujours  le  tableau 
d'iiistiiiie.  la  revue  passée  dimanche  dernier  au  Champ- 
(le-iMars  est  assurément  l'un  des  plus  beaux  qu'on  ait  ja- 
mais vus,  quelle  histoire!  quelle  armée!  quels  hommes! 
quel  enthousiasme  !  C'est  une  démonstration  comme  nous 
les  aimons,  comme  tout  le  monde  les  aime  ;  et  l'on  se  disait 
que  dans  l'état  actuel  des  choses,  c'était  le  coup  de  canon 
le  plus  pacifique  qui  se  put  tirer,  et  qui  ne  saurait  man- 
quer d'avoir  son  retentissement  salutaire  dans  toute  l'Eu- 
rope. 

Outre  ces  occupations  champêtres  et  militaires,  notre 
semaine  s'est  empreinte  du  caractère  le  plus  politique  ;  l'en- 
semble des  présentes  vignettes  le  constate  suffisamment.  Par 
malheur  un  sujet  aussi  grave  se  prête  peu  à  des  explications 
de  fantaisie.  L'un  de  ces  croquis  vous  représente  une  récep- 
tion (liez  M  le  l'résident  de  la  Chambre;  il  la  reproduit  avec 
cx^Hiiiiiile,  et  cependant  ilymanque  beaucoup  de  choses, 
de  ces  ilelails  i|u'on  ne  saurait  peindre  et  qui  resteront  tou- 
jours impossibles  à  décrire;  c'est-à-dire  la  dignité  de  ces 
entrevues ,  l'esprit  de  courtoisie  qui  les  anime  et  l'esprit 
de  magnificence  qui  les  décore.  On  connaissait  M.  Armand 
Marrast  pour  un  publiciste  éloquent  et  comme  un  écrivain 
spirituel ,  l'homme  pohlique  fait  maintenant  ses  preuves 
en  homme  du  monde  accompli  ;  les  soirées  d'agrément  s'en- 
chaînent aux  soirées  nflieielles  dans  ses  salons;  l'hôtel  de 
la  Présidence  est  ilc\enii  iiiiKinuaissable ,  et  les  magnifi- 
cencesilela  l(i'puhli(|iie  s  iru-ent  les  souvenirs  de  la  mo- 
narcliie  C.epend.iiii  uu  ne  peiina  pas  dire  de  la  présidence 
actuelle  ce  ipi'nn  reprochait  a  I  iiiicienne,à  laquelle  on  avait 
attache  tant  d  avantages  matériels  que  les  honneurs  y  sem- 
blaient étouffés  ïuus  les  prolits.  Cette  réllexion  nous  amène 
assez  naturellement  à  la  vignette  n°  2,  qui  figure  l'entrée 
céréinonialedu  Président  dans  l'Assemblée. 

Il  y  a  toujours  quelque  chose  d'imposant  dans  celle  opé- 
ration; mais  cela  dorénavant  tiendra  davant:ii;e  :i  I  idieque 
l'on  se  fait  de  cette  dignité  et  de  rhomme  qm  I  m ,  upe, 
qu'à  la  pompe  extérieure  dont  on  l'environTii'  l.e  jneMilent 
n'a  plus  de  costume  et  il  n'a  d'autre  cortège  que  celui  des 
secrétaires  et  des  huissiers.  Si  la  garde  nationale  forme  en- 
core la  haie  sur  son  passage,  on  n'y  ajoute  plus  le  salut  du 
tambour  qui  rappelait  cette  variante  du  Déserteur  :  a  La  loi 
passait  et  le  tambour  battait  aux  champs  »  La  révolution 
de  Juillet,  en  simplifiant  les  anciennes  habitudes  extérieures 
de  la  présidence ,  n'avait  pas  nui  à  l'éclat  qui  doit  s'atta- 
cher à  ce  principatus  mensuel  ;  elle  avait  compris  qu'il  n'y 
avait  pas  de  dignité  possible  avec  une  sonnette;  un  jour  oii 
l'autre  la  R(''p'iiMi,iiie  eiiiiipieiMlr:i  qu'il  n'y  en  a  p.n-  plus 

avec  un  cll,ipr;ni     Knlml  ,l  ce  elirlir]i.iite-lv-|H'rl     -,,n  ncuI 

refuge  dans  le.-  urjiules  çn-es,  le  pre-ulenl  ;cen  m. il  ilil 
sans  intention  de  calembour  )  ne  nous  semble  [w.-.  ^ullisam- 
ment  couvert. 

Voici  le  daguerréotype  qui  impose  à  nos  représentants 
d'autres  épreuves.  Ses  innocentes  malices  ont  fait  bien 
des  victimes.  C'est  le  verre  grossissant  de  toutes  les  im- 
pcrfeclions  physiques.  Il  exagère  d'une  manière  inconve- 
nante les  rugosités  de  la  peau ,  le  bistre  des  carnations , 
l'épaisseur  des  mâchoires  et  les  protubérances  nasales. 
Hier  encore,  M.  X..  représentant  camard,  se  plaignait 


L'ILLUSTRATION.  JOURNAL  UNIVERSEL. 


a  un  collègue  de  ces 
mauvais  procédés  de 
rapparoil  qui  ont  rendu 
riiii|ii'rrcTtion  plus  aji- 
parcnle;  à  quoi  le  col- 
lègue répondit  naturel- 
lement par  le  mot  de 
Talleyrand  :  "  Il  suffit 
qu'on  ait  mal  quelque 
part  pour  qu'on  vous  y 
attra|]e?  »  On  parle  de 
brouilleries  qui  n'ont 
rien  de  politique  et  de 
mariages  manques  grâce 
à  ces  indiscrétions  de 
la  chambre  obscure.  Un 
autre  détail  parlemen- 
taire qu'il  faut  bien  en- 
registrer ici,  c'est  la  de- 
mande de  deux  pétition- 
naires pxc(-iitriqnr^;  l'un 
implonnlilr  r.\^-,,'inMrr 
la  |>lniiilll;j,ilHiii  iliiii 
décret  i|ui  iMijiiiijiiil  a 
toutes  les  femmes  de 
couper  leur  chevelure  et 
de  se  montrer  dans  l'état 
où  Dahlila  réduisit  Sam- 
son  ,  vu  l'influence  fâ- 
cheuse qu'exerce  sur 
l'autre  sexe  le  dévelop- 
pement illimité  de  cet 
ornement  séducteur  ; 
l'autre  pétition  ,  qui  ne 
semblera  pas  aussi  tirée 
aux  cheveux  et  qui  n'a 
pas  une  portée  capitale, 
réclame  une  ordonnance 
bui  11  défende  de  couper 
les  queues  des  chiens 
(agitation  en  sens  di- 
vers), attendu  que  dans 
la  canicule  les  chiens  en- 


ragés ,  portant  la  queue 
entre  les  jambes  (on  rit), 
il  devient  impossible  de 
les  distinguer  s'ils  n'en 
ont  pas.  »  L'Assemblée 
consultée  passe  à  l'ordre 
du  jour. 

Cependant  il  s'est  fait 
un  grand  bruit  du  côté 
du  Théâtre -français, 
l'hedre  est  revenue,  Her- 
njione  va  reparaître  , 
nous  allons  revoir  ma- 
demoiselle Rachel.  Pen- 
dant trois  mois  made- 
moiselle Hachel  a  pro- 
mené a  l'étranger  et 
dans  nos  départements 
la  tragédie  française .  la 
poésie  française  ,  l'art 
français,  et  partout  elle 
a  obtenu  les  plus  bril- 
lants triomphes.  On  a 
dételé  sa  voiture  aux 
portes  des  villes,  on  lui 
a  dressé  des  arcs  de 
triomphe  ,  des  maires 
font  haranguée  ,  elle 
nous  revient  criblée  d'o- 
vations ,  écrasée  d'ap- 
plaudissements, et  char- 
gée de  dépouilles  opi- 
mes  ;  il  ne  faut  donc  pas 
désespérer  du  beau,  du 
goût,  de  l'art,  tant  il  est 
vrai  que  ces  instincts 
élevés ,  la  sauvegarde 
de  la  civilisation ,  peu- 
vent très  bien  s'allier 
avec  l'amour  éclairé  de 
la  liberté.  Sans  dout«  il 
vous  est  permis  de  ras- 
sasier   des    populations 


Cménionial  de  1  entrée  du  Piésideiit  de  l'.Vs; 


néceptioii  dans  le»  salons  du  nouvel  hôtel  do  l.i  Piisidence  de  l'AsserabWo  Nationnle. 


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21 


1.  Balle  de  calibre  du  fusil 
de  munitioD. 

t't  3.  Balles  de  calibres  infé- 
rieurs (tels  que  le  fusil 
de  chasse  )  ,  dont  le  jet 
n'a  pas  été  coupé.  Dans 
le  n**  3  une  partie  du 
jet  est  rabattue  sur  la 
balle. 

4.  Projectile  fondu  dans  un 

dé.  —  Ils  existent  en 
grande  quantité  et  va- 
rient beaucoup  de  ca- 
libre. 

5.  Id.  —  Au  fond  du  dé  il 

y  avait  des  petits  mor- 
ceaux de  cuivre  qui  se 
sont  imprégnés  dans  le 
plomb. 

6.  Espèce  d'olive  en  fonte 

percée  d'un  trou  dans 
le  sens  vertical.  Ce  pro- 
jectile fait  partie  des 
munitions  saisiesà  l'Ile 
Saint-Louis. 

7.  Feuille  de  plomb  roulée. 

8.  Projectile  percé  au  mi- 

lieu et  dont  l'extrémité 
est  taillée  en  hélice. 


9.  Lingot  de  plomb  traversé 
de  part  en  part  par  une 
tige  en  fer. 

10.  Balle    en     plomb     fondue- 

dans  un  morceau  de  bois  ; 
trou  fait  avec  la  mèche 
anglaise.  Ces  balles  sont 
en  assez  grand  nombre 
et  varient  sensiblement 
de  hauteur. 

11.  Cartouche  contenant   deux 

projectiles  :  une  bail» 
spliérique  avec  jet  et 
un  projectile  semblable  à 
la  ligure  10. 

12.  Balle    dite    Sobrier,    per- 

cée dans  l'intérieur.  Ces 
balles  ont  été  saisies  le 
15  mai. 

13.  Morceau  de  fer  carré  avec 

rainures  sur  les  faces  ; 
les  angles  sont  à  pans. 
Ce  projectile  a  été  ex- 
trait du  dos  d'un  garde 
mobile. 

U.  Projectile  conique. 

15,  16,  17,  18,  19.  Modèles 
pris  parmi  une  foule 
de  projectiles  de  toutes 
formes  et  de  toute  pro- 
venance. 


Projectiles  divers  provenant  des  insurgés  de  Juin  1848. 


de  théories  industrielles ,  vous  pouvez  leur  ouvrir  des  clubs 
comme  menus  plaisirs ,  leur  donner  des  journaux  pour  lec- 
ture et  des  chemins  de  fer  pour  récréation  ,  mais  soyez  as- 
surés que  cette  abondance  de  biens  ne  leur  rend  que  plus 
sensible  la  disette  des  autres;  un  jour  vient  où  ce  peuple 
se  reprend  de  plus  belle  et  de  toutes  ses  forces  à  ces  mer- 
veilleux enchantements  des  grandes  nations  et  dont  les 
grandes  nations  seules  sont  capables.  Après  des  mois  ou  des 
années  d'utopies  sociales ,  de  rêves  funestes ,  de  périls  re- 
doutés et  de  bavardages  inutiles  ,  ce  peuple  fatigué  s'en  re- 
vient à  la  liberté  vraie,  à  la  délivrance  morale  par  ces 
belles  aspirations  qu'on  nomme  l'art ,  la  poésie ,  la  littéra- 


ture, la  peinture  et  la  musique  ,  ces  principaux  agents,  dans 
le  présent  comme  dans  le  passé  ,  de  toute  civilisation  et  de 
toute  splendeur. 

Aidez  les  arts  et  les  artistes  ,  encouragez  les  lettres  ,  mul- 
tipliez les  œuvres,  ouvrez  des  débouchés  à  leurs  produits, 
alors  on  vous  applaudit ,  on  vous  bénit ,  on  comprend  que 
la  France  n'a  pas  dévié  de  son  sillon  lumineux  ,  voilà  ce 
qu'un  pouvoir  intelligent  et  protecteur  de  tous  les  intérêts 
doit  faire  pour  la  pensée,  et  ce  qu'il  lente  chaque  jour,  et 
même  ce  qu'il  a  commencé  de  faire  pour  la  librairie  fran- 
çaise. Elle  se  mourait .  elle  était  morte  ;  tuée  par  le  bruit 
de  la  rue  ,  par  l'agitation  du  foyer  domestique  ,  par  l'enva- 


hissement de  tout  ce  qui  tue  le  livre  ,  c'est-à-dire  le]nianque 
de  sécurité  ,  l'absence  de  tout  loisir  et  de  toute  liberté  d'es- 
prit ,  si  bien  que  la  librairie  se  voyait  menacée  de  devenir 
un  commerce  absolument  inutile  ;  comment  ressusciter  la 
morte  et  lui  dire  :  Lève-loi  et  marche?  comment  rendre  la 
vie  ,  la  force  et  la  santé  à  ce  cadavre  ?  C'était  un  problème 
au  moins  aussi  difficile  que  celui  de  l'organisation  du  tra- 
vail et  que  la  bonne  volonté  de  quelques  hommes  intelli- 
gents a  su  pourtant  résoudre  aux  applaudissements  de  tous. 
L'idée  est  si  simple  ,  comme  toutes  les  bonnes  idées  ;  qu'on 
s'étonneseulement  un  peu  qu'elle  n'ait  point  reçu  déjà  et  de- 
puis longtemps  un  commencement  d'exécution.  Il  est  vrai 


Les  insurgés  de  Juin  1848 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


il   -: 


„l   |H.,,ln.    I. 


li,|„OS  ' 

lrani;ai 
sait  né 


":'''''.'"■;',.'; 

iirilllu's,  l:i  \h 
l'Ol  do  1.1  lllil 

^OllS  un  a>lrr  l.i 


1-  |.^ 


I  ilr.  la  |HMiséc 
r  [ic'ii  i]ii'il 
iii|inrl('  lie 


lin  mnri'lK' |iii;niin  sur  rue;,  terres,  inscriptions  au  grand- 
livre  ,  rien  (|iieeela  I  Voilà  le  miracle,  et ,  par  exemple,  noiis 
ne  miiis  chargeons  pasde  vous  l'expliquer.  Oui ,  parmi  ces 
cciil  viiiul  iiiillo  liillets  il  vingl^cinq  francs,  un  millier  ro- 
cuiMlIcra  cinq  cciil>  Ir.incs  ,  mille  ,  quinze  cents,  trois  mille 
l'I  jiisi|ii  a  ili\  niilli'  livres,...  de  rente.  Assurément  vous  ne 
sauriez  Iniover  ailleurs  une  plus  belle  sui|iiiM' ,  cl  imlrc  sr- 
maine  ne  saurait  vous  otTrip  un  plusgraml  cm  ■un  i  uni 
Cependant  le  fîymnase  a  donné  un  pclil 


elle  du  1„ 
Ml" 


de  tous  les  tciiipbl 
,  vers  l'an  de  gnU-e 
I  trois  pour  cent  s'é- 


SUr  une  lli^tniicllc  du  Imll  \icil\  Irlllp: 

ISl'i.  un  il:-  Cr.i 
tailclliilM  1111  .jri 
la  Jeanne  Miilhieu  du  (iMiui.Kr  ni.iilciiniiM'Ilr  \niil;iil  être 
.liiiii'c  iiiiiirsiii-iiu'iiic  .  M  liii'ii  .|ii(.  -.111^  une  .iiliniic  ma- 
lUi'uVM'du  |icrc  .  le- inirr-.  nr  ~rM'r;iiriil  |i:i>  I;mIc-  an  L'ré 
de  SCS  \icu\.»Snii  iirhl  -nlilcrlu-j..  ,  qui  l.iil  iHiniiriii  ,i  li- 
uia.miiatKin  d'un  liii,iiiri,.|,  ,011-1-!, ni  a  Iraii^inrniiT  le  cen- 
dre futur  en  un  a^^l^tl■  Im'-ii;jiicu\  |Miur  le  Iic-mih  ilr  l.i 
cause,  comme  disent  1rs  |ii,ilMirii-    ri  l,i  iuhr  ilr\  ml  Inm- 

tÔt  de    l'amour.  La    niecr    imuimUi'    lr| hul    1  c    r.u.nlrir 

original ,  avec  une  logèrr  \,iri,inlr  l>  n V-i  |ms  \i-  prir  c|ui 

attrape  sa  fille,  c'est  la  fille  qui  mystifie  ici  rxrriirni  I nnr 

11  destinait  la  main  de  Jeanne  à  un  dipliuii.ili'  ,  il  1  i'>l  un 
dessinateur  qui  l'obtient.  Le  cadre  est  luciiii  et  la  pciniuri' 
des  plus  minces ,  on  s'est  sauvé  par  la  finesse  de  la  touche. 
C'est  ce  que  les  peintres  appelleraient,  je  crois,  un  succès 
pelure  d'oignon. 
-     Avez-vous  jamais  été  en  France,  dcinandc  Candide  ii 


Martin'  —  Oui,  répond  l'autre,  jai  vu  |iliiMruis 
villes;  il  y  en  a  où  In  moitié  des  liabilani- i'>l  liillc 


qucl- 


liclr 


il    I 


li'l   r,-|irit. 
-I  lir  r.iiro  i'a- 


iiiimr,  ri  1.1  -rniiiile,  de  nicdiic    On .1  l'.ni-    illirnlilc 

|,,utrscrM--|irce.s-la,  c'est  une  |nv--e  ,l,in- l,H|nelle  hml  le 
niiinile    elierrlie    le    plaisir  et    ou     ple-que    |.el-i r    lie     le 

trouve.  On  dit  qu'il  y  a  des  gens  1res  polis  il.uis  celle  ville- 
lii ,  je  le  veux  croire  ,  quant  à  moi  je  n'y  ai  vu  que  trois  es- 
pèces de  gens  :  la  tourbe  écrivante ,  la  cabalante  et  la  con- 
vulsionnaire.  »  Et  là-de^siis  l'Iionnéte  Candide  est  fort 
impatient  de  voir  Paris  Cimlide  n  r,iii-  '  i.inel  Mindeville 
ou  vaudcvilisanfserail  a— iv  n-e  puni  I  \  remlnne  '  Au-m 
le  nÔtre(  je  [larlcdu  Camlide  jeue  celle  seiname  au  lliiViliv 
des'Varii'li's  ne  \,i  pas  si  loin  ,  à  bcaucoui)  près.  Chassé 
de  la  faieii  linniihiinie  que  vous  savez,  du  cliâteaudeM.  le 
baron  de  Tliiinder  leii-Tranck  en  Westphalie ,  son  paradis 
terrestre,  ce  pauvre  Candide  tombe  dans  lenler  des  Bul- 
gares ,  puis  il  traverse  les  monts  et  les  mer-  a  l.i  1  vi  lierche 
rie  sa  chère  Cunégonde  ,  et  suivi  à  dislaine  par  mui  maître 


il  finit  par  arriver  tout  droit  dans  le 
le  fameux  Eldorado  ,  cette  terre 


p.ii  CM  elleiiii' lin  riiniiiuinisme  ,  1  lcanereali> 

ee,  ou  il  n  v  a 

m  reliL-imi,  m  l.innlle   ni  eiiunle  jn^ln  e,  mi  ,■! 

a, -un  \ildaiis 

la  COmmilIlllllIe  de   lous  les  lilen-el   ,1c  linili- 

le-    1,. ^, 

oùlesfonlaini-di-lnl.nelil  le  mi,  ,    l,'-ii,r,- 

1    la  ,', 'II,.. 

où  l'nr  est  limie  ,  el   par  eniiscpieul  eu  il  n,'  - 

,i^nl,,|ue,l,.  >,■ 

baisser  | r  en  pnniilre.  uiienlin  1  on  elail  -i 

ci'\q 1 

endevenail  inalheiiieiiv  a  faire  pitic    liieii  ,p 

.sodcdu  MaiCaniliile  ,   le  Caudale  ,1,-   VanrI 

'S  aniail  pu -e 

faire  pre-,n,l,ilil,'  ,1  a,lu.'l  ,  ni.ii-  ii.iu-  n  ,i\. 

II-    p,i>   \,inlu 

voir  bien,  1,111-  ,1,111-  ,ell,'  m-, -ni, M,-..  -,ilii,.  .1. 

r,ipliini-nie. 

et  nous  un  aMin-  ineinniin  le,-  :jr,iii,l,-  ,•!   p. 

hle-    ln,ilices. 

Aussi  bien  ne  hnnlie/  pas,,  l,,in,l„l,'    m,. 

leiaierde 

couplets,  ne  tmielnv  pas.i  r,in;:l,i>-  ,'l  .i  s,  -  i 

i-niineiiienls, 

laissez  1  esprit ,  l,'-,ii','.i-iui'>  el  li'-plai-,iiil,-i  i 

■-,l,'\,iltaire, 

où  le  dieu  lui  111, 'lue  les  a  places;    vous  r,,i 

ipi.'lnv,  qilon 

s'est  nieilMHivninil  e^avéde  ces  perscinn.i-,- 

r,ii-,'nneiirs. 

dccetl';id,ir:i,l,,  eu  larton  peint ,  etdeee  l„,i 

liile,|iuparmi 

tant  d'aventures  qui  lui  arrivenl ,  ne  -ni  p,i.- 

■n  ImiiNcrune 

scule  comique.  Va  pour  1  opliini-in,-  '  C,p,'n 

laiil  celui  des 

Van(f((,'s  ne  fera  guère  de  proseKi.-,  ei  -,,ll^ 

les  optimistes 

lli'l    le 


sl-l,al,l  lin  ,1 
travers  le-  \i 
paroles  peu,' 
cela  :  —  /'/„ 
rhnlel,   el   ,  ,' 

I" 


,-,,n,, 

.    pal,- 


siégeant  au-dessous  du  Instre  ,  ce  iiauvro  Candide  allait  faire 
naufrage  tout  net  en  vue  de  l'Eluorado. 


Voici ,  à  propos  de 
défaut,  un  pelil  épis, 
de  fer  pendani  celle  ; 
Paris  à  |)iiiiUer,|iieel 
viendra  pineliaiiieiueiil  i  ,  i 
élé  prévenu-  ,pi  iinlepeiidai 
de  Pans  le  vendredi .  deux  ; 


oniédie  (jui  nous  fait  aujourd'hui 
pninle  il  l'histoire  des  chemins 
e  (In  iiiaumnait  le  elieiiiin  de 
lais,  yilhistnilinn  y  re- 
I'  que  les  iiiviles  aviiient 
du  L-raiiil  (ainviii  parlant 
l'Iaienl  mis  a  h'iir  dispn- 


lall 


sition  pour  le  .saiiiedi.  On  veiil  prniiler  de  celle  f.iculle  pour 
ses  affaires;  on  resie  donc  daiislacapil.ile  jusipiau  dernier 
moment;  on  part  enfin  ;iiu  est  parli  ,  maisim  n'a  pas  prévu 
l'organisation  incomplète  du  nouveau  service  ,  l't  la  néces- 
sité qui  en  résulte  de  ftiire  soixante  lieues  sans  pouvoir 
mettre  pied  il  terre  pour  la  plus  maigre  collation.  C'est 
ainsi  que  nos  voyageurs —  ils  étaient  huit  et  des  plus  par- 
lemiMitaires  et  des  mieux  huppés  —  arrivenl  a  ('alais  ,  au 
milieu  de  la  nuil ,  parl'ailemenl  all'amés,  l'un  atlcléa  sa  va- 
lise ,  l'aulre  tirant  un  sac  de  nuit .  ctchercdianl  lous  un  gîle 
sans  le  trouver,  de  sorte  (]u'on  se  résigne  à  entrer  dans  l'holel 
Guillac  pour  y  smijier.  Nouvelle  illusion  '.  Plus  d'une  demi- 
heure  s'était  écoulée  déjà  ,  nous  ècril  un  léiiinin  oculaire. 
sansi|u'on  vil  apparaiire  aucun  des  prep.irald's  du  souper. 


p,i-  1 


pniir  .sli- 


ipi,.--.a.L','nl.,,l  .,'pl,ilnlen  -un  p.ilnl-ile 
stle  persistance  qui  trouble  le  repos  de  la  cité  ;  et  il  finit 
par  appeler  la  police  il  son  aide  pour  mettre  à  la  porte  les 
perturbateurs.  On  se  perd  on  conjectures  sur  le  dénoùment 
qu'aurait  eu  cette  grave  affaire,  si  le  maître  de  l'hôlel  Meu- 
ricc  ,'  obéissant  il  un  mouvement  d'attendrissement  a  l'as- 
pect de  ces  grandes  infortunes  à  jeun,  ne  les  eût  recueillies 
il  sa  table  comme  ces  rois  méconnus  que  le  Candide  de  Vol- 
taire rencontre  ii  Venise  ii  une  table  d'auberge.  Nos  repré- 
sentants v  furent  traités  avec  les  égards  dus  il  leur  rang  tl 


i-,l,-ap|.élil>p 


.  ,1  .dli'i 


l'Ilippiiill- 


:,p, 

d'clcdaii.s  kl  »al 


du  Cil 


-01 V 


leutaires. 
innes'inau- 
-llislorique, 
a  l'envi  des 
c  ce  soir,  el 
r,  ses  exer- 
pique.  Ce  sont  là 


des  restaurations  qui  obtiennent  l'approbation  de  tous  les 
partis. 

Hélas  '  hélas  I  ii  quoi  nous  oblige  notre  devoir  d'annota- 

li'iii-  ,1,'  l,,ii-  le-  lail-  il,',-hr,Mii,pieiir-iiii-ereelde  miroir  plus 
11,1111-  liili'l,'  ,1,'-  ,'\,-i,,'iiii-iil-  '  \,iila  notre  fin  de  Cour- 
rue  l^'iil  .<\\n~lm\ii  -[«■,[. i,lf  Arr.  i  iiKseits  de  guerre.  \'om- 
,pi,H  l,iiil-il  ,pi,'  la  i-ai-iin  ,1  |-:i,it  el  la  lui  su|irtine  du  salut 
pu  1,1,,'  n,.  p,'i  nii-ili'ul  |i.i-  en,  ,iie  ,r,iiiM  ir  l,--  cachots  el  de 
i-,.|ei-iii,'r  raliinie  en  en  relu-.inl  l.int  di'  inallieurcux  !  l,'/t- 

hislnilinii  \,iii- lie  1,  1  |.i,urla  dernière  lois  les  dèplora- 

lil,'- in-iruineni- il,' 1,1  LiuiTr,' (ivile  ;  pour  la  dernière  fois 
an— 1  l'Ile  vini-  iiili,i,luil  il.ins  le  sanctuaire  de  cette  terrible 
justice  ,  en  faisant  des  vœux  pour  n'avoir  à  reproduire  bien- 
tôt que  des  scènes  d'absolution  ,  de  clémence  et  d'oubli. 


Kn|t|ioi*t  de  n.  Ariiianii  jTlarraet 


Srn    LE     PROJET     Dli 


sriTCTION     l'HESEXTE 
N,VTI0NAL1.:. 


Après  ipialre  mois  de  travaux  el  d'éludés  préliminaires, 
il,'  |,,i-  ,1,'   lian^ilinii   el   lie  ile,r,'l>  ,1  ni-ç.'iice  ,   de   périls 

^lave-  el  de  Inr I,il,l,'-  l'pn'inr-  ,  v,ii,-l  i-nlin   l'Assemblée 

nationale  sur  le  seuil  de  l'edilice  (|u'clle  a  mission  de  con- 
struire. 

Sera-ce  le  temple  solennel  et  durable  de  la  liberté  ,  de  la 
fraternité  et  de  l'égalité?  .Sera-ce  un  monument  éternel. 

Cl ne  l'avait  in;.;i'Mii'inienl  aiiL,uiii''  de  sen  leiivre  [iriipre  la 

|iri'inier,' r,,,ii-lilu,iiile  ,'  La  -,.,-,.i,,l,'  n,'  p,,rla^i'  |m- ,,ssuré- 
ut  l'elleillusiiin  Cniniiieiil  ,-'v  ahaiidi.iinei.iil-elle  ,  lors- 
que ,  depuis  soixante  années ,  la  France  a  subi  tour  a  tour 
"  les  cruelles  douleurs  de  la  guerre  civile  ,  les  brillantes  dé- 
ceptions de  la  gloire  ,  les  amerluiiies  de  la  défaite  ,  la  mo- 
narchie ah-uliie  iln  L'i'ine  ,  la  iniuian'lii,'  lenipi'iee  el  sans  gé- 
nie, el  l,i  li'.iliiinl,' ,  et  I  illeL'iliniili'  II-  p,.uv,,n-  t',indé3 
sur  (lesti-a,liliiiii-el  II-  piiuv,nrs|-,.ii,|,'s  -ur  ,li- il  leièls ?... 
Tout  s'est  usé  ,  é]iiiisé  ,  jusqu  a  ce  qu'à  ces  souverainetés 
usurpées,  compressives  ou  défaillantes,  le  peuple  en  ait 
substitué  une  qui  ne  saurait  ni  s'épuiser,  ni  jiérir  ;  la 
sienne      .     n,if,ju,rtdeM   Muerdsl  1 

,\pr,'suii  lel  i,ihle,iii  ,  il  p,ii,ni  ilillii'ilo  d'espérer  pour  la 
ihiiiM'll,.  ,-li,irl,'r,'pul,li,-,nii,'.  qui  >e  prépare  la  pérennité  des 
-1,',  li'S  —  l';ii  lail  lie  1-1,11,-1111.  lien  ,  il  n'v  a  d  ('■ternel  ,  dit 
,s|i,ik,'speare,  que  le  tr.iv.nl  du  |.,-in,'in-  —  Mai-  la  dé- 
ni,',ne  des  vivants  ne  du;,'  qu  ,i  la  riiinlilien  ,1,'  -,■  ri'iinuve- 
liT -ans  re^se  (j'ia  est  suilout  vr.ii  des  institutions  ré|)U- 
hli,  ,1111,'-  In  temps  plus  ou  moins  long  ,  la  lettre-morte, 
pi'ul  ii'jii  une  grande  nation,  la  retenir,  la  comprimer, 
couiine  il.iii- un  miMile  imioiialile  Maisil  vient  on  |onr,  une 
heure  ,  mi  I,' pm-jn-  lenleni.'iit  l'ail  l,n-e  lenlrav,.  ,  ,.ni- 
porte  lesi, -,-!,, m,  -  ,-l  -e  l,,il  piiir  p.n  ,1e  n-iiilil,'-  ,1,',  liii,'- 
nienls,  ^  ,\in,-i  InmlH'nt  l'ii  pi,ii-siei-e  IcmU  na-l  lesde  ,iuiii/e 
siècles. 

En  République  ,  au  contraire ,  sous  le  suffrage  universel , 
les  révolutions  n'ont  plus  de  raison  d  être,  et  l'insurrection 
est  le  plus  grand  des  crimes.  Pourquoi  ?  —  M  .Armand  .Mar- 
rast  va  vous  le  dire  mieux  que  nous  : 

«  Le  moyen  d'éviter  les  secousses  violentes  et  périodi- 
ques ,  c'est  d'organiser  les  institutions  de  manière  que  toute 
idée  juste,  toute  application  utile  puisse  s'y  encailrer  sans 
effort;  que  le  mouvement  des  fsprits  et  des  faits  se  régula- 
rise en  s'a|)pliquant,  que  toute  amélioration  ])uisse  pas.ser 
de  la  conviction  d'urv  seul  dans  l'opinion  du  plus  graïul 
nombre  et  de  l'opinion  dans  les  lois,  sansautre  trouble  que 
r-i^itation  causée  dans  l'atmosphère  politique  par  le  mou- 
veineiiTel  la  calme  chaleur  île  l.i  himiero. 

»  Oue  faut-il  pour  cela,'  ,\diiplei' une  forme  de  gouverne- 
ment flerilitc  .  pniétrahle  aux  iiitcrètsfommf  niu  idées  ,  où 
le  sentiment  public  trouve  toujours  son  expres-ion  sincère  , 
el  dont  la  morale  soit  rebelle  à  l'ambition  ou  à  la  violence 
des  minorités, 

•  Voilii  ceipie  réalise  legouverneinenl  républicain  à  l'aide 
du  sulVr.ige  univei-scl  et  direct  cpii  est  son  principal  iiislru- 
nieiil.  Avec  le  sullrage  univci-scl  (oi// ;)fi((  itredrfrcluru.r. 
niiii.i  tinit  est  temporaire  et  rorrigilile.  » 

C'est  la  ,  en  effet ,  la  grandeur  e;  iieut-iHre aussi  la  misère 
dessocièlcs  démocraliipies.  jeunes,  luuùllantes,  violemment 
débordées  d'un  lit  inonarchupie  Longtemps,  sans  doute,  il 
leur  l.iudra  clieri-her  à  travers  mille  nbstacles  la  voie  régu- 
lière qu'elles  doivent  suivre  un  ieui  —C'est  dire  assez  ipie 
I  un  ne  piail  viser,  pour  la  con'sliliilioii  élaborée  acluelle- 


iiieiii  par  l'Assemblée  nationale ,  à  la  perpétuité  d'une  loi 
iiiiisaiipie  ,  11(111  plus  qu'a  la  solidité  d'un  monument  égyp- 
lieii  .\l.iis  si  I  \s-eu,l,lèe,  qui  ne  peut  ni  engager  l'avenir 
dniil  elli'n'e-i  p.is  luailresscv  ni  méconnaître  le  présent  et 
-,  -  pii--,inte-  exi.çinei's  ,  s,-  lu, nie  .i  iiipusdoi r,  |iour  par- 
le! \  11  Ij. Il  renient  ,  une  m.u-on  ,  un  veleun'nt  a  notre  taille  , 
-1  ell,'j,l!ed.in,les(.l  le- loiidi'iuclit,-  s.Tieux  et  stables  de 
1,1  |.,i  m,'  ri'pulihcaiiie  .  i-  e-l  assez  pour  sa  gloire  .  el ,  quel- 
,pi-  ii'M-iiin,  ipielipie  iliaiii:,. nient  qu  .ip|„-ile  ulléfieure- 
iiient  -lin  leuvre,  ses  droits  a  nuire  gratitude  seront  du 
moins  invariables  cl  imprescriptibles,  et  l'on  pourra  ,  l'on 
devra  même  dire  d'elle  .-ans  emphase  qu'elle  a  bien  mérité 
de  la  patrie. 

Eplièmère  ou  solide  au  reste,  el  <|uelles  que  soient  ses 
destinées  à  venir,  1  édifice  constitutionnel  gagne  singulière- 
ment il  nous  apparaître  au  travers  du  frontispice  ou  du  uor- 
tiquedonl.M.  Armand  Marrast  est  larchitectc  ,  eidonllob- 
jct  n'est  pas  seulement  de  nous  en  laisser  voir,  mais  de  nous 
en  montrer  sous  ini  jour  lumineux  les  grandes  lignes  el  les 
assi-es  principales 

paf  quatre  départements  el  près 
s,  membre  du  gouvernement  provi- 
M  Manasi,  sur  son  banc  de  l'As- 
I,iii  ,1  -,  -  an,  ii'ii-.inii-  rêveur,  sou- 
cieux .  presquealli  i-ie  s,, il  li,i-,iiil ,  -,,il  in-iin,  t .  ilallachait 
souvent  un  regard  pi, m  de  renoiiriiiunce  p.irdon  .  cherlec- 
ti'iii,  -1  ,  ,11  M.ii  iiv.'liitionnaire,  j'niventeiin  moldontj'ai 
bisiiin  ,  enipri'inl  au— i  d'une  sorle  de  mélancolie  .  pour  ne 
pas  due  de  convoi; isc  et  de  regret,  vers  cette  tribune  où 
nagui'ie  et  durant  tant  d'années  il  avait  siégé,  trôné  pres- 
que ,  en  vertu  de  la  royauté  du  sarcasme  ,  de  la  verdeur  el 
de  l'esprit  Chaque  fois  (piun  orateur  inepte  ou  ridicule  se 
cramponait  à  la  tribune,  qu'un  ili'hafnisenx  s'élevait  ou 
qu'un  membredu  pouvoirinterp,  li,- ei  ie^',, vaut  faisait  sotte 
mine  sur  la  sellelle —  toutes  clm-e-  ,l,,iii  la  r,,vauté  en  par- 
lant n  .1  p,,inl  11  ii.stré  la  Hepublique—  .,ii  eut  dit  queM.  Mar- 
lasl  ,  heii'hail  HIV (ilunlairenieiil  dans  sa  |jni'he  ou  â  son 
oreille  sa  lu. une  plume  de  Tolède  .  nu  se  elierchait  lui-même 
la-haut,  dans  cette  tribune  ,  parmi  lous  ces  généraux  d'A- 
lexandre auxquels  il  a  légué  le  sceptre. 
La  nomination  de  l'ex-rédacteur  de  tant  de  l'remiers- 


llepii'seni 
irilll   inllllnl 

ml   iiiii 
,1e  -iill 

soire  el  iii.ii 
semblée  nat 

eilel'. 

loqueu- 

,lee  na- 

,   -  '  I  .  >  -i-h'giaques 

Il  ilnilll  qui  ,  du  reste, 

lit  Inndees ,  honorent 

■ien  piiblicisleilu.Va- 

idcnl ,  dans  sa  splendeur. 

-  et  nous  l'en  louons  — 

me  écrivain  el ,  descendant 


l'nris  élincclaiils  ,  de  tant  d'Adr, 

ses  et  fines portrailures,  à  la  pi,--   ,':,,,.    i  \--i' 

liona  le,  parait  avoir  fait  trêve  ,i  ,  ,     :      ,  ,       ■  i  ,  ,  -, 

V  ers  i'A  uld  lang  sync  el  le  hnquei 

si  ces  apparences èl  ces  (onjc-tiii-e: 

tout  a  la  lois  lecnair  el  lespnt  de  I 

tional.  (Juoi  qu'il  en  s"il  ,  le  pr 

n'a  pas  voulu  laisser  l'i  li,i|ipi 

l'occasion  de  rcappar.iiire  eoi 

de  son  fauteuil ,  il  a  revendiipié,avec  instance  les  laborieu- 

seset  émineiites  fonctions  de  rapporleurdu projet deconsli- 

tiiliiin  ipii  ,  tout  d'abord,  avaient  été  confiées  à  son  habileté 

de  plume  cl  même  de  parole. 

Nous  avons  un  double  regret  :  c'est  que  ,  d'une  pari ,  le 
manque  d'espace  ne  nous  permette  pas  de  reproduire  en 
son  entier  le  rapport  de  M,  .Marrast ,  et  riue  ,  de  lautre,  nous 
n'ayons  pas ,  pressé  par  les  besoins  de  la  publicité,  tout  le 
temps  nécessaire  peut-être  pour  apprécier  et  analyser  di- 
gnement ce  travail  politique  important  qui  puise  un  si  haul 
intérêt  dans  son  sujet  même  et  dans  le  nom  de  son  auteur. 

Ainsi  que  nous  le  pressentions  ,  on  retrouve  tout  il  la  fois 
dans celteceuvreriinnime de  style  et  le  républicain  sincère. 
Efforçons-iiiiii-  il.iliniil  déjuger  l'écrivain  ;  tout  à  l'heure 
le  répiililii  .1111  le— ,11  In  a  dans  l'analyse  el  dans  les  citations 
par  nous  muliipliees  autant  que  possible  des  passages  les 
plussignilicatds  du  rapport. 

Ce  document  est  d'un  genre  neuf  dans  ee  qu'on  est  con- 
venu d'appeler  le  style  politique  et  la  langue  des  alTaires. 
Il  y  a  de  limage  ,  de  la  période ,  du  nombre  ;  la  déificatien 
de  l'article  de  loi  s'y  trouve  quelquefois  portée  jusqu'au 
lyrisme.  L'écrivain  s'y  défend  de  l'homme  politique  :  il  ne 
v'eut  pas  perdre  ses  droits  ,  et  sous  le  démocrate  on  sent 
pointer  l'académicien  ,  mais  l'académicien  révolutionnaire, 
comme  Kabreet  Marie-Joseph  .  comme  l'eussent  élé  Bar- 
nave  iM  Vergniaiid,  s'ils  eussent  vécu.  Ce  n'est  pas  ainsi 
,pi  l'i'i  iraiiMil  a— nri'inent  un  vieux  ministre,  un  directeur 
i:,'ii,r.il  ,1,'  I  ,'iiiv;;isi rement ,  un  honorable  économiste  ou 
slalislieien  ipi'nnt  blanchis  vingt  commissions  du  budget. 
gens  experts  en  celte  malien^  :  sans  doute  !  mais  alors  qu'il 
s'agit  de  constituer,  de  sauver,  de  régénérer  le  pays,  il  est 
permis  de  s'animer,  d'éclater,  d'avoir  de  la  pompe  ,  de  la 
véliémenco,  du  style.  De  pareilles  occasions  ne  so  présen- 
tent pas  deux  fois  .  sinon  dans  une  vie  d'homme ,  au  moins 
dans  une  carrière  de  rapporteur. 

Je  no  conseillerais  pas  toutefois  il  qui  n'aurait  |>as  le  ta- 
lent hors  ligiu' île  M  Marrast  de  Se  lancer  à  sa  suite  dans 
celle  voie  un  peu  hasirileiise  Son  travail ,  connue  toutes 
lesiruvres  composites,  n'est  pas.  selon  moi .  un  modèle  sur 
à  proposer-,  et  tel  qui  viunlrail  se  garder,  à  son  exemple,  de 
la  séclieresso  réglementaire  cl  officielle  .  pourrait  bien .  faute 
de  pos.<èder  un  peu  de  la  verve .  du  goût  el  de  la  sûreté  de 
main  d'un  pareil  o,«fur  politicpu- .  se  précipiter  dans  l'en- 
ffure  et  raccomumder  net  son  auditoire  avec  le  six  le  de 
proces-verbal  M  Marrast  lui-même,  tout  artiste  qu'il  est. 
mais  parie  ipie  le  côte  .saillant  de  son  talent  est  bien  moins 
renlhousiasme  germanique  que  la  vieille  ironie  française  , 
n  échappe  pas  toujours  à  cet  irueil .  et  l'on  Iniuve  ,  chemin 
f,iis;inl  .  dans  son  Rapport,  un  peu  de  rliéloriqiic  el  des  ex- 
pres.sioiis  ipii  ne  sont  pas  loujoui-s  heureus<>s  .  ou  certains 
traits  mal  réussis.  La  société  conipaiw  n  une  machine  gui 
se  Ji'lnuiiie.  la  ("(Uisliluliiui  pas.si"e  à  l'étal  d  ii.re  de  In  sphère 
oii  se  meut  l'aetirité  nationale  .  le  caractère  des  pnices  qui 
n'est  piiinl  ainialde.  tout  cela,  el  quelques  lapsus  de  même 
geniv.  n  appartient  ni  au  slvie  noble,  ni  ii  l.i  langue  des  af- 
faires M.iis  il  V  a  des  lâches  au  soleil  :  il  (hmiI  bien  s'en 
reiiionlrer  dans  l'iruvre  de  M.  Marrast  .  vis-ii-vis  duquel 
nous  sernuis  honteux  de  ces  petites  chicanes  .  si  elles  ne  lui 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


23 


iiortaipnt  hi  iiiruvc  cprtaiiie  du  soin  que  nous  avons  mis  il 

loliro,  l'n  MIC lenips  qu'elles  témoignent  chez  nous  d'un 

diiettantisiiic  lilléraire,  d'un  culte  de  la  forme,  exagérés 
|ieul-élre,  mais  que  plus  que  personne  M.  Marrast  aurait 
intérêt  à  trouver  dans  la  majorité  de  ses  lecteurs. 

Abordons  maintenant  le  côté  politique  de  son  travail. 

Le  rapport  débute  par  poser  en  principe  la  loi  du  progrès. 
Méconnue,  celte  loi  fait  les  révolutions.  Le  bon,  le  seul  gou- 
vernement est  donc  celui  où  elle  aura  toujours  droit  de  cité 
et  de  su|)rc'iiKitie,  et  ce  gouvernement  n'est  autre  que  la 
forme  re|iidilir;iiiir,  ;iidée  de  son  moleur  essentiel  et  de  son 
irréfragalilr  ilcninil  d  m-ilre  :  le  siilfioye  universel. 

'  Km  deu\  llllll^,  ciiiu  lut  le  nipport  a  ce  sujet,  la  France 
est  une  démocratie,  le  gouvernement  de  la  France  doit  être 
une  répiiblii|iie.  « 

Conclusion  d'autant  plus  juste,  qu'en  politique  comme 
en  jurisprudence  on  peut  toujours  dire  que  ta  forme  em- 
porte le  fond. 

Suit  cette  peinture  de  la  France  et  de  la  fonction  qu'elle 
remplit  (laii<  le  monde,  toute  de  dévouement  et  d'initiative  : 
"  Cette  rniiiiinii,  rlli'  l'exerce  dans Sa  vic  intérieure  commo 
dans.sa  mimIc  k  IiIkhi  .'^on  travailconstant  sur  elle-même, 
c'est  rairriirlii-^cniciil  Miccpssifde  tous  ses  enfants;  son  tra- 
vail au-dr.~-ii,.  ,  r-l  (Ir  iv|i;iiidn'  le-  iilcrs  qni  Irlevent  elle- 
même,  l'.r  i|iii  1,1  ili-hn-iir.  !■  rr-l  (II'  l.iiiv  pidliler  autrui  de 
ses  propiv-.  mminrli',:'  Icjui-iiie  lui  ol  anlipalliique ,  elle 
n'a  jamais  acquis  que  pour  dépenser. 

»  Changeant  dagcnts  et  de  iiiiiy.ens  suivant  le  temps ,  elle 
cherche  toujoursa  se  communiquer,  às'épandro;  tantôt  par 
l'épée,  quand  la  victoire  ouvre  les  grands  canaux  de  la  ci- 
vilisation ;  tantôt  par  les  révolutions,  quand  elles  proclament 
ces  principes  morauK  qui  unissent  les  peuples  ;  tantôt  par  le 
rayonnement  pacifiquedeson  intelligence.  Elle  a  sans  cesse 
le  même  moleur  dans  la  même  carrière,  et  tel  est  son  besoin 
de  sociabilité  qu'elle  semble  ne  pouvoir  se  reposer  qu'au 
sein  de  cette  association  universelle  des  nations,  liées  en- 
tre elles  par  le  respect  naturel  de  leur  droit  et  de  leur  devoir. 
.\us3i,  quand  un  pouvoir  malfaisant  lui  enlève  l'air  et  l'es- 
pace ,  vous  pouvez  lire  dans  ses  regards  attristés  tout  ce 
qu'elle  souffre,  jusqu'à  ce  que  son  génie  retrouve  sa  voie  et 
y  déploie  ses  ailes  avec  plus  d'élan  et  de  vigueur.  » 

L'idéal  de  la  France  est  donc  dans  la  formule  placée  en 
tête  du  projet  de  Con.stitulion  connue  le  dogme  fondamen- 
tal de  notre  polilii|ue  ;  Lihcrir.  Egniilr.  Fraternité. 

Le  projet  de  (.lonslitution  ne  delinit  [loint  ces  trois  termes, 
et  c'est  avec  raison  :  les  définitions  ne  valent  qu'en  niallié- 
matiqiies. 

Le  rapport  supplée  à  ce  silence  : 

«  L.'i  liberté  de  chacun  finit  où  commence  la  liberté  d'au- 
trui  :  ce  t  su  première  borne,  et  de  là  naît  Yégalilé... 

"  L'égalité  a  établir  dans  les  rapports  sociaux,  c'est  celle 
que  la  frulernilé  commande  et  explique... 

»  La  fraternité  servant  d'origine  aux  institutions,  inspi- 
rant les  lois  de  son  souffle,  animant  l'État  tout  entier  de 
son  esprit,  voila,  selon  nous,  l'heureuse  et  féconde  nou- 
veauté de  notre  République  et  de  notre  Sge... 

»Nous  sommes  convaincu  et  nous  affirmons  qu'une  so- 
ciété est  mal  ordonnée ,  lorsque  des  milliers  d'hommes  hon- 
nêtes, valides,  laborieux,  n'ayant  d'autre  ropriété  que 
leurs  bras,  d'autres  moyens  d'existence  que  le  salaire  ,  se 
voient  condamnés  sans  ressources  aux  horreurs  de  la  faim, 
aux  angoisses  du  désespoir  ou  à  l'humiliation  de  l'aumône, 
frappés  par  des  circonstances  supérieures  à  leur  volonté  qui 
viennent  les  chasser  du  toit  où  le  salaire  les  faisait  vivre. 

«  Nous  disons  que  lorsqu'un  citoyen  dont  le  travail  est 
la  vie.  oll're  à  travailler  pour  se  nourrir,  pour  nourrir  une 
femiiir.  ilis  onl.iiit-;  un  \irii\  père,  une  famille,  si  la  société 
imp.i"ili|(  drt.iiinu'  le-  \rii\  >i  elle  répond:  «  Je  n'ai  que 
faire  ilr  Mitiv  lra\ail;  ciienlii'z  ou  mourez,  mourez,  vous 
et  les  vôtres,  ■>  cette  société  est  sans  entrailles,  sans  vertu  , 
sans  moralité,  sans  sécurité  ;  elle  outrage  la  justice,  elle  ré- 
volte l'humanité,  elle  agit  en  heurtant  tous  les  principes 
que  la  République  proclame  .. 

>  La  République  ne  doit  pas  borner  son  action  à  proté- 
ger la  liberté,  la  propriétié,  la  famille,  ces  premiers  biens, 
ces  biens  impérissables  de  l'humanité;  elle  ne  doit  pas  se 
borner  à  dire  :  «  J'ai  des  lois  contre  les  pervers,  contre  les 
malfaiteurs  j'ai  des  gendarmes,  et  contre  les  factieux  j'ai 
du  canon.  » 

»  Sa  foi  lui  assigne  une  mission  plus  large  et  plus  élevée 
Elle  est  la  tutrice  active  et  bienfaisante  de  tous  ses  enfants; 
elle  ne  Ic^  bis'ie  pas  croupir  dans  l'ignorance,  S"  privcrlir 

ibiii-.  I, -iTr  ;  elle  ne  demeure  pasindillcu'iiir  d  \;iiit  ces 

cii^:'-  lie  I  indnslrie  qui  jettent  des  années  de  siljni's  sur 
les  pl.u  r>  publiques  avec  l'envie  au  cieur.  le  re.-seiitiment 
et  le  blasphème  à  la  bouche:  implacable  contres  la  révolte, 
elle  est  compatissante,  humaine,  |irévoyaiite  |iour  le  mal- 
heur: elle  recommande,  elle  honore  le  travail,  elle  l'aide 
par  ses  lois,  elle  en  garantit  la  liberté;  mais,  lorsqu'un 
chômage  forcé  vient  paralyser  ce  travail,  elle  ne  ferme  pas 
son  coeur,  elle  ne  se  contente  pas  de  gémir  en  répétant 
Fatalité!  elle  fait  appel  au  contraire  à  toutes  ses  ressources 
en  s'écriant  Fraternité  !  « 

Les  citations  qu'on  vient  de  lire  ne  procèdent  pas  seule- 
ment d'une  inspiration  généreuse:  elles  sont  le  point  cul- 
minant, et  comme  forme  et  connue  fond,  du  travail  de 
il  Marrast  et  de  la  Constitution  même.  En  elles  se  résume, 
a  iiein.  M'ii-  ilu  moins,  l'esprit  de  la  révolution. 

"m,  e  r-i  I I  ;i\iMi-  iiieeiiiinii  les  misièrcs  et  les  besoins 

de>  li,i\,iilli-iii~  lie  liinli>  ilis.-^i's,  c'est  pour  n'avoir  pas 
même  leni.'  il  .mielinrer  le  hhi  des  masses,  c'est  pour  s'être 
endormie  dm-,  nue  euntianee  funeste  et  dans  une  impré- 
voyance e^iii-ie  -nr  I  .iiciller  do  Laisser  faire,  d\i  Laisser 
passcralwilii,  c  e>l-;i-diivdii  Charun  pour  soi,  chacunchez 
soi.  qu'a  un  jour  dit.  I.i  iii.iii.ireliie,  si  prospère  et  si  [luis- 
sante,  est  tombée  iiii-er:ihleiiieiit  devant  une  minorité,  la 
veille  encore  imperceptible. 


Quiconque  voudrait  reprendre  aujoiinriiiii  ces  dnelrines 
d'indu  idii;di> pur,  euurriil  dnul'.in  meine  id.iine  !,.i  li- 
berté, .suis  dont,,  iniiisnnn  I  ,ippi  e>M(ili  ri  lil  lieence'  l'ilis- 
qii  a  \iK  yeii\  eomme  ,iu\  miliv-  il  e>l  iiidi>pi'iH,dilede  faire 
régner  l'ordre  dans  la  liberté  politique,  par  (luelle  exclusion, 
paripielle  anomalie  l'ordre  ne  règnerait-il  pas  dans  la  li- 
iierlé  industrielle?  Cette  conciliation  est  la  première  tâche 
d'un  gouvernement  éclairé,  quels  que  soient  son  nom  et  sa 
forme.  Si  ces  deux  éléments,  frères  et  non  rivaux,  sont 
compatibles  dans  le  premier  cas ,  ils  le  sont  aussi  dans  le 
second.  I!ei:i  est  eeilain ,  cela  est  évident ,  comme  dit  le 
plide-oplie  l'iei  M' l.einiiv;  et  voiUi  Cependant  cc  qui  est  mé- 
connu depuis  iiii  M  ^i.ind  nombre  d  années  :  d'où  la  situa- 
tion cruelle  ou  ^eiiiil  cette  nation. 

"  La  formule  lirnil  au  travail  ayant  paru  trop  absolue, 
ajoute  à  ce  sujet  l'auteur  du  rapport,  nous  l'avons  rempla- 
cée par  l'obligation  imposée  à  la  société  envers  l'individu 
soulfrant.  La  forme  est  changée,  le  fond  reste  le  même.  » 

Cela  est  vrai  :  mais  ce  fond  lui-même  n'est  rien  si  un  en- 
semble de  dispositions  n'en  assure  hi  mise  en  ]iraliqoe.  Le 

I  Itrnit  nu  trnrail  iiiMTit  d;in-  l,i  I '.nnsliliit  ion  ne  décide 

r.en    el,  j  ,v- .mii,,'-    nmi-N  l,.|eiiis  niedioi  renient    Kl  toutes 

le>  le.l;l.~!,.tlnn^  du   iii,,nde  elle- ni,>  ^,T,ii pin-smiles 

s'il  ne  sy  joint  r.irlmn  li;ilide  hennele  inf.iliL'jhle.  ;ilten- 
tive  des  gouvernants  \ii^~i  ie^ivd.i.l  Mir^  de  l,i  Cm-hliition 
qui  l'ont  coin|)ris  in-tineti\eineiit  ont -ils  en  mille  lois  r:nson 
de  ne  pas  s'arrêter  a  une  question  de  forme.  La  l^lonstitution 
pose  le  but ,  les  lois  organiques  le  rapprochent  ;  le  génie 
seul  et  la  vertu  l'atteindront. 

La  seconde  question  grave  qu'aborde  le  rapport  de  M. Mar- 
rast, est  celle  de  l'unité  ou  de  la  dualité  des  chambres.  Le 
rapport  conclut  à  une  seule  par  ce  dilemme  qui  nous  paraît 
décisif  : 

«  Ou  les  chambres  seront  d'accord,  et  alors  une  double 
discussion,  un  double  vote,  ne  servent  à  rien  et  peuvent 
nuire  en  retardant  la  loi  ; 

»,  Ou  bien  elles  seront  en  désaccord,  ce  qui  arrivera  le  plus 
souvent,  et  alor§  c'est  la  lutte  que  vous  établissez  au  sommet 
de  l'Etal  Or,  In  liille  on  haut,  c'est  l'anarchie  en  bas;  les 
den\  eliiimlnes  sent  donc  un  principe  de  désordre.  » 

.\pres  s  itie  ,iii:irlie  a  taire  ressortir  les  inconvénients,  les 
pénis  éventuels  d  une  lutte  entre  les  deux  chambres,  M.Ar- 
mand Marrast  combat  les  deux  objections  invoquées  contre 
l'existence  d'un  seul  pouvoir  législatif:  la  première,  puisée 
dans  l'exemple  de  l'Angleterre  et  des  Etats-Unis  américains, 
qui  nous  paraît,  ainsi  qu'à  lui,  peu  concluante;  la  seconde, 
qui  est  plus  grave  et  réside  dans  la  connaissance  de  notre 
impétuosité  nalurelle,  et  la  crainte  des  entraînements  dan- 
gereux auxquels  serait  exposée  une  assemblée  unique,  sous 
la  pression  d'un  événement  extérieur  ou  d'une  émotion  née 
dans  son  propre  sein. 

.\  cette  appréhension,  M.  Marrast  oppose  les  différents 
iIcL'n-  ,111  (ici, lis  imposés  aux  décisions  de  l'Assemblée,  et 
I  ciidili-Miiicnl  près  d'elle  et  par  elle  d'un  conseil  d'Etat 
cli.iiL'c  d  el.dieier  les  projets  de  décrets,  de  résoudre  les  dif- 
lienltes  li'^ishilives,  sorte  de  tribunal  qui  remplirait  assez 
roltice  d  une  seconde  chambre,  s'il  était  autre  chose  qu'une 
émanation  directe  et  une  délégation  de  l'Assemblée. 

Du  pouvoir  législatif  le  rapport  passe  à  l'examen  du 
pouvoir  exécutif. 

Ici,  autre  question  grave:  Par  qui  sera  nommé  le  prési- 
dent? Sera-ce  par  l'Assemblée  ou  par  la  nation?  La  Con- 
stitution pose  ce  dernier  mode;  le  rapporteur  le  soutient  en 
ces  termes  : 

«  La  majorité  a  été  convaincue  que  l'une  des  conditions 
vitales  de  la  démocratie  c'est  la  force  du  pouvoir.  Elle  a  donc 
voulu  qu'il  reçut  cette  force  du  peuple  entier,  qui  seul  la 
donne,  et  qu'au  lieu  de  lui  arriver  par  transmission  inter- 
médiaire, elle  lui  fût  donnée  parune  communication  directe 
et  personnelle.  Alors  il  résume  sans  doute  la  souveraineté 
populaire,  mais  pour  un  ordre  de  fonctionsdéterminé  :  l'exé- 
cution de  la  loi.  La  majorité  n'a  pas  craint  qu'il  abusât  de 
son  indé[iendance,  car  la  Constitution  l'enferme  dansun  cer- 
cle dont  il  ne  |ieiit  pas  sortir   L'.\ssemblée  .seule  demeure 

iiiaitie-seili'  ton!  -\>te petit  ique;  Ce  que  le  président  pro- 

liose  p.ir  ses  inini>lres,  elle  a  le  droit  de  le  repousser  :  si  la 
direction  de  l'administration  lui  déplaît,  elle  renverse  les 
ministres;  si  le  président  persiste  à  violenter  l'opinion,  elle 
le  traduit  devant  la  haute  cour  de  justice,  et  l'accuse.  • 

Reste  le  pouvoir  judiciaire.  Le  rapport  annonce  qu'aux 
trilHiii,in\  e\i-tanls  seront  ajoutés  un  tribunal  administratif 
sujiei  leur  et  une  haute  cour  de  justice  composée  de  juges  de 
la  Cour  de  c:i-s,ilion  et  de  cnnseillers-L'énéraux  de  dé|iarle- 
ments,  on  I  \--eiiililei'  ii,ili(iii;ile  pnnii;i  ieii\n\er  ses  pro- 
pres menilnvs,  !,■-  mini-lies  et  le  jin-idcnl  de  Ki  liépnlilique 
lui-même.  Ce  u  e^t  ni  le  temps  m  le  lieu  de  chercher  non 
|ias  il  juger,  mais  à  pressentir  le  mérite  de  ces  institutions 
nouvelles. 

«  Le  [iremier  projet  de  la  commission  de  constilulion  , 
ajoute  .M  .\rm:ind  Marrast,  était  d'étendre  I  in-litiiimn  du 
jury  au  pi-'ement  des  atVaires  correctionnelle- l'i  j  (|iiel((ues 
procès  civils;  mais  celle  pensée  a  renconln'  d,in>  tous  les 
bureaux  de  l'Assemblée. une  opposition  si  générale  et  si 
rude  que  la  commission  a  dû  se  résisner  au  silence  et  à  la 
défaite.  « 

Vue  i.pposihoii  pn-,pie  c'j.ile  s  est  iminil'istée  contre  l'in- 
lerdielmn  du  iMiiplieement  iinl]t;iire,  N,-,inii,niiis  la  com- 
inis-liin  ,  ,qirr-  ~elie  erl.illee  en  eeoiit.int  le  président  du 
enii-ed  el  le  immslii'de  l;i  ^■iiem',  a  Cm  devoir  maintenir  sa 
peii-ee  |iieiiiiere,  p;ir  eeli e  |ieiiM'P  principale  :  «  Vouloir  que 
1,1  p.Mivieie  p:iNe  I  inipéit  lin  .■iniig  et  que  la  ricliesse  s'en 
atfninchisse  par  1  argent  lui  a  paru  une  iniquité  monstrueu- 
se. "  Elle  reconnaît  toutefois  que  cette  interdiction  absolue 
du  remplacement  est  essentiellement  liée  à  une  bonne  loi 
de  rernitenient  et  ;i  l'aliréviiilion  du  temps  de  service.  En 
coii-eqiieii,  I  M  -el  ..lut  II'  pi  iiiiipe,  elle  proposc d'en  ajour- 
ner 1.1  ili-en-s jn-qii  ^m  iniinient  OÙ  la  loi  d' Organisation 

iiiilil;iiiv  ^era  »  iniiii.-,e  a  l'.^sicmblée. 


Tel  est  en  substance  le  ra|iport  excellent  de  .M.  Marrast. 
Encore  une  fois,  nous  regrettons  les  abréviations  et  les  mu- 
tilations qu'il  nous  a  fallu  inlliger  a  ce  document  remar- 
quable. En  terminant,  lâchons  du  moinsde  nous  faire  par- 
donner cette  anaU-"  lKiti\eet  imparfaile  |i:ir  une  dernière 
citation,  celle  des'  Iilmu-  elnqnentes  on  .\1  Marrast  signale 
les  dangers  de  toute  di'viation  do  |irincipe  démocratique  : 

"Tenez  pour  certain  qu'il  n'y  a  pas  aujourd'hui  dans  le 
monde  des  intelligences  un  autre  genre  de  gravitation  :  il 
faut  ou  le  suivre  et  s'y  attacher,  ou  rétrograder  dans  l'es- 
pace, aller  à  la  dérive  comme  une  comète  déroutée.  11  faut 
où  organiser  pacifiquement  la  démocratie  dans  cette  voie 
des  améliorations,  ou  revenir,  à  travers  les  ruineset  le  sang, 
à  un  état  qui  recommencerait  pour  tomber  encore;  il  faut 
ou  marcher  résolument  dans  la  roule  ouverte  par  la  Repu 
blique,  ou  se  rejeter  dans  les  révolutions;  marquer  sa  dé- 
cadence par  ces  oscillations  maladives,  et  faire  signe  alors 
à  la  barbarie  qu'elle  vienne  régénérer  un  sang  vieilli  et 
faire  disparaître  de  la  carte  de  l'Europe  cette  patrie  qui  en 
fut  pendant  de  longs  siècles  la  lumière,  l'orgueil  et  l'es- 
poir. »  " 

Ecartons  loin,  bien  loin  de  nous,  ces  appréhensions  si- 
nistres. Non,  ce  pays  ne  peut  périr  I  non,  cette  France  gé- 
néreuse que  dépeignait  si  bien  M.  Marrast  dansles  premières 
pages  de  son  rapport  n'en  est  point  réduite  à  ce  degré  de 
gangrène  et  de  démoralisation  qui  appelle  le  sang  barbare. 
La  France  qui  à  son  insu,  sans  le  vouloir  presque,  poussée 
parune  main  providentielle,  a  fait  la  République,  saura  la 
maintenir,  et  elle  y  trouvera  avec  le  temps  sa  force,  sa  gué- 
rison  et  son  salut. 

Félix  Morn.xxd. 


Esquisse  d'une  liisloire  de  la  mode 

DEPUIS     UN     SIÈCLE. 

EMPIRE. 

Neuvième  article. 

Le  désir  de  briller  par  les  ajustements  de  la  toilette  est 
un  instinct  inné  chez  la  femme.  Il  se  développe  chez  elle 
dès  l'fige  le  plus  tendre.  Encore  aux  bras  de  sa  bonne  la 
petite  lille  est  heureuse  de  la  belle  robe  neuve  qu'on  lui 
met.  Son  enfance  entière  s'écoule  à  habiller  et  à  déshabil- 
ler sa  poupée.  Sa  jeune  intelligence  se  tourne  naturelle- 
ment dans  ses  jeux  vers  cet  éternel  changement  de  la  pa- 
rure qui  fera  plus  tard  l'enchantement  de  sa  vie.  Ce  désir 
inné  de  la  parure  est  universel  ;  seulement  il  se  manifeste 
chez  les  diftérentes  races  humaines  avec  des  caractères  par- 
ticuliers qui  tiennent  au  génie  propre  de  ces  races.  La  né- 
gresse, avec  un  sentiment  juste  de  la  loi  du  constraste  des 
couleurs,  aime  à  faire  trancher  sur  l'ébène  de  sa  peau  une 
blanche  cotonnade  ou  un  collier  de  graines  rouges.  Les 
femmes  de  l'Orient  aiment  les  vêtements  aux  couleurs  écla- 
tantes, enrichis  d'or  et  dé  pierreries  ;  l'Espagnole  de  Sé- 
ville  ou  l'Espagnole  américaine  de  Lima  voile  plus  ou  moins 
sa  tête  avec  l'uniforme  mantille  de  soie.  Au  milieu  de  ce 
noir  vêtement,  dont  la  couleur  se  confond  avec  celle  de  sa 
chevelure,  elle  fait  en  quelque  sorte  la  nuit  autour  de  son 
pâle  Visage  pour  laisser  à  son  ardente  et  noire  prunelle  tout 
l'éclat  de  son  feu  pénétrant  Tantôt  c'est  l'ampleur  simple 
et  majestueuse,  tantôt  c'est  la  richesse  du  costume  qui  sé- 
duit la  femme.  Ici,  elle  recherche  les  couleurs  vives  ;  là, 
elle  donne  la  préférence  aux  couleurs  sombres  et  sévères. 
Si  au  milieu  de  ces  diverses  manifestations  du  goût  chez  les 
femmes  des  différentes  contrées  du  globe,  nous  portons 
notre  attention  sur  celles  qui  sont  à  la  tête  de  la  civilisation 
de  la  parure,  sur  les  Françaises,  sur  les  Parisiennes,  qui, 
de  l'aveu  de  tous,  tiennent  ici-bas  le  sceptre  de  la  toilette  ; 
il  semble  que  nous  devions  trouver  quelque  grand  principe 
d'esthétique  et  de  goût  comme  trait  marqué  de  leur  souve- 
raineté reconnue.  11  n'en  est  rien  cependant.  Notre  respect 
pour  lil  vérité  nous  oblige  en  ce  grave  sujet  à  sacrifier 
au  dé-ir  délie  sincère  celui  de  nous  montrer  galant  envers 

ne-  lelie-  i  um |i,it ru iie>,  .\\ iis-le  donc  :  ce  n'est  pas  la 

béante  peetiqne.  piUoresqiie  du  costume,  sa  simplicité  no- 
ble, ou  liien  sa  richesse  ou  sa  dignité  qu'aime  la  Parisienne  ; 
ce  qu'elle  aime,  c'est  le  chiffon  !  Elle  s'y  complaît,  elle  le 
caresse,  elle  l'étudié,  elle  le  travaille,  elle  en  vit,  elle  en 
rêve,  elle  l'aime  ii  la  folie;  elle  aime  leehitînn  pour  les  au- 
tres, peur  elle-même,  pour   le   clnllnn   lin-nie niez   le 

cliill'onde  ce  monde  et  \ous  aiieanl  i-iv  en  p.iilie  I  inquiète 
et  ineevsanle  aciivile  de  son  esprit  Ce  n  cl  p;i>Mjii  all'aire 
à  ellede  se  draper  magniliipiementdans  niu'  pièce  d'étotfe, 
elle  n  \  enli'nd  rien  :  elle  n'est  pas  une  vestale.  D'ailleurs, 
ya-t-ilrieii  de  plus  bêlerpiun  inorceaii  d  étoile  uni?  C'est 
bien  la  peine  d'avoir  fait  tant  de  eeiiqnete-  iinluslrielles, 
d'avoir  opéré  toutes  les  merveilles  i lei  nés  de  la  civilisa- 
tion pour  rétrograder  jusqu'au  pr/)/»/»  on  a  la  rhlann/de  (k>. 
Pénélope!  La  Parisienne  prend  une  étoffe  pour  la  soumet- 
tre aux  mille  exigences  de  son  imagination  capricieuse. 
I  our  la  froncer,  la  plisser,  la  tuyauter,  la  bouillonner,  la 
friser,  la  rucher,  la  taillader,  la  découper,  l'effiler,  la  bro- 
der, la  festonner,  la  falhalasser,  l'enjoliver,  la  chiffonner, 
en  un  mot,  de  cent,  dp  mille,  dp  dix  mille  manières  diffé- 
rentes. C'est  chose  liieiveilleii-:'  ipie  de  \oir  ce  qu'elle  (  rée 
d'adorables  inutilité-  :i  Lnde  de  1,,  -:u  >   de  1:,   I.Innde.  de 

la  dentelle,   du  nilMii    de-  pli -  et  de-  lleui- '   ll.idieuse 

.•,„m,|„,,Hle  re  temlidleii  N,ThLmie,,\  d-  elntlunieiL'es.  qui 

di-l,,ir;n-elll  ,■!  -e  lel \<'llenl   -  ■  ll- ee-r  ,iii|,,iir  d  .■Ile,  e|l,. 


Kt 


ipiia  1,1  l.ollllOinieilattellilledeM,!M.,l-r „!  -e- i 

comment  ne  croirait-elle  pu-  ;i  1  infullilHlili'  de  -nu  ^om. 
quand  elle  voit  une  si  unixei-  lie  -nnnii— em  .i  -c-  e:q,rices 
devenus  des  lois?  Non-senleinent  ses   inventions  les  plus 


n 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


nilc  suflini  C('p<-nd.int  pour  les  justifier  ;  A  toutes  les  époques  ,  la  Parisienne 
s'e^l  ;iih  lime  li'  uiiTite  (lu  bon  goùl  clans  l'art  de  la  toilelle  ;  que  sa  robe  fui  en 
ou  en  fourreau  d'cpée  ,  qu'elle  eût  sur  sa  tête  un  pOuf  au 
peau  à  la  Paméla  ou  un  bibi.   El  le  monde  de  continuer 


scnliiiii'iil  . 

ciiidoror  cl  diniilor!  Or 
jiour  citer  un  l'ail  des  | 
la  taille  qu'elle  s'est  amii 

innd.ciir  ;i  f:iiic  V"Mil.'c 

jusqn;,  IrMivinllr  -upr, 
l«'i"'-l- -mnr.Mi 


l.qu 


1  oppnsi'cs,   el 

-  \,Mi:iliiiii^  l'Niii'Mies  de 
lie  cl  llirii  en  ciiinl  fort 
'  ilu  Ijusc  de  sun  corset 
I  .liitanl,  il  est  peut-être 

-  le  vrai,  el  que  par  con- 
(IrlcsUdile.  cl  a  ce  sujet 

N  i-l-iT  |i;i-  une  chose 
p,i-  il.'  |ilii-i(  nr>  années 
|i;iiais>enl  Mir.innées,  et 


coiiiIm 
(iucl(i 
du  iiiond 


En  présence  d 

liOUS,    ll-IIH'IMMI 

ré|iut;ilinn  de  > 
illlicu  de  l'.ins  u 


|ue  nous  (iMinscineUrc 


paradoxes  sacrilégesl  Une  simple  remarque  gêné- 


,  formes  des  %'étcments  les  plus  éléijanls  au  bout  de 

-enl  ridicules  !  Chacun  trouve  alors  les  meilleures  raisons 

j^^  .,,„„,. quiT  ce  qui  lui  plaisait  alors,  pour  renier  ce  qu'il  avait 

adoré  Les  danics  ont  a  cet  égard  un  inéi)uisable  talent ,  une  imperturbable  lo- 
"i(iue  pour  trouver  sur  l'heure  même  le  fort  el  le  faible  diîs  choses  el  se  mettre 
îa  conscience  en  repos  avec  les  plus  pauvres  raisons  du  monde.  Ainsi,  pour  em- 

li.rM]n'eii  ISHiMprc-  |ilii>ienrs 


Ic-ihi 


nple 


ni  I  I 


iilh-(le 


Irap, 


Ico  ; 


ri   le 


,|i],iii  |,:i,  ili-  lui  iln-c  ;  "  l.e  temps  est  si  m 

-elle/  .1  |iied,  \ olre  robc  esl  il  l'instant  perdue,  liimli-  ipi  ,i\ec 
le  ili.ip  \eii,-.  eiiurcz  tout  le  jour,  vous  rentrez  et  apie-  i|iiel(|iies 
Ile.  vous  êtes  aussi  présentable  qu'en  partant.  »  L'avanlai^c  .--au- 
c  mari  était  convaincu  ,  le  tailleur  était  appelé,  et  madame  avait 

L'année  suivante  ,  autre  raisonnement  ;  »  La  redingote  est  un 


«SIO 

ClLipeau  en  bateau.  —  Habit  cuuleur  crotin. 
—  Culotte  de  peau. 

bizarres  sont  adoptées,  mais  encore  il  suffit  qu'elle 

emprunte  aux  autres  une  mode,  qu'elle  la  signe. 

pour  ainsi  dire,  pour  qu'on  l'accepte  en  lui  en 

faisant  honneur. 

c«\iprcm,itip,ci>niinenlnsnns- 
,li.Ml„lenr,  xeinr   mlinner  la 

l-:i,  Mllnl'   col  au 


lSll>l^|-« 

Coslnines    de    lîal. 


élément  lourd  et  assonuiKHil  ;  le  drap  se  fane  vile,  se  tache  et  se  roussit.;  per- 


,11  plu 


el  diiilleni> 


i:i 


esl   p;is  , 


■ilile  pour  une 


i-luiii 


repudiiins  le  lendemain 
se  jiiinl  une  faille  orii;in 


Capote  de    percale  écrue.   —  Fichu  et  brodequius 
écossais.  —  Ombrelle  de  percale. 

d'Aspasie ,  elle  fera  tendre  sa  chambre  à  cou- 
cher en  drap  rouie  ii  bordures  iioires  copiée* 
à  Pompéi  el  du  shie  le  plus  sévère.  Tantôt  elle 
n'estimera  que  les  mcnlilcs  anguleux  et  à  maigre 
prolil  :  lanlol  li^-  nicnlilo  chantournés  çt  à  rin- 
cc;iii\  :iriiinili>  ;iiii"iil  -eiils  du  prix  à  SCS  veux. 
\i'i|,inririiiii  le  lircii/e  iiislc  et  sombre,  demain 
les  (lunùcs  a  jiroluîlon  Chaque  artisan  s'ingénie 
dans  son  genre  a  varier  autour  délie  les  sé<luc- 


1.1  lormalmn 
.liens  le  cor- 
lolre  piopre 
■lie  dct;oiil. 
I.l  Hicphcilé 
Inv  le-  lem- 


Ciicvi'liiio  ,'i  1.1  Krani;oi<  l"'.  — Ch.ipeau  en  baripie 
-(■.leuivaii  de  brelnnues. 


sonne 
femme 

C'est  celle  lli\elile  de 
d'un  costume  naliumd 
Uinie  de  nos  pères,  iicc-  cm. ne  ic 
costume  de  la  veille.  \  celle  lii\n 
Noire  goùl  est  tourné  vers  l.i  rcclier 
dimie  et  sévère:  aussi  ce  sont  iii>ie 
mes  de  la  terre  s'étanl  le   plus  .i-iiiiimciil  ...viipce-  .!.■  le  1,  lie     i|m  -!• -..ni 

moiilrées  le  moins  aptes  h  iiiM-nlci   de-  ce-lmce-  p rc-qiic-  .i.m-  le  -eus 

artistique  du  mot.  Ces  charmaiilcs  poupées  leiil  I  élerncl  desosiiuir  des  pein- 
tres, et  jamais  le  ciseau  du  statuaire  ne  consentirait  ii  les  admettre  au  fron- 
ton d'un  iiionumenl.  Allez  donc  inscrire  dans  le  marbre  un  pouf  ou  un  bilii, 
un  caraco  ou  une  robe  ii  volants!  (Ju'imporle  après  tout  à  la  Parisienne  le 
déd.lin  des  Phidias?  Ses  arlisles  ii  elle,  les  vrais  artistes  selon  son  cœur  no 
sont  pus  ceux  qui  manient  réliauchoir  cl  la  brosse,  mais  ceux  qui  se  servent 
i!c-  .  iseaii\  el  de  l'aiguille  ;  la  couluriére  et  la  marchande  de  modes,  voilà 
le-  i;ciiie-  (pielle  aimo  11  consulter;  ce  sont  lii  ses  démons  faniiliore  qui  la 
piiiis-eiaiciil  a  un  changement  perpétuel,  si  elle  n'y  était  pas  disposée  d'elle- 
inèiiie,  i:Me  quillera  le  beau  pour  le  laid  sans"  scrupule,  pour  satisfaire 
l'inconslance  de  ses  dés  rs;  elle  aura  sur  sa  cheminée  des  porcelaines  de  Saxe, 
des  magots  chiniiis  ou  des  vases  élrusipies;  elle  s'engouera  tour  a  tour  d'un 
pelil  nègre .  (lun  joekev  ou  d'un  groom  ,  d'une  guenon  ou  d'un  bichon  .  d'un 
carlin  ou  duii  ki'ng'scharles.  Au  Vommencemeiit  do  dix-hiiilièine  siècle  elle 
se  faligucra  des  tiipis.series  liérédilaires  ou  des  inde.-lriiclil.ies  lenlures  de 
cuir  gaulré  et  diuv  .  de  la  tapis-erie  il  petits  points,  du  lanip:is  el  du  ve- 
lours brodé,  el  elle  ne  voudra  plus  voir  dans  ses  appartenu'iils  (]iie  des 
boiseries  peintes  en  blanc  et  relaussées  d'or,  llienlol  les  lenlures  el  les 
paravents  chinois  auront  sa  préférence  ;  puis,  quand  elle  prendra  la  tiini.pie 


f.hapcau  de  levantine.  —  Spencer  ilc 
—  llolie  de  peicde. 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


25 


courir  au  bois  ,  \e  coupe,  \e  phaéton  ,  le  bokei ,  le  guigne,  le  drohska  eX  le 
casse-cou  ,  petite  voiture  élevée  et  roulante  parfaitement  digne  de  son  nom. 
Comment  espérer  qu'une  femme  si  occupée  de  choisir  tant  d'étoffes  et  d  objets 
de  caprice  ,  de  répondre  à  tant  de  fournisseurs  et  d'organiser  jour  à  jour  sps 
triomphes  avec  l'aide  de  sa  couturière  et  de  sa  femme  de  chambre  ,  ait  assez  do 
loisir  pour  s'inquiéter  de  savoir  si  la  coupe  de  son  corsage  ou  les  plis  de  sa  jupe 
peuvent  figurer  bien  ou  mal  dans  la  représentation  d'une  œuvre  d'art  !  Elle  a 
trop  besoin  des  hommages  de  ses  contemporains  pour  se  mettre  en  peine  de  ceux 
de  la  postérité.  Qu'a-t-elle  affaire  d'être  belle  ?  Il  lui  suffit  d'être  jolie. 

Au  milieu  de  ce  perpétuel  besoin  d'innover,  de  renouveler  les  modes,  inspiré 
à  la  Parisienne  par  l'inconstance  de  ses  goûts  ,  il  est  digne  de  remarque  que 
le  fond  de  sa  toilelle  reste  toujours  à  peu  près  le  même ,  et  que  les  formes  mê- 
mes ne  varient  souvent  (|ue  d  une  manière  imperceptible.  Le  changement  ne 
s'opère  que  dans  les  détails  ,  les  dessins  ,  les  couleurs  ,  les  accessoires.  Et  cepen- 
dant ces  changements  ,  inappréciables  pour  un  œil  peu  exercé,  suffisent  pour 
donner  au  bout  de  quelques  semaines  un  air  de  gothicité  a  la  toilette  qui  n'y 
est  pas  conforme.  Quelquefois  de  très  longues 'périodes  sont  d'une  grande  sté- 
rilité ,  malgré  leurs  changements  apparents  et  seulement  superficiels.  Les  modes 
du  temps  de  l'Empire  sont  presque  tout  entières  dans  ce  cas.  11  suffit  de  par- 
courir un  recueil  de  gravures  de  modes  de  ce  temps  pour  être  convaincu  de  ce 
fait ,  reconnu  par  les  contemporains  eux-mêmes ,  comme  on  peut  le  voir  dans  le 
passage  suivant ,  que  nous  empruntons  à  un  journal  de  1812  «  Depuiscinq  ou 
six  ans  ,  quelques  falbalas  de  plus  ou  de  moins  ,  des  fraises  plus  ou  moins  am- 
ples ,  des  collets  ôtés  ou  remis,  ont  été  les  seules  variations  de  la  mode  ,  qui ,  au 
fond  ,  est  à  peu  près  restée  la  même.  Depuis  cette  époque  aussi  aucune  couleur 
n'a  été  exclusivement  en  vogue  ,  excepté  le  bleu  Marie-Louise  (  plus  éclatant 
que  le  (apis  ,  moins  foncé  que  le  barbeau  ,  très  peu  éloigné  du  bleu  turc  ).  Na- 
guère le  grand  art  consistait  à  se  vêtir  de  couleurs  disparates.  Ainsi  Ion  voyait 
une  femme  avec  un  chapeau  rose,  un  cliSle  rouge,  une  robe  pistache  et  des 


Chapeau  à  la  RobinsoD.  —  Cheveux  à  l'enfant. — Pan- 
talon de  tricot.  —  Bottes  à  la  hussarde. 

lions ,  spéculant  à  coup  sûr  sur  son  antique  fragi- 
lité. Qui  pourrait  énumérer  les  mille  petits  meu- 
bles à  son  usage  ?  Qui  pourrait  dire  seulement  les 
noms  des  voilures  variées  dont  elle  se  sert  ?  Vers 
1812,  outre  la  remise ,  outre  la  berline  pour  les 
grandes  cérémonies  ,  la  diligence  pour  les  visites 
sans  façon,  la  ftasMri/eï/e  pour  les  jours  d  hiver,  la 
calèche  fermée  par  dcsrideaux  ou  couverte  d'un 
parasol  pour  l'été  ,  elle  a  encore  le  carrich  pour 


Chapeau  de  p 


Le  Jeu  de  Diable. 

souliers  gris.  Et  ce  costume,  qui  eût  été  autrefois  le  conilile  du  ridicule,  cette 

le  couleurs ,  qui  eût  paru  monstrueuse ,  n'étaient  même  |)as  remarqués. 

Aujourd'hui  le  chapeau,  la  douillette  ,  les  souliers  sont  autant  que  possible  de 

la  inénie  éloffe  et  de  la  môme  couleur;  lo  châle  seulement  doit  trancher  sur  le 

•  \\r~  rin|ili)yoes  dans  la  toilette  étaient ,  en  1812,  bien  moins  variées 
iir  le  nul  aujourd'hui .  mais  elles  le  sont  déjà  beaucoup  si  on  lescom- 
'  ipii  .Mêlait  auparavant.  Le  génie  inventif  dos  f'abricanls  cherche  à 
1  h-  piiLTs  liMwlus  à  la  coquetterie  féminine  ,  et  il  se  montre  déjà  fé- 
i>  I  ,11 1  il  '  (Iniiiii'r  des  noms  nouveaux  à  des  produits  qui  souvent  ne  le 
,jii  pnii«-c  -i  liiin  de  nn^  ](»\r<  \i\ln'l'ni'i .  ii  prn|)os  cicsoie  ,  on  n'en- 
iii-l^.r  ipi.'-lr  l.ill.  ■  '-  .'•_■-  .'.'Inn-  'l--,'lin  Hi' \  rlnurs.  En  1812 
M'idlil  -  r.llllirli  -      1-     '         .  1  r  :i.        ,i  r.  il    -  ,    ,l    Unir- ,    i\    deSsinS  ,  etc. 

iiiiiiiliiirs  .  i\r>  Irnniliiica  ,  ilrs  iiiiiir  lliiirs  ,  ilc,~  rirginies ,  des  6ri(- 

ili-  hi'tnncs  ,  des  luUiites  ,  étoiles  ressemblant  a  un  satin  sur  lequel 

du  tulle.  Hais  l'étoffe  à  la  mode  depuis  un  an  ,  est  le  reps  ; 

une  étoffe  soit  à  la  mode  ii  une  époaueoù  les  dames  por- 

I  iiiuii-.  li'^riiilVcs  ii:iiis  il'  iiiciiic  ir'inps,  velours,  soie .  ca- 

■nnii-  i-i  iiMin-M'Iiii"    i;ili'   |.iii  ti'iii  des  Heurs  OU  des  plumes  , 

ihi  l'oriiil  ipn  e.-l   cMc-^iMiiHiii    rue;  les  rohes  sont  très 

I  leur  |Mi\  ,  iiiiiis  ils  ne  font 

'' iil    h\   |Hrri-rclice  aux 

.rl.iliiui  (lu  iiixc  (le  IDrieiit, 

iu   lldiLNulal   et  de  1  Empire. 

;■(■  ji-inrc  ii"iii:iilr  \,i  -  ;i\;iiM'c'r  M'i's  les sidiludes glacées du  Nord  , 

Il  ,|iir  lin-  -,i!,iiii-  ii!:irhT>  l/ur  r,ip|"irlenl  lie  iiiagniliques  four- 

-iiiiiii~  ,1    ,1  iiMiilr  en  Iniit  le  vériUible  luxe  du  jour.  Entre  ces 

■  |i;iriirr-  m  dillirriites  il  y  a  toute  la  distance  du  glorieux  com- 

.■ncciiirnt  (le  I  l-jnp  ir  ,i  -'•<•  ilrrlin. 

L'emploi  des  l'ournin^  ii  cïl  [>j:^  une  nouveauté;  un  moyen  de  parure  aussi 


,i|iii,|„ 


I  très  longues  ;  li'S  caclicniires  en 
ur.  Pendant  l'hiver  de  1812  les 
s  à  capuchon.  Lo  cachemire  ,   cel 


Chapeau  de  velours.  —   Redingote  de  (h-ap 
doublée  d'astracan. 

riche  n'a  pas  dû  manquer  d'attirer  l'attention  du 
monde  parisien  élégant.  Ce  n'est  pas  la  première 
fois  que  les  aigles  impériales  ont  pénétré  dans  le 
nord  de  l'Europe.  Ce  n'est  pas  la  première  fois 
que  nos  officiers  en  auront  rapporté  à  nos  dames 
de  rares  pelleteries.  S'il  faut  en  croire  la  chroni- 
que du  temps ,  ces  riches  cadeaux  passaient  quel- 
quefois aussi  des  dames  aux  guerriers.  Un  jour, 
entre  autres,  la  plus  joUe  femme  de  la  cour,  une 


.de  à  oreill 
—  Cl 


de  lièvre  ,  ha 
ulotte  de  c-isim 


26 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


grande  princesse  ,  une  des  sœurs  du  in.iilro  ,  l;i  [irincesse 
Pauline,  avait  reçu  dimsce  genre  un  pn^si'nl  \r;iiiiiPiili(i\;il 
ou  plutôt  impérial.  Car  c'était  remiii^riiir  AIin^imIk'  <|iii 
l'avait  donné  il  l'empereur  Napoléon  ,  cl  I  iiii|i(irur  N,i|i(i- 
léon  à  sa  clicrc  l'aiilrllr:  l'icelle-ri  ii  un  (li.niii.inl  rdoiiel 
de  dragons  ,  noiniiii'.liilo  de  ('.ariiiinilli-  \.;i  iii;ii;riilii|ue  pe- 
lisse doublée  en  i|iicMc  de  niarhc  di'\;iil  mander  la  L  é- 
tourdi  et  beau  colunel  s  en  lait  r.iiic  un  dnlmari  et  une  dou- 
blure de  chabra(|ue  ;  et  le  voila  le  Icndi^nain  a  une  revue 
de  l'Empereur  avec  cette  splcndide  parure.  Mais  par  mal- 
heur son  rliev.il  s'cinpnite  et  \:\  pnricr  le  di'-inrdrc  jiisipie 
(l;,n^lcL'iniip,Miu-rlnin\,'\,ip(-lri,n  i|ni,cnivr,,nn..l",inl 
le  don  ,l-:.iinlir-  nnprri.il.-  r,_M  ,  r  jn-quc  ..ni    h-  r, I,- 


,1    |,.nlu 


\\r      \l 


nnr.  p. 

Il     nlih^ 


pas  .-a  sii'ur  :  mai>il  envoya  le  beau  cnlmirl  ii 
il  niouruld'un  boulet  de  canon.  C'était  p;i\ci 
même  une  fourrure  donnée  par  une  belle  pi  im 
fût  tiré  il  meilleur  marché  s'il  s'cUni  >ini|ilciiii 
un  fourreur  !  — Outre  les  bellc>  il.inn  -  ri  lc~ 
nels,  les  petits-matires  de  la  IjiniiLriH.ic  .111--1 - 

1.M-IICI'    ,111     unnl    lie-    pcli-e.   cl     Ile-    \ilrl 

lllIMT    ll-e|i,|M-M.nl     l.l    llMce    Inniire    le-eiNre 

a  Icili-  rurheis  (r  lll\e  ,  ipil  il.ile  île  j.Slil  1 
di!.liiii;uer  par  la  larcle  cl  la  cIutIc.  I.ii-lr.n 
nuin  et  court  les  rues,  le  renard  ,  la  ma  rire  \  m 
la  zibeline,  toutes  lesfemmesen  portent  Mn- 1 
l'indice  de  l'opulence  el  n'est  permi-c  ipr.nix  le 

vniliiii.     II,.  nii>  I -  ellee-lile\enili.> ni-  lie 

a  picil    l,e-ri,li,-pi.lnn.ii-e-.    Ie-I"i|ni-  ,   le- lu 


•  [inn- 
-;i  lille 
l'exila 


lenilanl 
ii.ivant 
-le  a  se 


ni  :i  la 


el-pi 


tn 


-ili.nle    p, 
Il    ailnlilee 


mile 


elle   pair 


cl  p; 


ilevcliiiirs 
cramoisi  brodée  eu  or  et  la  tn.piepaifille.  l'uni  mui- pendant 
l'hiver  ce  nouveau  luxe  de  fnnrriires  dans  Imit  smi  cil.it,  ce 
n'est  ni  aux  Tuileries,  nian\Cliaiiip:^ÈIysces.  ni  al.nblentz  , 
ni  il  Bagatelle  qu'il  faut  aller  le  chercher,  mais  sur  les  bords 
du  canal  de  l'Ourcq ,  ii  La  Villette.  Cet  endroit ,  déjii  si 
triste  pendant  l'été,  devient  le  but  de  promenade  des  curieux 
et  le  rendez-vous  du  beau  monde  .  qui  viennent  y  voir  les 
habiles  patineurs  et  se  livrer  au  plaisir  de  glisser  sur  la 
glace  Des  marchands  de  comestibles,  des  loueurs  de  pa- 
tin- et  de  i!:iine;in\  Mint  él.ililis  sur  le  bassiu.  Au  uiois  de 
j;iii\iir  LSI!  le-  |,,ii-  I  iiiMM'iirs.  et  parmi  eux  le  célèbre 
peiiiiii  i-.i|.e\  ,  ,ii[ejiieiii  lin  II oifomie  composé  d'une  pe- 
tiie  \e-ie  ee.ni.iii'  Iquiiei'  ilaslraciin  Hu  colIct  et  aux  re- 
.\ei-  .i\ee  Inii-  ;j,  III -e- CM  usées  sur  la  piliirmc.  C'est  lii  qu'on 
le-  M  ni  1,1  ne  nulle  |i:i— !■-  ,  dessiner  ni  il  le  ligures  ,  des  oK- 
vrlli's.  iirnvuiif.i,  d.  >syjira(t's,  desrff/tors,  i\ei  renommées, 
s'élancer  le  cor|is  en  avant ,  se  balancer  sur  une  jambe  en 
tenant  l'autre  tendue  en  arrière  et  les  bras  arrondis  au- 
dcs^nsdela  lèlc  Daiw  ce  champ  clos  ,  on  leschaiiipinn^dis- 
piilenl  le  prix  de  l;ie|lileet  lie  la  L-ràce  ,  la  hennleesl  ii|ee 
de  eelli'  e-peee  de  ili'rnieMelirniil  iln  ill\-lien\  lenie  -iirle 
l'ne  clee.inie  ,  eiiM'I.ippee  de  lonrnires el  le-  pinnies  ilesnn 
cli.ipcan  an  \eiii  .i--isc  dans  un  traîneau  a  cou  de  cygne, 
auquel  -  .iiielleiii  |,,iii(iis  les  patineurs  avec  des  cordons  de 
piimpie,  ^les'  i.ipidi'inent  au  milieu  d'un  galant  cortège 
de  |eniii'-;jen-  i|iii  hiccnnipagiienl  |  «nu  la  ni  snii  lr;i|et .  pas- 
s.iiil  .  see^el^,llll  ile\nnl  clic  ,  cnninie  |i(inr  la  iimcci-  parle 
spectacle  de  leur  maille  Chaque  âge  a  ses  plaisirs.  Nos 
jeune-  ucn-  .niinniil  Inii  ne  sont  ni  patineurs  .  ni  galants. 
Il-  Inniini  '  I  epenil.int ,  comme  lo  bassin  de  La  Villette  est 
tiin|ein-,i  iiinli'c  lie,-  promeneurs  citadins .  ces  jeux  d'un 
aiiiie  ngc  peiiriinil  leiniilrc  quaiiil  un  Munira.  Il  n'en  est 
pa-ile  inenieile- |,inlin^  qni  .   penil.inl  I  etc  ,  conviaiei^t  les 

l'.in.-len-  .1  lie-  tele-  eell  I  llinel  le-     Une  -mil    lii^veOUS  FraS- 

cali  et  Mirlnnl  le  p.ne  ileli\nli  "ce  p.iiMili- lin-re^tre  du 
Parisdc  l'Empire  '  II- mil  di-p:iiii     la  -peenLiiimi   -mi  est 

emparée.  Des  cmi-ii  neiimi- mii  ieiii|il.icc  le- miilii|ues 

ombrages,  et  lus  roues  de»  \uiliues  lesmiiiciil. sur  le  pavé 
où  le  pied  délicat  des  jeunes  femiiies  foulait  naguère  de 
frais  gazons.  Et  Bagatelle  !  et  le  Jardin-Turc  !  (.'.oblentz  ,  il 
est  vrai  ,  nous  est  icslé  ,  sons  un  iinirc  nom  ,    car  a]irés  le 

p!.e-ir  ■InniL-eile-eliM-e-,  nelie  pin- ,;,  ,,nil  pl.ii-ir  est  de 

iliiiiL'e,  le-iimii-   n,i  1,1  innieni-    ;iii|„in,|  Iniicm alors, 

ïciil;is-cr  le  smr  peiiil.inl  I  de  -nr  celle  pailie  lin  boule- 
vard. On  y  est  même  nimn-  l'iih'  i|ir,iliir-,  pni-i|ne  les  bar- 
rières en  bois  placées  lle\,inl    le-  ni:ii-mi>  mil  ele  eille\ées. 

Mais  on  y  est  toujours  all^-l  inconnnodi-  par  l.i  1 --une.  et 

de  plus  on  y  est  aflecté  désagréablement  par  l'odeur  de 
l'asphalte  écliauffé,  ce  qui  lient  au  progrès  dii  siècle,  elpar 
l'odeur  des  cigarçs  ,  ce  qui  tient  il  sa  grossièreté.  Dans  le 
voisinage  Torloni  maintient  plus  que  jan  ais  sa  vogue.  11 
commençait  alors  sa  brillante  réputation  et  succédait  il 
Velloni  et  ii  (îarclii.  On  déjeunait  aux  cafés  Riche  et 
Hardi.  On  allait  maiig.'r  do  pi'lits-.ite.mx  \eisden\  Ikmi- 
res  chez  l-'clix  ,  llmmca  mi  ('.arcini'  Un  ilin.iil  elnv.  Vcr\ 
Cet  illustre  niailrc  de  1  art  cnlinaiie,  inilcpcnilaininenl  de  >a 
maison  du  l'alais-Koyal  ,  avait  déjà  ,  en  ISdl  ,  (ni\ert  aux 
Tuileries  un  second  établissement  a  l'entrée  de  la  terrasse 
des  Feuillants ,  du  coté  du  château.  C'est  lii  que  d'ordi- 
naire les  généraux  et  les  olliciers  de  l'Einiiire  se  réunis- 
saient pour  dîner  dans  les  courts  loisirs  que  leur  laissait  la 
guerre,  avant  d'aller  applaudir  lalma  ou  Fleury  au  Théfi- 
tre-Francais.  La'is  ii  rO()éra  ,  Klle\iou  ii  Feydeâu  ,  ou  ma- 
dame liarilli  il  l'Opéra-Bulfa ,  ii  moinsque  ,cës  artislesétant 
malades  ou  fatigués  ,  il  n'y  eût  plus  qu'il  se  rabattre  sur 
les  ihéiMres  du  boulevard  pour  y  voir  la  Chatte  merreU- 
Inise  ou  1(1  Urine  île  Persepolis. 

Le  théâtre  est  liinjnurs,  comme  en  tout  temps,  un  grand 
iiourvoyeiirde modes  C'est  lii  que  naissent  les  engouements 
les  plus  singuliers.  En  IHIO.  c'est  it/.  Duinoltetqn'i  est  le  hé- 
ros du  jour,  et  toute  la  ville,  ipii  11  est  par.  encore  infatuée  de 
dilleltantisme .  s'en  va  chantonnant  du  malin  au  soir  l'air 


banal?  ftnnvni/ntje  .  monsieur  Dnmnllel'.  Le  succès  fou  de 
la   l'ililr  Cniilnllnn    prnilnil    nn  ilélniie  de  nmu  c.inlcs  .   de 

liio.li-,  -mien    lilimi\  ,   -1 n  elillleli-     jeiile-  le-pieeesde 

llie.llle  lin  leilip-  lilll   oui  leii--l    liml-  lelll  liinnelll   ,111   liesoin 

le-  ilenmnin.ilimi-    le-  pin-  x,iriee,    Tmilc,  le-  nouveautés 

qui  i'\eillcnl  iinlc ni  11 nlinii  loinhcnt  dan-  le  ilmnaine 

lie  1,1  nielle  l.:i  l,iliicll-e  cmiieti^  de  IHII  donna  hc.MlCOUp 
pin-  doeciip.ilion  aux  iiiarcli.indc!,  de  luiides  qu  aux  a.stro- 
nomes.  En  IHIi,  un  honnête  Viennois,  M.  beijhen  .  spécu- 
lant sur  la  cré  liililé  parisienne  ,  s'élève  dans  les  airs  avec 
nri  ap|iiircil  Innnidable  simulant  les  ailes  d'un  oiseau  de 
iii.inere  1  liiie  niminr  de  rire  une  autruclie  OU  un  casoar. 
>  il  i.iii   II  1  le  lijin,' an  ciel ,  il  prend  sa  revanche  sur  les 

1 pimr-ile  Ion-  les  marchands  de  nouvcauiés.  Les  dames 

.se  metteiila  porter  des  bonnets  et  des  eli.i|iiMii\  a  la  Oe- 
glien ,  sans  garder  rancune  de  leur  un -iiln  .iiimi  .\[ires' 
avoir  été  chercher  ses  héros  au  ciel,  la  nimle  di'secnd  les 
preiiilic  jusque  dans  les  priitondcin,- de  la  terre.  Tout  Paris 
a\er-imies  larmes  au  rei  il  du  ni.illicnr  et  du  courageux 
ili'MHiiniienI  du  brave  Cofjin  Le  ihcilre  met  en  vaudeville 
I  In-lmie  arrivée  au  mineur  des  linuilleres  du  département 
lie  l'i  inrtlie  ,  et  la  mode  en  fait  des  chiffons  comme  à  son 


I 


Mais  1,1 
plus  la  en 

neurqii,,ieliui-e-e 
préparant- ,,^,,nli-i|i, 
en  l!ii,s-ie    i:c  qui      :p 

donnnanleili leii 

le,/;»/,/,,.'  nmipii-  le- 


el    lr,ili 
llm-l-elllle-el  , 


cnpalimi  eu  moment,  ce  n'est  déjii 
I  111  rnnijineqni  lie  vole  pas,  lemi- 
npicnmi-,  I  e-t  a  peine  le  bruit  des 

-  i|ii:'  r,iil  ri-'.ii  pire  pour  aller  ninnrir 

m  l,:nl,,-,e-el,o-e-  ,  c-l  l.i  pmi-ee 
1  u|,-,.-- le  !,,n-  li-e-pnt-,  c,-,-l 


1,1  li_nnv  rjie  ,  iiiix  li.iil- 

-Inilenl  ,    ilmil  1 -  a\i 


e-  ili 


1   11,1-  le  ilnilile 


Milh 


.Micllel- 

.\n,ue  !,■  .Me;crlicer'in,ii-  nnjonjon,  une  mmIciIc  lonpii' 

a  deux  léles  ,  qu'il  s'agit  de  faire  tourner  rapidement  sur 
elle-même  en  lui  donnant  l'élan  au  moyen  d'une  corde  fixée 
il  doux  baguettes,  AuxTuileries,  dans  les  jardins,  dans  les 
salons  ,  tonte-  les  iLiiiics,  tous  les  enfants  sont  occupés  ii 
faire  runflir  le  dmlilc  La  mode,  toujours  aux  aguets  de 
toutes  li>  lulii-ei  de  tous  les  caprices,  ne  manque  pas  d'en- 

l„i  liiieiMiine  ,  iii.iieli,ini  ,111  ji;i-  eonime  Un  régiment  et 
\ètne  irniie  -oiii'  d  nnilmnie  e-l  tiep  stérile  pour  que  la 
mode  songe  a  lui  lairc  le  nimnilre  cnipinnl  Tout  au  plus 
glane-t-elle  par-ci  par-la  qncli|ne-  ilenmiiiii, liions  mytholo- 
giques. Une  psi/ehé  n'e-t  pin-  I  .une  e|iii.-c  et  tourmentée 
par  l'amour,  c'est  1111  inirmi  de-line  a  remplacer  les  ancien- 
nes toilettes  où  les  lie, mil'-  ne  pouvaientsevoir  qu'àmoitic. 
Une  élégante  a  une  ligine  de  ."Saturne  sur  la  pendule  de  sa 
cheminée;  une  palrnuille  d'Amours  en  lii<ciiit  de  chez  Da- 
goty  dans  son  boudoir;  les  capunmx  <\  ilmment  le  mot 
d'ordre  :  aimer  !  Le  dieu  Morpliee  e-i  li^mi'eii  bronze  doré 
sur  son  litet  sur  son  somno  ,  mcublcqu  anlrefoison  cachait 
i\ei  -oin  et  dont  on  fait  parade  alors.  Elle  porte  descas- 
ipii-  a  la  Minerve,  des  tuniques  de  Vénus,  des  fichus  il 
1  Ins.  il  n'est  pas  jusqu'à  sou  cordonnier  qui  ne  décore  les 
pantoulles  qu'il  lui  vend  du  nom  pompeux  de  sandales  à  la 
P.sycdié.  Elle-même  ne-  ;i|ip:lle  ni  Clémence,  ni  Joséphine, 
ni  Marie;  elle  a  quelque  iimn  mythologique  ou  romanes- 
que :  Euphrosine  ,  Agiaé  .  Agiaure,  Emma  , Clara  ,Evelina  . 
Ida,  Nina,  Lodo'iska,  Palmire  ou  Zoé.  Cependant  elle  a 
moins  de  prétention  que  ses  grand'mères  n'en  ont  eu,  et 
moins  aussi  que  n'en  aurontses  filles.  Ellen  estpas  encore 
versée  dans  toutes  les  littératures  étrangères.  En  fait  de 
piano  ,  elle  joue  du  Boccherini  ou  tout  au  plusdu  Sleibelt; 
en  fait  de  romances,  elle  chante  :  Variant  jiour  la  Syrie,  le 
jeune  et  beau  Dunois;  en  fait  de  danse  .  elle  ne  viseplusii 
rivaliser  avec  les  terpsichores  de  l'Opéra  ,  elle  se  plaît  ii  la 
monacn:  et  la  gigue  Qii,  en  1811,  la  contredanse  favorite 
du  jour. 

A  tout  prendre  ,  la  Parisienne  des  dernières  années  de 
l'Empire  est  une  charinnnle  eié.iline  ,1  qui  il  ne  manque  le 
plus  smiveiit  (pi'nne  cmllnre  de  meiliein  jmil  et  unecein- 
tiiic  placée  a  la  ceinture  ,m  In  n  il  ehe  |,l,i,  |,e  sous  le  sein. 
Elle  a  le  pied  pi'lil  et  la  i.nnlie  line  :  .,1  mlieemirle  fait  foi 
de  sa  coqnellei-ie  cl  de  -,i  cmili.i  iice  ,1  ecl  cLMliI  ,\n-si 
grâce  a  -e-   pipon- cmirl-  cl    ,1    I  eliide  ,i|,pnirmnlie  de  l,i 

danse  qn  elle  11    l,nle  il    \    ,1  i|neli|nes  ,1111 -,  \o\e/.  a\ec 

quelle  eiaiv  elle  po-e-e- |Hei  I- ,1  Ici  le  aMV  i|iiclle -mnilesse. 
quel  clianniinl  luLinecmenl  ,,lle  nenclie    ,Snns  ee  ni    port, 

elle  a  lepnlalimi  hiumi- ■!!  ■  (.In  e-i  empie cela  est 

devenu-'  C  e-i  ce  qn  mi  ne  -,iiii,iii  iIcMner  ,iii|miiirinii  ipie 
las  femmes  ijli-enl  plnlnl  quelle-  ne  niiielienl  ,  qu'elles 
traînent  des  lobes  de  \c-laleMir  I  ,ispli,i|ie  de  nos  Imltoirs, 
et  qu'il  est  du  bon  ton  de  leur  laisser  balaver  la  poussière 
des  rues.  Dans  les  avantages  des  dames  il  n'est  pas  plus 
question  do  jambes  aujourd'hui  que  si  elles  n'existaient 
p.is  Comblon  les  vieux  amateurs  de  l'Empire  doivent  nous 
piendre  en  pitié,  nous  leurs  successeurs  insouciants  ou 
dcsherités  ! 


Nous  chercherons  il  compléter  plus  tard  les  observations 
que  peuvent  suggérer  les  modes  de  l'Empire,  en  les  liant 
aux  goûts  nouveaux  que  l'invasion  des  ciranjcrs  en  France 
fera  naître  dans  le  costume.  Nous  vciioi-  ,|ii;,  le-  excen- 
tricités anglaises  ou  russes  ,  après  a\oir  eie  li,i|,inees  par 
nous  ,  ont  lini  par  se  naturaliser.  Les  i,ii  nature.-  de  lepo- 
([110  nous  aidiM'ont  a  mieux  faire  coniprmidre  celle  époque 
de  transitiiMi,  Aujourdliui  nous  emprunlons  au  spirituel 
crayon  d'un  habile  dessinateur,  a  M.  11.  Veriiet .  quelques 
reproduciions  heiirausasdesi/iccui/Hi/cs  et  des  merrciUeii- 
«P.Ï  de  rEmpire,  La  juste  mesure  qui  sv  liouve  entre  la 
vérité  des  ilélails  et  l'' esprit  de  charge  de  l'ensemble  en  fait 
des  documenls  contemporains  très  inleres.sanlsii  consulter 
sur  celle  époipie  de  l'histoire  de  la  mode 

A    J   0 


Keoiioiiiie  doiiieittiqiip. 

Etuile  sur   te  piissé  et    t'iii'eiiir    de  l'art   culinaire  en  Fratice. 

Lcsdiinix  l'i  les,  ni-iniers  si.nvontl  L  art  culinaire,  dont 
la  France  hn.iil  le  -ee|iiie  ilmit  eHy  avait  réijigé  le  code, 
dont  elle  ilmin  iii  de-  lei  ,,ii-  ;,  l'Europe  et  au  monde,  le 
grandarld-  \.iiel  cl  île-  Ciiéine,  est  aujourd'hui,  hélas! 
en  pleine  d  cadence.  \  la  cuisine  du  ion  sens,  créatrice  de 
tant  de  (hcfs-d  œuvre,  a  succédé  une  cuisine  de /'an<ai»ie, 
qui  a  fausse  systématiquement  tous  les  principes  du  vrai 
goût,  méconnu  les  exemples  el  les  traditions  des  maîtres, 
el  qui  voit  dans  unporc  aux  choux  le  dernier  effort  du  gé- 
nie culinaire.  Ou  allons-nous  par  celle  voie  funeslc,  el  som- 
mc,-noii-  desiini-.i  Imnberde  chute  en  chute,  jusqu'à  celte 

iinnicn.-e  -; Ile  ileiiioei,iii,pie  cl  Micialc.  si  |ir6née  par  HOS 

bociali-lc-  qui,  en  inlendinl  dînent  el  déjeunent  au  Café  de 
Pans,  I  un  de  1  e- dm  un  i--,incUiairesou  se  conservent  en- 
core quelque- cl  ineel  le- du  leii  .sacré? 

(  elèudmi  il  I  lien  loi  -c  1,1  Hunier  avec  une  ardeur  nouvelle. 
ou  doii-il  -cieirnlre  sur  ses  réchauds  déserts?  Telle  est  la 
qiie-iimi  qiie-iion  grave,  quia  vivement  préoccupé  tous  les 
gr.iiid-  pi  ii-eins,  tousie* grands  mangeurs  de  notre  époque, 
cl  qn  d-mii  Ions  rcso|\iej|.  suis  licureux  de  pouvoir  le  dire, 
lin  II-  lin  -en- qui  1 1ml  1,,  — mer  le-  iiii,iLnnal  ion- lespluscrain- 

li^c-    .\ ]iim  qn,,i!  nienl    ilil   île    ni:m\,ii-cs  langues  et 

qiiel,|iie-  mii-inicis  c\pul.-cs  du  p.ilai,- des  rois,  l'art  culi- 
iiiiie  ne  peina  pas.  S'il  subit  en  ce  monient  une  crise  incvi- 
I  ilile  -inicdenos  révolutions,  c'est  qu'il  doit,  lui  aussi,  se 
ii.iii-Imnicr  pour  atteindre  il  la  hauteur  des  destinées  d'un 

peuple  libre. 

I  In  peut  ne  point  goûter,  il  est  vrai,  on  peut  même  railler 
quclqiiclois.  comme  je  l'ai  osé  faire  tout  à  l'heure,  quelques- 
unes  des  idées,  des  hypothèses  culinaires  de  nossocialisles. 
.Mais  il  faut  en  même  temps  rendre  justice  ii  leurs  bonnes  in- 
tentions. Tous  ont  voué  à  la  cuisine  un  culte  fervent  et  cons- 
tant; tous,  depuis  Saint-Simon  jusqu'il  .M,  Louis  Blanc,  se 
sont  accordés  à  la  considérer  comme  le  principe,  conuiie  la 
base  de  toute  société  bien  constituée. 

(Juand  feu  .M,  le  comte  de.Sainl-Simon  devint  dieu  parla 
grfice  du  Père  Enfantin,  lorsque  l'Église  nouvelle  s'installa 
sur  les  hauteurs  de  Ménilmontant,  on  voyait  tous  Ivs  jours 
descendre  de  la  montagne  sainte  des  philosophes  etdes  pu- 
blicistes,  des  apôLres  el  des  demi-dieux,  qui  s'en  allaient  à 
la  Halle  acheter  des  navels  et  des  carottes,  des  carpes  et 
des  lapins,  -ymbole  vivant  ije  parle  des  dieux  el  des  apô- 
tie-  ,  -Miiliiiie  vivant  de  la  réhabilitation  des  cuisinières, 
dmii  il-  ,i\,iienltoulefois  remplacé  le  panier  par  une  hotte, 
liulle  niy.-tique  et  qui  indiquait  aux  générations  nouvelles 
que  désormais  l'anse  du  panier  ne  danserait  plus.  La  plu- 
part, cela  est  triste  à  dire,  n'ont  vu  la  qu'une  mascarade 
liorsilc  saison,  qu'une  farce  digne  des  tréteaux.  On  a  luié. 
ciins|iiie  el  |.re-ipie  lapidé  CCS  glorieux  apôtres,  ces  nou- 
vciiix  cin,  hinnene-  qui  venaient  confesser  ainsi,  à  la  face 
de  Ions,  ee-nlilinie  doimiede  la  réhabilitation  de  l'art  culi- 
naire, ipii  c-i  le  pi  en  lier  elle  dernier  mol  de  toutes  lesgran- 
desdoclrine--iim,ili-les. 

Ouvre/ 1 7,(1  ,■,('  de  .\1  Cabet,  vous  verrez  s'il  a  négligé  les 
cuisiniers,  et  dans  le  phalanstère  de  .M.  Fourier  ils  occupe- 
ront la  seconde  place,  ils  viendront  immédiatement  après  les 
membres  de  la  Cohorted'ctite,  chargée  dévider  ccque rem- 
plira si  \i  tel. 1  son  q  a  iiositê  des  tables  plialanslérieuncs.  Quant 
aux  enfuit-,  il-  -eiont,  des  1  âge  le  plus  tendre,  dresses  aux 
exercices  enlnnnie-  .M,  Fourier  a  remarqué,  et  c'est  lii  mê- 
me, Mll\  ,inl  -e-  ill-ei|il,'-,  iilU'ile-  lein.irques  qui  font  le  plus 
iriionnein  .1  -,i  -;i-,icile  il  n  leiiLiiqnequo.  dese|il  adixans, 
Imi- le- mil, ml- -eemii|il,ii-;iiciilil,iiks  les  choses  s;ilesclmal- 
piopie-  hmic,  a-t-il  cunciu,  laisons-en  des  marmitons.  ■ 
ll-e|.|iielieieni  les  lègunies,  videroul  les  poulets,  lavcrontla 
v, Il—elle  lie  :  cl  il  e.sl  clair  que  cette  occupation  éclairera 
leur-  i-|iiil-,  élèvera  leurs  âmes,  bien  plus  i]ue  ne  le  pour- 
r,iii  l,iire  1  iiinlilc  étude  delà  l.iiigncdc  Virgile  et  d'Horace, 
de  >e|iliiielecl  d  llomcrc  C  e>l  ainsi  ipiils  pourronl  concou- 
111  el  peni  eiiereinporler  le  prix  dans  cc?gr,indcs  batailles 
enlin.iiie-iiii  1  miMiia,  au  milieu  des  danses  cl  di's  concerts. 
le-  en  1-1  n  ICI -el  le- p.ii  issiccsdetousles  plialaiisicrcs  du  globc. 
sedi-pnlci  la  p.ilinc  de  l'art  despetitspàlcs,  des  pieiis  a  la 
Sainte- .Menehould,  des  filets  saules  et  du  turbot  a  la  sauce 
aux  câpres. 

M.  Louis  Blanc,  sans  s'en  douter  peut-être,  a  continué  de 
marcher  dans  celte  voie  ;  il  y  a  même  été  plus  loin  que 
Saint-Simon  et  Fourier.  Tout  en  rendant ,  tout  en  essavant 
de  rendre  le  travail  attrayant,  Fourier  n'a  cessé  de  recon- 
naître ses  droits,  comme  il  a  ivciuinuceuxdu  capital  et  du 
talent.  C'est  ce  qu'ont  fait  aussi  les  saint-siii.oniens  lorsque, 
il  côté  du  principe  de  la  rcliabililalioii  de  la  cuisine  ,  ils  ont 
inscrit  leur  célèbre  axiome  1 .1  chacun  suirant  sa  capacilé. 
à  chaque  capacité  suirant  ses  wuvres  M.  Louis  Blanc  .1 
adopte  .  il  est  vrai .  la  première  partie  de  celleforinule.  mais 
pour  la  modifier  en  ces  termes  :  A  chacun  suivant Ja  capa- 
cité de  son  estomac  ,  autrement  dit ,  .1  chacun  suirant  ses 
besoins,  devise  qui  lui  appartient  et  qu'il  a  proclamée  liau- 
temeiil  et  développée  élnqueniment  dans  une  de  ces  honii"- 
lies  doiil  il  cdiliait  sesum/.fdn  I.iixeiubouri;. 

Cette  dcvi.sc  de  .\l  Louis  Ul.inc  el  celle'deM.  Proudlion  : 
Jouisse:  pour  Inirailler.  traraillez  pour  jouir,  prouvent 
é\idciiimeiit  ipie  Ions  les  progrès  de  l,i  science  socialislecon- 
\ergciil  cl  aboulis-seiit  a  la  glordicalion  de  larl  culinaire  . 
dont  les  lourneaux  seront  Icsaulelsdu  nouveau  culte.  Dans 
une  sociele  ou  les  droits  de  l'homme  el  du  citoyen  se  inesu- 
reronl  sur  les  facultés  de  son  ventre,  il  est  clair  que  le  cui- 
sinier doit  avoir  la  première  place  et  devenir  do  toutes 
façons  le  chef  de  l'Étiit.  Je  no  sais  si  les  pâtissiers  et  les 
cuisiniers  ont  déjii  pres.senli  ce  glorieux  avenir  qui  les  at- 
tend dans  la  république  démocratique  cl  sociale ,  mais  on 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


l'aurait  pu  croire  au  mouvement  qu'ils  se  sont  donne  après 
la  révolution  de  février.  On  ne  pouvait  alors  faire  un  pas 
dans  la  rue  sans  se  lieurteur  à  quelque  afiiclie  où  on  lisait 
bon  gré  :  Les  citoyens  garçons  pâtissiers ,  jaloux  de  faire 
prévaloir  leurs  droits  si  longtemps  méconnus ,  etc. ,  ou 
encore  :  Messieurs  les  citoyens  cuisiniers  sont  invités  à  se 

réunir  dans  la  salle  de pour  se  rendre  de  là  à  l'Hôtel- 

de-Ville ,  afin  de  protester,  etc. 

J'ignore  si  toutes  ces  manifestations,  protestations  et  récla- 
mations ont  eu  leur  effet;  mais  il  n'en  demeure  pas  moins 
constant  qu'il  importe  de  démocratifer  la  cuisine ,  comme 
on  a  démocratisé  ou  comme  on  démocratisera  le  crédit , 
pour  que  l'art  culinaire  sorte  enfin  de  l'état  de  crise  où  il 
languit,  et  que  les  cuisiniers  prennent  le  rang  qui  leur  ap- 
partient dans  notre  seciéié  nouvelle.  Il  faut  que  la  cuisine 
démocratique  soit  désormais  une  vérité. 

C'est  pour  concourir,  autant  qu'il  est  en  moi ,  à  la  réali- 
sation de  cet  état  de  choses  que  j'ai  voulu  vous  parler  au- 
jourd'liui  de  deux  ouvrages  culinaires,  l'un  ancien  ,  l'autre 
nouveau  ;  le  premier,  pubWé  par  \a  Société  des  bibliophiles; 
le  second,  composé  par  de  dignes  élèves  de  Carême  :  le 
Ménagier  français  et  {a  Néo  physiologie  du  goût. 

Si  ces  deux  ouvrages  se  rapprochent  par.  l'identité  des 
matières  dont  ils  traitent ,  ils  diffèrent  essentiellement  par 
la  manière  dont  elles  y  sont  traitées  ,  autant  que  par  les 
époques  qui  les  ont  vus  naître.  L'un  est  d'hier  et  l'autre  a 
trois  ou  quatre  cents  ans  de  date  Celui-ci  est  le  manuel 
d'un  bon  bourgeois  qui  n'y  entendait  pas  malice  et  qui 
nous  a  conté  tout  naïvement  comment  on  gouvernail  un 
ménage  au  quatorzième  et  au  quinzième  siècle  ;  celni-lii  est 
l'œuvre  de  trois  personnes  dont  voici  les  titres  et  qua- 
lités tels  que  nous  les  trouvons  déclinés  dans  son  avant- 
propos. 

»  Premièrement,  une  femme  de  bonne  compagnie  qui  n'a 
pas  d'enfants  ,  qui  n'est  plus  jeune  et  qui  n'a' pas  grand' 
chose  à  faire  ;  deuxièmement ,  son  docteur,  qui  est  un  des 
plus  habiles  médecins  i^erniii niques,  et  qui  voudrait  faire 
concorder  le  système  liy^iéiii(|ue  avec  la  cuisine  française 
par  philantliniple  ;  troisièmement,  son  cuisinier,  qui  n'est 
pas  le  moins  li^iiiilc  (1rs  liois,  iiiiiest  tourment.' par  le  besoin 
de  dnv  II  veille  sur  la  siirihc  qu'il  professe,  eldontleder- 
nier  cerlilicai  lui  a  ele  ileliui'  par  un  des  gourmets  les  plus 
illustres  de  Pans.  M  labbé-ducde  iMontesquiou.  » 

Certes,  voilà  de  grandes  et  puissantes  autorités  et  dont 
on  doit  beaucoup  attendre,  La  Sociétés  des  bibliophiles  me 
pardonneradonc  si  j'insiste  peu  sur  sa  curieuse  publication, 
si  je  me  borne  à  dire  (|u'elle  intéresse  au  plus  haut  degré 
tous  ceux  qui  s'occu|ieiit  de  I  histoire  des  mœurs  françaises, 
et  que,  par  la  pureté  du  texte  ,  par  les  notes  piquantes  et 
instructives  dont  elle  l'a  orné  et  illustré ,  elle  a  fait  de  ce 
Ménagier  un  livre  qui  prendra  placedans  les  bibliothèques 
de  tous  les  savants  ex  professo  et  de  tous  les  amateurs  de 
la  science. 

Cela  dit ,  je  me  hâte  d'arriver  à  l'examen  de  ce  grand  ou- 
vrage ,  de  ce  merveilleux  produit  d'un  cuisinier  tourmenté, 
d'un  docteur  germanique  qui  veut  faire  concorder,  etd  une 
dame  qui  n'a  pas  grand'chose  à  faire. 

C'est  l'Encyclopédie  culinaire  la  plus  complète  que  je  sa- 
che; c'est  une  histoire  de  la  cuisine  depuis  les  temps  les 
plus  reculés,  histoire  dont  le  besoin  se  faisait  généralement 
sentir.  Jusqu'ici ,  comme  les  trois  auteurs  le  remarquent 
judicieusement  dans  leur  |irèface,  la  cuisine  n'avait  pas  en- 
core renconiré  d'historien  ipii  sût  embrasser  et  retracer, 
dans  un  style  digne  d'elle ,  toutes  les  phases  qu'elle  a  subies 
depuis  la  naissance  du  monde  Les  traités  dogmatiques 
laissaient  même  beaucoup  à  désirer.  Depuis  Louis  XIV,  on  ne 
peut  citer  en  ce  genre .  mentionner  honorablement  que  la 
Cuisinière  fcoui'scoi'sc,  dont  l'auteur  est,  comme  chacun  sait, 
l'illuslre  iiuidame  Blanc,  cuisinière  de  madame  la  [rrési- 
dente  d'driiiesson ,  "  qui  voulait  faire  bonne  chère  et  qui 
regardait  de  pies  à  la  dépense.»  — «  Mais,"  ajoutent  les  trois 
auteurs,  «  la  plupart»  des  prescriptions  de  la  Cuisinière 
bourgeoise  sont  devenues  surannées,  et  la  naïveté  de  son 
style  a  rebulé  les  personnes  à  prétentions.  » 

Cette  fois-ci,  les  personnes  à  prétentions  seront  sans  doute 
satisfaites  On  a  eu  du  moins  la  prétention  de  les  satisfaire , 
et  il  est  juste  de  reconnakre  qu'on  n'a  rien  négligé  pour 
cela  .  en  même  temps  qu'on  a  demandé  à  toutes  les  cuisnes 
de  l'Europe  leurs  recettes  particulières,  poui'  les  rassembler 
dans  cet  universel  cumpendium  .•  cardiaque  cuisine  a  son 
caractère,  comme  chaque  peuple  a  son  génie.  La  cuisine 
russe  ou,  pour  parler  avec  les  maîtres,  la  cuisine  boréale 
excelle  dans  la  soupe  à  la  bière  et  ii  la  glace,  choses  étran- 
ges et  inexécutables  pour  nous ,  hélas!  L  Angleterre  tient  le 
sceptre  des  rôtis.  .\  la  Hollande  l'avantage  de  briller  à  l'é- 
gard d^.s  poissons  de  toute  espèce,,  et  surtout  pour  leurs  sau- 
ces variées  avec  une  intelligence  et  des  soins  e.rquis.  L'Espa- 
gne est  un  pays  si  bien  inspiré  pour  lu  composition  des 
ragoûts  que  les  trois  plus  belles  çntrées  de  liiiHieiine  cui- 
sine ,  c'est-a-riire  les  (irmlnilvs  d  oniiniHr  à  l<i  royale  ,  les 
perdrix  à  la  Mrdiiui  Cu-h  rt  li>  nllus-ijndndas,  nous  sont 
arrivéesen  Eraiicr  ,i  l,i  -mir  .Ir  l,i  innr  .\nni'  .\uciiiie  con- 
trée n'est  com|iaralile  a  I  llalie  |ii)ui'  la  roiilectioii  des  con- 
serves et  des  eonlitures.  L  .Mleiiiagne  est  un  pays  illustre 
par  la  distinction  de  ses  potages  et  la  perfection  de  ses  en- 
tremets au  snciv;  enlin  les  l'uloiiai»  excellent  dans  l'assai- 
sonnement qu'ils  appliipient  a  tnule  espèce  de  venaison; 
c'est  à  la  France  qu  il  apparleiiailde  rassembler  etde  réunir 
en  un  seul  et  brillant  laisceau  tous  ces  rayons  dispersés  et 
divergents  sur  l'horizon  culinaire. 

.4vant  d'aller  plus  loin,  qu'on  me  permette  de  remarquer 
combien  cet  horizon  CMlmntrc  me  sourit  et  me  semble  heu- 
reusement trouvé.  Horizon  culinaire .  rexpnsslt si  iioii- 

velle  sans  avoir  rien  de  clio,]uant,  rien  qm  ne  im  ir,-|iiiiii!r 
aux  locutions  de  ce  genre  déjà  univeisrllniirni  .ici  (  |.i(i>  . 
carnous  avons  Y  horizon  polit'iqae,  dont  on  lait  honneur  au 
Constitutionnel ,  les  grands  horizons  de  M,  de  Lamartine, 
les  horizons  rouges  et  h  s  horizons  bleus  do  Si,  lUigo  ,  les 


horizons  changeants  de  M  Dumas,  sans  compter  une  foule 
d'autr.^s  |)etits  /inr/.-on,!  d'un  commun  usage  ,  horizon  in- 
duslricl.  Iioriziiii  fnaiirier.  lidi'riiirc,  elc,  etc.  L'horizon 
culinaire  ne  prui  ilniic  manquer  d'être  le  bienvenu  sur  l'iio- 
rizuii  don  pavs  ou  Ton  parle  si  bien.  Certes,  si  la  Néo-phy- 
siologie était"  toujours  écrite  dans  ce  goût,  elle  eût  placé  son 
auteur  ou  ses  auteurs  parmi  les  premiers  de  nos  écrivains 
à  la  mode. 

Le  style  n'est  cependant  pas  ce  qu'il  y  a  de  plus  considé- 
rable, de  plus  louable  dans  cet  ouvrage.  Le  fond  y  vaut  en- 
core mieux  que  la  forme.  C.haque  mets  ,   chaque  aliment , 

teniriil  cl  -:ii'iililh|ii:inciil  .in;il\M- ikiii- Ml   ii.iliiiv  ri  ibiis 

ressemble  pointa  ces  théoriciens  naifs  qui  vousdiseiitsim- 
plenient  ;  «  Pour  faire  un  civet  do  lièvre,  prenez  un  lièvre.  » 
C'est  là  une  façon  de  parler  vulgaire  qu  il  faut  laisser  à  la 
Cuisinière  bourgeoise,  .aujourd'hui ,  pour  nous  apprendre  il 
f.iire  un  civet,  il  importe  de  nous  développer  d  abord  ce 
qu'Hippocrate  et  Galicn  ont  pensé  de?  lièvres  de  I  anti- 
i|iiilç.  ili's  h.iliiliidrs  ri  (1rs  iiisliiirts  lie  rr  iiiiadrupede,  et 

(■(illiliirlil    il  l,iii!   Il' MM  \  ir  l'^iiv  ^r  CMiiliiri ■  ,i  une  cnulume 

riMinuM'Icrilii  >M/.h'ni  ■  Mcrlr,  (|ii  "ii  piMlKiii!'  lirneraleiiient 
(le  nu.->  jduis  sur  Imilr-  I -^  Lilili'S  ansliicratiipies  et  dans 
toutes  les  maisons  di~iiii^iirr>,  a  l'exemple  de  la  cour. 

J'ai  nommé  la  nuit-  ri  r  .•-!  ,iss!>zdire  que  la  Néo-physio- 
logie est  d'un  cuisimei'  de  I  .uicien  régime,  qui  n'a  point 
écrit  pour  le  nouveau.  Mais  cela  même  rend  ses  observa- 
tions plus  piquantes'  et  plus  (lesinlercssces  Son  livre  est, 
en  quelque  sorte,  le  tesliiiuciil  niliimire  d'une  société  dis- 
parue, mais  qui  nous  a  l.n— !■  ilrv  inrllrs  qu  il  fini  ^ppru- 
prier  aux  besoins  et  au\  \;i-ir~  ;i|i|H'iiis  di'  l;i  siir,cii'  :ic- 
tuelle.  J'ose  dire  qu'en  lisiinl  ni  i.n\r,ii;r  (lans  rrlle  iiilcn- 
tion  on  y  profitera  beaucoup.  On  y  ajiprendra  en  même 
temps  à  mieux  apprécier  certains  faits  et  certains  hommes 
de  notre  histoire  qu'on  n'a  pas  encore  bien  connus,  parce 
qu'on  ignorait  tout  ce  que  peut  un  rôt  ou  un  souillé  sur  le 
cœur  et  l'intelligence  d'un  homme  d'État. 

Le  général  La^  Fayette ,  par  exemple  ,  a  été  bien  diverse- 
ment jugé  Puni  1(>  nus  .  c'est  un  grand  liomniè  ;  pour  les 
autres,  un  m, us  imlilniiic  .  ciiinnu^  lappel.iit  Napoléon.  La 
Fayette  n Clml  ni  -i  lijid  ni  si  lias.  Un  miitserla  locaractéri- 
ser,  et  ce  mot,  les  Inn- ,!iili'iu>  de  la  Néo-physiologie  l'ont 
trouvé  en  traitani  de  I  ihmi-'hi  du  navet  dans  le  haricotde 
mouton.  Le  géneial  l.;i  I  ,i\rUe  elait  un  navet.  Tous  les  ac- 
tes de  sa  vie  politique  ne  peuvent  mieux  se  innqiarer 
qu'aux  agressions  révolutionnain -i  l  :i  linxi-ioii  ilr>  n.i\els 
dans  le  haricot.  D'où  il  sutt  (pie  les  muil-  ^mil  1rs  La 
Fayette  de  la  cuisine;  car  ils  pnssedent  les  qualité»  léni- 
fiantes et  soporatives  qui  caractérisaient  le  général.  »  Comme 
on  le  voit , 

Les  navels  ne  sont  pas  ce  qu'un  vain  peuple  pense. 

Un  autre  fait  non  moins  curieux  se  raîtache  à  l'invention 
des  ratafias,  que  des  auteurs  mal  informés  avaient  attribué 
à  Fagon  ,  le  médecin  ordinaire  de  Louis  XIV.  A  les  enten- 
dre,"le  roi  devenu  vieux,  n'aurait  dû  la  constance  qu'il  a 
fait  voir,  dans  les  désastres  de  la  fin  de  son  règne  ,  qu'à  la 
puissance  récnnfortative  de  ces  spiritueux  produits  de  l'i- 
niaginalion  et  des  combinaisons  de  Fagon  et  de  madame  de 
Maintenon.  Uien  n'est  moins  vrai.  Ce  n'est  point  pour  exhi- 
larer  Louis  XIV  qu'on  a  inventé  les  ratafias  .  puisqu'on  en 
fabriquait  dès  le  règne  de  Louis  XII ,  et  que  les  élixirs 
étaient  déjà  connus  du  temps  de  Charles  sixième  du  nom  , 
Et  voilà  cependaitl  comme  on  écrit  riiistoirc  , 

l'histoire  des  rois  et  des  ratafias, 

Non-seulement ,  selon  les  auteurs  de  la  Néo-physiologie  , 
Louis  XIV  11  usait  point  de  ces  .spiritueux  ,  mais  encore, 
quoi  (ineii  aient  dit  de  iiiei  hantes  langues,  comme  le  duc  de 
Sainl-Smi'ui  Ir  i:r;ind  nii  mangeait  peu.  Il  semble  qu'aux 
M'iix  ilr  (Il  Miiiri-  (  riir  silii  irié  devrait  être  un  tort  plutôt 
qu  lin  iiirnl  ■  (    iiriMlnil  l,i  .V.ii-/)/iî/sto!ojievajusqu'à  traiter 

Sainl-.'^i Il  dr  ZdileiiiHir  imiis  avoir  ap|iris  queLouisXIV 

vidait  tous  les  matins  ciiiii  ,i~-irlles  de  iioiaw  et  plusieurs 

jattes  de  fruits  crus.  A  cr  Ir ;jii:i^:r  injurieux  on  oppose 

celui  du  marquis  de  Dan.re.iu  ,  qui  .itliinie  qu  à  restriction 
de  ses  grands  couverts,  le  roy  ne  virait  que  de  choses  très 
simples,  mangeant  toujours  modérément ,  quoique  de  bon 
appestit ,  'et  buvant  plus  sobrement  encor. 

yuantà  Monsieur,  frère  du  roi  et  duc  d  Orléans,  père  du 
Régent,  c'est  une  autre  affaire.  Nos  auteurs  conviennent  qu'il 
mangeait  queliiuefois  à  son  souper  tout  un  jambon  rôti,  douze 
bér.i'ssiurs. nrc  leurs  tartines  iJe  lèchefrite,  une  pleine  cas- 
srinlr  (Ir  liiiiiillle  d'amande,  et  puis  des  salades  avec  du 
biiinaL'r  ri  drs  concombres ,  et  puis  des  gâteaux  feuilletés 
et  liimies  de  cnnfilures  ,  et  finalement  des  fruits  de  la  sai- 
son tant  ipi  il  en  Vdvail  a  Sun  ((nuerl.  Madame  de  Choisy, 
ajoiileiit  a  ce  |irii|ios  nos  hisliirieiis  .  lui  re|iiorli,iit  conti- 
niirllrnienl  de  ne  pus  aimer  1rs  |Hilares,  rt  madame  de 
(■„ixlu-,nl..rr\,ill  ;i  rr  Mljrl  (pill  \  a\,lll  (1:1  IK  Idiiles  les  ha- 
liil'ndc^ilr  \liiii^i('iiri/»i'/'/i(f  rhiisr  qtii  iiiliiiljias  français. 

Lu  vente  je  regiellr  dr  nr  |i(inMiir  m  ,i|i|irs;inlir  plus 
longtemps  sur  ces  intérc-^nnUilrliiiU   M:ii>  |r  nr  Iji- |Miinl 

ici  de  la  philosophie  de  I  In-hurr  ,s,iii-(  rl,i  j    | imi-  iiin 

un  grand  parti  de  tOus.c('>  rriisriL-ncnn  iils  ,  qui  rrp, indent 
le  jdiir  le  plus  vif  sur  le  caractère  et  l'esprit  du  dix-scptieme 
sierlc  Cdinliien  nous  devons  remercier  les  auteurs  de  la 
Néo-physioloyie  d'avoir  composé  et  publié  un  volume  d'e 
700  pages  iii-i"  pour  nous  apprendre  tout  cela  ,  et  nous 
donner  de  plus,  presque  année  par  année  ,  le  menu  de  tous 
les  dîners,  de  tous  les  déjeuners  et  de  tous  les  soupers  qu'on 
a  SiTMS  Hir  1,1  Mille  (Irs'nii,-.,  de-  |.riiircsrt  drs  princesses. 
(Irxliirrlriir-,  ilr- (Mii|irrri(r-,  ri  (1rs  -rn.ilriir-.  ilrpiiisl'a- 
\riir:nrMt  (In  KM  l.dui-lr  r.h.ijlr  jiim|u  ,i  l,i  rliulr  dr  Charles 
le  liien-Aime  ' 

Nous  en' avions  déjà  lu  quelque  chose,  il  est  vrai ,  dans 
les  ouvrages  de  M.  Capeflgue,  qui  fait  de  l'histoire  comme 


M.  Dumas  fait  du  roman  ,  avec  autant  d'imagination,  de 
fécondité  et  de  facilité  Mais  ce  qu'on  remarque  le  plusdans 
les  innomln.ililr-  rrriu  de  M.  Capefigue ,  ce  qui  sans  con- 
tredity  tient  l,i  plii>tirande  place,  c'est  le  détail,  la  descrip- 
tion de  ce  qudiii  iii,dii;r>  les  grands  personnages  dont  il 
nous  raconte  les  fui-  ri  jr-ir.  J'en  veux  citer  un  exemple 
entre  mille  autre,  l.dr-(|ii  rii  i;i:i  le  roi  Louis XV  revint  de 
celte  campagne  ou  il  x'iint  si  vaillamment  battu  pour  la 
France  et  les  beaux  yeux  de  madame  de  Châteauroux ,  les 
bons  bourgeois  de  sa  bonne  ville  de  Paris  lui  offrirent ,  à 
l'Hôtel-de-Ville,  un  magnifique  menu,  menu  qui  inspire  à 
M,  C.apeligne  un  tel  enthousiasme  que,  dans  son  Histoire  du 
dix-huiticmr  siècle  ,  si  romanesque  d'ailleurs,  il  l'a  repro- 
duit ,iiisi|ii  1  Iniis  fois  :  primo,  dans  le  cours  du  récit;  se- 
cundc.  ilin-  Ir-  iidtr-  placées  au  bas  des  pages;  tertio 
eiilin  ,  (Km-  lo  pirrr-  |ii-tili(Mti\es,  Drs  critiiptes  iiud-in- 
leiilidiiiir-  ,ii(  11,-riMirni  prut-être  M.  C.aiieligiie  de  neveu- 
loir  par  kl  (pie  gi'o»Mr  des  feuilles ,  et  comme  on  dit,  tirer 
au  volume.  Pour  moi ,  je  n'y  vois  qu'une  preuve  du  zèle  de 
riiistdrien  qui  veut  être  exact  en  tout,  et  écrire  l'histoire 
par  le  menu  Cela  soit  d'it  sans  calembour,  car  je  les  ai 
dans  une  sainte  liorrrnr.  et  il  n'en  est  pas  un,  même  le  plus 
transparent.  de\ant  ipii  je  ne  demeure  aussi  sot  qu'un  dne 
derant  un  tourne-broche. 

Cette  comparaison  culinaire  est  si  ingénieuse  ,  elle  arrive 
ici  si  à  propos  que  je  serais  tenté  de  m'en  attribuer  l'hon- 
heur.  Mais  rendons  à  César  ce  qui  est  à  César,  et  ce  que 
d'ailleurs  on  tenterait  en  vain  de  lui  dérober.  Cet  dne  et  ce 
tourne-broche  sont  du  père  spirituel  de  l'auteur  du  Porc 
aux  choux.  Il  y  a  ,  dans  toutes  ces  gracieusetés  ,  un  parfum 
(pu  décelé  son  fruit,  et  qui  trahirait  le  plagiaire  qui  vou- 
(irnit  m  usurper  la  gloire. 

Mais,  a  propos  de  plagiaire,  la  cuisine  a  eu  les  siens, 
comme  la  littérature.  Croirait-on  que  les  chefs  bâtards  de 
la  cuisine  impériale  ont  pensé  ,  dans  leur  fol  orgueil ,  pou- 
voir imiter,  surpasser  même  ces  descendants  des  Vatel , 
attachés  traditionnellement  à  la  bouche  de  nos  rois  légiti- 
mes! Ce  fait  a  eu  lieu  cependant,  et  les  auteurs  de  la  Néo- 
physiologie le  racontent  avec  une  généreuse  indignation.  Ils 
n'oublient  pas  non  plus  de  nous  dire  quelle  triste  issue  a  eu 
cette  présduiptueuseet  odieuse  lenlaliv»  Permettez-moi  de 
vous  citer  ers  lignes  caractéristiques  qui  llétriront  jusqu'à 
la  dernière  postérité  les  cuisiniers  et  les  chambellans,  et  les 
préfets  du  palais  de  Napoléon  ,  et  Napoléon  lui-même,  et 
toute  son  auguste  famille  : 

«  Tout  le  monde  a  vu  avec  surprise ,  dans  la  première 
édition  des  Mémoires  de  M,  le  comte  deBausset,  le  tableau 
d'un  menu ,  d'où  il  résulte  que  ce  fonctionnaire  impérial 
faisait  servir,  au  château  des  Tuileries,  pour  le  dîner  de 
son  maître  ,  un  gigot  d'agneau,  au  second  service  et  comme 
plat  de  rôt  Voilà  ce  qu'un  maîire-d'hôtel  du  troisième 
ordre  n'aurait  eu  garde  de  souffrir  de  l'autre  côte  de  la 
r'm'ière  de  Seine,  ou  dans  le  faubourg  ^aint-Honoré  .  qui 
n'est  pas  moins  bien  habité  que  le  quartier  Saint-Germain, 
Il  est  à  noter  que  le  reste  et  l'ensemble  de  ce  dîner  bour- 
geois, publié  par  M.  de  Bausset,  rst  tellement  vulgaire  et 
si  dépourvu  d'aucun  usage  du  be.ni  iiidinle,  que  la  réputa- 
tion de  cette  famille  impériale  et  rrlle  dr  ses  principaux 
officiers  en  ont  lieaucoup  souffert  dans  reslinie  et  la  consi- 
dération puliliipie,  La  di\idi;alidii  Ires  indiscrète  ettoutà 
fait  iiinlile  (I  un  pareil  menu  a\ail  pniduit  un  étonneinent 

si  L-riv''r,d  et  lin  rll'rt  Irllr ni  fàclieux,  que  M.  le  préfet  du 

p:il:iis  inipi'iLil  ,1  cru  dr\ nir  retrancher  ce  document  dans 
|;i  (Iriiiirir  rdiiidii  (Ir  >r-  Mrmoires;  Cl  c'ost  en  vérité  ce 
ipi  il  ,i\ait  a  faire  de  mieux  pour  la  bonne  renommée  de  la 
fiiinille  Bonaparte,  ainsi  que  pour  l'honneur  de  ses  employés 

.\insi  voila  Napoléon  atteint  et  convaincu  de  l'irréparable 
crime  d'n\dir  nuiiL-r  du  lm-oI  dr  ninntiiii  ;  le  vi.il.i  desho- 
noré, lui  ri  lr>-lrli-,  p:ir  rnniih  rlllinrr  rl  rinilisrrrticui  de 
M.  delian-rt'  S;in>  diintr  il  ne  nrappartient  |ias  d'en 
appeler  d'un  jugement  porté  par  les  auteurs  de  la  Néo- 
physiologie.  Mais  j'aurais  souhaité  qu'ils  condamnassent 
moins  rigoureusement  l'empereur  Napoléon  N'est-il  pas  le 
parrain  ,  sinon  le  père,  des  poulets  à  la  Marengo!  Il  me 
semble  que  ,  pour  ces  poulets-là  ,  beaucoup  de  gigots  de 
mouton  lui  doivent  être  remis. 

Mais  je  n'en  finirais  point,  si  je  xenl.iis  siii\ir  nos  au- 
teurs dans  toutes  leurs  narratnm-  n  riiii-rin.iii.in-  J'ai 
voulu  seulement  donnerune  idrr  dr  .r  hrini  liMr,  de  cet 
excellent  manuel  de  cuisine  histiirn|iie  cl  (Idgiu.ilique.  de 
ce  iKiiiMMii  Temple  du  goût  on  les  noms  et  les  cliels-d'œu- 
vi-e  de  tiin>  1rs  eiiisiiiiei-  des  temps  passes  sont  inscrits  et 
décrits  pour  l'instruction  et  l'émulation  des  cuisiniers  pré- 
sents et  à  venir. 

Dans  un  des  mille  et  un  vaudevilles  de  M.  Scribe,  le 
héros,  le  célèbre  Vatel,  s'écrie,  en  faisant  sur  son  art  un 
retour  amer  :  «  Les  livres  du  poète  transmettent  son  nom 
et  sa  pensée  jusqu'à  la  dernière  po.stérité  ,  les  tableaux 
du  peintre,  li^s  stalnes  du  s-idpteur  immortalisenl  leur  mé- 
moire: miiis  ilrs  (  hrls  diruvre  du  cuisinier,  qu'on  reste- 
t-il?  ■■  Tn-tr  rrllrshin,  nriisipii  de  nos  jours  n'eût  point  af- 
llige  l'àinr  ilr  \  ilr!  l'„iril  riit  connu,  il  eût  inspiré  peut-être 
rrlir  Srii  />////<'"''"/"•,  ^^islr  innnunirnt,  ipii,  semiillipliant 
cl  -  ,rji  .|i  h,-, ml  il  ,1-,'  rn  ii^r,  rinil iriidr.i  tiiiitcs  lr-;jluires. 
tiiiile- I  -  siiiniiiiti's  riiinlnr  on  (lit,  loutes  les  (N'couvertes 
de  la  s,-ience  cl  de  l'art  culinaire,  .aujourd'hui,  ainsi  que 
nous  l'avons  remarqué  en  commeni;ant ,  il  traverse  une 
époque  de  crise  et  de  transition,  Jlais  toutes  les  doctrines 
avancées  simt  pour  lui;  toutes  rrpii-rnl  >iii  ];i  satisficlion 
pleine  et  entière  donnée  au  venticrl  ,i  Ir-lrin.ir  Innisera 
im-essanmienl  remplacé  pariin  m  nlrr  qiinis cl  ;i  l,i  morale 
de  l'Évan-ile.  cette  mordr  qui  -,irnlir  tniit  ;i  Ir-pi  il  et  au 

cœur,  succédera  un  petit  coilr  rnh rrdunt  S.tinl-Smion, 

Cabet.  Fimrier,  MM,  Ldiii-  lii.mrrl  rrdinllidn  dut  dri.i  posé 
les  principes,  dont  les  cuisiniers  sdci, (listes  de  l'aNeiiir  réali- 
seront les  conséquences. 

Alexaxdbe  Dufaï. 


28 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


ABUMil    R    BIS    (DEMMTOiraiXMB^ 


PAROLES     liT    MUSIQUE 


D'ARISTIDE   DE   LATODR. 


Dors  au  bruit  de  la  mer  profonde 

Qui  porta  tes  premiers  destins  , 

Alors  que  pèlenn  du  monde 

Tu  voguais  vers  des  bords  lointains. 

Dors  sur  le  rocher  solitaire 

Où  tu  jouais  naif  enfant  ; 

Dors  en  paii  !  l'humble  croii  de  pierre 

Abrite  le  front  du  croyant. 

Tes  pas  ont  foulé  mainte  plage  , 
Tesyeui  ont  vu  bien  des  douleurs, 
Partout  l'homme  est  né  pour  l'orage, 


Pour  la  souffrance  et  pour  les  pleurs  ; 
Mais  partout  aussi  la  prière, 
Et  le  protège  et  le  défeud. 
Dors  en  paii.... 

Descends  dans  la  nuit  solennelle  , 
Toi  qui  ne  crains  rien  de  la  mort. 
Le  temps  est  sombre...  Dieu  t'appelle 
Chateaubriand  ,  voici  le  port  ! 
Sur  ce  rocher  venait  ta  mère 
Écouter  la  plainte  du  vent. 
Dors  en  paii...  ' 


Combien  j'ai  douce  souvenance 
Du  joli  lieu  de  ma  naissance  ! 
Ma  sœur,  qu'ils  étaient  beaux  les  jours 

De  France  1 
0  mon  pays ,  sois  mes  amours 

Toujours  ! 

DE  Chateai'bria:u>. 


,  Andantino 


THANT 


PIANO. 


de    la  mer  pro  -  fon de  Qui  por  -  ta 


1^^ 


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lors  que  pé-le-rin    du     mon    -    -r  -  de,         Tu        vo  -  cuais 


vers    des  bords  lointains. 


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jr    le     ro-cher  so-li   -  tai  -    -   —  -  re.  Où        tu  jou-ais,  na-  if 


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L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL, 


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tout  l'homme  est      ne    pour      lo    -     -   ra-   -  ge,    Pour    la     souf-    -  (ran  -   -  ce        et     pour  les  pleurs;  Mais  par-lout   aus-si      la       pri - 


è  -    -    -     -   re  Et     le   pro-tége   et     le        dé  -  (end;    Dors  en      paix!  l'humble  croii  de      pier  -     -  re  A  -    -  bri  -  le     le  front  du  croy - 


Des  -  cends  dans       la    nuit    so  -  lem  -  -  nel  -    -  le,  Toi    qui  ne   crains         rien       de        la  mort.  Le  temps   est 


Pnr?    rn  paix!  l'humble  croix    de  pier'-re  A  -  -  —  bri-    -  te      le      Bre-ton       croy-  — ant. 


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L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


Lettres  il'un  Flaiieii 


LES   CnlEUnS    publics,    la    BOICHK   D  ACIF.n,    LI-    CITOÏIIN    PnOL- 
DHOS,    MADAME   DE    CIIIABDIN,    M.    DE    LAMAllIlSE. 

MoNSIEUn    LE    DlBECTEUn, 

En  province  et  ii  r(''tn\nspr,  "n  se  fiiil.  de  singulières  idées 
s\ir  l'éliit  ;iclucl  (Je  l'Mris  :  on  le  eroil  jiissi  liéserl  que  les 
siililes  lirùliinlsdu  S;iliiirii  et  non  uiiiins  dnnsjereux  que  les 
ijnrges  les  plus  redoul,ilile>  îles  A|irnniris  ou  de  la  Sierra- 
Moi-ena.  Partout  où  j'allai  |iciMl,ini  nii.ii  \M\,ije,  j'en  enten- 
dis parler  avec  liorreur.  ('.ri"|uiiiiil,niic  n  rllr.ur  |;as  |  lus  les 
petits  enfants  que  les  eitiiycn>  Ciihi'l  il  rrniiillion  n'épnu- 
vantenl  les  femmes  au  delà  d'un  rayon  de  deux  nnria- 
niètres  de  la  capitale.  Au  seul  mot  de  socialisme  jeté  par 
hasard  dans  une  conversation,  on  voit  toute  une  liiiniK''te 
fjiiiille  l'n>siinncr  de  la  tiM.e  aux  pieds,  1).- Iioininrs  Iumm- 
,.|  .rn>r>;.-.uii'inrnL  mil  peiu- de  l'état  de  -ml'i' |  ivMpir.iu 
laiil  (|ur  lie  l;i  lerreur.  Hien  ipi'en  iiiius.-Jiil  lriiiilrM\,- 
la  llepiihliqneiléiiiocratique  et  sociale,  un  mauvais  |  laisani 
mettrait  en  fuite  des  populations  enlii-res. 

Étrangers  et  provinciaux,  venez  à  Paris;  Paris  n'est  pas 
désert.  Paris  n'est  pas  dangereux.  L'état  de  siège  n'a  rien 
ilellraNant.  A  dire  vrai,  il  n'oiïre  aucun  inconvénient. 
Si  j'ai  niainlenanl  un  reproche  à  faire  à  Paris,  c'est 
d'(  lie  trop  calme.  J'ai  prolesté  le  premier  ,— et  je  m'en 
vante ,  —contre  la  résiirrei  tion  des  crieiiis  puljlics  ;  ils  m'a- 
pu.aienl  tellement  les  nerfs  cpie  je  me  sentais  parfois  tenté, 
pinir  les  forcer  a  se  taire,  de  h>  étrangler  de  mes  propres 
mains.  Ils  m'ont  fait  passer.— je  ne  l'ouiilie  point,— de  bien 
mauvais  (piarts  d'heure,  Kli  liien!  telle  est  l'inconséquence 
dele-prit  humain,  maintenant  qu'ils  sont  morts,  \ii  me 
surprends  a  les  rei^reller.  Franchement  ils  avaient  du  bon. 
L'n  peu  de  liriut  ilan>  une  ville  est  aussi  nécessaire  que 
licaiiriiiip  de  mouvement.  J'avais  lini  par  m'habituer,  sans 
m Cn  douter,  il  cet  abominable  concert,  .S  il  en  liait  Innps 
encore,  je  |irieraisM.  Ducouxde  ne  pas  remlir  i  l'Ilr  ludnji- 
naiiiiMpii  leur  a  imposé  silence,  et  que  ja\,iis  \,iineniejit 
ilriiiaiiilée  il  son  prédécesseur.  Je  suis  naturellement  bon  ; 
nim-M'iilemenl  je  |  ardonne  aisément  le  mal  qu'on  m'a  fait, 
111,11s  |e  n'aime  pas  a  voir  soull'rir  mon  semblable.  Cespau- 
\ie>L-riis,  hommes,  femmes  et  enfants,  ont  l'air  si  nial- 
liciiiTiix  de  ne  |  lus  pouvoir  crier;  ils  me  jettent,  quand  je 
p,is?.c  (levant  eux,  des  regards  si  tristes,  si  éloquents  en  me 
iiioulrant  il  ki  dérobée  le  bout  d'un  journal  sous  leur  habit, 
sous  leur  cliiilo  ou  dans  leur  panier,  que  je  n'ose  |  lus  les 
regarder.  La  vue  de  leur  bouche  niuelte  m'afflige  tout  au- 
tant que  celle  d'un  a'il  cre\é  on  d'un  mejnlire  coiipiv  É\i- 
(leimnent  leur  supplice  n'est  pas  propm  rniiiiic  .\  Ini:  luilc 
il  V  a  (le  rini(i>rice  a  les  |  river  de  l'usage  dr  l,i  ,  ,iinlr  |,,,ivr 
qiiils  l'aligiiaienl  un  peu  nos  iiiville^  Ini.i  drlic.ilcs. 


(pie   m 


l'i '■■-'■' 

.r  f.ichi 


de    \. 


,pcl,le-l. 


.~  j'ai  constaté 
lorité  qui  les 
i'ssa\("r  leurs 


.\ii>-i 

.IcMlcIll  .li'n/'llnr, 

ln>l>-.ci'l  du  >ilcn.c, 
\i\reet  de  jouir  de  l^'ii 
plus  de  bruit,  umi  i|iii 
d'autant  mieux  di~|iii-( 
pa>p!,„  l,,nl,p,  !,„.,-, 
"'■"i.|iui,.|,l  ;■„,,,, 

d';rjic.,l,l,>li ■.■Iil>, 

l.a  lldiirhv  (/'(«■(,/■ 
.Sniiliiree-tllaiiipirde 
ipies  ;  Fuis  ce  que  liais 
ixili.lineiiuel  (juesint  s, 
M  ,\lricil  de  l!,i-.~i-ii, 
simu-;  ,\llrcil  .Munlui, 
IdVl  l;i  lln,irhe,liin(r> 
rhedefe 


pour  exercer  leur  mémoire,  ils  récitent  tout  haut,  mais 
(l'une  voix  aimable,  douce,  caressante,  craintive,  les  titres 
(les  journaux  les  plus  nouveaux  ou  les  plus  recherchés  du 
piiliiic  .\ii>>i  ilr  iiisinonarrivée,leurph\Moii"iiiirM'stcon- 
sidriMlilciiiciii  ,11'nrlinree,  Co  ne  sont  plus  Ic^  -i,iiiic~  de  la 
(■  sont  des  êtres  aiiniH>,  liciiicux  de 
liiiis  sens.  Tant  qu  ils  ne  feront  pas 
lr>  il.iisl.iis,  je  les  adorerai.  Je  suis 
en  Inir  faveur  qu'ils  m'ont  révélé, 
1,1  ji,ii— ,1111  (■  (le  deux  journaux  qui 
■iHiii  ri  ilniii  l;i  Irci me  m'a  procuré 
I  /;.>.«7ic  diiner  ri  Ir  Peuple. 
inliliilr  :  lUfiniiliU'l  (lémitrratigue. 
csdruxrpi.::Mplir>p(.ucaiaclrrisli- 
iiûririiiieiiue  jMurra  .'  Haine  audes- 

«m,iv7/»,,'lla| 1  rrd.n.-leurenchef 

■  ^r-  il, us  priini|i,iii\  articles  sont 
diji.il  I  I  \i  iiMiid  Ciiiiiri  .Ir  soupçonnais 
/(■cdrliv  uiir  ,Mi>ui' c.nl, -llr  lie  celle  Bou- 
p.irdo  redacliiiisdel'rii  Ir  Liimpiiin,  que 
,M  Ir  lu.iciiii  ne  (Ir  la  11  piihliipie  a  eu  la  Inii.ihlr  pniilcnce 
d'eiiipriiicr  (le  ^'iiiiM'ir,  .Mais  ces  sniipi,'oiis  il.iiriit  injustes, 
si  je  dois  en  croire  .\1  Ariiiaiiil  C ri  l)a|.rrs  la  déclara- 
tion solennelle  dr  cri  rcru.iin  :  l.i  llnurlie  d  acier,  loin  de 
continuer  la  poliliipie  des  lédacleiiisde  la  llauche  de  fer,  la 
combattraitau  contraire.  11  parait  que  la  Houclte  d'acier  le^ 
gardait  un  passé  qui  n'est  plus,  tandis  que  la  Bouche  de 
/'craies  yeux  dans  l'avenir.  «Nous,  enfants  du  peuple,  s'é- 
crie M.  .Armand  Comet,  nous  n'éprouvons  pour  le  comte 
de  Chainbord,  principicule  do  l.ucques  et  autres  lieux, 
(pi'une  pilié  iirolonde,  et  nous  disons  :  Si  il  quelques  jours 
d'ici  Chambord  veut  être  roi,  nous  lui  présenterons  une 
epre,  iKui  par  la  poignée  et  agenouillés,  mais  bien  par  la 
poiiile  et  debout!  I  !  »  Ainsi  Voilii  Chambord  bien  averti. 
iM,  .\nnand  (2oniet  s'oppose  il  son  rrlum  m  l'ianrr.  ..  il 
moins  (pi'il  ne  veuille  être  lionimr  ri  l'r.nn  ,11  .,11  il.insce 
cas  .\l,  .Armand  ('.omet  et  ses  aiiii,^  s  riii|iii  ■-.ii.uriii  de  lui 
oiiNrir  leurs  ran.gs.  et  de  lui  tendre  une  main  iioinie  par  la 
poudre  el  durcie  par  le  travail.  Seulement  M.  Armand  Co- 
iiirl  a  oublié  de  nous  aiiprendre  avec  quelle  poudre  ij  s'était 
noirci  1rs  mains, 

l-ai  ll.iiranl  la  paliliquc  rétrospective  de  M.  Alfred  Mon- 
liruil,  il  m'a  .seiiililé  (pie  celte  poudre  sentait  diablement 
celle  de  la  republiipie  deinocraliqiie  el  sociale,  M.  Alfred 
M(uihrial.  diuit  la  tête  lourno  a  l,i  Mir  ilr- r\  rnements dou- 
loureux qui  se  succèdent  sans.Miiii  .  I  m  1  ,iis,.n,  demande 
il  M.M,  l.amartine,  Ledru-Kollin  cl  I  ,iiii~  Kl, un  uiis'est  prc- 
cipitcc  leur  façon  de  gouverner,  et  répondant  il  cette  ques- 
IJun  il  trouve  bien  triste  la  république  qu'ils  ont  faite.  Du 


reste,  il  est  plein  de  confiance  dans  l'avenir;  il  ne  doute  pas 
(|uc  rid(''e  sociale  n'avance,  l'idée  sociale  qui  .seule  peut 
?aii\rr  Ir  p,i\s,  etc.. 

.\l.ii~rii  lui  dr  socialisme,  d'erreurs  el  de  déclamations, 
.M  ,\llii'il  .Mmilirial  en  est  encore  à  l'A  B  C.  La  faible  es- 
ipii-M'  d'un  rlr\e  peut-ellc  s'étaler  aux  nigards  du  imlilic 
a  coté  (I  un  tableau  achevé  du  maître?  giiel  ^uccr,~  la  llim- 
che  dacier.  .MM,  C.omul  et  Monbrial  a\,iiriit-il.->  Ir  du, il 
d  espérer  le  jour  ou  paraîtrait  un  nouveau  cliel-du'u\re  du 
cito\eii  l'roiidlion,  le  Manifeste  du  peuple  dans  le  Peu/de  ! 

].(!  Peuple  journal,  n'exi~le  encore  (pi'a  l'état  de  pro- 
spectus-s|ieciinen  II  aura  pour  rédacteur  en  chefle  citoyen 
Proudlion  ;  iliislMLnr  Ihirlinir,— un  vrai  Duchène.  Il  olfre 
plusieurs  points  lU-  n  --imMuice  matérielle  avec  feu  le 
Représentant  du  Peuple,  lirmeusemeut  tué  par  l'état  de 
siège.  11  a  seulement  changé  d'imprimeur,  de  domicile  et 
de  prix,  et  il  ajoute  cinq  épigraphes  ii  son  ancien  titre. 
Comme  le  Représentant  du  Peuple,  le  Peuple  veut  ([ue  le 
pi  liiliictrur  qui  n'était  rien  soit  tout.  De  plus,  il  exige  que  le 
I  :i|iii.ilisle  qui  était  tout  ne  soit  rien.  Enfin  il  proclame  les 
jMiiiiipcs  suivants  :  division  des  fonctions,  indivisibilité  du 
pouvoir,  plus  d'impôts,  plus  d'usures.  |)lns  de  misère,  le 
travail  pour  tous,  la  famille  pour  tous,  la  propiirle  pour 
tous.  Le  prospeclus-specimrii  du  Peuple  a  été  lance,  coiiiuie 
on  dit,  dimanche  matin.  iM,  Proudlion  a  voulu  passer  >a  ii^- 
vue.  Tandis  que  70,000  soldats  de  toutes  armes  et  300,(100 
curieux  se  rendaient  de  tous  côtés  au  Champ-de-Mars,  des 
bandes  d'riiranls  les  escorlaient  en  criant,  malgré  les  or- 
(loiiii,iiiir>  ilii  pifici  ilr  piihrr  ;  Vollii  lo  premier  Cl  Ic  der- 
nier iiiiiiirin  (lu  iiMii  II, il  ilii  ciiuyen  Proudhon,  un  sou... 

.Ir  I  ,11  .h  hrir,  jr  I  :ii  In,  rr  journal,  et  je  Ic  déclare  :  si 
j'a\,Ms  la  ,-,ilisl.iil  inii  il  rirr  ch.irgé  de  le  juger,  cn  qualité 
lir~ilri.ii>  |i.i>  ,1  Ircoiiuamner,  quelle  que  dût  cire 
l'ri.iiilhon  II  1-1  p,is  seuleiiii-nt  le  plus  extra- 
lilll>  11,11, iiln\. il  ilr^irn\,.in-.,   >l  ni  rsl    ,ilissi  le 


la  pi 


lai 

discutée  en  ce  moment 
constitution  monarchiqii 
en  ces  mots  :  Refus  de  t 


q,irlcpr..|ii.'C^ld:l 


■  I  A- 

ilnlll    li.lllr 


llr.lripirl,, 
hlilrr  liiilio 


Il  il  r\cite- 
1  p.is  avoir 
tre  l'autre, 
n'a-t-il  pas 
(institution 


>l  une 


ail  a  ruucrier:  .Maisil  n'est 
lieiirriisrmrnl  pas  licMiin  de  signaler  a  la  justice  cet  odieux 
empiii-iiiiiirin  du  p;  iiple,  qui  n'a  pas  même  le  |ietit  mérite 
delir  1 1111.-.1  iriii  iriiM'iiient  passionné  ;  dédaignant  donc  le 
mauvais  citoyen,  je  ne  m'occuperai  un  moment  que  de  l'é- 
crivain ridicule. 

A  cet  égard,  l'auriez-vous  pu  croire!  le  citoyen  Prou- 
dlion >'ç>l  siiip,is,-é  Itien  déplus  drolatique  que  son  mani- 
lr,-.ir  r\:iiiiinr  -nii~  i  r  point  de  vuc.  Je  uc  parlerai  pas  du 
^,llll.■  ili>  |.rn  ~  ,  ili>  1, unies  des  mères,  des  cris  des  or- 
plirliii>  ilniii  il  r~i  .iiTosi',  Saupoudré,  entrelardé;  vous 
coiiii.ii-M/,  -iil':,-,iiiiiiniil  I  r  -l\  Ir,  |irii  \,ir]r  li'adleurs,  que 
VAlelier  :i  un  Jour  cniiqiir  ,i\ri  Liiil  l^r^|.|ll  ru  mettant  en 
rrij.ir.i  il  iiiir  liiMilr  ou  loiilr,~lrs  abominations  de  la  déso- 

l.ilioii  ,-,■  iioii\,iiriii  arri Irrs  couiiiie  a  plaiâir,  cette  fa- 

iiirii-,1' scriir  du  Miiliule  iiiiiii/inaire  dans  laiiuelle  Purgon 
iiiriiace  le  lioiili ■  \r^,iii  ilr  toutes  les  maladies,  poul'  le 


punir  d'avoir  reliiM'  Ir- 
bon  vous  dire  aiis>i  qm 
patience  en  exciimi  le 
vous  citer  quelqur^  iinr 
qu'il  a  seul  le  talnti  ili 
rien  de  bien  nouxcm  ( 


A  quoi 

M      l'rollin pirrlir   ,,li   prllple  la 

|ilii-  |.os-ilile  MMi  mip.iliriice,  et 
ili>  |iai(iles  de  paix  et  de  sacrifice 
lilniquer!  je  ne  vous  apprendrais 
lUs  ne  connaissez  peut-être 


pas  encore,  c'est  la  théorie  du  mariage  que  la  république 
démocratique  et  sociale  se  propose  de  mettre  en  prati(iue 
"  Nous  Nouions  la  famille,  s'écrie  le  citoyen  Proudhon,  et 
nous  l:i  \oiiloiis/)ii«r/(i«(/(;  mutide  ..  Nos  wiixont  cherché 
le--  riiiiciiii~  dr  1,1  la  mi  Ile  et  nous  ,i\oii-  linii\e  que  ces  en- 
iiriiii~ilr  1,1  l.iiiiillrelairul  | 
(loin  I  aiiil.llioli  r>l  lie  -;rjiH 


A'ous, 

feiimie  et 
Il   Ir-rll- 


le   gros 


11  la  ne, 


joisme 

iv.u'o,  par  ses 

irili>  |,l 

lilh|llr-el  dis- 

'    |i,l  — ri 

driis  |i|iiases 

~Irlr,  1 

|.nTi\o  a   la 

r    -,ili^ 

lommeutaue. 

Hir    illi 

niable  et  sans 

uur,  (le.. 

âge  de  motifs 

iieiiiiMlela  faiiullr  ■  l'oi|:v  Ir  lliiiilir.iii  1 

capitaliste,  le  rentier,  I  liouime  de  ifour 

le  parasite,  l'intrigant,  l'oisif,  pénétrez  dans  sa  vie  intime; 

interrogez  sa  femme,  sa  bonne,  son  petit  garçon,  et  vous 

saurez  quel  est  celui  qui,  par  son 

amoursdésordonnées,  corrompt  |r^ 

sont  la  famille...  »  Ici  je  suis  forer 

de  paix  qui  manquent  un  peu  dr  r 

conclusion  que  je    vous  m diinni 

>■  Nous  voulons  le  mari. 1^1  mn/o 
(ac/ie,  contracté  en  toute  Illicite  (1 ,1 

sordides,  résoluble  seulement  par  la  mort  ou  la  ibaiiisos 

Où  donc  trouvorez-vous  cet  idéal  du  mariage,  si  ce  n'est 
parmi  vous,  ouvriers  et  ouvrières? —  Et  coiiime  cette  ob- 
servation termine  bien  une  pareille  tirade.  — /es  riches,  non 
plus  que  les  rois,  ne  connaissent  pas  iinnour  en  mariage  » 

Le  citoyen  Proudlion  vent  la  propriété  coiuine  la  ranulle.,. 
pour  tout  le  monde.  On  a  dit,  avoue  t-il.  ipie  la  propriété 
ainsi  entendue,  ainsi  dépouillée  de  ce  qui  en  lait  le  pri- 
vili'ge  et  l'abus,  n  élait  plus  la  propriété.  Ne  croyez  pas 
(pi  il  réponde  il  celle  olijection.  Homme  de  pratique  encore 
plus  (lue  de  théorie  —  c'e.-t  lui  ipii  s'adresse  cet  étrange 
couipliment  —  il  laisse  cette  discussion  aux  savants.  En- 
lin,  monsieur,  ii  partir  du  1"  septembre  KSIS,  le  citoyen 
Proudlion  nous  promet  la  jouissance  d'un  Dieu.  (Juiind 
son  système  sera  appliipié.  la  religion  sera  expliipiée,  la 
vraie  religion.  Mais  pour  la  dèconxrir  il  nous  deniando 
encore  un  peu  —  moi.  je  dis  beaucoup  — de  patience;  car 
il  lui  faut  1.  recommencer  notre  exegcse.  montrer  philoso- 
pliiipienienl,  il  l'aide  des  nouvelles  données  sociales,  le  snr- 
iiaturalisme  dans  la  nature,  le  ciel  dans  la  société.  Dieu 
dans  Ihonime,  »  Les  calouiniatenrs  du  citoyen  Proudlion. 
attachés  ii  leurs  mythes,  ne  sauront  quel  est  sou  Dieu, 
quelle  est  .sa  fui,  que.  «  lorsque  la  civilisulion  lui  apparaî- 
tra connue  une  perpétuelle  Aporulypsa  cl  l'histoire  coinnio 


un  miracle  sans  fin,  el  lorsque,  par  la  réforme  de  la  société, 
le  christianisme  aura  été  élevé  ii  sa  deuxième  puissance.  • 
Patience  encore  une  fois;  patience,  répétons-nous  avec  le 
citoyen  Proudhon. 

Le  citoyen  .4niédéeLangIols,  auteur  d'un  article  inlilulé: 
De  ta  flratuité du  crédit,  el  qui  suit  immédialemenl  le  ma- 
iidr-teaii  peuple,  uiérile  aussi  une  mention.  Lisez-Icsi  vous 
ilr-iic/- ^a\oii  tout  ce  (|ui  arrivera  en  France  et  en  Euro[)0 
liir-M|iielrr(i-ilit  -era  L'raljiit.  Comparé- il  re  rêve  sinpide.  l'A- 
poialxp.M'rl  II -Coiiir- r,iiita.,ii,|i,r-  .IHoHm.iiin  m.in(|uenl 
coiiipl'clriuriil  il  iiiMjimitiou  M.ii>  a  propos  de  divagations 
extraonliii.iiir-i  .iiiiir  mieux  vous  parler  du  dernier  feuillo- 
ton  de  madame  Emile  de  fiirardin  le  vicomte  (jharles  de 
Launay  )  ,  car  j'ai  eu  tort,  je  le  reconnais  mainlenanl,  de 
déclarer  plus  haut  que  l'état  de  siège  n'olTrail  aucun  incon- 
vénient 11  en  a  de  fort  sérieux.  Je  demande  qu'il  soit  levé 
puisqu'il  nepermel  plus  à  madame  Emile  de  Girardin  •  d'es- 
sayer d'avoir  de  l'esprit  el  du  coura.ge.  -  Le  dimanche  3 
.se|ilenibre,  la  Presse  a  publié  un  courrier  de  Paris  délai  de 
siège,  selon  l'expression  de  son  auteur,  un  courrier  vieilli, 
mutilé,  n'ayant  plusnisens  ni  à-propns  Y.n  lelisanljeme 
demandais  avec  anxiété  s'il  était  po-sible  (pie  le  vicomte 
Charles  de  Launay  eiil  écrit  de  pareilles  phrases.  Je  n'eus 
le  mot  de  lenigme  qu'il  la  (In  du  dernier  paragraphe  Ar- 
rixé  la,  lion  sans  peine,  j'appris  qu  on  en  :i\ail  elfacé  tous 
les  traits  un  peu  piquants,  supprimé  toutes  les  idées  géné- 
reuses. Cet  os,  je  ne  le  connais  pas  :  mais  c'est  à  coup  sûr 
un  homme  de  goiît,  car  il  a  bien  rempli  sa  Iftehe  ;  il  n'a  rien 
laissé  de  piquant  ni  de  généreux...  Quelques  citations  vont 
vous  le  prouver. 

0  Dts  qu*on  est  (piaire  personnes  daiiâ  un  salon,  on  est  plein 
ires|iiil  (C'est  un  aiilre  on  ) ,  elc,  ilc.  — Tout  le  monde  est 
(Ui  même  avis,  loiit  le  momie  ciiliipip,  blâme,  injurie,  maudit 
i'eial  (ie  choses  ù  Punaniniilé  el  îi  l'envi,  aver  un  en^eiiible  el  un 
entrain  qui  font  plaisir,  etc.  C'est  lii  de  b  rraleniilê  dans  la  mé- 
disance. Seuleiiient,  pour  causer  diplomatie,  on  attend  que  les 
jeunes  persoimes  soient  allées  >e  coucher .  i7  n'y  a  pnx  moyen  de 
raconter  devant  elles  les  aiilècédenis 

»   La  mode  en  politique  c'est 

j)  A  pro|)os,  on  nous  assure  que  M 

Etall-ce  inconséquence,  était-ce  ironie,  nul  n'a  pu  pénétrer  ce 
llljslérp. 

•  Autre  anomalie.  Le  jour  delà  fêle  de  la  présidence,  madame 
Marrasl,  femme  du  président  de  l'Asseinhléc  républicaine,  avait 

les  cheveux  poudrés  comme 

On  raconte  même  que 

Que  de  Irails  piquants  cet  on  a  efl'accs  1  que  d  idées  gé- 
néreuses il  a  supprimées  !  Ne  les  devinez-vous  ;  as!  El  pour- 
tant telle  est  la  grandeur  d'âme  du  vicomte  Charles  de 
l.aiinav,  qu'il  a  la  modestie,- peut-être  la  mêchancelé — de 

lllihrr   Ce  rrllillrlon  \iriill,    inillilr    -;ili^  -rlis  ni  il-propOS. 

Apir>  loin  ,  ri'  i|iii  I  ,illliL'"  Ir  |ilii--  cv  11  r-i  |i,i-  de  ne  pouvoir 
pliiscs>n\rr  (l.noirdr  IC-pril  cl  du  coiir.ige,  c'est  d'être 
seul  ,  toujours  seul ,  de  ne  pouvoir  être  d  aucun  parti:  car, 
dil-il  : 

«  Il  y  a  deux  partis  qui  se  disputent  la  France  en  ce  moment 
et  aucun  des  deux  ne  nous  attire.  Il  y  a  : 

n   Le  parti  de  ceux  qui  veulent  tout  garder: 

D  Le  parti  de  ceux  ([ui  \eulent  tout  prendre; 

D  Le  parti  des  égoïstes: 

n   Le  parti  deseuvieux. 

»  Les  uns  ont  un  mol  charmant  qu'ils  .nlTectionncnl,  qui  ré- 
sume toute  leur  pensée  ; 

>   Fusiller I  fusiller! 

a  Les  autres  oui  aussi  leur  mot  f.ivori,  également  aa'(.'clueui, 
qui  dévoile  loul  leur  sysU"  nie  ; 

D  Guillotiner!   guillotiiierl 

!»  Et  l'on  veul,  s'écrie  L-  vicomte  Charles  de  Launay,  que  nous^ 
autres,  nous  les  poêles,  nous  rêveurs  d'héroïsme,  professeurs  de 
niagnaiiiniilé,  nous  prenions  fait  et  cause  pour  celle  politique  de 
li;i|)|ie  chair!...  Que  nous  tendions  notre  niaiii  généreuse  à  cfs 
iiiiiiiis  a\i(les  et  crochues!..  Que  nous  saisissions  la  lyre  d'or 
pnur  répéter  à  l'univers  l'un  de  ces  beaux  refrains,  que  nous 
choisissions  entre  ces  deux  paroles  d'amour  : 

a   Fusiller!  fusiller! 

a  Guillotiner!  guillotiner! 

a  Jamais.  > 

Pour  se  consoler  de  toutes  ses  infortunes,  madame  de 
Girardin  donne,  elleaussi,  desconseilsau  peuple;  elles'ef- 
force  de  le  convaincre,  dans  son  intértH.  qu'il  a  le  plus  grand 
tort  d'eux  ier  le  mobili(>rdu  bour.L'eois,  Elle  lui  en  fait  une 
descriplion  détaillé  qu'on  a  respectée.  .\  l'en  croire,  c'est 
pour  défendre  son  mobilier  que  le  Ixnirgeois  de  Paris  se  fail 
tuer  si  bravement.  On  peut  lui  demander  sa  \  ie,  dil-il,  mais 
il  ne  faut  pas  lui  demander  »  son  alfreiise  pendule  d'albâtre. 
Ilanquee  de  deux  affreux  vases  d  alliàtre.  ornc^de  fleurs  en 
papier  et  de  deux  affreux  flambeaux  en  albàlre  ornés  de 
bobèches  en  papier,  qu'il  appelle  sa  garn.lure  de  iliemi- 
n  e..,  •  Enlin  l'orateur  s'écrie  : 

Peuple,  si  tu  savais  combien  c'est  laid  rc  que  lu  cniîes,  tu 
pardonnerais  au  bourgeois  son  bonheur...  Veu\-lu  donc  le  liier 
pour  avoir  sou  nlTreuso  coiumndeeii  acajou  si  incommodtsdoiil  te 
liroir  rebelle  el  faiinsque  ne  cède  jamais  que  pour  vous  tomber  sur 
les  pieds:  veux-ln  donc  le  tuer  pour  sou  alTivu^e  armoire  d  glace 
dilTorme,  pour  son  aiïreux  ciel  de  lit  en  acajou,  rocher  de  Si- 
sxplie  qui  iiirnace  toujours  son  sommeil:  pour  son  alTreux  6011- 
fîeur-du'jour,  eu  ac.ijnii,  toujours  boiteux  :  |K>ur  sa  rave  ù  li- 
queurs eu  acajou,  i>o«r  ses  nlTreuses  porci-laine^  aux  couleurs 
bosiilesqui  vous  fout  jriiicrr  les  yeux  :  pour  ses  affreuses  lilho- 
gi;iphies  de  pacotille,  pour  loiilcs  ces  clio<.es  si  communes  si 
iiml  choisies,  si  laides,  vcux-lu  doue  le  tuer?  • 

Si  le  iieuple  est  cap;ible  de  n-sisler  ;i  de  p.ireils  arpu- 
ments.  ce  dont  je  doute  fort,  je  suis  pei-suadé  que  col  autre 
paragraphe  aura  pour  résultat  de  (iél mire  tout  l'elTel  du 
iiKiuileste  publié  le  même  jour  par  le  citoyen  Pnnidlion. 

•  Quand  un  a  été  milHonuaire,  quand  on  a  ébloui  Parlj  de 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


31 


son  luxe  ,  qu'on  a  eu  les  plus  beaux  chevaux  ,  les  plus  beaux  hô- 
tels du  monde  éléj^ant  ,  quand  on  a  séduit  dix  duchesses  ,  une 
douzaine  de  mtii-q"ises  et  même  quelques  fièrcs  ladien  ,  veux- 
tu  savoir,  peuple  ,  ce  qui  plait ,  ce  qui  amuse  ?,,..  C'est  de  sortir 
il  pied  ,  un  parapluie  sous  le  bras ,  et  de  s'en  aller  voir  à  un  citi- 
quième  élage  une  griselle  bien  rieuse  qui  se  moque  de  vous  gen- 
timent, n 

11  faudra  que  l'étal  de  siège  et  le  général  Cavaignac  ren- 
dent de  bien  grands  services  à  la  France  pour  que  je  me  dé- 
cide à  leur  pardonner  la  littérature  qu'ils  nous  ont  faite.  .. 
Réduire  un  poëte  à  cette  prose  ,  une  femme  d'esprit  à  ces 
épigrammes  ,  un  rêveur  d'héroïsme ,  un  professeur  de  ma- 
gnanimité à  ces  legons...  J'en  suis  tellement  indigné  pour 
ma  part  que,  dans  la  crainte  de  ne  pas  pouvoir  me  conte 
nir,  je  me  bornerai  à  emprunter  une  dernière  phrase  à  ma- 
dame de  Girardin. 

0  Vrai ,  le  général  Cavaignac  est  bien  généreux  de  ne  pas  nous 
faire  adorer  son  képi  ou  son  caftan  au  bout  d'une  perche,  comnu 
le  farouche  Gessler  lit  Bftorer  son  chapeau  ;  il  ne  se  trouverait  pas 
un  Guillaume  Tell  fi'unçais  pour  le  jeter  par  terre.  » 

Madame  de  Girardin  trouve  que  c'est  un  singulier  pays 
que  le  nôtre  ,  où  l'on  est  à  la  fois ,  dit-elle  ,  si  spirituel  et  si 
bête  ,  si  brave  et  si  lâche,  où  tout  le  monde  a  le  courago 
de  se  faire  casser  la  tèle  et  où  personne  n'a  le  courage  de  la 
porter  haut.  Cela  peut  être  vrai  pour  certaines  gens ,  mais 
il  y  a  certainement  en  France  un  grand  nombre  d'hommes 
ou  de  femmes  d'esprit  et  de  cœur  cjui  ne  sont  en  même 
temps  ni  bètes  ni  lâches.  Je  ne  crois  pas  non  plus  que  tout 
le  monde  ait  le  courage  de  se  faire  casser  la  tête  et  que 
personne  n'ait  le  courage  de  la  porter  haut.  Même  dans  la 
littérature  de  l'état  de  siège  ,  il  ne  devrait  pas  être  permis 
d'abuser  ainsi  du  paradoxe ,  et  on  aurait  bien  du  supprimer 
avec  les  mots  piquants  et  les  idées  généreuses  de  ce  cour- 
rier vieilli ,  mutilé  ,  n'ayant  plus  ni  sens  ni  à-propos  ,  ces 
antithèses  qui  ne  signilient  absolument  rien.  S'il  était  be- 
soin de  les  réfuter,  nous  rappellerions  à  madame  de  Girar- 
din le  double  et  éclatant  exemple  que  vient  de  donner 
M.  de  Lamartine.  Il  avait  eu  le  courage  d'exposer  sa  vie 
pour  fonder  et  défendre  la  République  ,  et  sa  Lettre  aux 
dix  départements  {\)  prouvera  à  ses  calomniateurs  et  à 
ses  ennemis  qu'il  a  toujours  le  courage  et  le  droit  de  por- 
ter sa  tête  haut.  Je  ne  ferai  pas  il  M.  de  Lamartine  l'injure 
de  dire  qu'il  s'est  justilié  ,  car  je  ne  lui  ai  jamais  fait  l'in- 
jure de  croire  qu'il  pouvait  être  soupçonne;  mais  je  le  fé- 
liciterai d'avoir  rompu  si  hautement ,  si  complètement ,  si 
éloquemment  avec  la  république  rouge.  Il  s'était  tu  peut- 
être  trop  longtemps.  La  France  ,  qui  l'aime  et  qui  l'honore 
coiume  un  de  ses  plus  grands  génies  et  de  ses  meilleurs  ci- 
toyens ,  éprouvait  le  besoin  d'entendre  sa  voix.  Il  a  enfin 
parlé  !  et  son  discours  restera  comme  une  des  pages  les  plus 
intéressantes,  les  plus  instructives  et  les  mieux  écrites  de 
l'histoire  des  trois  premiers  mois  de  la  Hépiihlii|ne  de  18iS. 
Ce  n'est  pas  là  de  la  lilleralure  il  rtal  de  siège,  Dieu  soit 
loué  et  béni  !  M.  de  l.jmarluic  avait  le  premier  engagé  la 
lutte  contre  la  ie|inliliqiic\  mlente,  épuratoire ,  dictatoriale, 
terroriste,  de  p^m^i  •,  ilr  i^cste,  de  couleur,  en  faveur  de 
la  République moilnrr  .pacilique,  légale  ,  unanime,  consti- 
tutionnelle. Cette  lutte  ,  il  l'a  soutenue  pendant  trois  mois 
avec  une  intrépidité  et  une  persistance  que  nul  danger  n'a 
pu  effrayer,  nul  obstacle  fatiguer,  et  pour  aider  Washing- 
ton à  triompher  deBabœuf,  de  Robespierre  et  de  Canton, 
il  est  encore  tout  prêt  à  offrir  sa  vie.  Tout  ce  qu'il  de- 
mande en  récompense  de  pareils  sacrifices ,  c'est  de  ne  pas 
être  méconnu.  «  Les  plus  grands  phénomènes  des  révolu- 
tions,  sécrie-t-il  en  terminant,  ne  sont  pas  leurs  crimes, 
ce  sont  leurs  erreurs.  Citoyens,  voici  la  lumière  ,  reconnais- 
sez vos  amis.  Nommé  dix  fois  par  vous  comme  signification 
et  non  comme  homme,  confondu  désormais  dans  les  rangs 
des  simples  représentants,  de.-cendu  d'un  pouvoir  trop  haut 
pour  mon  ambition  ,  et  ne  désirant  point  y  remonter;  ou- 
bliez-moi,  nem'accu,-ez  pas  !....  Peut-être  ai-je  mérité  un 
seul  jour  vos  suffrages  ,  c'est  le  jour  où  je  les  ai  sacrifiés  à 
la  concorde.  Quant  a  moi ,  je  me  souviendrai  de  vous  tous 
les  jours  de  ma  vie  piibliiiui-.  ('.Iia(|iie  fois  que  je  jetterai 
dans  l'urne  un  vnle  de  lionne  intenlion  pour  le  peuple  ,  de 
fermeté  contre  les  factions  ,  de  salut  pour  la  patrie ,  pour  la 
famille  ,  pour  la  projiriètè  .  |)Our  la  conscience  ,  pour  la  so- 
ciété ,  je  me  dirai  que  j'y  jette  avec  ma  pensée  votre  propre 
pensée  à  tous.  Je  médirai  que  deux  millions  de  citoyens  vo- 
tent avec  moi  pour  cette  Republique  unanime  qui  n'esta  vos 
yeux  comme  aux  miens  que  l'intérêt  de  tous,  légitimé  par 
le  droit  de  tous  ,  et  dèfrridu  par  la  main  de  tous,  dans  le 
plus  libre  et  le  plus  foil  ilc~  um  reniements.  » 

Remerciez  avec  moi  l;i  l'inMilnicr,  monsieur  le  directeur, 
d'avoir  fait  les  bons  citii\riis-i  >u|iriieursen  tout  aux  mau- 
vais, et  recevez  l'assurance  de  la  con^dèration 

DU  VlF.LX  Fl.4m;ie. 


Bulletin   Bibliograiiliiqiie. 

Organisation  du  Iraïuiil.  —  Ile  l'i  dcmocrniie  industrielle ,  par 
Chaules  Laudil.vte  ,  ancien  élève  de  l'École  polytechnique  , 
1  vol.  iii-18.  Paris  ,  laid.  —  Mathias ,  3  fr. 

M.  Ch.  Laboulnye  est  l'auteur  d'un  tfict'Onnaire  des  arts  et 
maiiu/'Mf(uie,ï  qu'il  paru  il  y  a  quelques  aimées.  Le  nouvel  ou- 
iragequ'il  vient  de  publier  était  commenié  depuis  longtemps  lors- 
que la  révolulion  de  février  a  éclaté.  Ill'a  continué  sans  l'achever 
cependant,  car  ce  n'esl ,  comme  il  le  reconnaît  lui-mènie  ,  qu'une 
ïéunion  de  noies  dont  il  complaît  faire  un  Iraiail  plus  élendu. 
11   n'eut  jamais  songé  à  le  publier  tel  qu'il  est,  si  la  question 

(]]  Publiée  'tons  Trots  mois  au  pouvoir,  volume  inlS  qui  ronlieiil  en  outre  son 
ulloiulioilsqu'il  a   proiioiicéa  ile]iiiiâ  le  2*   février  à  la  cliaiubie  el  k  lllùlei-dc- 


n'avait  une  telle  gravité  ,  une  telle  urgence  qu'il  y  a  presque  tra- 
hison ,  dit-il  ,  à  garder  par  devers  soi  ce  qu'on  croit  être  la  vérité. 
Aussi  espére-t-il  que  son  essai  fournira  quelques  maléiiaux  utiles 
aux  architectes  chargés  de  construire  l'édifice  de  l'avenir.  Celte  es- 
péiance  ,  nous  la  partageons.  II  y  a  sans  doute  dans  lu  Démocru- 
iie  industrielle  un  bon  nombre  d'idées  déjà  connues  et  jugées. 
Mais  la  base  fondamentale  est  un  système  qui  offre  dans  de  cer- 
taines mesures  l'intérêt  et  le  mérite  de  la  nouveauté. 

En  elTet  M.  Ch.  Laboulaye,  après  avoir  constaté  qu'il  existe 
des  relations  intimes  entre  la  constitution  écononiiiine  d'un  pays 
el  sa  constilution  politique,  arrive  à  celte  conclusion  en  ce  qui 
concrme l'organisation  industrielle  delà  France,  c'est  que  pour 
être  en  rapport  avec  sa  constitution  politique,  elle  doit  être  dé- 
mocratique, a  La  division  du  sol ,  dit-il ,  a  réellement  i-ésolu 
pour  la  classe  agricole  le  problème  de  l'organisation  du  travail  : 
production  considérable ,  répartition  équitable.  Aussi  voyez  le 
pays, tu  ;  désire-t-il  une  révolution  quelconque.^  Il  la  ledoute  fort, 
au  contraire  ,  parce  (lu'il  craint  qu'elle  ne  lui  envoie  trop  sou- 
vent le  percepteur.  Il  ne  désire  que  la  terre  dont  il  espère  bientôt 
pouvoir  acheter  nu  morceau  ,  le  plus  souvent  pour  arrondir  celui 
qu'il  possède  déjà  ,  el  l'on  peut  se  fier  ù  lui  du  soin  de  lui  faire 
produire  tout  ce  qu'il  peut  rapporter.  II  n'y  épargnera  ni  peines, 
ni  soins.  Or  pourquoi,  tandis  que  la  plus  grande  partie  de  la  na- 
tion s'avance  dans  les  voies  que  nous  venons  d'iinliquer,  quand 
le  but  à  atteindre  est  le  même  pour  tous ,  pourquoi  le  champ  de 
I  industrie  tend-il  à  être  exploité  eu  grande  propriété?...  De 
même  que  l'exploitation  des  furets  et  des  pâturages  se  prête  mal 
à  l'exploitation  morcelée,  il  peut,  il  est  vrai  ,  exister  certaines 
industries  qui  ne  peuvent  être  exploitées  que  dans  un  grand  éta- 
blissement: mais  n'est-il  pas  certain  qu'avec  les  idées  qui  font 
la  nation  française  d'aujourd'hui  ,  qui  seules  peuvent  faire  sa 
force  et  sa  grandeur,  le  but  de  lontes  les  institutions  doit  être 
bien  plus  de  favoriser  la  division  de  la  propriété  industrielle 
que  sa  concentration  ;  que,  par  exenqtle ,  de  deu\  industries  qui , 
toutes  choses  égales  d'ailleurs,  réclameront  du  pays  les  sacri- 
ficei  qu'enlraine  la  protection  des  douanes  pour  être  importées 
en  France  ,  on  devra  préférer  celle  qui  assurera  l'aisance  de 
cent  petits  établissements  à  celle  qui  fera  nuitie  dix  grandes  fa- 
briques ? 

Cette  idée  ,  qu'il  croit  juste,  M.  Laboulaye  essaie  de  la  dé- 
montrer par  des  faits.  Jetant  un  coup  d'œil  rapide  sur  la  consti- 
tution économique  des  diverses  branches  de  l'initustrie  ,  il  prou- 
ve :  4"  que  les  fabrications  qui  font  la  gloire  de  l'industrie  fran- 
çaise ,  qui  luttent  avec  avantage  coidre  celles  de  l'étiangcr  et 
donnent  lieu  ii  un  commerce  d'importation  important ,  s'exploi- 
tent sous  forme  démocratique,  c'est-ù  dire  que  la  propriété  in- 
dustrielle y  est  divisée  en  un  nombre  très  grand  des  possesseui-s 
des  instruments  de  travail,  que  l'exploitation  s'y  lait  en  peiits 
ateliers:  2"  que  celles  ,  au  contraire,  qui  s'exploitent  en  grandes 
mamifaclures  ,  sous  une  forme  évidemment  eiiipi  mitée  ii  l'An- 
gleterre, s'accliinalenl  dillicilement  en  l'rance  ,  et  que  ce  n'est 
qu'il  l'aide  delà  prolectiou  des  douanes  qu'on  est  par\enu  ,  grâce 
aussi  aux  elforts  d'habiles  ingénieurs,  de  conr.igeux  f.ibiicanls, 
à  donner  quelque  prospérité  ù  ces  graniles  factoreries  ,  pros- 
périiê  qui  n'a  pu  ce|iciidant,  dans  le  plus  grand  nombre  des 
cas ,  permettre  il  leurs  produits  de  dépasser  les  frontières  de  la 
France ,  dont  le  mar.hé  leur  était  réservé  par  la  protection  doua- 
nière ,  el  d'aller  lutter  avec  l'industrie  anglase  sur  les  marchés 
élrangers.  11  eu  conclut  nalurellcment  que  celte  seconde  forme 
d'oiganis.ition  industrielle  n'est  pas  celle  qui  convient  aux  mœurs, 
au  caraclùre  de  notre  nation  ,  el  que  les  encouragemenjs  de  l'É- 
tal ne  doivent  pas  être  exclusivement  réservés,  comme  ils  l'ont 
été  jusqu'ici  ,  à  la  coustilnlion  de  ces  grandes  propriétés  indus- 
trielles, de  ces  grands  monopoles  inabordables  pour  la  presque 
tolalité  de  la  nation  el  dont  les  pro„'rès  sont  ratalenient  accom- 
pagnés de  ceux  de  la  misère  des  agglomérations  nombreuses 
d'ouvriers  auxquels  l'abord  de  la  propriété  est  interdit,  comme  le 
prouve  l'expérience  ù  Reims,  à  Mulhouse,  à  Saint-Quentin  ,  à 
Lecds  et  à  Manchester. 

Amené  ainsi  il  étudier  ces  monopoles  dont  la  concentration  , 
avant  la  révolution  de  février,  tendait  ù  grandir  et  ii  constituer  au 
profit  d'un  petit  nombre  ce  qu'on  appelait  la  féodalité  financière  , 
M.  Laboulaye  établit  : 

Que  le  monopole  illimité,  c'e-t  pour  la  classe  déshéritée  le  ser- 
vage et  la  misère. 

Que  la  concurrence  illimitée  est  souvent  une  cause  de  misère  , 
en  permettant  ,  par  la  lutte  de  tous  ,  le  monopole  réel  du  plus 
fort ,  du  plus  riche  ;  guerre  où  celui  qui  a  le  plus  d'écus  ,  détruit 
celui  qui  en  a  le  moins ,  où  la  victoire  est  encore  du  côlé  des  gros 
baladions. 

Que  de  même  que  les  progrès  delà  centralisation,  en  créant  les 
armées  modernes,  ont  produit  une  force  infiniment  supérieure  à 
celle  des  troupes  des  seigneurs  féodaux  ,  de  même  l'iiitervenlion 
de  l'Étal ,  de  l'association  de  Ions  dans  la  production  industrielle, 
pour  concenlrer  les  elVorls  communs  au  profit  de  tons,  peut  pro- 
duire des  résultats  infiniment  supérieurs  il  ceux  de  l'iiidusirieféo- 
dale,  et  que  l'apanage  de  tous  ne  peut  être  abandonné  ii  quel- 
ques.uns  sans  un  droit  personnel  de  ceux-ci. 

Qu'enfin  la  liberté  de  chacun  élaiit  un  droit  que  la  société  ne 
peut  confisquer,  le  proJuit  de  cette  liberté  est  une  propriété  ,  un 
juste  monopole  inconlcslable;  qu'une  sociéiéist  d'auiani  plii^  p.n- 
faile  que  l'on  y  respecte  mieux  l'axiome  Cliacvn  y  est  proprié- 
taire rt responsable  de  ses  ceuia'es,  que  le  citoyen  trouve  p'iis  de 
liicilitès  pour  pouvoir  développii  son  êlrc  el  créer  des  richesses 
qui  proiluiscnl  le  bien  être  et  l'indépendance  d'une  famille  en  ac- 
croissant les  richesses  sociales. 

Ces  principes  posés,  M.  Ch.  Laboulaye reclierche  les  moyens 
les  plus  propres  ù  les  meltre  en  pratique.  La  plupart  étaient  déjii 
connus,  d'autres  ne  nous  semblenl  pas  acceptab.'es.  (les  moyens 
sont  d'ailleurs  tilloaient  noinureux  ,  que  leur  simple  eiiunie- 
ralion  leiiiplii.iii  plus  d'une  colonne  de  ce  journal  ,  nous  ren- 
virroMS  donc  aux  cli.ipilres  5,  13,  7,  8,  9,  10  et  H  de  la  IJrmo- 
cratie  industrielle  ,  ceux  de  nos  U-cteurs  qui  désireraient  savoir_ 
rommeiit  .M.  Ch  Laboulaye  espère  pouvoir  atliindn-  le  but  qu'il 
s'est  proposé,  c'e.st-ii-diie  démocraliser  l'iniliislrie.  II  nous  suf- 
fira de  conslaler  que,  dans  son  opinion  ,  la  ilesiriiction  ne  la  mi- 
sère ,  la  ililTii^ion  de  liiisiince  et  de  la  noble  iiidé|iiiid.iiiie  qui  en 
résulte  doiieiit  s'ulileiiir  par  l'éiieigie  du  lr,n.iillei.r  (  sans  le 
serours  d'une  piiiiacie  universelle,  d'une  fiiriiiiie  lriiinpeu?e  et 
subversive  de  lout  re  (|ui  existe)  ,  en  seionihiiil  l.i  divisimi,  la 
léparlition  entre  les  travailleurs  illdu^lriels  des  moyens  d"  pro- 
duction ,  en  léalisani  ponr  ceux-ci  tout  ce  i|n'a  produit  depuis 
la  révolulion  de  1789  la  division  du  sol  ponr  les  pojocleiirs  de 
i'agricuttnie. 

La  questinn  ,  dit  M.  Ch.  Laboulaye  dans  son  second  chapitre, 
nous  parait  se  poser  plus  neltemeiit  thatpie  jour  :  «  ou  bien  le 
désir  iiiiiitelHgeiit  du  mieux ,  nous  pou-.ïera  vers  le  cotnmuuisnie. 


la  négation  de  toute  propriété,  de  toute  supériorité  ,  de  l'iudé- 
pindanccet  de  la  libellé  de  l'homme  devenu  un  rouage  inintel- 
ligent de  la  machine  sociale  ,  et  nous  conduira  sûrement  à  une 
alTreuse  égalité  dans  la  misère  par  l'avilissement  de  tout  el  du 
tous ,  ou  nous  verrons  une  puissante  démocratie  industrielle  il 
large  base,  douée  d'une  ardeur  immense  pour  le  travail  de  la  pro- 
duction ;  et  l'aisance  devenant  la  récompense  assurée  du  talent 
et  du  travail  fera  croître  dans  des  proportions  inconnues  jusqu'il 
ce  jour  la  richesse  de  la  nation.  »  Quant  i>  nous,  nous  espérons, 
avec  M.  Cli.  Laboulaye  ,  que  la  question  sera  résolue  selon  nos 
désirs  et  les  siens;  que  les  dépositaires  du  pouvoir,  suivant  ses 
sages  conseils,  rassureront  la  propriété  par  leur  énergie,  leur 
sagesse  ,  leur  dévouement,  leur  franche  opposition  à  de  fuiiesles 
doctrines ,  el  que  son  livre  contribuera  pour  une  certaine  part  à 
cel  heureux  résultat. 

L'appendice  qui  termine  la  Dcmocralie  industrielle  rewkrme  un 
arlicle  sur  l'administration,  un  projet  de  loi  sur  les  brevets  d'in- 
vention rédigé  par  M.  Jobard  ,  les  statuts  des  comptoirs  el  sous- 
comptoirs  fondés  à  Paris,  les  statuts  de  l'Union  du  crédit  fondée 
il  Bruxelles  avec  les  articles  ii  ajouter  pour  la  convertir  en  banque 
mutuelle  d'échange;  enfin,  une  note  intitulée:  Caisse  de  relraile 
pour  les  Iravailleurs  ,  Caisse  des  invalides  de  la  marine. 

Vicrcen  irnvaiWiut ,  projets,  voies  et  moijens  de  réformes  socia- 
les, par  François  Vidal,  auteur  de  la  Itépnrlition  des  richesses. 
—  Paris,  1848  ;  un  volume  iu-18,  3  fr.  50  c.  Capelle,  rue  des 
Grès-Sorbonne,  10. 

M.  Laboulaye  est  un  éclectique  :  «  Placé  ,  dit-il  ,  entre  les  so- 
cialistes qui  veulent  tout  faire  faire  par  l'Étal ,  personne  mysté- 
rieuse, infaillible,  ayant  toujours  des  trésors  inépuisables  il  .sa 
riisposilion  ,  et  les  éconoraisles  qui  nient  lout  avantage  ù  celle 
intervention  ,  qui  professeul  la  Ihéoiie  du  gouvernement  éclairé, 
ne  réclamani  que  la  lîberlé  absolue,  complète  du  travail  ,  el  re- 
fusant de  reconnaître  qu'il  puisse  en  résulter  le  moindre  incon- 
vénient ,  il  a  cherché  dans  l'ouvrage  que  nous  venons  d'analyser 
rapidement  à  indiquer  comment,  dans  quelles  limites  deva"ient 
.se  combiner,  en  vue  de  l'inlérêt  général ,  la  liberté  et  l'autorilé, 
l'indépendance  de  l'individu  et  le  pouvoir  de  la  société.  M.  Vi- 
dal, lui,  est  un  somi/is(c  pur  sang.  Digne  émule  du  citoyen 
Louis  Blanc  ,  dont  il  a  élé  le  secrétaire  au  Luxembourg  ,  el  des 
citoyens  Cabet ,  Pierre  Leroux.  Proudhon  el  auires  citoyens 
delà  même  école,  il  peut  avoir  comme  eux  de  bonnes  intentions, 
mais  il  a  certainement  aussi  de  fort  mauvaises  idées.  Après  tout 
il  n'en  est  ,  comme  il  le  dit  lui-même  en  ne  réclamant  avec  jus- 
tice ni  brevet  d'invention  ni  brevet  de  perfectionnement,  que 
le  réceptacle  et  l'écho.  Elles  ne  lui  apparlienniul  pas  en  propre, 
il  ne  fail  que  les  publier,  car  leur  germe  se  trouve  déjà  dans  des 
livres  qui  ont  été  écrits  il  y  a  plus  de  deux  mille  ans ,  dans  des 
livres  dont  les  auteurs  sont  restésinionnus.  Quand  je  dis  publier, 
je  me  trompe,  je  devrais  dire  réimprimer,  puisqu'il  déclare 
rranchement  ,  •  n'ayant  pas  la  prétention  île  faire  du  nouveau , 
de  rinconnu,  »  que  tout  ce  qu'il  développe  dans  ce  volume  il 
l'a  déjà  exposé  en  grande  parlie  sous  une  autre  forme  el  en  d'au- 
tres termes,  il  est  vrai,  dans  des  brochures,  des  articles  de  re- 
vue el  un  livre.  Du  reste  ,  si  M.  Vidal  marche  dans  un  .sentier 
depuis  longtemps  frayé ,  dans  un  sentier  qu'il  a  hattu  lui-môme, 
il  prend  aujourd'hui  une  autre  allure.  Les  projets  qu'il  présen- 
tait, sous  la  monarchie  écroulée  ,  comme  des  projets  rationnels 
dont  il  n'osait  espérer  la  réalisation  ,  il  les  donne  inainleiiant 
comme  possibles,  comme  iinmédiatenient  réalisables,  comme  né- 
cessaires. Ce  qui  éiaii  une  utopie  il  y  a  six  mois  ,  peut ,  dans  son 
opinion,  devenir  une  institution  de  la  République.  A  sou  avis, 
les  Ihéoriciens  d'avant  la  révolution  sont  les  .seuls  hommes  vrai- 
ment pratiques,  les  seuls  qui  conipreunent  le  mouvement  des 
idées  et  des  fa. ts  ,  les  seuls  qui  puissent  le  diriger,  les  seuls  qui 
aient  le  vrai  sentiment  des  besoins  de  la  société  arluelle;  aussi 
n'hésite-t-ilpasàdire  que  le  lenips  approche  où  les  idéis  sxiales , 
les  idées  positives  à'ordre ,  ù'associntion  et  A'or^anisulion  ,  que 
l'on  traitait  de  chimères  el  de  rêveries,  seront  les  seules  idées 
raisonnables,  deviendront  pour  la  société  actuelle  Vunique  moyeu 
de  salut.  «  Le  temps  est  proche,  s"écrie-t-il  dans  un  accès  d'en- 
thousiasme ,  où  l'inlervenlion  del'Rlal,  réclamée  depuis  vingt 
ans  par  les  socialistes ,  repoussée  avec  obstination  par  les  écono- 
mistes libéraux  ,  repoussée  par  les  propriétaires  ,  par  les  agricul- 
teurs ,  par  les  industriels ,  par  les  marchands  ,  par  les  banquiers 
et  par  les  capil.ilistcs  ,  sera  invoquée  à  grands  cris,  implorée 
comme  une  faveur,  comme  une  grùce  parla  piopiiété,  par  l'agri- 
culture, par  l'industrie,  par  le  commerce,  parla  banque  cl  par 
les  économistes  libéraux  eux-mêmes.  » 

A  lire  ces  passages  extraits  de  la  préface,  on  devine  sans  peine 
ce  que  doivent  contenir  les  dix-sept  chapitres  de  l'ouvrage  ;  ils 
peuvent  tous  se  résumer  ainsi  :  absorption  de  l'individu  par  la  so- 
ciété. Le  premier,  intitulé  le  Droit  au  travail,  ne  sera  pas,  je 
IVspére  ,  sans  iunuence  sur  la  discussion  qui  vient  de  s'ouvrir  à 
l'As^eniblée  nationale.  M.  Vidal  a  du  moins  le  mérite  de  la  fran- 
chise ;  il  avoue  que  le  droit  au  travail ,  qu'on  le  sache  ou  qu'on 
l'ignore,  implique  nécessairement  l'organisation  du  travail ,  et  que 
l'organisation  du  travail  implique  la  transformation  économique 
de  la  société.  Le  principe  posé ,  dit-il ,  les  conséquences  sont  iné- 
vitables. A  l'en  croire,  les  adorateurs  du  passé  auiout  beau  se  la- 
menter comme  des  Jérémies,  c'en  est  fait  à  lout  jamais  de  l'an- 
cien régime ,  cl ,  quoi  qu'il  arrive  dans  l'ordre  politique  ,  la  régé- 
nération sociale  s'accomplira. 

Révéler  les  moyens  d'opérer  cette  révolulion  indispensable  ,  en 
d'aulres  termes ,  coiislituer  l'ordre  nouveau  ,  tel  est  le  bul  (|ue 
s'est  proposé  M.  Vidal.  Dans  les  cliajiilres  2.  3  et  It,  il  expose 
toutes  les  réformes  qu'il  considère  comme  immédiatement  néces- 
saires dans  l'agricultu'e,  riiniuslrie,  le  commerce  ;  les  chapi- 
tres i).  G,  7,  8  et  10  sont  consacrés  aux  institulions  de  crédit  ;Ie 
chapitre  11  a  pour  litre  :  Itachal  possible  du  sol  par  l'État,  ra- 
chat de  la  dcllr  publique  ,  des  ctiemins  de  fer,  des  can^nix  et  des 
mines;  les  ilijpilres  12,  f.'i  et  ili  traitent  des  iiistilulinns  de  ga- 
rantie ,  lies  asMiiaiH-es  ,  îles  hôtels  écoiiomi.jue^  ponr  les  f.imilles 
d'ouvii.is,  des  armées  indu^lrielles;dans  le  chapilicl5  .M.  Vidal 
répond  ans  ohjeclio.-is  ;  dans  le  IG''  il  se  résume ,  el  dans  le  17*^  et 
dernier  il  conclut. 

Cet  ouvrage  est  encombré  de  phrases  inutiles,  \fais  au  milieu 
de  tout  ( e  fali as  déi  lainaloiio ,  dans  ce  luhubohu  d'utopies  exlra- 
vagantcs,  (jui ,  de  l'avis  de  leur  vulgarisateur,  datent  au  moins 
de  2,000  JUS,  on  découvre  çà  et  là  i|uelque  idée  raisonnable  et 
féconde  ;  on  peut  donc  le  lire  avec  fruit,  même  s(  on  coiniait  suf- 
nsainuR'ut  messieurs  les  socialistes  cl  leurs  sy-lèmes.  Au  lesle 
c'r^t  un  guide  digne  d'êlre  recoinniandé  aux  amateurs  qui  vou- 
draient cs>ayer  de  pénéirer  pour  la  l'.reinière  fois  dans  ce  monde 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


rt-ccmnii-nldiTonvirl ,  s'il  jiV-l  pas.romnR'le  ricomieiil  llli-mc'uiu 
M.  Vidal ,  renouvelé  (les  Grecs.  Qu'il-,  aient  la  précaution  de  s'en 
munir  avant  de  se  mettre  en  route,  et  ils  seront  sûrs  non-seulo- 
nunt  de  se  rendre  par  la  voie  la  plus  courte  aux  endroiLs  les  i)lus 
curieux  à  visiler,  UKiis  de  Irnuver  en  oiilrc,  au  chapitre  qui  les 
conrrrue  ,  liplllcs  les  i-xpliralicins  dr-ii  ;ilil|.s. 

Bien  (|n'il  ne  ii:iilc-  piis  cli'^  rmini's  principes,  M.  Vidal  arrive 
à  cerlaines  réformes  dont  M.  LalicmUije  propose  l'appljcaliun 
dans  sa  Démocralic  vnt'>\triet[c.  Mais  si  M.  Labnuiaye  veut  dé- 
moraliser l'indusire  à  l'instar  de  l'agricutture,  M.  Vidal,  au 
contraire  ,  a  la  prélenlinn  de  socialiser  le  sol  comme  l'innuslrie. 
La  propriété  démocriiii((ui'  lui  scndile  une  mauvaise  chose.  Au- 
tant il  adore  les  nuMicis  prniircrjnnt  dils  ,  surtout  les  travail- 
leurs qui  ne  travaillml  p;is  pinrc  ((u'ils  aiment  mieux  ne  rien 
faire,  autant  il  déti^lv  les  pajsans.  Du  rcsie  on  doit  lui  savoir 
(çré  de  >a  franchise.  Il  confesse  tous  les  rêves  de  son  imajfina- 
tion  avec  une  naïvele  qui  lui  fait  honneur.  Il  est  impossible  de 
s'exprimer  plus  uettenu'Ul.  Jl  a  même  la  bonhomie  de  nous  dé- 
voiler loules  les  petites  supercheries  qu'il  entend  pratiquer  pour 
nous  façonner  à  son  image.  Le  passage  suivant  est  curieux  â  plus 
d'un  titre. 

Il  Si  la  ï'raucc,  dit-il  (  pages  d6i  et  suivantes  ) ,  (tait ,  couune 


l'Angleterre,  un  pavs  de  propriété  arislocialique ,  nous  irions 
droit  au  but ,  sans  prendre  un  chemin  de  traverse  ,  nous  ne  de- 
manderions point  la  division  préalable  du  sol  pour  arriver  ensuile 
à  l'association.  Mais  ,  eu  égard  ix  nos  traditions,  à  nos  préjugés, 
eu  égard  aux  obstacles  qu'il  faut  ahsninntent  tourner  puisqu'on 
ne  peut  les  détruire  ,  nous  devons  prendre  la  ligne  courbe,  parce 
que  c'est  encore  celle  qui  nous  permettra  d'arriver  au  but  plus  sti- 
rcnu'ut  et  plus  promptenn  nt. 

n  Présentement  donc ,  nous  demandons  l'accession  du  paysan 
à  la  propriété  ,  parce  que  c'est  aujourd'hui  le  seul  moyen  de  pré- 
pai-er  l'émancipation  des  travailleurs  et^d'anioindrir  la  rente  t\e  la 
lerre.  Mais,  pour  nous,  ce  n'est  point  le  but  définitif,  ce  n'esl 
qu'ui'e  étape.  La  plus  extrénu'  division  delà  propriété  n'est  point 
le  terme  de  nos  espérances,  bien  (lue  ce  soit  peul-étre  la  Iransilitui 
nécessaire  du  présent  à  l'avenir.  Nous  rêvons  un  tout  autie  mon- 
de ,  nu  monde  diamétralement  opposé... 

n  Léducalion  générale  devehqipera  les  intelligences  el  dissi- 
pera les  préjugés  ;  la  force  des  choses,  d'un  antre  C(j(é  ,  démon- 
trera l'iiisuflisance  de  la  petite  luliureet  poussera  les  hommes  â 
l'as^ocialiou.  Mais  je  reconnais  (|u'aujonr(l'hui  il  n'y  a  rien  à  al- 
leiulre  de  la  géiiéralion  présente  di'  nos  paysans  ;  race  ignorante, 
égoïste,  âpre  au  gain  el  impitoyable  au  malheur,  obstinée  dans 


ses  préjugés  ,  rebelle  a  loules  Us  iiuiovalions,  même  t}  telles  qui 
ont  pour  objet  l'amélioration  de  son  sort,  elle  n'a  d'affection  que 
pour  son  champ  et  pour  ses  écus  ;  elle  tn-nt  à  son  bélail  plus 
qu'il  sa  famille  ;  elle  porte  plus  sincèri  ment  el  plus  longtemps  ,  au 
fond  du  cœur,  le  deuil  d'un  bœuf  mort  que  le  deuil  de  ^on  vieux 
père,  et  elle  trouve  (|ue  le  bonheur  de  l'humaniié  serai!  payé 
trop  cher  s'il  devait  lui  coûter  mumentanémenl  quelques  centimes 


iddilii 


els. 


n  (À-ux  qui  se  font  les  plats  courtisans  du  peuple  des  campa- 
gnes,  (|ni  en  exaltent  les  fausses  vertus  ,  ne  connaissent  pas  le 
paysan.  Le  paysan  de  la  France  centrale,  le  paysan  qui  ne  sait 
ni  lire  ni  éciire,  mai*  qui  s.iil  compter;  qui  n'est  jamais  sorti  de 
son  harnean  ,  qui  n'a  poini  éié  décrassé  par  le  service  mililaire, 
qui  n'a  de  la  créaliire  humaine  que  la  forme  extérieure  et  le  lan- 
gage ;  c'est  généralement  nu  être  stupide  et  grossier  auquel  on  ne 
peut  s'intéresser  que  par  amour  de  l'humanité,  qui  fera  la  résis- 
tance la  plusopiniaire  ,  la  plus  féroce  même,  t  toute  idée  géné- 
reuse ,  s'il  n'enirevoit  pas  pour  lui  un  profit  immédiat ,  qni  tue- 
rait au  besoin  ceux  qui  veulent  l'affranchir,  comme  les  prétoriens 
liienl  ceux  qui  veulent  les  délivrer  du  joug  du  despotisme.  Le 
plus  grand  ennemi  dn  peuple  ignorani ,  ajoute  M.  Vidal  avec  rai- 
sou  ,  c'est  lui-même.,,,  n 


fieorge  SIephciisoi 

l.r  >,;iiieili  1  i  iiiiùt  (loiiiiiT,  csL  iiiofl ,  (liuis  soii  élahlis- 
sciiM'iil  ilii  cimiiIj'' (lu  Derl-iy ,  \e  célèbre  in2;énieui'  anglais 
(icrii  L'e  Sle|ilirnsnn  ,  (|ui  il  (!U  la  gloire  ,  sinon  fl'iHrc  l'inven- 
teur lies  clK^mins  de  fer  proprement  dits,  du  moins  d'em- 
pliiyiM-  le  premier  avec  suci-ès  une  machine  a  vapeur  sur  les 
Villes  ferrées. 

(iciiri;i'  Slepliens()n  était  né  à  Wylam  ,  village  situé  sur 
les  hiinls  lie  l;i  Tyne  ,  à  neuf  milles  de  Newcastle  ,  au  mois 
il  iivril  17X1 .  Sun  père  ,  simple  ouvrier  de  la  lioiiillère  de 
WMaiii  ,  ne  put  lui  faire  donner  auiuiie  éilm  iiliini  Au  lieu 
dallera  l'érole  .  il  fut  iililiL-é  ,  des  son  h;i..  ,iiir  ilr  ii  ;i\  iuller 
pour  Ljiigucr  sa  vie  De  In  lioiiillere  de  W  \  l,;iii  ,  il  p.i-.i ,  a 
ili\-liuit  ans  .  daiisiclle  de  Killiii;;\\orlli  .  ipii  .ipp.iiieii.ilt a 
Imil  llaveiiswi.rlh  ,  el  s'él.inl  liveiles  lors  a  Killiiiijwi.rth  .  il 
\  épousa  plus  tard  sa  première  reiiiiiie  ,  iliiiil  il  ei'il  un  seul 
(Mil.iiil  .  le  celelire  ingénieur  en  ilierile  la  iiiiii|ia-nioile  l.on- 
dre^etdii  Noril-Duest ,  M.  Itolieil  Sleplieuson  ,  actuelle- 
ineiitiiieiulueilela  cliaiulire  des  roiiiiiiiiiies 

t'.e  lut  pendant  son  séiiiur  a  Killiiigvvorlh  iiue  se  niani- 
Irsineiii,  ses  pretujères  dispositions  pour  la  mécanique.  Sa 

" lie  s' étant  cassée  ,  il  eiilreprit  de  la  raccommoder  et  il 

\  riMissil,  A  dater  deee  uioiiieul ,  il  devinlThorloger du  vil- 
lage Toiiles  ses  heures  de  Im^ir  élaient  (  onsaeri'es  il  la  ré- 
par.ilioii  desiiiiiiiln^  .In.Mrjres  Un  jour,  une desniaeliiues 
de  la  houillère  dr-hiMc  ,i  mmUer  l'eau  reliisa  de  louetion- 
uer.  On  essaya  \aiiieiiieiil  de  la  faire  niaiclier.  Aucun  des 
employés  ne  piil  même  eompremire  pouri|uoi  elles'élait  ar- 
rélce.  Stepliensiiii  vint  levauiiiier.  demanda   et  obtint   la 


permission  de  la  remettre  en  bon  état ,  el  non-seulement  il 
la  répara  ,  mais  il  y  ajnt.ta  des  perfectionnements  impor- 
tants. Ses  supérieurs  l'en  récompensèrent  en  l'élevant  de  la 
condition  d'un  simple  ouvrier  au  rang  d'ingénieur,  et  ils  le 
eliargereiit  de  conduire  seul  cette  machine.  Tout  en  remplis- 
sant ses  nouvelles  fonctions,  il  fit  travailler  son  esprit  et  il 
eut  la  gloire  de  décoiu  rir  la  lampe  de  sùreléen  même  temps 
ipie  sir  lliiiiiplirev  U.iw  l.ejour  ou  sa  preiniere  expérience 
eut  lieu  i\  ocliiiire  LSI.';'  .  le  re\ereml  John  llogdson  re- 
ee\ail  de  sir  llumplirey  Davy  une  letlie  ipii  lui  annon(;ait 
son  iilil|.  inveulion.  Une  soilscriplioii  ,  ouverle  en  IS.lSen 
siHi  liiiiineiir  et  a  son  profit ,  produisit  1.(1(111  livresslerling  . 
ijui  lui  fiirenl  oITerles  avec  une  pièce dargeiilerie  .  il  la  lin 
d'un  grand  diiier  d'aiiparal  il.iiis  la  ville  de  Neweasile 

Descelle  epoipie  Sleplieuson  s'oceiip.i  presipie  e\eliisive- 
ment  du  proMeiiie  ilnul  la  sohilion  iuiiiiorlalisera  son  nom. 
f.u  ISIIi,  la  machine  de  Trevelluik  et  Vivian  Irainait  (les 
voilures  a  MerlliM-lgdvil  .  ,ivee  oiie  vitesse  de  cini|  uiilles 
il  l'heure  .  en  US  11  et'lSl!i,  lilenlvinsop  et  Chapiiianconslrui- 
sireiil  une  niiiiv(;lle  machine  ipii  ne  put  pas  marcher.  Dejii 
en  Uill.  avant  de  découvrir  la  lampe  de  sûreté  .  Slephen- 
soii  lui-même  en  avail  coiislriiit  une  pour  la  houillère  de 
Killiiigworlh  .  ipii  l'onclioniia  ipielipie  temps  sur  le  chemin 
de  Um-  de  la  (  oiopaguie  ,  et  ipi  il  remplaça  liienli'il  par  une 
iiutre  bien  supérieure  ,  d'après  la  demande  de  l'iinjenieur 
en  chef 

Ce  n'élaienl  lit  toutefois  que  des  es-sais.  Dix  années  de- 
vaient eiicori'  s'écouler  avant  qu'une  véritable  locoieolive. 


se'iiblabic  it  celles  dont  on  se  sert  aujourd'hui  .  quoique 
moins  parfaite  ,  rouliit  sur  un  chemin  de  fer.  Cette  grande 
révolution  dont  les  conséquences  ont  dèjii  été  si  grandes,  et 
I  imagination  la  plus  hardie  ne  saurait  deviner  les  résultats 
bilurs  ,  1  Angleterre  ,  que  dis-je  ,  le  monde  entier  les  doit  a 
Slcphenson  En  1824,  il  avait  fondé  il  Newcastle  ,  avec 
M.\l.  l'ease  ,  Longridge  et  son  fils,  un  vaste  établissement 
pour  la  construction  des  machines  à  vapeur,  qui  e.\isle  et 
prospère  encore  aujourd'hui  sous  la  raison  sociale  Robert 
StephensoTi  el  C'  ;  ce  fut  de  cet  établissement  que  sortit  la 
première  locomotive  destinée  a  transporter  des  voyageurs 
el  des  marchandises  sur  une  voie  ferrée.  Stephenson  en 
était  en  même  temps  l'inventeur  et  le  constructenr.  En  1825 
il  eut  le  bonheur  de  la  voir  fonctionner  avec  un  succès  com- 
plet entre  Sloekton  et  Darlinglon. 

Malgré  son  succès,  Stephenson  n'osait  pas  alors  avouerles 
espérances  qu  il  avait  conçues,  il  craignait  de  passer  pour 
liiii  II  disait  qu'il  comptait  atteindre  une  vitesse  de  vingt 
milles  a  1  heure ,  mais  il  rêvait  déjà  une  vitesse  de  soixante 
el  de  cent  milles  II  y  a  un  an  environ  ,  il  s'exprimait  en  ces 
lermes  a  Newcastle  ,  dans  un  diner  public  :  e  A  Liverpool 
je  m  engageai  a  obtenir  une  vitesse  de  dix  milles  il  l'heure. 
Je  ne  doute  pas ,  ajoutai-je  ,  que  ma  machine  n'aille  beau- 
coup plus  vite  ,  mais  il  vaut  mieux  èlre  prudent  au  début. 
Je  m  exprimais  ainsi  devant  une  commission  d'enquête  nom- 
mée par  le  parlement.  Quelques-uns  des  commissaires  de- 
iiiaiiileient  si  j'étais  un  étranger,  et  un  autre  donna  à  en- 
tendre il  ses  collègues  que  j  avais  perdu  la  raison.  Je  n'en 
persislai  pas  moii  s  dans  mes  projets,  et  j'emportai  mes 
plans,  ilelermiué  à  les  mettre  il  exécution.  »  Tandis  qu'il 
cdiislrnisail  sa  première  locomotive  .  il  dit  il  ses  amis  qu'il 
obtiendrait  une  vitesse  illimitée  ,  pourvu  qu'elle  ne  se  brisât 
pas  en  morceaux. 

La  réputation  de  Stephenson  ne  date  pourtant  que  de 
1S*I.  .\vaiil  la  création  Au  chemin  de  fer  de  Liverpool  et  de 
Manchesler  il  n  était  connu  comme  constructeur  de  ma- 
chines ipie  de  ses  clients.  Mais  les  directeurs  de  ce  chemin 
de  fer  ayant ,  en  1829,  ouvert  un  concours  pour  la  construc- 
tion d'une  machine  ii  vapeur  destinée  à  leur  servir  de  mo- 
dèle, (îeorge  Stephenson  gagna  le  prix  de  .500  livres  avec 
s.i  eeleliie  iii;ichine  le  Rocket  Dèslorssa  fortune elsa  gloire 
liniiii  .1— iiiccs  il  se  vit  chargé  de  la  construction  des  prin- 
cipile-  liL'iic-  de  chemins  de  fer,  non-seulement  de  la  Gran- 
de-lirelagne  .  mais  du  continent. 

Sieplieiisiiii  vivait  ,  riche  et  honoré  ,  dans  son  élablisse- 
meiil  du  comté  de  Derby,  où  la  mort  est  venue  le  frapper,  le 
12  aiMit  dernier,  dans  s;i  soixante-huitième  antièe 


o 


RICHESSE 


VTIOX  DU   DERMEIl   ItKBl'S 


Marche  ilev;tiil  toi,  car  tout  chemin  mène  à  Home:  m.» 
Iioulieui-,  \K\i  uu  ne  conduit  eu  ce  moinle. 


(Ml  s  abonne  riircrfemftif  aux  buivaiix.  rue  de  Hicholieu. 
n"  liO.  par  Tenvoi  franco  d  un  mandat  sur  la  poste  ordiv 
l.echevalier  et  ('.',  ou  près  des  diivcleui-s  de  poste  el  de 
messauiM'ies ,  des  principaux  libraiivs  de  la  Krance  el  de 
Ici  ranger,  el  ilesiiirrespondaïuesileragenced  abunnenienl 


l'.'.Ui.lN 


ruCH-S.vl.xt-C  .HMV 


L'ILLUSTRATION, 


Ab.  pour  Paris.  3  mois ,  8  fr.  —  6  mois,  16  fr. —  Un  an,  30  fr. 
Prix  de  cliaqueNo,  75  c. — La  collection  mensuelle,  br.,  2  fr.75. 


N"  290,  Vol.  XII.  —  SAMEDI  16  SEPTEMBRE  1848. 
Bureaux:  rneRlclielleo,  60. 


Ab.  pourles  dép.  — 3  mois,  9  fr.  — 6  mois, 17  fr.— Un  an,32fr. 
Ab.  pour  l'étranger,    —    10  fr.        —       20  fr.        —      40  fr. 


SOMMAIRE. 

IllBloIre  de  la 

poJiiaine  .    I«    3 
M.  Fra 

de  M.  Ilédianl  ,  qualre  gravures.  —  La  souscrfplton  en  librairie. 
—  Correspondance.  —  Une  visite  A  la  librairie  plialansie- 
Tienne,  par  M.  Alexandre  Dufai.  —  AlbuDi  uioldo-valaque  (  s* 

srticle).  U(i  relais  lie  poste  en  Moldo-Vabcbie  ;  Uo  eunsul  général  étranger 
k  BucliareM  :  La  fêle  des  Ouvriers  français  dans  une  furet    nioldo-valaqne  : 

'i.   Dmissau 

tleesins  de  M.  H.  Bouquet.  —  FOles  de' Calais  et  Dunlierqoe.    Ban- 
quet de  la  garde  nalioiiale  sur  la  grande  plaue  ;    Bénédielion  du  ehemi 
fer;   Lancement  de  la    Bùhe  ;  La   proccssiou  du    Reuse  :   Rue    Arago  ; 
Dupouy  :  Bue  de  la  Marine. 


Histoire  de  la  semaine. 

Par  une  sorte  de  pressentiment  sans  doute  de  tout  l'em- 
barras, de  tout  le  péîe-ni6le  de  ia  discussion  du  préambule, 
l'Assemblée  ne  s'était  pas  plutôt  laissé  entraîner  par  la 
flatteuse  éloijuence  de  M.  de  Lamartine  ,  à  décider  que  no- 
tre constitution  aurait  un  avant-propos,  qu'elle  a  semblé 
vouloir  revenir  sur  sa  décision.  Parmi  les  préambules  que 
leurs  auteurs  présentaient  pour  être  substitués  à  celui  de 
la  commission  ,  il  en  était  un  concis,  net,  simple,  aussi  peu 


préambule  que  possible,  et  que  son  auteur,  M.  Boussi ,  avait 
soutenu  en  quelques  mots  également  clairs  et  précis.  Celte 
tentative  nouvelle,  mais  déguisée,  contre  les  phrases  vagues 
et  dangereuses  de  la  commission  ,  a  partagé  l'Assemblée  en 
deux.  Le  bureau  a  cru  à  une  majorité  pour  le  rejet  de  la 
proposition  de  M.  Boussi. 

Ce  sort,  injuste  pour  celle-ci ,  a  été  partagé  également 
par  d'autres  rédactions  qui  le  méritaient  bien.  La  plus  fan- 
tasque était  celle  du  citoyen  représentant  Deville,  que  l'As- 
semblée a  écouté  ,  dans  ses  développements  sérieusement 
burlesques  ,  avec  une  patience  désespérante  pour  l'orateur 
dont  le  tliéme  était  que  la  tribune  n'était  pas  libre  sous 
l'état  de  siège.  Ce  constituant  a  eu  toute  carrière  ,  et  l'As- 
semblée ,  silencieuse  pendant  la  harangue ,  a  comprimé  ses 
rires  jusqu'au  moment  où  l'orateur  est  descendu  de  la  tri- 
bune. 

Une  fois  la  concurrence  des  préambules  vidée  ,  on  est 
entré  dans  la  délibération  des  paragraphes  de  celui  de  la 
commission.  Dès  l'article  premier,  où  tant  do  choses  sont 
garanties  aux  citoyens  ,  depuis  l'éducation  à  l'enfance  et  le 
travail  à  l'âge  mûr  jusqu'à  l'assistance  à  la  vieillesse  ,  dès 
ce  premier  article  ,  s  est  produit  un  amendement  de  M.  Bau- 
chard  ,  qui  promet,  après  tout  cela  et  malgré  tout  cela  ,  non 
pas  seulement  un  meilleur  emploi  ,  une  plus  égale  réparti- 
tion ,  mais  la  réduction  des  charges  qui  pèsent  sur  les  con- 
tribuables. Il  s'est  trouvé  une  majorité  pour  ajouter  cette 


promesse  à  toutes  les  autres.  Sans  doute  beaucoup  d'ad- 
versaires du  préambule  auront  eu  la  perfidie  de  concourir  a 
l'adoption  de  cette  gasconnade,  dans  l'espoir  qu'au  vote 
d'ensemble  elle  le  compromettrait  et  le  ferait  définitive- 
ment rejeter. 

Le  paragraphe  2  ,  qui  porte  que  la  République  française 
est  démocratique  ,  une  et  indivisible  ,  a  été  voté  à  l'unani- 
mité par  777  votants  ,  après  quelque  incertitude  exprimée 
par  M.  de  La  Rochejaquelein  sur  le  sens  du  mot  démocrati- 
que ,  que  M.  Dupin  aîné  a  essayé  de  lui  faire  comprendre  , 
sans  se  llatter  d'être  plus  heureux  que  nos  pères  ne  l'avaient 
été  ,  en  1789.  avec  une  partie  de  la  noblesse  ,  quand  ils 
avaient  tenté  également  de  lui  en  faire  bien  saisir  le  sens. 
—  Le  vote  des  paragraphes  3,  4.  S,  6  et  7  n'a  amené  au- 
cune discussion  importante.  Un  fort  bon  discours  deM.  Du- 
cos  a  fait  ajouter  au  paragraphe -4  que  la  République  a  pour 
base  la  famille,  \a  propriété ,  Y  ordre  public. 

Mais  le  paragraphe  8  semble  être  le  terrain  sur  lequel  se 
sontdonné  rendez-vous  les  champions  de  tous  les  partis.  On 
se  rappelle  que  dans  sa  rédaction  primitive  la  comiîfission 
de  constitution  avait  semblé  reconnaître  un  droit  illimité  au 
travail.  Dans  la  rédaction  revisée  ,  elle  engage  seulementla 
République  à  fournir  du  travail  aux  bras  inoccupés  dans  ia 
mesure  de  ses  ressources.  M  Mathieu  (  de  la  Drôme)  a  pré- 
senté un  amendement  pour  rétablir  formellement  l'enga- 
gement primitif  et  ses  conséquences.  Ce  représentant  a  dé- 


Bombardement  de  Messine  par  la  ûotte  napolitaine,  le  3  septembre  1848. 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL     UNIVERSEL. 


veloppésa  proposition  dans  undiscoursliion  loni; .  I)ien  lent, 
bien  lourd  ,  où  les  Sauvages  jouaient  continuellement  un 
rôle  pour  la  plus  grande  hilaritéde  l'auditoire.  Mais  ce  qui 
a  paru  plus  gai  encore,  c'est  que  le  lendemain  M.  de  Toc- 
([ueville  ayant, pendant  une  heure, tenu  constammentl'As- 
semblée  attentive  et  l'ayant  entraînée  par  une  des  plus  élo- 
quentes opinions  (in'clïc  eût  encore  entendues  à  sa  tribune, 
M.  Mailnru  i  df  l:i  Drome)  lui  a  succédé  pour  bien  constater 
que  M.  dcTiii  i|iir\illc  ne  lui  avait  pas  répondu.  C'était  vrai , 
et  l'Assciiilili'c  l'A  iiiiinnu  par  un  fou  rire. 

M.  I.('diii-l;nliiii  ;i  liii'i,  lié  iK.indial  Ire  l'effet  produit  par 
M.  dcT(ii'i|iirMlli'  ,  iii:m~I  iii^inr.il  hiu  manquait  ce  jour-là  à 
l'orateur  ili'  ICxIn'iiii'  L:,inrlii'  Il  iidus  semble  d'ailleurs 
s'engaL'ci-  dans  un  |m>U;-iiiiIii'u  qui  ne  lui  promet  ni  d'être 
considéré  comme  homme  pratique  ,  ni  de  conserver  long- 
temps la  popularité  dont  il  peut  jouir  II  y  a  trois  semaines 
il  présrnli'it  un  proLTommo  de  socialisme  bâtard  qui  cher- 
chait a  M'Iinc  hniiliiHiuiH'  .Mardi  il  réclamait  l'insertion  du 
droit  au  ir,i\.iil  d.iii-  lii  . mi^iiiiition  ,  mais  il  reconnaissait 
que  de  loii^lcinps  ce  droit  ne  pourrait  être  8érieu^ement  re- 
vendiqué et  demeurerait  à  l'état,  sinon  de  lettre  morte,  du 
moins  de  lettre  non  encore  lisible.  L'enthousiasme  de  la  ma- 
jorité de  l'Assemblée  qui  venait  d'applaudir  M  de  Tocquc- 
ville  et  qui,  un  instant  après,  applaudissait  M.  Duvergier 
de  Hanranne  ,  a  fait  d'autant  plus  ressortir  la  froideur  de 
l'accueil  fait  à  M  Ledrii-Rollin  par  ses  amis. 

•lamais  M.  Duvergier  de  Hauranno  n'avait  été  plus  spiri- 
tœl  et  plus  incisif.  Il  était  dilficiled'arracher  plus  vivement 
le  masque  qui  ,  sous  le  nom  de  droit  au  travail ,  sert  à  dé- 
guiser le  socialisme.  Il  a  fait  ressortir  les  fatales  conséquen- 
ces d'un  premier  pas  (|ue  l'on  ferait  dans  cette  voie  ;  il  a 
récusé  comme  auxiliaires,  avec  une  malice  qui  n'a  pas 
échappé  il  M  de  Lamartine,  les  orateurs  qui  prennent 
M.  Proudhon  pour  bouc  émissaire  du  socialisme  ,  et  qui , 
après  lui  avoir  adressé  quelquedureté  ,  se  croient  en  règle 
avec  la  snrii'h''.  Il  a  rérlanié  pour  le  principe  de  la  propriété 
un  dé\c)iiriiiriii  |ihIi(  ii'ii\  cl,  sévère;  il  sait  qu'elle  a  beau- 
coup diiilnuiriiiv  ,ijii;iiic'ii  au  banc  de  M.  de  Lamartine) , 
mais  il  .-ait  ,ius>i  qu  un  iiu  respecte  pas  toujours  ce  qu'on 
adore.  L'Assemblée,  pendant  une  lieure  ,  a  souri  et  applaudi 
à  ce  discours,  auquel  il  n'y  avait  rion  à  répondre. 

Pourtant  M.  Crémieux  a  répondu.  Son  discours  a  été 
étendu  ,  mais  accueilli  ,  comme  celui  de  M.  Ledru-Rollin  , 
avec  peu  de  faveur,  même  sur  la  Montagne.  N'oublions  pas 
qu'au  début  et  à  la  fin  de  cette  même  séance  de  mardi  , 
r.Asscmblée  avait  entendu  deux  opinions  remarquebles, 
lune  de  M.  Gauthier  de  Humilly  ,  l'autre  d'un  nouvel  ora- 
teur, homme  de  talent ,  M.  Harlhc  (  des  Basses-Pyrénées). 
La  discussion  a  continué  dans  la  séance  de  mercredi. 
M.  Thiers  ,  après  M.  Arnaud  (de  l'Ariége  ) ,  un  orateur  nou- 
veau qui  a  trouvé  la  solution  dans  l'Evangile  ,  —  qui  l'eût 
cru  '/ — •  M.  Thiers  a  traité  la  question  en  orateur  éloquent , 
en  homme  d'Etatqui  croit  plus  à  l'expérience  et  à  l'obser- 
vation qu'il  ces  panacées  sociales  invenlées  par  des  rêveurs 
qui  n'ont  jamais  pris  la  peine  de  descendre  il  la  réalité  et 
de  suivre  ie  jcudes  élémenlssociaux.  Ce  qu'on  est  convenu 
d'appeler  l'événement  de  la  séance  a  été  le  discours  de 
M.  Tmers.  C'est  toujours  le  même  esprit ,  net ,  lumineux  . 
pénétrant ,  incisif,  sans  rival  dans  l'analyse  et  dans  la  criti- 
que. Sous  celte  parole  mordante  ,  la  Montagne  se  révoltait 
et  se  soulevait.  Nous  en  sommes  bien  ffiché  pour  la  Mon- 
tagne ;  mais  il  faut  encore  qu'ils  se  résignent  il  la  supério- 
rité de  ceux  qui  ont  appris  ce  que  la  Montagne  a  dédaigné 
d'apprendre.  Vous  avez  pu  ,  ô  citoyens,  changer  bien  des 
choses;  mais  vous  n'avez  pas  pu  changer  la  nature;  vous  avez 
pu  vous  partager  les  ministères  ,  comme  ledis.ait  na'ivement 
M.  Crémieux  ;  mais  il  y  a  quelque  chose  que  vous  nepou- 
vez  pas  vous  distribuer,  parce  que  ce  n'est  pasii  vous.  In- 
terrompez, criez,  failesdu  bruit,  messieurs  de  la  Montagne; 
vous  n'en  serez  pas  plus,  pour  cela  ,  des  orateurs. 

M.  Thiers  avait  sommé  les  socialistes  de  divulguer  leurs 
secrets  ,  s'ils  en  avaient.  M.  Considérant ,  avec  beaucoup  de 
sang-froid  et ,  nous  en  sommes  convaincu  ,  avec  beaucoup 
de  bonne  foi ,  a  déclaré  qu'il  avait  en  sa  possession  le  moyen 
de  remédier  il  toutes  les  misères  humaines.  "Mais  il  a  de- 
mandé il  IWsseniblée  quatre  séances  du  soir  pour  l'initier  ii 
sa  panacée.  Nous  rc;_'rrl|.Mi-  i|iii'l.'  nrlcuirnl  n'iiit  pas  per- 
mis d'accueillir  rcllr  |ini|Hi.ili(iii  :  h--.  |ih.il,iii-lrrirns  ilironl, 
qu'on  n'a  pas  \oiilii  li'M-nniln',  ri  .pi'il  nr,-l  |i,isrloiinaiit 
que  la  société  suit  tuujuuia  nialade.  lin  atk-iidaiit ,  il  y  a  en- 
core trente-six  orateurs  inscrits  pour  parler  sur  le  droit  au 
travail  ;  cela  prendra  plus  do  quatre  séances  et  ne  nous 
guérira  pas. 

Pour  ne  pas  intcrrpmpre  notrccompte-rendu  de  la  discus- 
sion delaConslituiion  ,  nous  avons  un  peu  interverti  l'ordre 
des  délibérations  de  rAssemblée.  Hausses  séances  des  deux 
derniers  jours  de  la  scncnnc  iIcîîih'vc.  dlci  l.ni  rclfu-he  ii 
son  rôle  de  constituanic  Niiniiciii  .  a  luiun  Mire  de  la 
séance,  M.  le  minislic  des  allaiics  cliaiiccics  est  venu 
annoncer  que  la  niédiallon  de  la  France  et  de  l'Angleterre 
élait  acceptée  par  l'Autriche  ,  comme  elle  l'avait  été 
déjii  par  la  Sardaigne.  Cette  nouvelle  a  élé  accueillie  avec 
une  vivcsatislactiiin.  Puisl  Assemblée  a  repris  la  discussion 
du  (Iccict  sur  la  limil.itiuii  ik'slieures  de  travail  ,  interrom- 
pue dc|iiiis  huit  jours  a  la  siiiledun  renvoi  au  comiié.  Par 
siiile  des  nouvelles  niodilications,  il  ne  s'agissait  plus  de 
I  abrogation  pure  et  simple  du  décret ,  mais  do  la  substitu- 
tion (l'un  système  de  limitation  plus  large  fixant  un  maxi- 
mum do  douze  heures  puni  la  '  '  ' 
dans  les  usinesetmannla.  im;  - 
des  jirincipes  ;  on  a  man  hc  ,i  I 
cerliludcs  ,  des  ruiihailirlhin~ 

CNlnclMcs      Crlh'    llN.dM.ll    a    d 

lrav;iil  a\.nl  Mulnul  p.airhni  ,| 
Immauics  ,  lllal^cll  \  irniilii..,..a 
s'apercevoir  que  daiisuiic  iiuilt 
nombre  infini  (rin(lii>li  ics  un  s 
do  ceux  mûmes  auxquels  on  a\  ait  voulu  venir  en  aide.  Dans 


industriel 

l.ill  ec.u  h 

.lulerram 

le  an  iiu 
iriiculle,- 

un  des  in- 
arsqiie  in- 

niresdo 
hcr  l'al.n 

a  durée  (\n 
des  forces 

eliH-aliiCf 
Il  a  aggr 

et  |iour  un 
ver  le  son 

beaucoup  d'ateliers  elfectivemenl  ,  soit  par  suite  d'usages 
locaux  ,soiten  vertu  de  conventions  librement  stipulées,  la 
somme  de  temps  exigée  des  ouvriers  est  loin  d'atteindre  le 
maximum  de  durée  fixé  par  le  nouveau  décret.  Pour  ces 
nombreuses  exceptions  on  a  maintenu  le  statu  quo.  Enfin  , 
après  deux  jours  de  confusion  ,  le  décret  a  été  voté  ,  et  la 
seconde  séance ,  celle  du  samedi ,  a  été  complétée  par  le  vote 
du  projet  qui  a  extrait  du  budget  de  1HI!I  toutes  les  contri- 
butions directes  pour  les  soumettre  il  un  vole  immédiat.  Le 
chiil're  total  de  ces  impôts  s'élève  à  tâO.nW.OLi  francs  Les 
conseils  généraux  et  les  conseils  d'arrondissement  vont  être 
appelés  à  eu  faire  la  répartition 

A  l'ouverture  de  la  séance  de  lundi  dernier,  l'Assemblée 
a  repoussé  une  proposition  de  son  comité  de  législation 
tendant  il  investir  les  tribunaux  ,  pendant  la  durée  de  l'étal 
de  siège  ,  du  droit  de  suspendre  les  journaux  par  jugement 
rendu  après  citation  il  comparaître  devant  lejury  dans  les 
quarante-huil  heures.  Un  certain  nombre  de  représentants 
voyaient  dans  la  défense  publique  une  garantie  pour  la 
presse ,  dans  la  citation  il  court  délai  une  garantie  pour  la 
sûreté  publique,  elenfin  dans  la  régularisation  d'une  faculté 
que  ne  confère  pas  la  législation  de  l'état  de  siège  ,  un  allé- 
gement pour  la  responsabilité  du  pouvoir  exécutif.  Celui-ci 
s'est ,  par  l'organe  de  M.  le  ministre  da  la  justice  ,  montré 
peu  désireux  d'être  dépossédé  du  droit  qu'il  s'est  arrogé  ,  et 
l'Assemblée  lui  a  laissé  celle  responsabilité  qui  ne  semblait 
pas  lui  paraître  lourde.  —Un  vole  de  question  préalable  a 
ensuite  écarté  définitivement  la  proposition  de  M.  Crespel 
de  La  Touche ,  qui  avait  été  le  point  de  départ  de  toute  cette 
discussion. 

La  diplomatie  continue  à  faire  des  vides  regrettables  sur 
les  bancs  de  la  Montagne  et  de  l'extrême  gauche.  Il  y  a 
deux  mois  ,  c'était  M.  Emmanuel  Arago  qui  partait  pour 
Berlin  ,  aujourd'hdi  c'est  M,  Pascal  Duprat  qui  part  pour 
l'Autriche,  La  lecture  de  la  lettre  par  laquelle  le  nouvel  am- 
bassadeur demandait  un  congé  ii  la  chambre  ,  en  lui  an- 
nonçant la  mission  dont  il  était  chargé  ,  a  été  suivie  d'une 
certaine  agitation. 

Pendant  que  les  puissances  médiatrices  se  disposent  à 
remplir  leur  mission  d'humanité  et  do  civilisation  ,  le  Pié- 
mont rétablit  son  armée  ,  ses  équipages  de  guerre ,  ses 
moyens  de  défense  ,  et  fournit  ainsi  une  nouvelle  force  aux 
arguments  que  l'Angleterre  et  la  France  auront  il  employer 
pour  amener  l'Autriche  ii  une  solution  équitable.  Mais  si 
l'on  est  autorisée  espérer  que  le  sang  ne  coulera  plus  de  ce 
côté  de  l'Italie  ,  on  a  il  déplorer  la  situation  deLivourne  et 
de  Messine. 

A  Livourne  une  insurrection  nouvelle  a  éclaté  dans  des 
proportions  alarmantes  il  l'occasion  de  la  fermeture  des 
clubs,  ou  plutôt  il  l'occasion  des  arrestations  faites  à  Flo- 
rence. Le  gouvernement  toscan  avait  fait  arrêter  les  insti- 
gateurs de" tous  les  troubles  qui  ont  éclaté  à  Florence  et  il 
Livourne.  Le  parti  de  ceux-ci  ,  se  voyant  réduit  ii  l'impuis- 
spuce  par  l'arrestation  de  ses  chefs,  a  voulu  tenter  un  der- 
nier efi'ort  décisif.  Le  3  au  matin  a  été  engagée  une  fusillade 
il  Livourne  qui  a  duré  deux  heures;  les  troupes  ont  perdu 
G.T  hommes,  et  lesinsurgésn  ont  eu  que  8  hommes  tués;  ils 
s'étaient  embusqués  dans  les  maisons  et  de  lii  tiraient  sur 
les  soldats,  qui  étaient  il  découvert.  Le  colonel  Cipriani ,  qui 
dans  toute  cette  affaire  a  déployé  courage  et  énergie ,  s'est 
vu  forcé  de  se  retirer  avec  ses  soldats,  au  nombre  de  1,200, 
dans  la  forteresse,  en  abandonnant  sur  la  place  les  canons 
dont  les  chevaux  avaient  été  tués.  Le  -4  au  matin  ,  600  hom- 
mes environ  de  la  garde  civique  de  Florence  sont  partis 
pour  Livourne  ;  le  grand-duc  les  a  passés  en  revue  ,  et  ils 
se  sont  mis  en  route  dans  les  meilleures  dis,!Ositions.  Mais 
que  pouvaient-ils  faire  dans  cette  guerre  de  rues  ,  où  les 
meilleures  troupes  n'avaient  pas  pu  tenir!  Aussi  les  nou- 
velles du  6  septembre  annoncent-elles  que  Livourne ,  gou- 
vernée par  des  autorités  populaires  et  par  un  général  nommé 
par  l'insurrection  ,  n'était  pas  encore  rentrée  sous  l'obéis- 
sance du  grand-duc  de  Toscane  ,  qui  réunissait  des  forces  à 
Pisc  pour  marcher  contre  Livourne.  La  garnison  de  cette 
dernière  ville  avait  évacué  les  forts,  faute  de  vivres,  et  fra- 
ternisait avec  le  peuple,  par  suite  d'une  convention  Peuple 
et  soldais  parcouraient  la  ville  en  criant  Vive  la  Ri'publi- 
que  française!  et  en  annonçant  l'intention  de  se  donner  a 
la  France.  Les  chambres  siègent  en  permanence  à  Florence 
depuis  le  départ  du  grand-duc  pour  Pise.  —  Le  colonel  Ci- 
priani avait  trouvé  moyen  de  se  réfugier  ii  bord  de  la  fré- 
gate française  il  vapeur  le  Vauban  ,  mouillée  en  rade. 

Le  roidoNaples  a  dirigé  une  expédition  nouvelle  contre 
la  Sicile  ;  et  Messine  est  criblée  de  boulets,  mais  non  réduite. 
Malgré  un  bombardement  acharné,  l'avantage,  suivant  les 
dernières  nouvelles,  serait  aux  Siciliens  contre  les  Napo- 
litains et  les  Suisses.  Mais  si  l'Angleterre  et  la  France,  re- 
présentées lii  malheureusement  par  des  forces  navalesinsuf- 
lisanles,  n'interviennent  pas  en  temps  utile  ,  quel  que  soit 
le  vainqueur  en  définitive  ,  le  ma.ssacrc  sera  alTreux. 

Nous  nous  arrêtons  ici  pour  aller  ii  notre  mairie  retirer 
notre  carte  d'élccleur.  (Hielesabonnés  parisiens  de  Vllhis- 
trution  ,  qui  ne  lieiiuenl  pas  il  ce  quo  MM.  Caliel  .  liasp.id  et 

Kersausieailleiils'asMMiirar.\-> Méea  cùledeM.M.  l'ierrc 

Leroux  cl  l'rundliun  ,  prenneni  le  nicnie  suin  el  .adupleiil  une 
mémeli>le.  M.\l, /.'uvc;  ,hi  \onl  c[  Arliillc  riruld  .  anciens 
députes,  M  hÀImmiil  Ail.ui, .  >  vicl.uie  l'eiiei  al  ,1e  la  l'ie- 
fecturo  delà  Seine  ,  re|ae-.enlanl  han-  iiu.inecMhlVeienlc.^ 
du  parti  de  l'ordre  ,  uni  cle  ,uIm|.Ii-.  eiunnie  ciiiduLil-  |i.ir 
un  nombre  considérable  de  garde»  n.ilionaux.  Nous  ii  irons 
pas  perdre  notre  voix  sur  d  autres  noms. 


■  iifliieiiFea. 

Quand  un  lioiiinie  e>t  parvenu,  l'on  ne  sait  comment  , 
il  >u  donner  une  imporUmce  ,  a  exercer  un  ascendant  dis- 
proportionnés avec  la  médiucrile  de  son  niérile  uu  de  sa  po- 
sition connus,  l'on  dit  iju  il  est  in/7iii'ii( ,  qu  il  a  de  l'in- 
fîuence.  Les  mois  intrigant ,  intrigue  seraient  trop  crus. 


Comme  bien  des  gens  se  résolvent  par  intérêt  à  certaines 
platitudes,  à  la  condition  de  garder  les  dehors  de  la  dignité 
el  de  laisser  l'amour-propre  en  repos  ,  ils  avouent  les  ser- 
vices dus  il  Vinftuence  d'un  personnage  ,  mais  ils  recule- 
raient devant  I  idée  exprimée  par  le  mot  protection.  Le 
prolecteiir  avait  déjà  remplace  le  bienfaiteur  ;  la  faveur 
était  devenue  un  service  maintenant  on  n'est  même  plus 
l'obligé  de  la  générosité  d'aulrui  ;  l'on  a  des  influences  à  sa 
disposition. 

Voiliidonc  une  expression  commode  pour  tout  le  monde  . 
et  fort  propre  ii  déguiser  le  côté  graveleux  des  menues  in- 
dustries d'antichambre. 

Il  est  rare  que  les  mois  fassent  défaut  aux  idées  ou  aux 
faits:  sous  le  dernier  règne  les  influences  gouvernaient 
despotiquement  toutes  les  branches  de  l'adminislralion  : 
faveurs,  emplois,  pensions,  adjudications  .  commandes  . 
rémunérations  ,  tout  était  il  la  merci  des  influences. 

L'homme  a  induences  est  le  courtier  marron  des  faveurs 
du  pouvoir,  assimilées  à  une  marchandise.  Une  telle  profes- 
sion suppose  trois  genres  de  coquins  ,  le  vendeur,  l'entre- 
metteur et  le  consommateur. 

Ce  dernier  est  le  plus  innocent ,  car  le  plus  souvent  il 
ignore  que  l'on  a  vendu  ce  qu'il  n'a. pas  payé. 

L'abus  des  influences  implique  la  corrupl.on  et  la  ré.gu- 
larise  ;  il  a  discrédité  l'ancienne  chambre  des  députés  qui 
a»ait  fini  par  constituer  le  règne  occulte  des  influences  per- 
sonnelles ,  par  désorganiser  les  administrations  el  par  pla- 
cer les  ministres  et  les  représentants  dans  des  conditions 
de  dépendance  mutuelle. 

Dès  son  avènement ,  la  République  a  pris  .  contre  le  re- 
tour des  influences ,  des  mesures  insuffisantes  encore ,  mais 
qui  procèdent  d'une  bonne  intention.  Il  n'existe  contre  ce 
principe  dissolvant .  d'autres  garanties  que  le  palrioiisme  et 
la  moralité.  Ces  réformes  de  la  conscience  une  fois  réalisées, 
l'intervention  des  représentantsdu  pays  dans  la  répartition 
des  emplois  peut  devenir  salutaire.  Us  connaissent  les  can- 
didats nés  dans  les  départements  dont  ils  seul  les  manda- 
taires ,  et  peuvent  éclairer  le  choix  des  ministres  exposés  a 
nommer  des  fonctionnairesqui  leur  sont  inconnus. 

L'intervention  du  représentant  en  faveur  des  candidats 
absents,  dignes  d'être  écoulés  el  liorsd'ètal  de  soutenir  eux- 
mêmes  leur  prétention  ,  servirait  aussi  a  neutraliser  l'in- 
fluence trop  immédiate  des  concurrents  qni  résident  au 
centre  du  gouvernement ,  et  il  empêcher  que  l'administra- 
tion provinciale  ne  devint  l'objet  de  l'exclusive  exploitation 
des  Parisiens.  Centralisation  injuste  et  qui  ferait  affluer 
dans  la  capitale  tous  les  intrigants,  tous  les  solliciteurs  de 
la  République  française. 

Pour  que  l'Etat  soit  éipiitablenient  administre  ,  il  faut 
que  les  absents  n'aient  jamais  lorl ,  et  que  tous  les  droits 
étant  représentés,  il  n'y  ait  pas  d'absente  parmi  les  citoyens 
dispersés  sur  le  territoire  de  la  patrie. 

L'important  estde  commencer  paranéantir  l'influence  des 
influences,  et  par  rogner  les  grifîesà  l'inlérèt  individuel.  La 
suppression  du  cens  électoral,  l'accroissement  du  nombre 
des  députés  étaient  les  hases  indispensables  de  cette  ré- 
forme ;  il  ne  reste  à  effacer  que  de  vieilles  habitudes,  et  l'on 
doit  y  parvenir  maintenant  que  le  sort  d'un  ministère  ne  ' 
saurait  plusdépendrede  laconcession  d'un  bureaude  tabac. 

Pau|iërisnie. 

Le  paupérisme,  c'est  l'étatde  la  classe  indigente  considéré 
théoriquement,  dans  son  ensemble  Difficile  a  définir,  ce 
terme  ,  jeune  encore  ,  a  subi  une  foule  d'inlcrprélations ,  au 
milieu  desquelles  le  sens  véritable  reste  indécis.  Poursurve- 
nir  avec  opportunité,  un  motdoit  être  indispensable  :  quand 
on  dit  :  Le  paupérisme  est  une  des  plaies  d'un  pays  ,  il  est 
aisé  de  reconnaître  qu'on  aurait  usé  tout  aussi  bien  dessub- 
stanlifs  misère  ,  pauvreté.  Ici ,  p:upérisme  signifie  donc  la 
pauvreté  collective  et  désigne  la  classe  des  nécessiteux. 

Néanmoins,  bien  que  le  mot  paupérisme  semble  compor- 
ter un  sens  plus  général ,  toutefois  ,  la  nuance  n'est  pas 
nettement  tranchée  .  et .  tout  en  essayant  de  définir,  nous 
nous  sentons  heurté  il  l'écueil  des  définitions. 

Il  paraît  assez  naturel  que  des  économisl^'s  plus  ou  moins 
difl'us ,  plus  ou  moins  creux  dans  la  profondeur  de  leurs 
systèmes  ,  se  soient  dans  la  crainte  de  présenter  leurs 
doctrines  sous  le  titre  de  pauvreté ,  propre  a  fournir,  dans 
une  équivoque  ,  un  résumé  critique  assez  brutal ,  se  soienl , 
dis-je  ,  avisés  de  forger  le  mot  paupérisme  ,  pour  dénom 
mer  la  théorie  de  la  pauvrelo. 

Quoi  qu'il  en  soit  ,  nous  n'aurons  pas  il  nous  inquiéter 
du  paupérisme  de  ces  melapliysiciens  ;  l'ulililc  pratique  de 
leurs  doctrines  est  siiflisaïunienl  justifiée;  le  paupérisme  fail 
très  bien  vivre  ceux  (pii  en  parient. 

Lorsque  je  considèro  la  nature  et  la  portée  de  la  plupsirt 
de  ces  travaux  dont  le  but  officiel  csl  l'extinction  de  l'indi- 
gence ,  il  me  souvient  de  mon  ami  le  louvolier,  qui  proté- 
geait les  louves,  afin  de  conserver  la  philanthropique  in- 
stitution de  la  louveterie. 

En  effet ,  les  louveliers  de  la  faim  sont  bien  moins  occu- 
pés dus  inslitutions  propres  il  prévenir  le  paupérisme  ,  que 
(le>  p.iuMcs  tout  faits,  tout  préparés  à  être  alignés  dans 
les  iuHiiiis.sinls  calculs  de  la  jitalistique.  Ce  sont  ceux-ci 
qu  ils  distribuent  sur  le  vaste  échiquier  de  leur  imagina- 
tion; leur  efi'ort  .se  borne  il  lesempêcher  de  mourir  d'épui- 
sement sous  la  main  de  l'opérateur;  leurs  doctrines  se 
réduisent  a  diverses  façons  d  organiser  la  répartition  quo- 
tidienne de  l'aumône.  Le  problème  serait-il  donc  do  conser- 
ver dos  sujets  pour  sauver  la  luuvelerie? 

Il  n'esl  aucun  de  ces  messieurs  qui  n'ait  cenl  fois  im- 
prime celle  proposition  :  —  Le  paupérisme  est  la  plaie  de 
l'Anglelerre. 

Quand  la  misère  est  le  partage  de  pre^^que  tout  ce  qui 
consliluc  le  corps  social ,  quand  quelques  individus  privilé- 
giés absorbent  liiiile  la  ,seve  de  l'Elal .  la  plaie  ,  si  je  ne  me 
trompe  ,  c'e.-t  l'oxuloire  cpii  ronge  el  non  le  corps  débilité  de 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


85 


la  nation.  Du  toute  évidence,  il  faut  chercher  la  plaie  de 
l'Angleterre  dans  la  cause  du  paupérisme ,  non  dans  le 
paupérisme  même.  La  maladie  de  la  Grande-Bretagne,  c'est 
une  aristocratie  dévorante  qui  monopolise  la  propriété  et 
absorbe  le  capital. 

Le  paupérisme  n'est  la  plaie  d'aucun  Etat;  mais  l'orga- 
nisation de  toules  les  sociétés  contient  certains  vices  qui  en- 
gendrent la  misère. 

L'extinction  complète  de  la  pauvreté  nécessiterait  des 
institutions  d'une  perfection  absolue  :  il  n'est  pas  donné  à 
l'homme  d'en  établir  de  semblables  .Le  seul  but  que  des  lé- 
gislateurs puissent  se  proposer  raisonnablement,  c'est  de 
satisfaire  aux  intérêts  du  plus  grand  nombre,  et  d'opérer 
une  diminution  progressive  sur  le  chitl're  des  nécessiteux. 

La  principale  source  du  paupérisme  en  France,  c'est  l'a- 
bus de  l'industrie,  développée  outre  mesure  aux  dépens  des 
travaux  agricoles  La  terre  nourrit  toujours  ceux  qui  la  tra- 
vaillent; elle  est  un  fonds  qui  reste  entre  leurs  mains:  l'in- 
dustrie, exploitée  au  profit  du  capital,  est  sujetie  à  des 
revirements  de  diverse  nature  qui  laissent,  du  jour  au  len- 
demain, des  légions  d'ouvriers  sans  pain. 

Durant  ces  sortes  de  crises ,  le  maître  est  assez  riche  pour 
attendre  ;  la  vie  du  manœuvre  n'est  nullement  garantie. 
Dans  certaines  manulactures  établies  en  rase  campagne  , 
lelles  que,  par  exemple,  les  usines  d'exploitation  de  la 
fonte  de  fer  ,  l'ouvrier  est  logé  :  au  pied  de  sa  chaumière , 
il  cultive  un  petit  jardin  qui  l'aide  à  vivre  :  de  sorte  que , 
si  le  prix  des  fers  vient  à  baisser  au  point  de  commander  la 
réduction  des  salaires  ou  la  fériation  de  la  forge,  l'artisan 
conserve  un  asile,  avec  la  moitié  de  sa  nourriture  :  avan- 
tages qui  l'ont  auparavant  mis  à  même  d'économiser  assez 
d'argent  pour  se  procurer  l'autre  moitié. 

Telles  sont  les  bonnes  et  saines  industries  ,  celles  qui,  ti- 
rant de  la  nature  même  du  sol  leur  chance  de  bénéfice, 
permettent  à  leurs  exploitants  de  concédera  l'ouvrier  un 
modeste  usufruit 

De  pareils  avantages  sont  refusés  à  la  fausse  industrie, 
qui  spécule  sur  la  concurrence,  qui  économise  forcément 
sur  tout  le  matériel  des  dépenses,  qui  entasse  dans  les  villes 
une  population  famélique,  et  affame  trois  cents  hommes 
pour  gorger  d'or  un  spéculateur  sans  entrailles. 

Toute  industrie  qui  coûte  à  l'État  sa  sécurité,  aux  arti- 
sans le  bien-être,  la  moralité,  la  santé  et  le  bojiheur  revient 
à  un  trop  haut  prix  à  la  société. 

Le  système  de  la  libre  concurrence  a  créé  beaucoup  d'in- 
digents. Quand  une  compagnie  fait  travailler  ,  avec  l'inten- 
tion de  livrer  a  perte,  dans  le  but  honnête  de  ruiner  ses 
rivaux  ,  elle  a  bien  soin  de  payer  le  moins  possible,  afin  de 
ménager  ses  ressources.  Les  employés  de  cette  compagnie 
pâtissent ,  ceux  des  entreprises  rivales  subissent  la  baisse 
d'abord  ,  puis  la  ruine.  Enfin  ,  quand  le  diflérend  est  vidé, 
il  est  rare  que  l'objet  de  l'exploitation  remonte  à  son  pre- 
mier taux. 

Lors(|u  une  industrie  utile  de  sa  nature  fait  augmenter  le 
paupérisme,  c'est  un  signe  infaillible  qu'elle  est  placée  sur 
un  terrain  qui  no  lui  convient  pas,  et  qu'il  la  faut  remettre 
dans  des  conditions  normales  de  gestion  ou  de  localité. 

Cet  écueil  est  celui  de  la  plupart  des  fortes  exploitations 
industrielles  situées  dans  les  grands  centres  de  populations. 
Autant  que  faire  se  peut,  les  manufactures  devraient  être 
établies  aux  lieux  mêmes  d'où  elles  tirent  la  matière  pre- 
mière que  leurs  travaux  mettent  en  œuvre.  Les  villes  ,  en 
général ,  ne  produisent  rien  ,  hormis  des  consommateurs. 

Ce  ne  sont  point  les  salles  d'asile,  ni  les  dépôts  de  men- 
dicité, ni  les  sociétés  philanthropiques  qui  réussiront  à  ré- 
duire le  paupérisme  :  le  nourrir,  ce  n'est  pas  le  diminuer  ; 
bien  au  contraire,  ce  genre  de  palliatif  enfante  de  nouveaux 
indigents.  Que  dans  une  année  de  disette  la  charité  publi- 
que se  saigne  à  blanc  pour  faire  vivre  ceux  qui  n'ont  rien, 
un  parti  pris  général  d'économie  servira  forcément  ensuite 
à  compenser  ces  impôts  volontaires;  chacun  réduira  ses  dé- 
penses et  bornera  son  luxe  :  le  commerce  perdant  ses  cha- 
lands, n'écoulant  plus  les  produits  de  l'industrie,  suspendra 
les  commandes;  et  les  ateliers  ,  contraints  de  diminuer  le 
nombre  de  leurs  ouvriers,  en  mettront  h  moitié  dans  la  rue. 

Depuis  cinquante  ans,  le  paupérisme  a  diminué  de  pro- 
portion dans  les  campagnes  et  même  dans  les  villes.  C'est 
dans  les  contrés  manufacturières  qu'il  est  le  plus  abondam- 
ment répandu.  L'une  des  villes  où  l'on  manie  le  plus  d'or 
et  de  richesse,  Lyon,  est  la  cité  qui  contient  le  plus  de  mal- 
heureux. Paris  voit  la  misère  s'accroître  avec  l'industria- 
lisme; sa  famélique  et  remuante  population  faubourienne, 
accrue  par  la  stupide  imprévoyance  du  gouvernement  de 
juillet ,  tient  le  crédit  public  en  échec  et  rend  la  France  in- 
gouvernable. 

La  question  du  paupérisme  est  liée  à  la  répartition,  à  la 
distribution  proportionnelle  et  intelligente  des  diverses  in- 
dustries à  travers  le  territoire  français.  Tout  reste  a  faire  à 
cet  égard. 

Les  principaux  moyens  d'atteindre  le  paupérisme,  sont  : 
l'éducation  morale;  car  parmi  les  indigents,  il  en  est  qui  re- 
fusent de  travailler  ou  qui  gaspillent  lesfruits  du  travail  ;  la 
répression  des  excès  du  système  de  libre  concurrence  qui 
organise  contre  les  consommateurs  la  sophistication  et  la 
fraude,  contre  la  classe  des  producteurs  ,  la  banqueroute  et 
la  ruine,  et  contre  l'ouvrier  ,  l'indigence. 

On  diminuera  en  outre  le  nombre  des  pauvres  parla  suf- 
fisante élévation,  par  la  fixité  des  salaires;  et  en  rendant 
plus  stable  la  posilion  de  l'ouvrier  que  les  industries  em- 
ploient au  jour  le  jour.  Mais  ce  genre  de  réforme  est  inap- 
plicable sous  le  régime  de  la  concurrence  acharnée. 

Les  coalitions  de  capitaux ,  ou  plutôt  de  riches  capita- 
listes ,  dans  le  but  de  monopoliser  les  exploitations,  ce  que 
Fourier  nomme  la  féodalité  industrielle ,  sont  encore  une 
cause  de  paupérisme.  11  est  évident  que  si  quatre  hommes 
mettent  en  commun  deux  millions  dans  l'espoir  d'en  gagner 
dix,  ils  n'y  réussiront  qu'à  la  condition  de  dévorer  l'exi- 
stence de  soixante  personnes.  Savoir  se  borner  à  une  hon- 


nête aisance  est  une  vertu  morale  dont  l'éducation  doit  en- 
seigner la  pratique. 

Ne  serail-il  pas  convenable  aussi  de  rendre  les  apprentis- 
sages gratuits?  leur  prix  souvent  onéreux  en  éloigne  nom- 
bre de  pauvre  diables  qui  demeurent  sans  ressources  faute 
de  savoir  un  état  ;  ce  sont  les  ouvriers  inhabiles  qui  recru- 
tent le  paupérisme. 

Pour  ce  qui  e^t  des  gens  infirmes ,  incapables  de  gagner 
leur  vie,  des  asiles  leur  seront  ouverts;  ils  ne  coûteraient 
pas  à  l'Etat  la  moitié  de  ce  que  l'on  dépense  pour  entrete- 
nir les  indigents  propres  au  travail 

Une  simple  observation  prouve  que  la  société  possède  les 
moyens  de  diminuer  le  paupérisme  :  on  a  remarqué  que 
plus  une  localité  est  riche,  plus  elle  contient  de  néces- 
siteux. 

Parnn  les  causes  directes  du  paupérisme,  signalons  l'ac- 
croissement rapidede  la  population  :  les  colonisations  agri- 
coles offrent  un  moyen  d'utiliser  ces  forces  surabondantes, 
et  de  maintenir  l'équilibre  entre  les  ressources  du  terri- 
toire et  le  nombre  de  ses  habitants. 

L'épuisementdu  crédit  public  est  l'un  dos  agents  les  plus 
funestes  du  paupérisme  :  aussi,  sous  les  gouvernements  fai- 
bles et  romnattus,  cet  élément  dissolvant  se  renforce-t-il 
d'une  cohue  d'indigents  volontaires  .  plus  alléchés  de  pil- 
lage et  d'anarchie,  que  de  travail.  La  pression  qu'ils  exer- 
cent sur  la  société  exagère  encore  et  prolonge  le  discrédit, 
cause  universelle  de  misère  et  de  famine.  Il  arrive  alors  que 
le  paupérisme  est  l'œuvre  des  indigents,  qui  pratiquent, 
sur  une  grande  échelle,  un  genre  de  vol  dont  ils  ne  profite- 
ront pas.  Il  paraît  alors  impossible  de  sortir  de  ce  cercle 
vicieux  autour  duquel  les  utopistes,  les  louvetiers  du  pau- 
périsme se  mettent  à  faire  le  manège,  à  califourchon  sur  la 
phrase,  avec  beaucoup  d'agrément. 

Dans  de  telles  conjonctures,  qu'un  gouvernement  montre 
de  l'unité,  de  la  force  et  qu'il  soit  bien  appuyé,  ce  phéno- 
mène antisocial  disparait  soudain  ;  le  crédit  comprimé  cir- 
cule tout  à  coup  avec  une  activité  brûlante ,  et  entraîne 
après  lui,  pour  un  temps,  les  misères  de  ce  paupérisme  qui 
semblait  pénétrer  par  d'inextricables  raeinesjusqu'aux  en- 
ti-aillesde  la  société. 

FoANcrs  Wey. 


C!ourrier  de  Paris. 

Ne  croyons  plus  aux  augures,  surtout  lorsqu'ils  voient 
tout  en  noir.  S'il  vous  souvient  des  prédictions  de  notre 
printemps,  il  était  bien  loin  d'annoncer  l'été  dont  nous 
jouissons.  Dans  les  clubs,  dans  les  salons  ,  et  même  dans 
ies  Courriers  de  Paris,  il  se  disait  que  l'été  ne  serait  pas  la 
belle  saison,  et  qu'il  faudrait  fuir  Paris  comme  la  ville  d'ex- 
piation. Paris  ne  devait  pas  sortir  du  cercle  fatal  tracé  par 
l'émeute,  la  famine  et  le  choléra.  Enfants  d'une  race  mau- 
dite. Parias  de  la  civilisation,  riches  de  la  veille  et  pauvres 
du  lendemain,  nous  étions  tous  dévoués  aux  jjlus  horribles 
fléaux,  et  même  l'horoscope  était  si  lamentable  que  c'est  à 
peine  s'il  nous  laissait  notre  tête  sur  nos  épaules  et  nos  deux 
yeux  pour  pleurer  tant  de  malheurs.  Les  alarmistes  avaient 
beau  jeu  ,  et  pourtant  ils  auront  perdu  la  partie  ;  jamais 
belle  saison  ne  fut  si  bien  nommée  et  ne  varia  davantage 
.sesdistractions.  Pour  ne  parler  que  de  la  présente  semaine, 
la  carte  de  ses  aventures  est  passablement  longue,  elle  a 
même  ajouté  plusieurs  hors-d'œuvre  à  son  menu  ;  c'est  un 
peu  l'été  qui  empiète  sur  les  domaines  de  l'hiver,  car  enfin 
voici  des  bals ,  ou  tout  au  moins  des  réunions  nocturnes 
avec  accompagnement  de  violons ,  de  tables  de  whist  et  de 
causeries  politiques. 

Dans  tous  les  temps  et  sous  tous  les  régimes,  Parisa  voulu 
des  fêtes,  il  en  a  voulu  naturellement  aux  jours  d'abon- 
dance, et  aux  époques  de  crise  pour  en  atténuer  la  rigueur. 
Ses  édiles  l'ont  compris  et  ils  se  sont  engagés  à  verser  ainsi 
leur  épargne  dans  la  bourse  du  pauvre.  Les  riches  et  les 
heureux  de  ce  monde  se  préparent  à  les  imiter  C'est  pour- 
quoi nous  avons  un  commencement  d'hiver  avant  les  ven- 
danges. A  quoi  servent  les  fêtes,  disaitMalthus,  qui,  parla 
même  occasion  ,  demandait  ;  A  quoi  bon  la  population' 
Mais  cela  sert,  ô grand  philosophe,  à  nourrir  cette  popula- 
tion. D'ailleurs  nous  savons  tousass^z  d'histoire  pour  avoir 
appris  que  les  choses  se  sont  passées  ainsi  dans  les  empires 
et  les  républiques ,  à  leurs  moments  précisément  les  plus 
agités.  Les  anciens  républicains  de  Rome  avaient  le  cirque, 
cette  fête  de  la  grasse  matinée  romaine  ,  et  le  bain  ,  cette 
fête  de  toutes  les  nuits;  les  Arabes  ont  la  liberlé  du  désert , 
cette  fête  de  tous  les  instant;  laissez  donc  au  parisien  la 
fête  des  grandes  foules,  des  réunions  à  grand  orchestre,  des 
toilettes  brillantes  qui  alimentent  la  circulation  etviviiient 
le  commerce.  Voilà  pourquoi  on  s'est  réuni  cette  semaine 
chez  le  présidentde  la  Chambre,  en  attendant  la  soirée  du 
chef  du  pouvoir,  et  les  démonstrations  dansantes  des  au- 
tres autorités.  Rien  de  plus  contagieux  que  l'exemple,  et 
la  finance  va  se  mettre  de  la  partie.  On  parle  d'un  bal  pro- 
chain ,  avec  intermède  de  loterie  bienfaisante,  dans  la  de- 
meure du  roi  des  banquiers,  et  Salomon  va  rouvrir  son 
temple. 

Quant  au  temple  ou  hôtel  de  la  Présidence,  quelque  vastes 
que  soient  ses  salons,  construits  dans  des  proportions  mo- 
narchiques, nousavonséprouvé  qu'ils  ne  pouvaient  contenir 
tous  les  fidèles.  «  On  trouve  cette  demeure  trop  petite  di- 
sait un  assistant ,  mais  plaise  à  Dieu  qu'elle  soit  pleine  des 
vrais  amis  de  la  République.  •  Vainement  des  mécontents 
ont-ils  prétendu  que  les  salons  de  la  Présidence ,  alors  que 
sonne  l'heure  brillante  des  réceptions ,  ne  sont  pas  autre 
chose  que  la  salle  des  Conférences  illuminée  aux  bougies,  et 
qu'on  y  retrouve  les  politiques  de  couloir  sous  une  autre 
enveloppe.  Qui  donc  s  avisera  jamais,  au  contraire,  de  re- 
connaîlro  les  tribuns  du  iriatin  au  visage  et  aux  principes  au- 
stères dans  ces  représentants  d'unegalanterio  si  sémillante. 


comme  si  nos  papillons  législatifs  pouvaient  d'ailleurs  con- 
tinuer les  altercations  de  la  tribune  sous  le  feu  croisé  des 
dramants,  des  beaux  yeux  et  des  cavatines?  Cependant 
nous  devons  dénoncer  l'entêtement  de  trois  de  ces  Lycur- 
gues,  MM.  A,  B,  C.  Insensibles  au  char-me  de  cotte  hospita- 
lité conciliatrice  ,  ils  discutaient  à  outrance  le  préambule 
de  la  constitution.  Enire  autres  objections  mémorables  : 
«  Pourquoi,  proclamer  disait  l'un  ,  ipre  la  Con.stitution  est 
faite  en  présence  de  Dieu  ,  c'est  une  formule  digne  de  La 
Palisse.  —  Je  proposerais,  ajoutait  un  autre ,  de  dire  :  avec 
l'aide  de  Dieu  —  Dites  plutôt,  cria  le  troisième,  qu'elle  est 
faite  à  la  grûce  de  Dieu.  » 

Puisque  rrous  en  sommes  toujours  au  grand  chapitre  des 
fêtes,  dimanche  a  vu  une  réunion  encore  plus  fréquentée 
et  à  tel  point  que  la  solitude  s'est  faite  tout  à  coup  dans 
la  ville.  La  population  émigrait  à  Saint-Cloud  ;  on  s'est 
réuni  sur  la  route  du  bois  de  Boulogne,  où  l'on  marchait 
par  caravanes,  et  aux  embarcadères  des  chemins  de  fer, 
qui  secondent  volontier's  tous  ces  transports.  Ou  s'est  réuni 
enfin  dans  ces  parcs  jadis  réservés  et  dans  ce  château  ci- 
devant  royal,  théâtre  de  tantd'évènementsctdont  nos  Pari- 
siens ne  connaissaient  guère  que  la  façade.  En  même  temps, 
M.  Green  exécutait  sa  trentième  ascension  en  ballon  ;  l'in- 
trépide aéronaute  avait  annoncé  un  voyage  de  long  cours, 
il  allait  visiter  les  astres  ou  tout  au  moins  la  Belgique;  tou- 
tes les  lunettes  étaient  braquées,  les  yeux  s'écarquillaient. 
les  esprits  étaient  en  suspens;  parlez-moi  des  aéronautes 
pour  mettre  une  foule  en  l'air,  et  puis  au  bout  de  sa  course 
aérienne,  qu'aucun  soulfie  ennemi  n'a  troublée,  M.  Green 
esir  descendu  à  la  barrière  de  Clichy.  Ce  n'est  pas  précisé- 
iiient  aller  aux  nues,  el  l'on  a  trouvé  généralement  que 
c'était  prendre  un  bien  long  chemin  pour  ne  pas  sortir  de 
l'enceinte  continue. 

Mais  voici  bien  un  autre  ballon  dégonilé ,  la  planète  Le- 
verrier  n'existe  plus.  C'est  encore  une  étoile  qui  file,  et  un 
astronome  qui  se  laisse  choir  dans  son  puils.  L  imagination 
n'égare  pas  seulement  les  poètes,  darrs  l'occasion  elle  joue 
de  bien  mauvais  tours  aux  savants.  Ce  fameux  Neptune, 
rival  de  Jupiter  et  de  Vénus ,  que  les  calculs  de  l'algé-^ 
briste  avaient  arraché  aux  profondeurs  du  ciel,  et  qrr'un 
télescope  ami  avait  entrevu  dans  les  espaces  invisibles,  le 
voilà  réduit  à  l'état  de  chimère  et  d'illusion.  La  roche 
Tarpéienne  était  bien  près  du  Opitole,  et  l'Observatoire 
est  un  Olympe  d'où  les  Titans  de  l'astronomie  tombent 
foudroyés.  Quoi!  tant  de  travaux  et  d'efforts,  une  armée 
(le  chiffres  si  formidable  ,  tant  de  colonnes  déployées  pour 
escalader  le  ciel,  Pélion  entassé  sur  Ossa,  peine  inutile, 
autant  en  emporte  le  vent.  L'architecte  des  rriondes.  a  dit 
Horace,  couvre  ses  secrets  d'une  profonde  nuit ,  et  voila 
M.  Leverrier  sorti  d'un  beau  rêve,  il  était  parti  pour  les 
astres  comme  M.  Green,  et  il  ne  descend  même  pas  à  la 
barrière  de  Clichy.  C'est  à  dégoûter  des  voyages  et  des  dé- 
couvertes. Ceux  qui  ne  voient  pas  facilement  les  étoiles  en 
plein  midi,  avaient  fait  (on  s'en  souvient)  toutes  sortesd'ob- 
jections  :  Prenez  garde,  monsieur  le  calculateur,  la  science 
parfois  n'y  voit  goutte,  et  la  base  des  mathématiques  n'est 
pas  plus  solide  qu'une  autre.  —  Ouais!  vous  niez  donc  Ga- 
lilée et  pr-étendez  faire  le  pi-ocès  à  Newton  ,  —  passe  pour 
une  étoile  filante,  mais  un  monde,  allons,  soyez  raison- 
nable on  vous  accorde  une  demi-lune;  —  et  le  savant  de 
répliquer  comme  Jodelet  :  C'est  parbleu  bien  une  lune  tout 
entièr'e! 

Si  l'Observatoire  se  dépeuple,  la  Ménagerie  s'enrichit. 
Voici  une  vignette  qui  vous  l'atteste  :  elle  vous  représente 
le  chimpanzé  ou  jocko  récemmentarrivéau  Jardin-des-Plan- 
tes.  Cejocko  s'appelle  Jack  en  souvenir  de  Jacqueline,  qu'il 
remplace  dans  la  mémoire  des  professeurs  du  Muséum  et 
dans  leur  collection.  Jack  est  un  enfant  du  Sénégal,  son 
âge,  dix  mois;  sa  taille,  dix-huit  pouces;  il  est  visible  dans 
la  rotonde  de  l'éléphant,  un  gardien  spécial  veille  sur  lui. 
On  le  traite  en  grand  per-sonnage,  on  le  comble  d'égards, 
on  l'environne  de  soins  et  on  le  nourrit  de  friandises.  Ce 
n'est  pas  que  Jack  appartienne  à  une  grande  race  et  qu'il 
corrrpte  des  a'reux  authentiques,  contemporains  de  la  Croi- 
sade ou  tués  à  la  bataille  de  Nicopolis  ,  Jack  recueille  tout 
simplement  les  bénéfices  de  son  humeur  fâcheuse.  Jack  goûte 
peu  nosdogmessaci-amentrds  :  égalité,  fraternité,  tranchons 
le  mot,  c'est  un  mauvais  coucheur.  On  l'avait  établi  au  pa- 
lais des  singes,  et  ceux-ci  fêtaient  sa  venue  par  nrille gam- 
bades, mais  Jack  ne  répondit  à  ces  démonstrations  aflèc- 
tueuses  que  par  des  grincements  de  dents  et  des  regards 
effarés.  L'isolement  lui  a  profité,  et  sa  fureur  n'est  plus 
maintenant  que  de  la  mélancolie.  Il  marque  d'ailleurs  quel- 
que sympathie  pour  notre  espèce,  et  il  a  pr-is  son  gardien 
en  véritable  affection.  A  voir  cette  sombre  tristesse,  on 
avait  craint  d'abord  pour  les  jours  de  Jack,  et  que  la 
Ménagerie  no  fût  affligée  d'un  suicide  ,  les  rêveurs  de  son 
espèce  étant  fort  enclins  à  se  laisser  mourir  d'inanition  ; 
heureusement  l'appétit  de  Jack  a  rassuré  tout  le  monde,  il 
mange,  il  dévore  même  les  aliments  qui  forrt  les  délices  de 
notre  espèce  ,  et  si  l'on  pouvait  dire  d  un  singe  qu'il  est  sur 
sa  bouche,  nous  le  dirions  volontiers.  Jack  n'aime  pas  seu- 
lement les  bonnes  choses  et  les  mets  succulents,  il  est  co- 
quet et  soigné  dans  sa  personne  ;  des  mains  pudiques  l'ont 
affublé  d'mie  culotte  rie  matelot  rayée  de  rose  et  de  blanc 
dont  il  paraît  humilié  II  est  évident  qu'il  rêve  une  autre 
défroque.  Cependant  on  lui  a  fait  un  bournous  pour  les 
grandes  occasions,  attention  délicate  qui  lui  rappelle  l'Afri- 
que; mais  le  principal  ornement  de  Jack,  ce  sont  les  ba- 
gues qu'il  a  rapportées  du  pays  natal,  il  ne  s'en  dessaisit 
qu'avec  répugnance,  et  il  en  est  une  qu'il  ne  lâche  qu'à  la 
dernière  extrémité.  —  C'est  son  anneau  de  fiançailles .  nous 
disait  son  gardien  ,  et  certainement  il  aura  été  marié  dans 
son  pays.  Buffon  a  fait  de  l'orang-outang  ou  jocko  un  por- 
trait flatteur  auquel  nous  vous  renvoyons,  vous  y  lirez  cou- 
ramment l'avenir  de  Jack  et  les  talents  qu'il  ne  saurait 
manquer  d'avoir  lorsque  son  éducation  sera  terminée.  Tout 
ce  que  nous  jiouvonsdire  aujourd'hui  de  ce  jeune  singe. 


oG 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


c'est  qu'il  donne  les  plus  brillanles 
espérances. 

Un  monde  s'évapore  enfumée,  un 
singe  arrive,  une  élection  académi- 
que se  prépare  ,  ces  grandes  nou- 
velles ne  surprennent  plus  personne. 
On  dit  MM.  les  académiciens  fort 
soucieux  dans  le  temps  de  crise  où 
nous  vivons,  non  pas  sur  l'article 
(le  leur  immortalité ,  il  n'y  a  pas 
lieu  de  s'inquiéter  de  si  peu  de 
chose;  ce  qui  cause  le  souci  de  nos 
trente-neuf,  c'est  la  nécessité  dose 
compléter  Quelques-uns  ont  ouvert 
l'avis  de   remplacer  leur  Turenne 

f)ar  quatre  marécliaux  littéraires, 
esquels  ne  .seraient  admis  réelle- 
ment qu'au  fur  et  mesure  des  ex- 
tinctions; mais  ce  coup  do  canif 
porté  au  règlement  n'a  pas  eu  l'as- 
sentiment de  la  majorité  :  c'était 
sans  doute  se  ménager  des  allian- 
ces et  des  protections  individuelles 
parmi  les  puissants  du  jour],  mais 
l'influence  de  l'Académie  comme 
corps  s'en  filt  ressentie  dans  l'ave- 
nir, M.  de  Chateaubriand  n'aura 
donc  qu'un  successeur ,  c'est  bien 
assez  hardi  comme  cola 

Mademoiselle  Racliel  est  rentrée 
au  Théâtre-Français;  et  après  l'o- 
vation anticipée  que  nous  lui  décer- 
nâmes samedi  dans  ces  colonnes, 
vous  vous  attendez  ii  de  nouvelles 
fanfares  Cependant  il  ne  faut  dé- 
guiser la  vérité  il  personne,  pas 
même  aux  reines  tragiques,  et  notre 
complaisance  de  chroniqueur  béné- 
vole ne  saurait  aller  jusqu'à  applau- 
dir la  grande  tragédienne  alors  que 
ses  forces  la  trahissent  et  que  son 
génie  l'abandonne.  Phèdre  s  est  vue 
couronnée,  glorifiée  ,  encensée,  et 
c'était  justice  si  les  admirateurs  en- 
tendaienlacquitter  une  vieille  dette 
et  glorifier  ce  talent  consommédont 
l'avenir  nous  promet  encore  de  si 
rares  jouissances.  La  vérité  que  nous 
annoncions  tout  à  l'heure,  c'estqu'on 
a  applaudi  Phèdre  bien  plus  qu'on 
ne  l'a  écoutée ,  et  tout  le  monde 
y  a  gagné  ;  la  mourante  Phèdre 
ne  fut  jamais  si  mourante  en  effet; 
le  cri  ,  le  mot,  l'intona- 
tion ,  tout  venait  expirer 
sur  ses  lèvres;  son  re- 
gard semblait  appesanti , 
la  poitrine  était  halelante; 
on  ne  reconnaissait  la 
déesse  qu'il  cette  attitude 
d'une  suprême  élégance , 
et  à  cet  art  inné  et  exquis 
de  la  démarche  et  du 
geste  qui  ne  l'abandonne 
jamais. 

Comme  nouveautés  do 
la  semaine ,  viennent  en- 
suite l'Ambigu  et  Napo- 
léon, la  Taverne  du  Dia- 
ble et  la  Gaitè.  Cette  ta- 
verne est  un  bouge  infer- 
nal où  s'accomplissent 
toutes  sortes  d'événe- 
ments diaboliques.  Ri- 
chard Murphy  s'y  grise 
et  s'y  ruine.  Pourtant  lii- 
Chard  avait  fait  un  ser- 
ment,  vrai  serment  d'i- 
vrogne, celui  de  renon- 
cer au  vin  et  au  jeu.  Ces 
deux  péchés  capitaux ,  Ri- 
chard les  rachète  ,  aux 
yeux  des  âmes  sensibles, 
par  l'amour  qu'il  éprouve 
pour  Emma  Walter  ,  la 
perle  do  Nevv-'Vork. 
Emma  n'est  pas  ingrate  , 
mais  Richard  a  un  rival, 
comme  tous  les  amanis 
trop  heureux.  Le  mélo- 
drame nous  donne  ce  lord 
Claypolo  pour  un  scélérat 
licllè ,  et  ce  n'est  pas  lii 
précisément  la  plus  gran- 
de surprise  de  la  pièce. 
Son  originalité  consiste 
dans  les  recottes  em- 
]il(iyérs  par  le  crime  pour 
s.Ml,.|urras.^,M'il,.  I;,  vcrUi. 
'l'aritut  Cl;i\pnli.  vend  un 
cheval  l'uuiliu  a  liicliaril, 
alin  que  l'étourdi  se  cassé 
le  cou  sans  rémission 
tantôt  il  lui  gagne  son 
argent  au  biribi  ,  pdur 
l'amener  à  so  brûler  la 
cervelle;  mais  ces  dif- 
férents   inovens   d'pxler- 


Jeune  singe  Chimpanzé  mile  envoyé  i  la  Ménagerie  nationale  par  M.  Duchateau,  gouverneur  du  Sénégal. 


Thé 


lire  des  Variétés.  —Cmxdiie,  V  lableau.  —  Candide,  M.  Ch.Pérej;  jeunes  filles  do  l'Eldorado,  mesdemoiselles  .Mine, 
Clémence,  llorteuse,  Foiic]ucl,  Cénau. 


mination  n'atteignent  pas  leur  but; 
Claypole  finit  par  poignarder  son 
rival,  et  il  enlevé  la  belle  fiancée, 
en  mettant  le  feu  à  la  taverne  du 
Diable;  bref,  nous  assistons  à  cette 
éternelle  bévue  de  la  justice  qui 
s'appréle  à  frapper  un  innocent  à 
la  place  du  vrai  coupable,  lorsque 
les  morts  ressuscitent  pour  démas- 
quer le  fourbe  et  l'assassin.  Le  dé- 
noùment  est  providentiel  cl  le  suc- 
cès a  été  diabolique. 

Quant  à  lautre  mélodrame,  le 
Divorce  de  A'apo/rôn,  il  est  d'une 
espèce  assez  bizarre.  On  y  voit  Na- 
poléon divorçant  avec  Joséphine... 
en  vers.  C'est  une  paraphrase  lon- 
guement rimce  de  celle  résolution 
impériale  dont  un  beau  jour  Bru- 
net  Cadet-Roussel  exprima  le  véri- 
table motif  devant  le  conquérant , 
en  ces  termes  :  «  Il  est  douloureux 
pour  un  homme  tel  que  moi  de 
n'avoir  personne  à  qui  transmettre 
l'héritage  de  ma  gloire  ;  décidé- 
ment ,  je  vais  divorcer  avec  ma- 
dame Cadet-Roussel  pour  épouser 
une  femme  dont  j'aurai  des  en- 
fants. » 

Certes  ,  montrez-nous  encore  et 
toujours  le  grand  homme,  bien  que 
nous  leconnaissionsde  longue  date  : 
montrez-le  dans  sa  gloire,  dans  sa 
grandeur  ,  dans  ses  actions  héroï- 
ques; mais  n'allez  pas  jouer  avec 
cette  ombre  illustre.  11  remplit  le 
trône,  il  est  vainqueur,  il  com- 
mande ,  il  pacifie ,  ou  bien  encore  11 
entraîne  .ses  soldats  par  loute  lEu- 
rope  ,  c  est  alors  qu'il  fait  bon  de  le 
voir,  de  le  suivre,  d'applaudir  à  sa 
gloire  et  à  votre  drame;  de  même 
s'il  est  vaincu,  exilé,  persécuté  par 
la  fortune  et  par  ses  ennemis,  car 
le  tableau  n'en  sera  que  plus  pa- 
thétique et  plus  intéresant;  mais 
Napoléon  irrésolu,  troublé,  impé- 
rieux ou  suppliant  vis-à-vis  d'une 
femme.  Napoléon  qui  tremble,  qui 
s'emporte  et  qui  se  débat  dans  une 
altercation  domestique,  c'est  une 
pitié,  un  triste  spectacle  et  des  plus 
lamentables. 

Dans  les  environs  de 
ces  deux  théâtres,  qui  à 
l'envi  ont  broyé  du  noir 
tout  le  long  de  la  belle 
saison  ,  il  est  une  scèno 
joyeuse  qui  a  compté  et 
compte  encore  d'excel- 
lents comédiens.  Ces  heu- 
reuses soirées  qu'ani- 
maient jadis  les  Goyas 
de  la  parade  et  les  Bam- 
boches du  vaudeville . 
Odry  ,  Rébard  ,  Bernard- 
Léon  ,  un  autre  comédien 
vous  les  rend.  Les  Fo- 
lies-Dramaliques  prospé- 
raient sans  Lepeintre  , 
mais  il  a  mis  le  comble 
à  leur  fortune  en  y  por- 
tant son  répertoire  des 
yariêlés.  Il  faut  enten- 
dre ,  il  faut  voir  comme 
ce  vieillard  .  toujours 
vert  et  d'une  verve  comi- 
que infatigable ,  sait  tirer 
parti  do  ces  amusantes 
malices  de  lespnt  et  du 
vaudeville  d'autrefois. 

Au  bout  de  cette  men- 
tion, nous  retrouvons  na- 
turellement les  Variétés. 
A  propos  de  Candide  et 
de  son  arrivée  dans  le 
pays  d'Eldorado  :  «  'V'ingl 
belles  filles,  dit  le  roman, 
vingt  belles  filles  reçurent 
Candide  à  la  descente  du 
carrosse  et  le  vôlirenl 
d'un  tissu  de  duvol  de 
colibri  ;  après  quoi  les 
grandes  offirièrfs  de  la 
couronne  le  menèrent  à 
l'appartomont  du  prince 
entre  deux  lilos ,  chacune 
de  mille  musiciens,  selon 
l'usage  ordinaire.  •  Mille 
musiciens  ,  pas  un  i  de 
moins  ,  ainsi  s'exprime  la 
roman  .  mais  notre  vi- 
gnette qui  copie  fidèle- 
ment la  pièce  devait  se 
montrer  plus  réservée . 
aussi  bien  ce  serait  trop 
de  nuisique  pour  un  sim- 
ple vaudeville. 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


37 


li'avenir  des  Cheniiiis  île  fer.  —  SYSTÈME  ATMOSPHÉRIQUE  de  m.  iiédiard. 


Chemin  de  fer  atmosphérique.  —  Système  Hédiard. 


La  plus  grande  révolution  opérée  dans  notre  siècle  révo- 
lutionnaire n'a  pas  encore  dit  son  dernier  mot.  Il  en  est 
ainsi  de  tout  ce  qui  vient  dans  ce  monde  ouvrir  un  nouveau 
champ  à  l'activité  de  l'industrie  humaine.  11  était  naturel  de 
chercher  dans  l'analogie  le  premier  mode  d'emploi  de  la 
machine  à  vapeur  appliquée  aux  chemins  de  fer.  La  ma- 
chine ordinaire,  la  voiture  connue  et  les  ornières  de  la  roule 
fournirent  le  modèle  développé  et  combiné  pour  la  nouvelle 
application  avec  un  art  ingénieux;  une  fois  le  procédé  in- 
venté ,  on  alla  au  plus  pressé  et  tous  les  élablissements  de 
cheminsde  fer  furent  réalisés  selon  l'échantillon. 'Voici  main- 
tenant le  progrès  :  la  puissance  atmosphérique  substituée  à 
la  puissance  de  la  vapeur. 

L'expérience  n'est  pas  nouvelle;  mais  l'expérience  per- 
fectionnée par  le  système  dont  nous  allons  rendre  compte 
attend  encore  une  application 

La  traction  sur  les  chemins  de  fer  par  la  puissance  at- 
mosphérique a  été  appliquée  depuis  quelques  années  en  An- 
gleterre et  en  France. 

En  Angleterre,  1  ingénieur  Brunel  a  construit  un  chemin 
atmosphérique  sur  le  5o«/A-I>eron,  d'une  longueur  de  iO  ki- 
lomètres environ  ,  et  en  France  un  parcours  de  2,200  mè- 
tres est  établi  sur  le  chemin  de  Saint- 
Germain,  d'après  le  système  anglais 
de  Klegg  et  Samuda. 

L'exploitation  se  fait  régulièrement 
sur  ces  deux  chemins;  on  a  reconnu 
que  ce  nouveau  mode  présentait  des 
avantages  incontestables  de  célérité 
et  de  sécurité  ,  mais  que,  d'un  autre 
colé  ,  il  en  coûtait,  pour  l'établir,  plus  n 

cher  que  pour  le  système  ordinaire  ;  /YlT 

qu'il  fallait  des  machines  fixes  très 
puissantes  et  une  consommation  de 
charbon  au  moins  égale  à  celle  des 
locomotives,  pour  vaincre  les  ren- 
trées d'air  considérables  qui  se  font 
par  la  soupape  longitudinale. 

Toutes  les  imaginations  se  sont 
donc  tournées ,  avec  raison  ,  vers  la 
soupape  longitudinale  ,  comme  étant 
la  base  du  système.  Beaucoup  de  pro- 
jets se  sont  succédé;  celui  dont  M.  Hé- 
diard est  l'inventeur  a  parfaitement 
réussi. 

Son  système  a  été  expérimenté  sur 
un  chemin  d'essai  de  1  800  mètres  de 
parcours  à  la  gare  Saint-Ouen  ;  il  a 
été  pendant  trois  ans  l'objet  d'études 
approfondies  et  d'expériences  nom- 
breuses de  la  part  de  diverses  com- 
missions scientifiques,  qui  toutes  lui 
ont  donné  leur  approbation ,  et  en 
dernier  lieu  de  la  part  de  la  com- 
mission technique  des  chemins  de 
fer,  dont  le  rapport  au  ministre  ex- 
prime ,  avec  des  éloges  très  honora- 
bles pour  l'inventeur,  le  désir  d'une 
application  en  grand. 

il  ne  reste  donc  plus  qu'à  en  faire 
l'application  sur  une  échelle  assez 
étendue  pour  résoudre  les  questions 


pratiques  relatives  à  l'installation  des  gares  et  à  la  distance 
des  relais  des  machines. 

On  s'abuserait  en  admettant  que  l'essai  fait  à  Saint-Ger- 
main peut  donner  des  lumières  sur  ces  divers  points  :  car  le 
svstème  anglais  réalisé  à  Saint-Germain  estd'une  telle  im- 
perfection que  l'on  n'en  peut  rien  conclure  contre  celui  de 
M  Hédiard.  Qu'il  suffise  de  dire,  par  exemple,  qu'à  Saint- 
Germain  la  soupape  longitudinale,  organe  fondamental  de 
toute  propulsion  atmosphérique,  est  tellement  vicieuse  que, 
sans  parler  de  l'entretien  coiitcux  qu'elle  exige,  elle  donne 
dos  rentrées  d'air  trente  /'ois  plus  considérables  que  le  sys- 
tème de  M.  Hédiard. 

Après  la  question  de  la  soupape  longitudinale,  il  a  fallu 
s'occuper  de  la  question  d'économie.  Les  adversaires  du  sys- 
tèniealmosphérique  faisaient  des  objections  tiréesdes  appli- 
cations déjà  faites,  et  les  présentaient  comme  insurmontables. 

C'étaient  :  1°  la  dépense  première  de  l'établissement  d'un 
chemin  ; 

2"  Des  machines  fixes  de  200  chevaux  au  moins  par  six 
kilomètres  ,  force  nécessaire  pour  extraire,  avec  assez  de 
promptitude,  l'air  du  tube  propulseur,  de  manière  à  ne  pas 
ralentir  la  marche  du  piston: 


Système  Hédiard.  —  Coupe  Ir; 


aie  du  tube  propulsi 


Système  Hédiard.  —  Plan  du  piston. 


3°  L'inconvénient  de  n'employer  la  force  de  ces  ma- 
chines que  pendant  cinq  minutes  par  heure  ,  au  moment 
seulement  des  convois,  ce  qui  occasionnait  une  consomma- 
tion considérable  de  charbon  en  pure  perte,  puisque  les 
machines  doivent  rester  toujours  allumées. 

Ces  objections  étaient  plausibles,  et  le  système  anglais  de 
MM.  Klegg  et  Samuda  n'y  répondait  rien  ;  il  fallait  donc  tra- 
vailler à  résoudre  ces  difficultés,  et  voici  les  idées  de  M.  Hé- 
diard sur  le  nouveau  mode  d'exploitation  : 

Pour  arriver  à  un  bon  résultat  dans  l'exploitation  d'un 
chemin  de  fer  atmosphérique,  il  a  pensé  qu'il  fallaitprcmié- 
rement  diviser  les  convois. 

En  prenant  pour  point  de  comparaison  les  chemins  de 
Versailles  et  de  Saint-Germain  ,  dont  les  trains  partent 
toutes  les  heures,  on  pourra  établir  des  calculs  exacts,  car 
il  est  bien  évident  qu'il  n'existe  pas  en  France  d'autres  loca- 
lités plus  parcourues. 

Chaque  convoi,  sur  l'un  et  sur  l'autre  de  ces  chemins,  se 
compose,  en  temps  ordinaire,  de  ti  à  8  voitures  au  plus  par 
heure. 

Par  le  système  atmosphérique,  en  faisant  des  convois  de 
2  voitures  tous  les  quartsd'heure.  on  transportera  également 
huit  voitures  par  heure  ,  avec  l'avan- 
tage de  ne  pas  faire  attendre  les  voya- 
geurs. 

Dès  lors ,  au  lieu  d'établir  le  che- 
min avec  des  tubes  propulseurs  de 
W)  centimètres  de  diamètre ,  pesant 
200  kilogrammes  le  mètre  ,  il  ne  fau- 
dra plus  que  des  tubes  d'une  capa- 
_^  '  cité  quatre  fois  moins  grande ,  c'est- 

jRTTx  à-dire  de  20 centimètres  de  diamètre, 

^^  V^  et  ne  pesant  plus  que  bO  kilogrammes, 

I  attendu  que  le  poids  des  tubes  dimi- 
nue dans  la  proportion  de  la  décrois- 
sance de  la  capacité. 

(Ir  donc ,  si  le  tube  de  iO  centi- 
mètres donne  une  force  assez  grande 
pour  faire  marcher  un  convoi  de  huit 
voitures  avec  une  vitesse  de  80  ki- 
lomètres à  l'heure,  un  tube  de  20  cen- 
timètres fera  marcher  deux  voilures 
avec  la  même  rapidité,  ou  bien  quatre 
voitures  avec  une  vitesse  moitié  moins 
grande;  c'est-à-dire  que ,  s'il  se  pré- 
sentait au  départ  un  grand  nombre 
de  voyageurs,  on  composerait  immé- 
diatement le  train  avec  quatre  voi- 
tures au  heu  de  deux  ;  mais  alors  la 
vitesse  .  au  lieu  d'être  de  80  kilomè- 
tres a  l'heure  ,  ne  serait  plus  que  de 
.40  kilomètres. 

En  réduisant  le  tube  propulseur  à 
20  centimètres  de  diamètre,  et  en  éta- 
blissant les  départs  de  chaque  con- 
voi de  quart  d'heure  en  quart  d'heure, 
M.  Hédiard  n'entend  pas  adopter  ces 
proportions  d'une  manière  invariable. 
La  grandeur  des  tubes  pourra  être, 
au  contraire ,  augmentée  sur  des 
lignes  qui  auraient  besoin  d'employer 
une  force  plus  grande  ,  de  même  que 

N-  200. 


L'ILLUSTRATION,    JOURNAL  UNIVERSEL. 


les  convois,  si  on  1p  jh^p  nri-r'^R.niir,  pniirrniil  iMro  di-tancm 
<lilTéromment,  :\1  llrili,,r.l  ,i  \(iuIh  -niliincnl  |iM.ii\('r  .iml 
pouvail  diviser  Ic^  li.nn^  ;i  I  inlim  ,  ri  imili  iplin'  l('~  i|i-|.;ii  U 
s.-ins  augmenter  les  11  ji=  du  cuuiIjuïLiIjIi:.  Sun  iiul  enfin  ;i 
été  d'établir  un  cuntriisle  frappant  avee  le  système  actuel, 
dont  l'intérêt  est  de  ne  faire  que  de  grands  convois  partant 
à  de  très  lons;S  intervalles,  et  remorqués  par  do  lourdes 
et  puissantes  locomotives,  source  par  conséquent  de  graves 
accidents, 

La  proportion  de  20  centimètres  de  diamètre  adoptée 
pour  les  tubes  ,  dans  la  démonstration  que  nous  venons  do 
faire  ,  présente  un  avantage  important  dans  l'exploitation 
d'un  chemin. 

On  avait  jusqu'il  ce  moment  présenté  le  scrvire  ilrs  gMres 
comme  une  diiliculté  .  a  raison  des  crni^rnimu  ilrsoie. 
parce  que  le  piston  placésousie  wagon  du  ciinii  iu|iciuvait 
pas  passer  par-dessus  les  rails,  et  parce  (ju  \\  lallait  em- 
ployer des  moyens  lents  et  pénibles  pour  faire  les  ddfé- 
rentes  manœuvres. 

Il  y  a  -iS  centimètres  de  rails  à  l'essieu  di's  voilures  ;  or 
donc,  en  plaçant  des  tubes  de  20  cenlimrhv, ,  Mi|i|iiiri'- 
par  des  pattes  qui  les  élèveraient  de  i  ;i  .'.  riniimrin-;  .m- 
dessus  des  rails  ,  il  resterait  encore  environ  l.'i  «■nliiucLi'-S 
pour  atteindre  l'essieu,  distance  suflisante  pour  attacher  le 
piston  au  wagon  directeur.  Il  s'ensuivrait  donc  que  le  pis- 
ton pourrait  passer  sans  obstacle  par-dessus  les  railsi  que 
lo  service  actuel  des  aiguilles  n  aurait  pas  besoin  d'être 
changé,  et  que  lo  piston,  su  trouvant  rapproché  autantqiie 
possible  du  wagon  ,  y  gagnerait  en  solidité.  Le  tirage  s'y 
ferait  plus  directement. 

M.  Ilédiard  fait  observer  que  s'il  était  nécessaire  sur  cer- 
tains parcours  d'employer  un  tube  propulseur  de  30  ou  40 
centimètres  do  diamètre  alin  d'obtenir  une  force  phisgrande, 
on  pourrait  arriver  au  même  résultat  qu'avec  les  tubes  de 
20  centimètres  en  donnant  aux  roues  du  wagon  directeur 
qui  supporte  le  piston  un  diamètre  de  quelques  centimètres 
de  plus. 

La  pompe  pneumatique  qui  servait  à  faire  lo  vide  au  che- 
min d'essai  de  Saint-Ouen  avait  un  diamètre  de  2  mètres 
sur  une  course  de  75  cenlimètres. 

Elle  enlevait  un  mètre  cube  d'air  par  seconde  ,  et  elle 
était  mise  en  mouvement  par  une  machine  à  vapeur  de 
la  force  de  -40  chevaux. 

En  adoptant  ces  données  pour  une  ligne  atmosphérique 
qui  serait  construite  avec  un  tube  propulseur  de  20  centi- 
mètres de  diamètre,  et  dont  les  machines  seraient  espacées 
de  10  en  10  kilomèlres ,  on  y  ferait  le  vide  en  sept  minutes 
puisqu'un  lul)o  de  20  centimètres  de  diamclre.  sur  un  par- 
cours de  dix  kilomètres,  conlii'iil  loi)  nirlrr.i  cubes  d'air, 
et  que  dans  7  minutes  il  y  a  lio  ^n  Minier  ;  i) 

Maintenants!  on  établissait  .uijiKr.  de  (  liaiiuo  machine 
lixe  ,  placée  de  10  en  10  kilomètres,  un  tube  d'aspiration  , 
formant  réservoir,  d'une  capacité  double  d'un  tube  propul- 
seur de  20  centimètres  de  diamètre,  c'est-à-dire  un  réser- 
voir contenant  800  mètres  cubes  d'air,  il  faudrait  gualorie 
minutes  pour  y  faire  le  vide  (2). 

Au  monieiildu  départ  du  convoi ,  on  mettrait  en  commu- 
nication, au  moyen  d'un  robinet,  le  tube  propulseur  avec  le 
réservoir  ;  l'équilibre  s'établirait  immédiatement,  et  le  vide 
serait  fait  aux  deux  tiers. 

Le  piston  ,  poll^-^|l;l^  l;i  pression  atmosphérique,  refou- 
lerait alors  ei iirliiiii    Li  portion  d'air  restant  dans  le 

tube  propulseiii  .  ;i|ii'  -  I  |t;i<siige  du  piston  ,  l'air  du  tube 
propulseur  aiir.iil  p>is.-r  ni  luliihlç  ilins  le  réservoir  ;  mais, 
comme  ce  réservoir  se  Ihhim  r.ni  dir  il  uni' capacité  deux 
fois  plus  grande,  Tair  du  liilie  piii|iiil-riii  ne  1  aurait  rempli 
qu'il  moitié;  par  conséquent,  après  le  pas.-age du  convoi . 
le  baromètre  indiquerait  encore  un  vide  de  35  ii  -40  centi- 
mètres, ou  une  demi-atmosphère,  et,  dans  l'intervalle 
de  chaque  convoi ,  la  pompe  n'aurait  pas  à  faire  le  vide  en 
lotalile,  m  ii-  -riilrmeiità  le  compléter. 

Ain?i ,  ,1  II-  piii-^.iiites  machines  (ixes  qui  ont  été  jus- 
qu'ici cniisii  iiilr.^  ]iiiur  épuiser  dans  un  temps  très  court 
1  air  coiuenu  dans  le  tube  propulseur,  dont  la  force  n'est 
ulilisèe  ((u'un  douzième  du  temps  pendant  lequel  la  ma- 
chine est  en  feu  ,  et  ipii  dépensent  presque  en  pure  perte 
onzedou/ieiiirMle  leur  iniuliiislllile,  .M    llnliiirda  substitué 

desmaeliini  -  mil ni  iiinin^l'ii  h-,,  .pu  ;iL:i^>ent saiisccssc. 

ottoujuui>  Il  1  lie ni,  |HiiMpi  elli^r i;ii;:iMneii  t  daus  le  ré 

servoir  additionnel  le  vide,  au  moyen  duquel  on  obtient  une 
force  incessamment  prête  à  être  mise  en  action. 

Tel  est  le  projet  de  M.  Hédiard ,  dont  nous  terminons 
l'exposition  par  le  devis  comparatif  do  la  déjicnse  dans  le 
système  des  locomotives  et  le  système  atmos[iliériquc  ; 

SYSTÈME  LOCOMOTIVE.      |SYSTÈME  ATMOSPIlÉRIQUi:. 

MÈMK    ÏEnUAIN    POUII    LES  DEUX    STSTKHE.S. 


lllls  h  tO  kiloijr., 
100  kilogr. .  liiur 
lé>  Oe    lu 


I  SO  kilopr, ,   ltf>  ! 
h  30  fi.   les  100  kUogr.    .  .   . 
Une  locoiiiolivo  et  son  lenilcr  ]>D 
kiluiiitilre,  cuUlaut  S0,000  Tr 


tiiia>  k  so  kilo 

100  kilogr. 


!  cout-incls  lie  n  kilogr.  ,  1rs  s 
k  30  fr.  les  100    kil.KP.  .   . 

Unlube<le  00  kiloi;r,  ,Tc  nièirc 
k  10   fr. ,  les  100  kaogr.  .    .  . 

l'i,     lulif  ,rn,|„r..lif,ii   (JO.OOO  fr. 


10  kiloiiièlrcs. 
Dépendes    inipiévi 


(1)  Tiiiilc's  les  niiichincs  fixes  sont  couplées  pour  le  cas  où  il  yen 
.Turail  une  en  réparallun. 

(2)  Un  lubc  de  deux  niùhcs  de  dioniiHre  sur  une  longueur  de 
200  int^lres,  a  ixaclcinent  le  double  de  la  capacité  d'un  (ulie  de  2U 
ccnliniilrcs  de  diamètre  qui  aurait  unelongucur  de  i/ix  kitomclrcs. 


Prix  éïiil  pnur  l'élalilisseinent  d'un  chemin  dans  les  deux 
sv>lriiii-    111  II-  il  e\i-ie  eu  l.ive'ur  de  l'atmosphérique  : 

■  l'iii. ,.,  Diiiii riiiivii|ii,il)lr  (l;ins  les  travaux  do  terrasse- 

iiiciil  ,  il;iii>  leiiireiirii  lie  11  Mile ,  des  rails,  des  loconiBti- 
ves,  et  dans  la  diminution  des  deux  tiers,  au  moins  ,  du 
combustible.  —  Ajoutez  à  cela  :  vitesse  et  sécurité. 


La  8ou8cri|ition  de  liibrairie. 

La  souscription  avec  primes  autorisée  au  profit  de  la  li- 
brairie et  des  industries  qui  s'y  rattachent  a  conquis  la  fa- 
veur du  public.  On  comprend  que  les  scrupules  de  lé- 
galité rigoureuse  ont  dû  céder  avec  honneur  en  présence 
d'un  grand  intérêt  à  sauver,  de  nombreuses  infortunes  à 
soulager. 

Les  croque-morts  do  la  librairie,  ces  industriels  qui 
spéeulfint  sur  la  ruine  des  éditeurs  et  qui  flairaient  déjà  une 
proie  11  dévorer  ii  l'encan  ,  sont  les  seuls  à  protester  contre 
uur  opération  dont  l'efl'et  est  de  rendre  la  vie  il  un  corps 
epiii-e.  On  assure  que  ces  honnêtes  gens  ont  ailressé  ii 
l'autorité,  au  nom  de  la  morale  publique,  une  réclama- 
tion à  laquelle  se  sont  associés  de  braves  détaillants  poussés, 
les  uns  par  une  basse  envie,  les  autres  par  l'ignorance  de 
leurs  véritables  intérêts. 

On  peut  rire  des  envieux;  maison  doit  éclairer  les  aveu- 
gles en  leur  montrant  que  l'activité  rendue  à  la  librairie 
leur  prolitera  finalement  autant  qu'aux  éditeurs  eux-mê- 
mes; qu'elle  leur  prolitora  comme  aux  imprimeurs,  aux 
fabricants  de  papiers,  aux  relieurs,  aux  brocheurs  et  a 
tous  ceux  qui  concourent  à  la  production  et  au  débit  des 
livres.  ,  . 

Quant  aux  croque-morts,  on  ne  voit  guère  que  les  épi- 
ciers qui  puissent  être  touchés  de  leur  douleur  et  s'associer 
raisonnablement  il  leurs  regrets. 

Il  y  a  encore  une  autre  plainte  qui  s'élève  contre  la  Sous- 
cription ;  c'est  la  plaintn  d'un  éditeur  de  Paris,  un  grand 
esprit,  un  noble  cœur,  que  le  sentiment  de  la  confraternité 
n'a  cessé  d'animer  et  qui  a  donné,  en  tout  temps,  l'exem- 
ple du  dévouement  ii  l'intérêt  commun.  C'est  un  homme 
qui  a  été  fort  malheureux  et  qui  s'en  souvient.  Moi  qui 
parle  ici ,  j'ai  eu  le  bonheur  dans  ma  vie  de  lui  rendre  un 
grand  service,  de  lui  donner  un  bon  conseil  qu'il  a  suivi , 
dont  il  s'est  bien  trouvé  et  qu'il  a  reconnu  pendantsix  se- 
maines environ  ,  juste  le  temps  qu  il  fallait  pour  s'assurer 
qu'il  avait  été  fort  heureux  de  me  rencontrer. 

Cet  éditeur  donc  a  commencé  par  applaudir  il  l'idée  de  la 
Souscription  ;  il  a  fait  des  démarches  pour  y  être  associé, 
puis  tout  à  coup  ,  il  a  cru  faire  un  meilleur  calcul  en  s'asso- 
cianl  à  la  réclamation  peu  intelligenleou  peu  bienveillante 
des  détaillants ,  et  le  Journal  des  Débats  a  enregistré  une 
déclaration  de  lui ,  portant  que  ses  ouvrages  —  les  ouvrages 
de  M.  Charpentier  I  —  ne  feraient  point  partie  dii  Catalo- 
gue. C  est  un  très  petit  malheur  assurément  ;  mais  la  cor- 
poration des  éditeurs  veut  être  vengée  de  cetle  retraite  ridi- 
cule. Elle  le  sera.  Elle  li-l  déj  i  p.nr  l'accueil  iiue  plusieurs 
de  ceux  auxquels s'e,sl  .hIh-m'  M  i  li.irpentier,  pour  les  en- 
traîner, ont  fait  aux  iii.iiil>  expi  une,,  de  sa  révolte.  Si  le,< 
éclats  de  rire  qu'il  a  provoquer  ,  si  les  sourires  de  pitié 
qu'il  a  recueillis  ne  l'ont  pas  assez  averti .  nous  mettrons 
le  public  tout  entier  dans  la  confidence  do  ce  pauvre 
homme  qui  reproche  ii  l'opération  d'être  républicaine, 
et  qui  déclare  ne  pouvoir  y  prendre  part  à  cause  de  ses 
opinions  monarchiques.  Tartufe  était  aussi  ell'ronté  ,  mais 
il  n'était  pas  si....  Comment  dirai-je"'  Le  mot  est  court, 
maisil  estdur...  Gazons,  commedit Arnal ,  Tartufe  n'était 
pas  si  Charpentier. 


M.  le  Préfet  de  la  Seine  vient  d'adresser  aux  adminislra- 
teursdela  Souscription  la  lettre  suivante  : 


Paris,  le  l/i  septembre  18 


Messieurs  , 


"  Je  vous  prie  de  me  porter  sur  la  li?te  de  vos  souscrip- 
teurs pour  une  somme  de  250  fr. 

«  Je  serais  heureux  que  mon  exemple  pût  rendre  l'acti- 
vité il  la  féconde  industrie  des  éditeurs  et  des  imprimeurs, 
si  utile  à  de  nombreuses  familles  d'ouvrier.-  el  si  importante 
parmi  les  industries  parisiennes. 

'  Sailli  e(  fraleriilK^ , 
"  Le  Itrprt-scitlanI  du  l'cuple.  Préfet  de  la  Seine  . 

»   TllOCVli-CnAUVEL.    •■ 


slic  A  la 


l.lhralrli'  IMi.ilauHli'r 


Théorie  du  droit  de  propriété  et  du  droit  au  travail ,  par 
M.  CoxsiDÉinM.  —  De  l'Organisation  du  travail  selon 
Fourier,  par  M.  llENSEyciN.  —  Le  l'résrnt  et  l'Avenir. 
par  M.  J.-I).  Khantz  —  L'nc  visite  au  l'Iiahuistère  . 
par  Matuieu  Bbiascoliii. 

Au  bout  du  quai  VoUairc,  entre  la  rue  du  Bac  et  la  rue 
de  Beaune.  n'avez-vous  pas  entrevu  jiarfois  une  pctile  bou- 
tique pointe  en  vert,  et  dont  la  montre  étale  aux  yeux  dos 


passants  plusieurs  rangées  de  livres  elde  brochures  qu'on  ne 
trouve  guère  que  la ,  et  que  pourtant  on  n'y  va  pas  toujours 
chercher  !  Bien  peu  ,  en  ell'et ,  franchissent  le  seuil  de  la  li- 
brairie phalanstérienne  ;  bien  peu  troublent  ce  silencieux 
asile  où  s'accumulent  toutes  les  productions  qui  ne  peuvent 
trouver  place  dans  les  colonnes  de  la  Dimocralie  pacifique, 
car.  comme  on  sait,  cl  ce  Journal  et  celte  Librairie  sont 
deux  parties  d'un  même  tout,  deux  enfants  d'une  même 
famille  qui  n'épargne  rien,  disons-le  à  sa  louange,  pour 
produire  les  siens  et  leur  faire  faire  leur  chemin  dans  le 
inonde. 

Librairie,  journaux,  revues,  cours  publics  el  gratuits  à 
Paris  etdans  les  provinces,  lesphalanstériens  ont  tout  em- 
ployé, depuis  dix-huit  ans.  pour  la  pacifique  propagation  de 
leurs  paciliques  doctrines.  Ont-elles  recru  té  ce  pendant  beau- 
coup de  prosélytes?  sont-elles  parvenues  a  préoccuper  vi- 
vement la  masse  des  esprits?  les  hommes  éminenls  qui  les 
représentent  exercent-ils  une  sérieuse  influence,  dans  un 
camp  ou  dans  l'autre?  Non;  les  partis  modérés  les  rejet- 
tent comme  des  utopistes,  assez  inollénsifs  d'ailleurs;  elles 
partis  extrêmes  les  dédaignent  comme  des  auxiliaires  inu- 
tiles, parce  qu'ils  savent  fort  bien  qu'on  n'accomplit  pas 
pacifiquement  une  révolution  radicale. 

Ainsi,  pour  avoir  voulu  transiger  avec  tous  les  intérêts 
et  ménager  tout  le  monde,  lesphalanstériens  n'ont  contenlé 
personne.  Cola  devait  êlre  ;  car  il  n'y  a  de  doctrine  puis- 
sante et  populaire  que  celle  qui  accepte  franchement  tous 
les  moyens,  quels  qu'ils  soient,  qui  mènent  au  but  qu'elle 
a  marqué.  Or.  les  phalanstériens  ont  fait  tout  le  contraire  ; 
par  une  singulière  inconséquence  en  se  proposant  pour  fin 
la  transformalion  totale  de  la  société,  ils  se  donnaient,  ils 
se  donnent  encore  comme  essenliellement  conservateurs. 
Us  veulent,  on  un  mol,  détruire  en  conservant  et  conserver 
en  détruisani 

Cette  illusion  s'explique  en  partie  parla  façon  toute  par- 
ticulière dont  les  disciples  do  Fourier  conçoivent  la  méla- 
niorphoso  sociale  qu'a  prêchée  leur  maître.  A  les  entendre, 
il  suffira  qu'un  plialanstcro  s'établisse  sur  deux  ou  trois 
lieues  carrées  ,  pour  qu'il  la  vue  des  miracles  qu'il  accom- 
plira, de  l'ordre  qui  y  regnera,dubonheur  dont  on  y  jouira, 
tous  les  peuples  des  quatre  parties  du  monde  soient  saisis 
d'une  irrésistible  envie  de  bâtir  des  phalanstères,  et  de 
devenir  Ilarmoniens.  C'est  ainsi  que  sans  secousses  .  sans 
trouble  aucun,  el  d'un  accord  unanime,  la  face  du  globe 
sera  renouvelée.  Croyez  cela ,  et  lisez  Fourier  !  Dans  ce 
nouvel  état  de  choses'  lous  les  anciens  droits  seront  sauve- 
gardés ;  seulement  ils  s'exerceront  dans  toute  leur  étendue 
et  bien  au  delà  des  étroites  limites  que  leur  impose  forcé- 
ment cet  étal  bâtard  qu'on  nomme  civilisation.  Ainsi  le  ca- 
pitaliste retirera  cent  pour  cent  d'un  capital  qui  ,  aujour- 
d'hui,  lui  rapporte  au  plus  huit  ou  dix  d'intérêt;  et  le 
travailleur  vivra  comme  s'il  gagnait  vingt-cinq  francs  par 
jour.  Certes  la  perspective  est  llalteuse.  el  lorsqu'il  en  coûte 
si  peu  pour  la  réaliser,  on  se  demande  pourquoi  cela  n'est 
pas  déjà  fait.  On  a  essayé,  il  est  vrai ,  el  même  deux  ou  trois 
fois.  Chose  bizarre!  tous  ces  essais  ont  été  des  plus  mal- 
heureux. Mais  qu'est-ce  que  cela  prouve  ?  une  tentative 
d'harmonie  ou  de  réalisalion  harmonienne  peut-elle  réussir 
dans  notre  milieu  civilisé,  pour  parler  le  langage  des  adep- 
tes! il  faut  attendre  une  heure  plus  propice,  chercher  un 
lieu  plus  favorable.  On  chercho;  mais,  chemin  faisant,  plu- 
sieurs phalanstériens  plus  pressés,  mettent  un  peu  de  côté 
les  idées  du  niaitre,  et  s'elTorccnl  de  les  appliquer  à  ce  qui 
est,  en  attendant  ce  qui  sera 

De  ce  nombre  est  M  Victor  Considérant,  l'homme  le  plus 
distingué  aujourd'hui  de  l'école  sociétaire,  et  celui  qui  a  le 
plus  habilement  tenté  de  faire  rentrer  les  doctrines  fourié- 
ristes  dans  les  bornes  du  possible  cl  du  réel  Qui  a  lu  ,  ou 
entendu  M.  Considérant,  sait  qu'il  apporte  dans  ses  écrits 
ou  ses  discours  de  l'esprit,  de  la  verve,  et  une  façon  d'argu- 
menter souvent  pressante  et  saisissante.  Sous  la  monarchie 
il  n'était  point  de  ceux  que  redoutait  le  gouvcrnemenl.  Au 
phaUinslere  près,  qu'on  lui  passait  volontiers  ,  c'élail  un 
conservateur,  un  quasi-ministériel.  Il  voulait  alors  conser- 
ver po^/d'i/ucmcnj  pour  révolutionner  «ofifllcnient.  Depuis  la 
République,  M.  Considérant  s'est  maintenu  dans  celte  posi- 
tion mixte,  eherehantii  concilier  des  thèses  inconciliables, 
défendant  a  la  l'ois  la  propriété  et  le  droit  ou  travail,  la  fa- 
mille et  le  ph.ilanslére,  se  faisant  lapotrede  la  communauté 
el  l'adversaire  des  communistes. 

C'est ,  animé  de  ces  intentions  contradictoires ,  qu'il  vient 
de  rééditer,  après  l'avoir  augmenlé  et  corrigé,  un  petit  traité 
intitulé  Théorie  du  droit  de  proprirté  et  du  droit  au  tra- 
vail, publié  il  y  a  quelipies  années  dans  la  l'halange. 

Tandis  que  M.  Proudhoii  alTirme  que  la  reconnaissance 
du  droit  au  travail  entraîne  la  ruine  du  droit  de  propriété. 
M.  Considérant  conclut,  au  contraire,  que  de  la  consécra- 
tion du  premier  dépend  le  maintien  de  l'autre.  Pour  le  prou- 
ver, il  débute  par  iléclaror  que  la  vraie  loi  sociale  est  en- 
core a  trouver,  et  qu'aeluellemcnt  tous  tes  Codes  humains 
sont  fau.r  par  cela  .icul  q u' ils  existent .  Car,  dit-il.  si  la  société 
était  établie  dans  ses  conditions  normales,  elle  fonctionne- 
rait d  elle  même  et  sans  cet  amas  de  prescriptions  el  de 
restiietions  législatives.  C'est  pourquoi  à  ces  Codes  humains, 
rédigés  au  hasard,  adoptés  par  convention  el  maintenus  par 
la  force,  il  faut  se  liàlerde  siib-liliier /c  rrat  dioif.  If  droif 
naturel,  le  droit  immualile .  le  droit  émané  de  Dieu,  et  qui 
est  l'expression  des  rapports  résultant  de  la  nature  nicmr 
des  êtres  ou  des  choses. 

Pour  moi.  je  ne  demande  pas  mieux  que  d'accepter  ot  de 
suivre  ce  droit-lii?  Mais  qui  viendra  nous  le  révéler?  .\ 
quel?  signes  le  reconnaîtrons  nous?  Ce  droilémanr  de  Dieu 
neserail-il,  a  dire  vrai ,  qu'une  émanation  de  M.  Victor 
Considérant;  cl  si  cela  éiait .  n'y  aurait-il paslicudesigna- 
ler  l'outrecuidance  d'un  homme  qui  condamne  en  masse  et 
sans  examen  tous  les  législateurs  de  tous  les  temps  el  de 
tous  les  siècles ,  el  tous  les  peuples  qui  se  sont  confor- 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


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mes  il  leurs  lois?  A»  fond  c'est  toujours  Ui  qu'il  en  faut  re- 
venir. Lorsqu'on  nous  parle  du  droit  naturel,  du  droit  do 
Dieu  ,  on  n  en  parle  jamais  qu'en  son  nom  et  de  sa  propre 
autorité;  c'est  pourquoi ,  en  pareil  cas,  l'autorité  ,  l'expé- 
rience des  siècles  méritent  d'être  pesés  dans  la  balance. 
Non  :  tous  les  Codes  humains  ne  sont  pas  faux,  par  cela 
seuls  qu'ils  existent.  C'est  le  contraire  qu'il  fallait  dire,  pour 
être  vrai;  car  les  lois  nes'établissent  qu'à  la  condition  d'éire 
conformes  aux  principes  fondamentaux  de  la  nature  liu- 
niaine  ,  au  caractère  particulier  des  peuples,  aux  nécessités 
spéciales  de  la  situation  où  ils  se  trouvent.  Un  Code  qui 
n'aurait  pour  lui  que  des  geôliers  et  des  gendarmes  ne  se 
maintiendrait  pas  longtemps.  Toutes  lo.^  pages  de  l'histoire 
l'attestent.  Mais  qu'importe  l'histoire  aux  phalanstériens  ! 
S'il  faut  les  en  croire,  l'humanité  lait  fausse  route  depuis 
la  naissance  du  monde.  Quelques-uns  d'entre  eux  ,  il  est 
vrai ,  d'un  esprit  moins  exclusif,  nous  accordent  que  de- 
puis six  mille  ans  toutes  les  révolutions  qui  se  sont  succédé 
ont  bien  eu  quelque  résultat.  Elles  ont  préparé  l'/iarinoiiic, 
comme  dit  M.  Hennequin  ,  dans  son  courssur  VOrganisa- 
tion  du  travail.  L'humanité  ,  en  d'autres  termes ,  a  lait  et 
continue  à  faire  son  apprentissage  phalanstérien  en  passant 
par  les  phases  suivantes  : 

1°  Édcnisme.   ou  bonheur  primitif,  paradis  terre^tre. 

2°  État  sauvage ,  ou  chute  de  l'humanité. 

3»  Patriarcat,  nouvelle  déchéance. 

■4°  Barbarie,  déchéance  pivotale. 

5°  Civilisation  ,  phase  de  progrés. 

(i"  Garanlisme .  nouveau  progrés  non  réalisé. 

7°  Séries  ébauchées,  phase  essentiellement  transitoire 
introduisant  l'espèce  humaiue  en  Harmonie. 

Nous  ne  sommes  encore  aujourd'hui  qu'à  la  cinquième 
phase ,  l'état  de  civilisation ,  d'où  il  nous  faut  passer  au  ga- 
ranlisme ,  qui  nous  mène  droit  aux  séries  ébauchées  .  d'où 
nous  atteindrons  enfin  au  ncc  plus  ultra  de  notre  destinée, 
aux  merveilles  de  la  papillone  ,  de  la  cabalistc  et  de  la 
composite. 

Pour  passer  de  la  cicilisation  au  garantisme,  le  droit  au 
travail  est  nécessaire  ,  et  c'est  pourquoi  M.  Conîidérant  le 
défend  avec  tant  de  zèle?  mais  avec  un  zèle  plus  fervent 
qu'éclaire.  Car  à  bien  lire  son  petit  traité,  il  en  résulte  tout 
s.mplement  qu'il  veut  bouleverser  tout  le  monde  pour  nous 
replacer  dans  une  situation  absolument  semblable  à  celle 
où  nous  sommes  aujourd'hui. 

M.  Considérant  commence  par  remonter  à  l'origine  des 
choses;  procédé  dont  il  est  toujours  prudent  de  se  défier. 
Quand  on  veut  embrouiller  une  question,  c'est  un  e\cellent 
moyen  que  de  se  reporter  au  lendemain  du  déluge  :  car  per- 
sonne ne  pouvant  dire  au  juste  commeiilles  choses  se  sont 
passées  à  l'origine  des  choses,  on  le  suppose  tout  à  l'aise  , 
el  l'on  en  déduit  ensuite  tout  co  qui  vous  plaît  d'en  dédu  re. 

Accordons  toutefois  à  M.  Considérant  qu'à  cette  époque 
quelques  hommes  se  sont  emparés  indûment  d'un  bien 
usurfié  sur  le  bien  de  tous,  et  qu'ils  ont  ainsi  donné  l'exem- 
ple d'une  usurpation  que  la  conquête  et  les  envahissements 
de  toutes  sortes  ont  perpétuée  sous  diverses  formes  jusqu'à 
nous.  Accordons-lui  ce  point,  mais  à  la  condilion  qu'il  re- 
connaîtra aussi  que,  depuis  l'affranchissement  des  Commu- 
nes .  depuis  linunense  développement  de  l'industrie  et  du 
i-ommerce,  de|iuis  la  révolution  de  1789,  la  propriété  n'a 
elé  le  plus  souvent  que  le  fruit  du  travail  et  d'une  sage  éco- 
nomie. M.  Considérant  l'a  reconnu  plus  d'une  fois  .et  ce- 
pendant, attendu  que  tout  homme  né  sur  la  terre  a  droit  à 
une  portion  de  cette  terre  ,  il  demande  que ,  par  une  révo- 
lution radicale,  les  choses  soient  constituées  dans  la  société 
de  telle  sorte  : 

1°  Que  le  droit  au  capital  primitif,  c'est-à-dire  à  l'usu- 
fruit du  sol  dans  son  étal  brut  soit  conservé  ,  ou  qu'un  droit 
équi\ aient  soit  reconnu  à  chaque  individu  qui  naît  sur  la 
terre  à  une  époque  quelconque  ; 

i'  Que  le  capital  créé  soit  réparti  continuellement  entre 
les  hommes,  à  mesure  qu'il  se  produit,  en  proportion  du 
concours  de  chacun  à  la  production  de  ce  capital. 

De  plus  il  admet  que  ce  capital  ainsi  réparti  sera-trans 
missible  de  famille  en  famille  .  et  constituera  de  nouveaux 
patrimoines.  Eh  bien,  soit!  bouleversons,  ruinons  la  société 
actuelle  pour  réaliser,  s  il  est  possible,  cette  égale  réparti- 
tion entre  tous  de  la  terre  commune.  Avant  un  demi-siècle, 
grâce  à  l'inégalité  des  travaux  el  des  capacités ,  et  par  le 
seul  fait  de  l'héritage,  l'équilibre  sera  de  nouveau  renversé; 
alors  il  deviendra  aussi  impossible  qu'il  l'est  aujouidliui ,  de 
garantir  le  droit  au  travail ,  sans  faire  violence  aux  person- 
nes et  aux  choses;  l'ordre  social  sera  à  chaque  instant  re- 
mis en  question  .  et  au  lieu  de  propriétaires,  il  n'y  aura  que 
des  détenteurs  illégitimes.  Car  tout  ce  qu'on  ajoutera  à  son 
bien  ,  on  le  prendra  nécessairement  sur  le  bien  d'autrui ,  et, 
à  ce  compte,  l'on  sera  toujours  tenu  à  restitution. 

A  M.  Considérant,  à  tous  ces  socialistes  mitigés  et  à  l'eau 
de  rose,  je  préfère  de  beaucoup  M.  Proudhon  :  avec  lui  on 
sait  de  suile  à  quoi  s'en  tenir.  M.  Proudhon  a  dit  une  chose 
parfailemenlvraie,  il  a  été  loyal  et  conséquent  lorqu'il  s'est 
écrié ,  devant  la  commission  à  qui  fut  soumis  son  fameux 
projet  :  "  Accordez-moi  le  droit  au  travail,  el  je  fais  bon 
marché  de  la  propriété.  »  Qu'est-ce  en  ell'et  que  le  droit  au 
travail  ,  sinon  la  ruine  de  tous  les  principes  politiques  et 
économiques  proclamés  par  la  révolution  de  1789  ?  Tous 
tendent  à  assurer  à  l'individu  l'entier  développement  de 
toutes  ses  facultés  ,  le  libre  essor  du  commerce  et  de  l'indus- 
trie ,  sous  la  surveillance  et  la  garantie  de  l'État ,  et  avec  les 
conditions  qu'il  impose  pour  prix  de  cette  garantie  et  de 
celle  surveillance.  Le  droit  au  travail,  au  contraire,  fait 
rentrer  le  commerce  et  l'industrie  entre  les  mains  de  l'État , 
c]ui  en  devient  ainsi  le  maître  absolu  :  car  il  dispose  de 
toutes  les  forces  qui  le  font  agir.  On  répond  ,  il  est  vrai, 
qu'il  y  a,  dans  l'industrie,  des  époques  de  chômage,  de  gêne 
et  de  souffrance  où  le  travailleur  ne  peut  trouver  à  em- 
phner  ses  bras,  à  gagner  le  pain  de  sa  famille,  et  qu'alors 
lÉtat  doit  lui  en  fournir  les  moyens.  L'argument  est  sé- 


rieux sans  doute;  mais  il  ne  résout  pas  la  question;  mais  si 
Ion  ne  demande  le  droit  au  travail  que  parce  motif, 
on  comprend  peu  la  portée  d'un  pareil  droit;  on  ne  se  fait 
pas  môme  une  idée  juste  de  ce  que  c'est  qu'un  droit. 
Si  limité  qu'il  soit  dans  son  action  ,  un  droit  est  inatta- 
quable dans  son  principe  ,  et  ce  principe  entraine  les  plus 
graves  conséquences.  Étendu  à  tous  les  citoyens  il  peut  tou- 
jours être  invoqué  par  tous,  et  entraver  à  chaque  instant 
la  marche  des  affaires.  Comprenez  ainsi  le  droit  au  travail , 
ou  ne  l'inscrivez  pas  dans  votre  Constitution  ,  si  par  là  vous 
voulez  simplement  engager  l'État  à  venir  à  l'aide  dos  in- 
dustries et  des  travailleurs  en  souffrance.  L'État  n'a  pas 
besoin  d'y  être  obligé  pour  le  faire  ;  car  il  l'a  toujours  fait , 
et,  quel  qu'il  soit,  despotique,  républicain  ou  constitu- 
tionnel ,  il  le  fera  toujours;  car  il  y  va  non-seulement  de  sa 
justice,  mais  du  premier,  du  plus  pressant  de  ses  intérêts, 
de  soutenirson  commerce  ébranlé,  de  rétablir,  dès  qu'il  le 
peut ,  le  cours  de  ces  canaux  industriels  qui  sont  les  sour- 
ces de  ses  richesses. 

Ainsi ,  il  n'est  pas  nécessaire  do  proclamer  dans  ce  but  le 
droit  au  travail  qui  ,  en  aucun  cas,  ne  peut  être  considéré 
comme  un  palliatif,  car  c'est  tout  un  principe,  tout  un  or- 
dre de  choses  nouveau  ,  qui  a  pour  base  la  concentration 
de  toutes  les  forces  de  l'industrie,  de  tous  les  instruments 
du  travail  et  de  la  production  entre  les  mains  de  l'État ,  de- 
venu par  là  le  seul  capitaliste,  le  seul  propriétaire,  le  seul 
manufacturier.  M.  Proudhon  a  donc  parfaitement  raison 
quand  du  droit  au  travail  il  déduit  la  ruine  du  droit  de  pro- 
priété; et  M.  Considérant  n'échappe  à  celte  inévitable  con- 
séquence que  par  des  distinctions  puériles  ,  ou  en  se  per- 
dant dans  les  fantastiques  régions  du  phalanstère. 

Ces  régions  viennent  d'être  tout  particulièrement  étudiées 
et  décrites,  d'après  Fourier,  par  M. 'Viclor  Hennequin,  dans 
le  cours  de  science  sociale  qu'il  a  professé  l'an  dernier  à 
Besançon  ,  et  qu'il  vient  de  publier  à  Paris.  Nous  avons  eu 
quelquefois  le  plaisird'entendre  M.  Victor  Hennequin,  lors- 
qu'il enseignait  ici  les  doctrines  du  maître  ,  et  nous  préfé- 
rons de  beaucoup  ses  improvisations  à  ses  écrits.  Ce  M.  Hen- 
nequin parle  avec  une  clarté,  une  facilité  singulière;  il 
trouve  ,  sans  le  chercher,  plus  d'un  trait  piquant,  qui  relève 
à  propos  l'attention  de  ses  auditeurs,  et  qui  ne  nuit  pas  à 
l'exposition  de  la  doctrine  phalanstérienne,  d'ailleurs  assez 
divertissante  en  soi.  Bien  moins  heureux  en  tenant  la 
plume,  M.  Hennequin  écrit  comme  tout  le  monde,  comme 
tout  le  monde  qui  n'écrit  pas  ;  sa  prose  est  une  de  ces 
honnêtes  proses  dont  on  ne  peut  dire  ni  bien  ni  mal.  Tou- 
tes ses  pages  ne  se  distinguent  les  unes  des  autres  que  par 
la  variété  des  matières  dont  elles  trailent.  Je  n'essaierai 
point  d'y  suivre  pied  à  pied  le  savant  professeur  ,  ni  de 
faire  par  conséquent  une  réfutation  en  forme  du  système 
si  complexe  de  Charles  Fourier.  Qu'il  me  soit  permis  seu- 
lement d'opposer  à  ses  adeptes  deux  objections  que  je  crois 
aï^sez  sérieuses. 

Le  principe  dont  partent  les  phalanstériens,  c'est  que 
l'homme  et  la  société  sont  deux  sujets  d'observation  et  d'é- 
tude dont  on  peut  connaître  les  phénomènes,  découvrir  et 
déterminer  les  lois  aussi  nettement ,  aussi  rigoureusement 
qu'on  a  observé  et  décrit  les  lois  de  la  nature  extérieure. 
Newton  a  découvert  les  lois  de  l'attraction  de  la  matière; 
Fourier,  celles  de  l'attraction  entre  les  hommes  et  de  l'har- 
monie qui  doit  exister  entre  eux,  entre  toutes  les  parties 
de  notre  globe,  comme  elle  existe  entre  les  sphères  célestes. 
A  cet  égard  la  philosophie  de  Fourier  se  rapproche  du  py- 
thagorisnie,  et,  comme  lui,  elle  a  dû  séduire  ces  esprits 
géométriques  qui  aiment  à  transporter,  dans  l'élude  des 
choses  morales,  la  rigueur  des  déductions  el  des  solutions 
mathématiques.  Malheureusement  rien  n'est  plus  faux  que 
ce  rapprochement  entre  l'esprit  el  la  matière,  que  cette 
assimilation  de  l'un  et  de  l'autre.  Les  grands  philosophes 
de  notre  époque  auront  beau  faire.  En  dépit  de  Fourier, 
en  dépit  de  M.  Auguste  Comte,  on  ne  fera  pas  de  ce  qu'on 
appelle  la  scietice  sociale  une  science  précise  et  positive 
comme  la  physique ,  la  chimie  ou  l'astronomie.  Dans  le 
monde  moral  les  causes  varient  éternellement,  et,  avec 
elles,  les  effets  qui  en  émanent.  11  n'y  a  pas  deux  hommes 
ni  deux  sociétés  semblables,  et  qui  puissent  se  trouver 
dans  des  situations  absolument  identiques.  C'est  pourquoi 
tous  les  systèmes  de  la  philosophie  de  l'histoire  seront  tou- 
jours des  baromètres  rétrospectifs,  qui  nous  prédisent  au- 
jourd'hui letemps  qu'il  faisait  hier.  11  en  est  de  môme  de 
la  psychologie.  Lorsqu'elle  se  renferme  dans  l'élude  des 
[ihénomènes  de  l'âme,  elle  est  puérile  et  insignifiante  :  car 
que  peul-on  savoir  sur  l'âme,  si  l'on  ignore  les  mobiles 
qui  la  font  agir?  Or,  dès  qu'elle  passe  de  l'étude  deseflels 
à  celle  des  causes,  la  psychologie  cesse,  par  cela  même,  d'ê- 
tre une  science  positive,  et  la  spéculation  y  prend  la  place 
de  l'observation. 

Comme  les  psychologues  de  l'école  écossaise  ,  et  vers  le 
même  temps  à  peu  près,  Fourier  voulut  élever  la  psycholo- 
gie au  rang  de  science  positive.  Mais  tandis  que  Reid  et  ses 
disciples  tentaient  timidement  quelques  pas  dans  cette  voie 
nouvelle,  Fourier  s'y  aventura  hardiment,  et  prenant  toutes 
ses  inductions  pour  des  faits,  tous  ses  rêves  pour  des  vé- 
rités, il  refit  mathématiquement  l'homme  à  son  image,  et  à 
l'image  de  cet  homme,  l'état  social  qui  devait  lui  convenir, 
étal  dont  le  principe  d'organision  est  l'attraction  ;  et  la  fin , 
le  bonheur  :  bonheur  qui  s'accroîtra  indéfiniment ,  grâce 
aux  progrès  indéfinis  des  séries  et  des  groupes  qui  doivent 
changer  cette  terre  en  un  nouveau  paradis  terrestre,  fort 
supérieur  au  premier.  Sans  cela  ,  ou  serait  le  progrès? 

Ce  progrès,  selon  Fourier,  doit  s'accomplir  sans  effort, 
mais  non  sans  travail.  Tout  le  monde  travaillera  dans  le 
phalanstère;  mais  loul  le  monde  s'amusera  en  travaillant, 
et  travaillera  en  s'amusant.  Écoutez  à  ce  propos  un  nou- 
veau disciple  de  l'école  sociétaire,  M.  J.-B.  Krantz,  ingé- 
nieur des  ponts  et  chaussées,  qui,  sous  se  titre  ;  Le  Présent 
et  l'Avenir,  vient  de  publier  quelques  considérations  sur  la 
théorie  du  maître  : 


«  Le  travail  devenu  un  plaisir,  dit  M.  Krantz,  ceci  sent 
le  paradoxe ,  et  voilà  deux  mots  qui  hurlent  de  se  trouver 
ensemble.  Oui  en  apparence,  mais  non  en  réalité.  Car  je 
vous  le  demande,  le  bal  n'est-il  pas  sans  contredit  un  plai- 
sir et  des  plusvifs?Cependant,  lorsqu'on  y  rénéchil,  quoi 
de  plus  maussade  el  de  plus  fatigant  que  de  marcher,  cou- 
rir, sauter  toute  une  nuit  dans  une  chambre?  On  me  paye- 
rait cher,  je  vous  pire,  pour  faire  cet  exercice,  s'il  n  avait 
avec  lui  quelque  chose  qui  le  rend  plaisir.  Ce  quelque  chose 
c  est  la  compagnie  *  belles  jeunes  llllcs,  dont  chacune  se 
dispute  les  doux  regards ,  c'est  la  présence  de  nos  amis ,  ce 
sont  les  douces  causeries,  c'est  la  musique  encore  Eh  bien  i 
ne  remarquez-vous  pas  que  tous  ces  accessoires  qui  font  de 
la  danse,  triste  travail  par  lui-même,  une  chose  si  pleine 
d  attraits,  nous  pouvons  les  introduire  dans  nos  ateliers? 
Itien  ne  nous  empêche  d'avoir  prés  de  nous,  au  milieu  de 
nos  groupes  de  travailleurs,  nos  mères,  nos  amis  nos 
amantes;  rien  ne  nous  empêche  encore  ,  dans  les  moments 
de  fatigue,  de  nous  aider  de  la  musique  ,  de  stimuler  l'é- 
mulalion  de  chacun  ;  nous  pouvons  aussi  avoir  des  ateliers 
propres,  convenables,  bien  aérés,  et  dès  lors,  je  vous  le 
demande,  travailler  dans  de  pareilles  conditions,  ne  sera- 
ce  pas  un  plaisir?  Quand  elles  seront  réalisées,  le  travail  sera 
de  bon  ton  ,  l'oisiveté  méprisée ,  et  s'il  existe  encore  des 
malfaiteurs,  soyez  sûrs  qu'on  les  condamnera  non  au  tra- 
vail, mais  au  repos  forcé.  » 

Ici  se  place  ma  seconde  objection. 

Quand  bien  même  on  pourrait  rendre  le  travail  attrayant, 
j'en  serais  très  fâché  ,  el  pour  deux  raisons. 

La  première,  c'est  que,  tel  qu'il  est.  le  travail  contribue 
essentiellement  à  la  dignité,  à  la  moralité  de  l'homme.  C'est 
une  salutaire  épreuve  qui  tous  les  jours  nous  fortifie  et  nous 
retrempe;  le  corps  en  devient  plus  robuste,  l'esprit  plus  sûr. 
les  habitudes  plus  régulières ,  l'homme  meilleur  J'ajoute 
qu  il  est  impossible  que  le  travail ,  quelle  que  soit  sa  nature, 
puisse  s'accomplir  sans  attention  ,  c'est-à-dire  sans  effort  ', 
sans  fatigue  Le  propre  de  la  distraction ,  de  la  récréation  , 
c'est  de  permettre  à  nos  esprits  de  se  dissiper,  au  cor|is  et 
à  l'âme  de  flâner  tout  à  leur  aise.  Le  propre  du  travail ,  c'est 
de  les  contenir,  de  les  fixer,  de  les  appliquer  à  un  môme  ob- 
jet. Vous  ne  changerez  point  cela.  Variez  donc,  tant  qu'il 
vous  plaira  ,  vos  exercices;  iirenes  tour  à  tour,  comme  le 
conseille  Fourier,  la  plume  ,  la  bêche  ou  le  rabot;  travaillez 
à  côté  de  vos  femmes ,  de  vos  génitrices  ou  de  vos  page.ises  ; 
cuisez  le  pain  eu  cadence,  ou  faites  des  bottes  au  son  de  la 
llûte  ou  du  llageolet;  il  arrivera  toujours  de  deux  choses 
l'une  :  ou  les  travailleurs  auront  les  doigts  et  l'esprit  à  la 
besogne,  et,  dans  ce  cas,  les  concerts  et  les  conversations 
dont  lisseront  entourés  ne  seront  peureux  qu'une  fatigue 
de  plus ,  par  l'effort  qu'il  leur  faudra  faire  pour  se  soustraire 
à  cette  distraction  ;  ou  bien  ils  prêteront  l'oreille  aux  con- 
versations et  aux  concerts,  et,  dans  ce  cas,  ils  ne  feront 
rien  qui  vaille. 

En  second  lieu  ,  en  supprimant  la  peine  qui  accompagne 
le  travail,  les  phalanstériens  supprimeraienlen  môme  temps 
la  douceurdu  repos  aui|uel  il  nous  prépare.  Leplaisiret  la 
peine  ne  nous  sont  agréable  et  pénible  que  par  la  ■compa- 
raison que  nous  faisons  de  l'un  à  l'autre.  Rien  ne  serait 
plus  fastidieux  que  de  s'amuser  toujours.  On  demanderait 
alors  comme  une  grâce  de  s'ennuyer  un  peu,  de  lire  une  ode 
ou  une  ballade  ,  de  faire  enfin  quelque  chose  qui  ne  fût  pas 
attrayant.  Rien  de  plus  facile  à  amuser  que  I  homme  labo- 
rieux. Rien  de  jilus  difficilement  amusable  que  l'oisif  qui , 
tout  le  long  du  jour,  promène  de  distraction  en  distraction 
son  inévitable  ennui,  et  qui  ne  s'intéresse  à  rien,  parce  que 
son  attention  est  incapable  de  s'attacher  à  quelque  chose. 

L'excès  en  tout  est  un  dëraul, 
a  dit  un  sage  dont  j'ai  oublié  le  nom;  les  phalanstériens 
observent  trop  peu  cette  maxime.  Selon  M.  Krantz,  on  s'a- 
musera du  soir  au  matin  et  du  malin  au  soir  dans  le  pha- 
lanstère, et,  selon  M.  Mathieu  Briancourt,  c'est  alors  que 
seront  réalisées  ces  parole.s  du  prophète  Isaie  ;  Si  votis  vou- 
lez m'écouter,  dit  te  Seigneur ,  vous  serez  rassasiés  des 
biens  de  la  terre. 

Le  fait  est  qu'on  ne  sera  que  trop  heureux  en  Harmonie 
si  nous  en  croyons  la  description  anticipée  que  vient  d'en 
tracer  M.  Mathieu  Briancourt  dans  sa  Visite  au  Phalanstère. 
C'est  un  petit  roman  dans  l'intrigue  duquel  l'auteur  a  en- 
cadré les  dissertations  romanesques  de  Fourier.  En  somme . 
cette  Visite  de  M.  Briancourt  n'est  point  désagréable,  mai.- 
elle  est  un  peu  longue.  En  fait  de  choses  inutiles  ,  il  ne  faut 
que  le  nécessaire. 

Je  n'en  ai  point  fini  avec  les  phalanstériens;  mais  l'es- 
pace me  manque  pour  vous  parler  de  quelques  autres  de 
leurs  derniers  ouvrages  ,  et  particulièrement  de  ceux  qui 
traitent  de  l'émancipation  de  la  femme  et  de  l'organisation 
du  mariage. 

Ce  sujct-tà  vaut  bien  un  article  sans  doute, 
et  cet  article ,  nous  le  ferons  dans  peu ,  mais  en  nous  re- 
commandant à  toute  l'indulgence  de  nos  lecteurs,  et  surtout 
de  nos  aimables  lectrices.  Car  malgré  les  vives  sympathies 
i|ue  nous  inspire  le  beau  sexe  en  général  et  en  particulier, 
nous  nous  apprêtons  à  combattre  cette  émancipation  de  la 
femme  ,  que  nous  trouvons ,  à  Paris  et  en  province,  très 
suffisamment  émancipée.  Uonni  soit  qui  mail  y  pense. 
Alexandre  Dufai'. 


Alhiiiii  JUoltio-Valafiiie. 

(5«  Article.  ) 

CN    RELAIS    DE    POSTE. 

Au  sein  des  pays  nioldo-valaques,  d'anciennes  traditions, 
chez  les  hospodars  ,  les  avaient  longtemps  constitués,  sous 
peine  de  mort ,  informateurs-nés  des  Sultans  de  Conslan- 
tinople. 


a; 


L'ILLUSTRATION,  JOUFîNAL  UMVERSEL. 


Li  iddi»  (loposle  Li  Muldu-\   I  cl  c,  dapie»  H    Lou;,  jult 


Princes  chrétiens  ,  vassaux  d'cmpe 
reurs  turcs  ,  et ,  la  [ilnpart  du  tenij  b 
issus  cux-mômes  d'un  sang  imperul 
ils  avaient  contracté,  tics  le  moment 
do  leurinveslituro.  l'obligation  de  tenir 
en  toute  circonstance  et  au  risque  de 
leur  vie  les  Sultans  au  courant  des 
moindres  actes  des  princes  de  la  chré- 
tienté. 

Ce  sentiment  d'obéissance  passive 
enfanté  au  sein  d'une  société  intelli 
gente  et   souple   par  une  terreui   qui 
n'était  que  trop  fondée,  avait,  depuis 
des  siècles,  donné  naissance  à  des  lia 
iJitudes  toutes  particulières  d'investi 
gation  à  l'égard  de  la  conduite  politi 
que  et  privée  de  chacun  des  nionaïques 
chrétiens. 

Ces  traditions  se  retrouvent  encore 
là  de  nos  jours  ,  et  à  chaque  pas  qu  on 
fait  sur  le  terrain  des  principautLs  du 
Danube.  Certes  on  peut  admettre 
qu'avec  la  marche  du  temps  le  cnrac 
tere  en  a  changé,  mais  il  est  clair  qu 
les  moyens  comme  les  résultats  sont 
resiés  parfaitement  les  mômes  Le  pio 
cédé  habituel  dont  usent  les  hospodirs 
est  au  surplus  fort  simple.  Prince^  très 
riches,  et,  en  général  ,  dit-on,  fort  go 
néreux.  ils  versent  l'or  à  pleines  mains 
partout  et  en  faveur  de  tous  ceux  qui 


des  principaux  points  de  l'Europe,  con- 
sentent à  leur  livrer  en  échange  les  no- 
tions les  plus  confidentielles,  les  pins 
secrètes. 

Dix-sept  princes  phanariotes ,  ré- 
gnant en  Valachie  ou  en  Moldavie, 
surpris  par  la  Porte  Ottomane  en  fla- 
rant  délit  d'ignorance  à  l'égard  de  la 
j  olitique  chrétienne,  avaient  payé  de 
leurs  léles  cette  ignorance. 

L'information  à  tout  prix  était  ainsi 
devenue  une  telle  condition  de  leur 
existence  politiipie  .  de  leur  existence 
mitérielle,  qu'après  avoir  acquis  à 
erind  frais  leurs  sources  de  nouvelles 
dans  les  cours  étrangères ,  leur  pre- 
mier soin  dans  le  gouvernement  inté- 
rieur du  pays  avait  porté  sur  le  plus 
grand  perfectionnement  de  l'adminis- 
trition  des  postes;  leur  premier  mi- 
nistre était  toujours  le  grand  postier, 
ou  postelnik  el  mare.  Celte  circon- 
stance explique  l'admiration  que  font 
éprouver  a  tout  étranger  l'extrême  ra- 
p  dite,  la  facilité  ,  l'économie  des  com- 
munications dans  ces  provinces ,  en 
dtpit  même  des  difficultés  accumulées 
que  ces  communications  rencontrent. 

Le  paysan  moldo-valaquc,  par  exem- 
I  le ,  l'être  le  plus  endormi  ,  le  plus 
désespéré,  le  plus  apathique,  devient , 


l  1  Con  ul  „e  cnl  lIi     ^er  i  Bucl  i  e^t 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


41 


Les  Mockans  (pâtres  t 


une  fois  qu'il  est  à  cheval ,  le  plus  intrépide  comme  le  plus 
adroit  postillon  du  monde  entier. 

La  plupart  du  temps  mal  vêtu,  monté  sans  élriers  comme 
sans  selle,  au  milieu  d'un 
attelage  qui  ne  se  com- 
pose guère  que  de  h.nil-  — — 
Ions  et  de  vieilles  ficel- 
lejs,  ayant  à  franchir,  à 
travers  les  steppes  et  les 
montagnes ,  des  routes 
longues,  non  frayées,  sou- 
vent impraticables  ,  au 
bout  desquelles  ,  moins 
heureux  que  ses  chevaux, 
il  est.  lui ,  sans  gîte,  sans 
nourriture  et  sans  abri  , 
l'infortuné  voyage  comme 
le  vent,  et  il  arrive.  C'est 
qu'il  emporte  avec  lui  de- 
puis des  siècles  le  bulletin 
des  opérations  de  la  chré- 
tienté contre  le  Turc  ,  et 
que  de  son  relard  dépend 
souvent  la  vie  de  son 
prince  ,  qui  est  le  vassal 
du  sidtan  ;  aussi  il  arrive. 

11  arrive  frais  et    dis- 

fios  ,  comme  il  est  parti  ; 
B  plus  modeste  salaire  le 
trouve  toujours  recon- 
naissant. 

J'ai  fait  dans  ma  vie 
plus  de  40  000  lieues  de 
poste  en  courrier.  Des 
postdlons  comme  les  su- 
rudgis  moldo-valaques , 
on  peut  en  croire  mon 
témoignage  ,  ne  se  ren- 
contrent nulle  part,  l,e 
voyageur  le  plus  indiffé- 
rent, le  plus  soucieux,  le 
plus  morose  ne   pourrait 


pas  manquer  d'être  ragaillardi  à  la  vue  de  ce  que  son  pos- 
tillon moldo-valaque  déploie  d'adresse,  de  verve,  d'entrain, 
de  philosophie,  de  ra|)idité,  de  gaieté'   A   l'imitation  des 


sagals 
Moins 
pasda 


espaî 
poéti 
nsles 


;r.ols,  il  ne  cesse  d'animer  ses  chevaux  de  la  voix. 

que  toulefoisque  lesarrieros  andaloux,  ce  n'est 

ronin?ccerosde  l'endroitqu'il  passe  pouraller  re- 
cruter les  encouragements 
prodigués  à  ses  montures. 
/(  jure  ,  lui  ,  à  faire 
trembler   tous   les   échos 

d'alentour. 

Un  jour  que  quelques 
postillons  valaques  avaient 
l'honneur  de  mener  mon- 
seigneur l'archevêque  mé- 
tropolitain actuel  ,  une 
mare  survient ,  dans  la- 
quelle le  carrosse  reste 
complètement  embourbé. 
Les  surudgis  ,  devenus 
muets  sur  leurs  chevaux 
où  leur  respect  pour  le 
prélat  enchaînait  leurtio- 
cabulaire  d'usage,  décla- 
rèrent tout  d'un  coup  aux 
gens  de  monseigneur 
qu'ils  se  reconnaissaient 
impuissants  à  le  tirer  de 
là.  On  songeait  déjà  à 
aller  requérir  à  quelques 
lieues  de  distance  des  che- 
vaux de  renfort,  quand, 
d'un  commun  accord,  tous 
les  postillons  se  présen- 
tent à  la  portière  du  saint 
prêtre,  avouent  leur  em- 
barras .  leurs  scrupules . 
et  ne  dissimulent  pas  que 
si  monseigneur  les  auto- 
risait à  jurer  il  serait  im- 
médiatement hors  d'af- 
faire. «Qu'à  cela  netienne, 
mes  enfants ,  dit  le  pieux 
archevêque  ,  je  me  bou- 
cherai les  oreilles.  » 


Moulin  et  fontaine  près  du  canal  de  Kustendgé  ,  d'après  M.  Doussault. 


Ruines  du  fort  Saiii'-r.corses  k  Giuifwu  ,  d'.ipris  M.  .M.  Counuct. 


Le  poit  d'Ibrada  en  Vilachla  ,  d'après  M.  M.  Bouquet. 


h -2 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


Aussitôt,  sous  des  avalanches  de  cataclirèscs  et  d'onoma- 
topées, dont  il  serait  vraiment  fort  emliarrassanld' offrir  ici 
la  traduction  libre,  —  les  chevaux  s'enfuient  comme  devant 
une  grêle  do  tonnerres,  et,  de  la  mare  où  il  était  engagé, 
sort  V équipage  archiépiscopal  triomphant  comme  le  char  du 
soleil. 

LES  CONSULS  ÉTRANGERS  A  BUCBABEST. 

Si  l'on  devait  juger  de  l'importance  des  fonctionnai- 
res publics  par  l'étendue  ,  par  la  multiplicité  de  leurs 
attributions  ,  il  ne  faudrait  point  hésiter  à  dire  (lu'il  n'y  a 
nulle  part  do  fonctioi;naires  plus  occupés,  et,  par  consé- 
quent, plus  importants,  que  les  agents  et  consuls  généraux 
(les  puissances  européennes  dans  les  principaulés  du  Da- 
nube. 

i'I.iir^  1,1  ^nr  un  terrain  entiériMiicnt  inexploité,  chargés 
il  .illiiM-  |nilii)ii"esde  la  plus  haute  LTavilé,de  la  nature  la 
nlii-  ,1,  lu  , il  ,  ils  ont  d'abord  ,  toutes  les  lois  iju'ils  ne  sont 
|i,i~  I  iihiMiir-  ilansie  torrent  ou  dans  les  ra»,r(/«i(ccs  des  in- 
Irii  I-  (lu  prnii'cloratrusselcequisiiiipliliealijrs  leurs fonc- 
ti,,,|.  ;;  i.nic  |irciivesurce  Ihéatrede  tiint  le  tiilent  des  plus 
hdliili  s  uiiiliiia.-adcurs:  de  plus,  ledriiit  inlerualional,  connu 
sou-  le  nom  de  capitulations  ,  existant  en  Valachie  et  en 
Moldavie  tout  conmie  aux  exlrénutés  asiatitpjcs  ou  afri- 
caines do  l'empire  ottoman  ,  tant  (|ue  ces  riches  provinces 
continuent  à  relever  do  la  suzeraineté  du  Sultan  ,  MM.  les 
consuls  étrangers,  par  le  fait  de  ces  traités  qui  ont  arraché 
aux  Turcs,  pour  la  leur  conférer  à  l'égard  de  leurs  natio- 
naux, toute  juridiction  directe,  sonten  possession  d'une  au- 
torité qui  règle  chacune  des  phases  municipales ,  sociales, 
judiciaires,  politiques ,  de  la  vie  publique  de  leurs  compa- 
triotes. 

L'agent  politique  et  consul-général  de  la  France,  par 
exemple,  outre  les  devoirs  que  lui  imposent  ses  fonctions  di- 
plomatiques, se  trouve  être  selon  l'occurrence,  maire,  no- 
taire, huissier,  juge-de-paix,  coroner,  présidentdecourd'as- 
si^cs,' geôlier,  procureur  du  roi,  oflicier  de  gendarmerie,  juge 
dins'iruction,  président  de  tribunal  de  preiniero  iiislanceet 
(le  commerce,  procureur-général ,  tout  ci'  ipiil  i  >l  iirrmis 
d'èlreennn  pour  représenter  dans(hai|uc;ill. un'  il  ;i  rliaiiue 
heure  du  jour  et  de  la  nuit  la  qualité  de  nia,^i=tral  repies- 
seur  ou  protecteur.  Ainsi  que  ses  collègues,  il  doit,  sous  le 
même  visage,  retrouver  au  besoin  les  traits  rembrunis 
d'un  grand-prevôt  ou  l'air  de  fête  permanent  du  diplo- 
mate ,  il  doit  sous  le  môme  toit  réunir  ses  salons,  sa  chan- 
cellerie, son  tribunal,  sa  prison!:.. 

Les  attributions  de  ses  collègues  d'Autriche  et  do  Russie 
se  compliquent  en  outre  de  la  distribution,  il  leurs  domiciles, 
il  une  (juantité  incalculable  de  coups  de  knout  ou  de  coups 
lie  bâton. 

Aussi  quel  n'est  pus  réUinnemcnt  des  Français  d'aujour- 
d'hui quand,  apie-  di\  imii-  .i  peino  qu'ils  ont  quitté  Pans, 
la  France,  tout  bnll.inl-  d  indépendance,  de  liberté,  et  ne 
soupçonnant  pas  d  ailleurs  le  moins  du  monde  l'existence 
des  capitulations,  ils  so  trouvent  tout.ii  coup,  et  par  leseul 
fait  d'avoir  mis  le  pied,  depuis  quelques  heures,  dans  les 
fctats  du  grand-seigneur,  régis  par  la  même  juridiction 
exceptionnelle  qui  existait  au  temps  de  François  1"  ou 
d  Henri  IV. 

Il  est  donc  absolument  nécessaire  de  dire  ici  en  peu  de 
mots  en  quoi  consistent  ces  capitulations  de  la  France  avec 
la  Porte  Ottomane. 

Elles  rrglent  trois  intérêts  principaux  :  ]aprotcctorat  re- 
liyiciij-  du  pavillon  ,  les  droits  des  commerçants,  les  attri- 
Initiuiis  judir  taires  de  nos  afjents  àl'  égard  de  nosnalionaux . 
Par  les  capitulations  les  consuls  et  ambassadeurs  de  l,i 
France  au  Levant  sont  investis  de  tels  pouvoirs  que  ,  sous 
leiirseuhi  responsabilité,  arbitres  de  la  convenance  politique 
(|u'il  peut  ^  avoir  «  ce  que  tels  ou  tels  Français  résident  ou 
non  dans  leurs  échelles ,  ils  peuvent  même  encore  aujour- 
d'hui, aux  termes  des  ordonnances  consulaires  de  I7T8  et 
I7>y,  e.ipUralices  des  traités  entre  chrétiens  et  Turcs,  les 
l'aire  cnln  rr  /»ii/.(  cl  puings  liés,  et  les  réinterner  par  les 
vaisseau.v  de  I  l'.lnl  Dans  les  dernières  années,  quelques 
grands  Cl  iiiiincls  rntL-idérantii  tort  la  terre  moldo-valaque, 
a  raison  de  son  éloiguemenl,  comme  un  Eldorado  d'impu- 
nité, ont  mis  souvent  nos  agents  dans  le  cas  d'appliquer  à 
leur  égard  ces  lois  sévères. 

Ces  attributions,  toujours  si  [lénibles,  expliquent  l'usage 
où  sont  encore  nos  consuls-généraux  dans  les  principautés 
d'avoir  auprès  d'eux  une  garde  albanaise.  Les  agents  de 
I  .\utriche  a  liucli,uvj.l  ri  ii  bi-s\ ,  qui  cunipliMil  un  nombre 
con.-idérablo  de  Inii-  ii,iliiin,iii\  il, m-  .  r- pinvinces.  ont 
c-hacuu  une  garde  dr.l,,ii/.rMMi:.ulli,in.Mip|..iilenant  il  l'in- 
fanterie do  leur  armée,  DrieMlaiix  ou  Liu.ipn  iis ,  ces  gar- 
des,  comme  on  peut  l'imaginer,  appotlml  dan-  rl]ai|uc 
lèrénionio,  il  la  promenade  ou  en  voyirjr  un  rnl  un  ap- 
parat il  la  marche,  â  la  préscnca^  des  aulni  iir-  mn-ul mes 
La  Uussie  est,  depuis  ipiclqius  aiinrr-,  ,l:iii-  I  n-.i-nli 
former  de  ses  consuls  p™/,  <■((■»/«  m  .MnliluV  .il. i  In.' I.i  [w 
pinieredrsrs  anilu-sniliaiis  a  l'.i.iislanl  innjili.  !  Picalablc- 
iiiciit  liin  h.iir-l  il  l,iss\  ni'  rr--riil  il  riiv  |iiiiir  ces  agents 
les  piisl.'-  Ir-  pin-  inipiiilanis,  Ir-  pins  ;i\  ,i  nl.igeux. 

Permis  jans  di.nilc  ,i  rlianin  ilr  inai-  .In  ivilouter  ou  de 
combattre  la  iiolitique  in--r.  in.ii-,  li.iiuhnmenl  ,  il  serait 
impossible  de  ne  pas  remliv  liinnini;!' a  l'esprit  d'équité  qui 
guido  toujours  l'empereur  ciiMi-  i  imix  qui  le  servent  bien. 
Sur  les  grands  champs  de  batailli'  de  sa  politi(|ue,  ses  en- 
couragcmentsetses  recompenses  se  mulliplient  comniedans 
un  jour  de  guerre  ;  c'est  un  sperlaile  lui  icux  ,  par  ma  foi , 
quedovoircomiiiriil  n  ('.nii-l.inlniiipln,  ,1  Pin  li.nr-l,  ,i  la.ssy, 
il  Belgrade,  à  ('.r.ir.i\  m  -imi  irr.iin|irn-rs  -ns  .nji  ail  -  .111  len- 
demain des  marrlir-  liurrr,  un  ilr-  Miiiiirr-  .Se-  l.iveurs 
s'étendent  même  ,  l.ml  il  r-l  lil.nnlri  ni.nainliipui  ,  jus- 
qu'il couvrir  de    -r-  ilr.  lil.lllnn-  II'.,  .rrlil-  ri  IMUgOrS  COUl- 

|)laisants  admiralnn-  lii  -i  -  -mir-  .^Sr,  irviteurs,  qui 
sont  presuue  tmijiuu.-  di-lingues  ou  li.ibdu^,  s'émeuvent 
du  spectacle  digne  do  pitié  que  présentent  les  agents  fran- 


çais leurs  adversaires;  ils  s'étonnent  parfois  que  dans 
notre  armée,  officiers  et  soldats  soient  si  mal  récompensés, 
citaussés,  chauffés  cl  nourris.  L'action  des  diplomates  rus- 
ses, toujours  délétère  sur  ce  terrain,  les  conduit  à  la  faveur, 
a  la  fortune  Les  agents  el  consuls-généraux  de  la  Franco, 
(|u'on  a  placés  lii  , "depuis  18ai  ,  pour  obéir  au  désir  de  ce 
boyard  ipii  voulait  qu'on  tirât  do  temps  à  autre  le  rideau 
dciiiere  leipiel  la  Russie  les  protège,  pourvoir  si  par  hasard 
elle  ne  les  aurait  pas  mangés,  doivent  bien  se  garder  de 
dire  ce  qui  se  passe,  sous  peine  de  se  voir  abandonnés , 
desavoués  ou  rappelés  par  le  gouvernement  de  la  France,  ce 
pays  de  la  loyauté  el  de  la  grandeur.  Bien  heureux  mémo 
sont  les  agents  du  ministère  des  affaires  ri  inui  i.  s  |r,inrai= 
quand,  engagés  dans  des  luttes  avec  ces  lim  ii-  lii'  i  >  - ,  ces 
faux  monnayeurs,  ces  assassins,  ces  1 
bigames  pour  lesquels  le  gniivcrnement 
d'entrailles,  ils  nrilr\  icnnrnl  p.isli 
criminels,  qu'un  sçntiinciil  riirigii| 
de  vergogne,  les  porte,  eu  Uiulr 
chasser  sans  pitié  de  la  terre  molilu-Milaqur, 

Une  seule  fois  depuis  183i  ,  sons  ||.  nnni-incde  .M.  Mole, 
le  cabinet  de  Paris  comprenant  leNirêinn  importance  du 
poste  politique  des  principautés  du  Danube,  y  a  placé  un 
des  employés  supérieurs  de  la  carrière  dos  ambassades. 
Antérieurement ,  puis  plus  tard  ,  les  divers  cabinets  ont 
trouvé  plus  conforme  à  leur  politique  de  n'y  mettre  que  des 
agents  pris  dans  le  corps  consulaire  proprement  dit. 


iii.iiili.iittjnl 
cliiiic-de  ces  grands 
t  priiloiid  de  devoir, 
iin-l.iiii'e ,  a  vouloir 


FÊTE  DES  OUVRIERS  FRANÇAIS  DANS  UN 
VAI.ACHIE. 


FOUET  DE  LA 


Il  importe  plus  que  jamais  de  le  dire  et  de  le  répéter  ; 
Aux  termes  les  [ilus  stricts  des  capitulations  de  la  France 
avec  la  Porte  ottomane,  nos  travailleurs,  de  toute  indus- 
trie, de  toutes  conditions,  de  tout  métier,  peuvent,  dans  un 
très  court  espace  de  temps,  faire  en  Sloldo-Valachie  une 
véritable  fortune. 

Le  pays  est  si  vaste  ,  si  riche  ,  il  renferme  en  forêts  ,  en 
terres  ,  en  grains  ,  en  prairies  ,  en  vignobles  tant  de  tré- 
sors, el  il  possède  si  peu  de  bras,  qu'il  y  a  là  place  pour 
un  nombre  illimité  de  Français  ,  ouvriers  honnêtes,  éclai- 
rés .  laborieux 

Un  voyagequi ,  pendant  sept  mois  de  l'année,  depuis  mars 
jusqu'en  novembre  ,  se  fait  à  très  bas  prix  de  Paris  à  Giur- 
gewo,  à  quinze  lieues  de  Bucharest ,  toujours  en  chemin  de 
for  ou  en  bateau  à  vapeur...  La  langue  facile  ii  apprendre 
en  raison  de  ses  nombreuses  affinités  avec  la  nôtre....  l'e.x- 
trême  abondance  el  l'extrême  bon  marché  des  matières  pre- 
mières,. .  la  livrede  viande  de  boucherie  à  6  centimes  ,  .. 
le  vin  à  moins  de  i  centime  la  bouteille  ,...  le  plus  beau 
poisson  ,  la  plus  belle  volaille  à  ,30  ou  -iO  centimes,...  le 
lait,  le  beurre  ,  les  œufs  pour  rien  ;..  chez  les  habitants 
une  aménité  el  une  bienveillance  exquises  ,  qui  les  portent 
a  offrir  maisons  à  habiter,  terres  aussi  à  cultiver  à  des  fa- 
milles françaises  entières  si  elles  se  recommandent  par 
leur  travail  ,  par  leur  éducation  ,  par  leur  conduite,...  ne 
sont-ce  pas  vraiment  là  des  avantages  marqués  parie  temps 
qui  court  !  ne  sont-ce  pas  lii  autant  d'attraits  pour  aller 
bien  vite  offrir  à  des  populations  entières  qui  vous  les  de- 
mandent ,  le  concours  ,  l'appui ,  l'exemple ,  les  bonsollices 
de  travailleurs  probes  ,  habiles  ,  énergiques  comme  le  sont 
les  ouvriers  français. 

La  langue  que  lui-même  parle  est  déjà  ,  en  cas  de  non- 
snccès  dans  les  travaux  de  sa  main-d'œuvre  ,  un  précieux 
capital  ,  et  combien  n'en  ai-je  pas  vu  qui ,  sous  la  seule 
protectiim  <lc  l'idiome  français,  accueillis,  choyés,  reçus 
partout  à  bras  ouverts  ,  finissaient  par  devenir  les  amis 
de  familles  riches  ,  après  y  avoir  été  les  maîtres  ,  souvent 
les  professeurs  des  enfants.  Tel  est,  en  effet  ,  ce  lien  his- 
torique de  parenté  que  les  Roumouns  se  sentent  avec 
nous,  qu'un  corps  d'armée  des  soldats  de  Napoléon  .  qui 
serait  venu  dés  180,^,  au  lendemain  do  la  bataille  d'.4us- 
lerlitz  ,  dans  les  principaulés  (lu  Danube,  aurait  donné  â 
leurs  habitants  ,  à  raison  des  affinités ,  des  sympathies  in- 
nées entre  Français  et  Moldo-  Valaques  ,  plus  d'impulsion  , 
de  progrès  ,  de  mouvement  en  avant ,  de  prospérité  en  dix- 
huit  mois,  que  ne  l'a  fait ,  depuis  bientôt  cent  ans,  le  protec- 
torat des  Russes.  Et  quand  on  voit  ce  qu'en  moins  de  vingt 
ans  nous  avons  fait  de  l'Algérie  .  on  peut  supposer  ce 
qu'avec  nos  conseils,  nosdirections,  nos  exemples,  seraient 
devenues  doux  des  plus  admirables  contrées  de  l'Europe. 
Un  exemple  tout  matériel  au  surplus  ,  s'est  offert  dans  les 
diTiiicics  années,  qui  prouve  la  vérité  de  cequonousavaii- 
çiiii-  ICI  .  cl  ipii  a  démontré  ce  que  pourraient  devenir  les 
clni-'s  \.ilai|iics  mises  entre  des  mains  françaises. 

t  n^i.iiiil  iniiiibre  d'ouvriers  bûcherons,  charpentiers 


venus  eu  Valaclu 
1  C.li.irnlais 
■  Hcnv  ,  o 


is  la 


.Maçonnais,  do  la  Franche- 
duite  d'un  honorable  né- 
le  la  hu  de  1812  a  KSHi; 
lacs  tuusquatre,  cinq  et 
-  1  lièncs  furent  conci'dés 
t  un  seul  arbre  a 


l'r.i 


I  un  dans  l'autre  au  prix  de 

fourni  2,700  de  cosciouvosqui ,  aux  marchés  de  Cette  et 
de  Bordeaux  .  se  vendent ,  année  commune,  entre  28  el 
33  fr.  le  cent. 

M.  Condemino,  c'est  le  nom  de  l'honorable  chef  de  celte 
vasto  ontrcpriso  ,  el  ses  associés,  au  nombre  de  cinq  ou  .six  . 
quitteront  en  France  des  situations  avantageuses  pour  venfr 
s'établir  dans  un  village  valaque  à  proximité  de  la  forêt. 
Là  les  plus  nobles  exemples  de  travail  no  cessèrent  d'être 
donnés  pendant  trois  ans.  Tous  les  ouvriers,  vivant  avec 
leurs  femmes  el  leurs  enfants  au  milieu  de  la  forêl ,  même 
pendant  l'hiver,  gagnaient  les  uns  jusqu'à  dix  ,  d'autres 
lusipia  soizo  francs  par  jour  !... 

LES     «oc  K  ANS     OU     PATRES     TRANSYLVAINS, 

Les  plus  anciennes  traditions  do  la  vio  agricole  et  pasto- 
rale des  lîermnins  ,  traditions  retrouvant  souvent  leur  ap- 
plication cl  leur  \  il'  par  les  viclnires  des  .Mlemands  sur  le.- 


Turcs,  amènent,  chaque  année,  au  tcin  des  principaulés 
.Moldo-Valaques  ,  d'immenses  troupeaux  venant  du  sud  de 
l'Allemagne,  et,  à  l'instar  de  la  jne«(o  espagnole,  exerçant, 
au  milieu  des  terres  incultes,  le  droit  de  vaine  pâture!  Les 
bergers  qui  mènent  ces  innombrables  troupeaux  sont  con- 
nus au  pays  moldo-valaque  sous  le  nom  de  Mockans,  et, 
avec  les  cliasseurs  de  Tamadeo ,  ils  sont  à  peu  près  les  seuls 
Ilôtus  humains  des  grands  steppes  dont  nous  avons  parlé  !.. 
Leurs  ma'urs,  leurs  coutumes,  leurs  instincts  leur  créent 
ries  affinités  sans  nombre  avec  les  Cosaques  du  Don  el  de 
l'Ukraine!.. 

La  plupart  d'entre  eux  appartiennent  à  celle  race  que 
nous  avons  plus  d'une  lois  mentionnée  dans  le  cours  de  ces 
récils...  la  race  ticule  .  qui  forme,  au  milieu  des  races  hon- 
groises, saxonnes  et  valaques,  un  enclave  important  de  la 
'Iransylvanie  !  Un  des  plus  grands  dislricls  de  la  Valacliic 
(  si  habité  aussi ,  en  partie ,  par  celte  race  :  c'est  celui  de 
Sekouieni ,  qui  prend  son  nom  de  Sckoui ,  Sicule  ! .  .  Les  Si- 
cules  sont  connus  en  .Allemagne  sous  le  nom  de  Tzecklert. 
L'armée  autrichienne  recrute  parmi  eux  d'excellents  sol- 
dats de  cavalerie  légère.  L'histoire  révolutionnaire  parle 
d'eux  à  lune  de  ses  pages  les  plus  sanglantes.  C'élaicnldes 
hussards  tzecklers  qui  conimirenl  contre  les  plénipolcn- 
tiairesde  la  République  française  à  Rasiadt  l'atlenlal  le  plus 
inou'i  dont  il  soil  fait  mention  dans  les  fastes  universels  du 
droit  des  gens.  Me  trouvant ,  dans  le  courant  de  l'été  1845, 
le  voisin  à  table,  chez  l'agent  d'Autriche  à  Bucharest,  de 
.M  le  comte  N**',  l'un  des  plus  grands  seigneurs  de  la 
Transylvanie  ,  la  conversation  vint  à  tomber  sur  cette  page 
douloureuse  de  l'hiotoire  des  Tzecklers,  el  quel  ne  fut  pas 
I  intérêt  vif  et  profond  qu'il  excita  en  moi  quand  je  l'en- 
lendis  me  raconter  qu'à  quelques  jours  de  la  ,  étant  dans  ses 
propriétés  sur  ses  terres  sicules ,  on  vint  le  soir,  fort  tard, 
lui  dire  qu'un  de  ses  plus  vieux  paysans,  se  trouvant  au  lit 
de  mort,  témoignait  un  vif  désir  de  lui  parler!  Quelque 
.ivaucée  que  lut  l'heure  l'insistance  du  messager  annonçait 
de  la  part  du  moribond  un  vœu  si  ardent  de  voir  son  seigneur 
que  le  bon  cœur  du  coniie  N***  ne  put  se  refuser  d'y  satis- 
faire, eldeux  heures  effectivement  ne  se  passaient  pas  sans 
qu'au  fond  d'une  pauvre  cabane  on  ne  vil  le  noble  'Fransyl- 
xdin  recueillant  avec  un  soin  religieux  les  dernières  paroles 
(lu  hussard  agonisant!  Or,  quelle  élail  cette  confessiou  ex- 
traordinaire qui  avait  porté  l'ancien  cavalier  à  vouloir  ab- 
solument, à  un  moment  si  solennel,  verser  dans  le  cœur 
de  son  maître  toute  l'affreuse  amerlume  du  sien? 

On  l'a  déjà  deviné  sans  doute  ' 

Au  milieu  d  un  déluge  de  larmes  amères,  arrêté  de  temps 
il  autre  par  des  sanglots,  le  vieux  hussard  tzcckler  ne  ca- 
chait plus  qu'avant  de  paraître  devant  Dieu  il  avait  voulu 
décharger  son  âme  du  poids  horrible  qu'y  avait  toujours 
laissé  la  mort  de  Roberjol ,  dont  lui  ,  quittant  le  monde,  de- 
vait malheureusement,  hélas!  près  de  cinquante  années 
après ,  se  déclarer  l'assassin  ! 

Les  Mockans  tzecklers  passent  eux-mêmes  pour  avoir  les 
habitudes  les  plus  farouches  Leur  vie,  qui  les  conduit  par- 
fois, comme  bergers  de  leurs  innombrables  troupeaux,  jus- 
qu'au fond  de  l'Asie,  n'a  rien  que  de  tristement  sauvage. 
(Certains  d'entre  eux,  déjà  mêlés  comme  enfants  à  la  con- 
duite des  troupeaux  ,  n'ont  jamais  connu  d'autre  toit  que  la 
voûte  des  cieux ,  d'autre  horloge  que  le  soleil  ou  les  étoiles, 
d'autre  vêtement  que  leurs  peaux  de  mouton  ,  d  autre  lit 
que  le  sol  de  la  terre  !  N'ayant  participé  à  aucun  deschan- 
gements amenés  par  le  temps  ,  par  la  civilisation,  par  l'in- 
ilustrie.  ils  seraient  retrouves  par  des  Romains  du  temps  de 
■Prajan  exactement  tels  ijuils  ont  été  vus  par  eux  il  y  a 
2000  ans!..  Ne  connaissant  aucun  tissu  ,  ne  soupçonnant 
pas  même  l'usage  du  linge  ,  ils  ont  la  détestable  habitude 
d'oindre  leur  corps  avec  le  suif  qu'ils  extraient  des  brebis! 
Un  jour  que,  dans  une  de  nos  haltes  de  chasse  aux  steppes, 
quelques-uns  d'entre  eux  prenaient,  par  la  pluie,  refuge 
près  de  nos  feux  ,  ils  me  surprirent  cherchant  à  m'exalter 
sur  les  délices  de  la  vie  pastorale  par  la  lecture  du  joli  ro- 
man d'Estelle.  Leur  voisinage  ne  tarda  pas  à  me  faire  passer 
brusquement  des  scènes  des  bergers  de  Florian  aux  rudes 
réalités  do  leur  vie  ûprect  nomade...  Je  laissai  bientôt  mon 
livre...  défiant,  parbleu,  l'imagination  du  chantre  de  Né- 
morin  de  trouver  sur  mes  nouveaux  hôtes  une  place  con- 
venable pour  y  attacher ,  sans  une  affreuse  disparate  ,  le 
moindre  petit  nœud  couleur  de  rose!.. 

(1  1  u  n  G  E  «  o. 

Celle  petite  ville  vahupie  ,  le  siège  de  l'une  des  trois  for- 
lcre,s,-cs  luniiics  si  longtemps  lais.-ccs  debout  par  les  traités 
cuire  niusulinanset  \ahnpies,  prend  son  nom  d'un  fort  au- 
trefois bâti  par  les  navigateurs  génois  en  1  honneur  de  saint 
Georges,  siinfo  Giorgio...  nom  dont  les  Turcs  on  (l'abord 
fait  Giurgio,  puis  Oiurgewo. 

On  retrouve  ainsi  les  vestiges  des  navigateurs  génois 
dans  toutes  les  mors  et  jusqu  aux  centres  des  plus  grands 
lieuves  du  Levant  ;  des  rivages  du  Danube  ,  ils  ont  qiicl- 
(piefois,  les  plus  illustres,  passé  au  livre  dor  de  la  noblesse 
moldo-valaque  !  tu  possession  des  plus  précieuses  tradi- 
tions maritimes,  ils  savaient,  entre  autres,  affronter  les 
périls  do  la  mer  Noire  avec  un  sang-froid,  un  couraaequi 
ne  se  retrouvent  pas  chez  tous  les  capitaines  marchands 
d'aujourd'hui.  C'est  que  dès  le  douzième  el  le  treizième 
siècles ,  des  intérêts  mercantiles,  assis  sur  des  bases  largos, 
honnêtes,  courageuses,  éclairées,  avaient  su  ouvrir  au 
prolit  des  plus  basses  classes  du  peuple  au  moyen  Age  des 
relations  cpie  la  politique  occidentale  d'aujourd  liui  ne  rou- 
git pas  d'avoir  entieromeiit  perdues    . 

Ces  temps,  que  nous  n  hc-iloiis  p.is  a  appeler  (es  temps  de 
ta  barbarie,  savaient  donc  e\ploilcr,  au  profit  de  riiiimanile 
souIVrauleet  pauvre,  les  tivsoi>dc  Mibsistances  que  la  main 
(le  DuMi  .avait  accumulées  si  près  de  iuHiS(l<ifi,trc(  riches gre- 
nin-s  d'iibiindanre! .  ri  cependant  alors  on  était  barliare,... 
bai  baiv,  .-oit  :  mais  monte  sur  de  frêles  uav  ires,  la  foi  au  cœur, 
loffr.Mule  posée  aux  pieds  de  la  Madone,  on  allait  à  travers 


L'ILLUSTRATION,   JOURNAL  UNIVERSEL. 


hô 


les  mille  périls  des  mers  cherchoi-,  pour  des  frères,  le  pain 
qui  manquait!  Marin  de  Gènes  ou  de  Veniso,  on  porlail 
jusque  dans  la  mer  d'Azof  ou  jusqu'au  centre  des  plus 
'^'rands  neuves  asiatiques  ou  européens  les  grands  noms  de 
républiques  florissantes! 

Oui.  sans  doute...  on  était  barbare ,  mais  en  échange  des 
mille  dons  de  la  Providence,  là.  d'oùon  rapportait  illustra- 
tion militaire,  science  maritime,  industrie  abondante  et 
profitable  à  tous,  on  trouvait  encore  moyen  de  laisser  après 
soi  ces  impérissables  citadelles  bâties  sous  l'invocation  des 
saints  qu'on  avait  plus  d'une  fois  invoqués  pendant  la  tem- 
pête, et  qui,  debout  sur  chaque  promontoire  des  mers  du 
Levant  |iour  y  protéger  là  de  grandes  choses,  semblent 
aujourd'hui,  du  haut'de  leurs  demeures  altières  regarder, 
moqueuses,  les  créations  éphémères,  mesquines  ou  égo'istes 
de  notre  siècle  qui  passe!... 

Cette  idée  a  inspiré  a  l'auteur  de  l'histoire  de  la  Roma- 
nie  la  page  la  plus  éloquente  qu'il  ait  écrite...  Je  ne  puis 
résister  au  plaisir  de  la  citer  ici!... 

«Oui,  s'écria-t-il  en  parlant  des  Moldo-'V'alaques,  oui, 
certes,  ce  peuple  a  été  brave!  ..  et  c'est  à  sa  bravoure  qu'il 
doit  d'être  resté  lui  quandia  Hongrie  et  la  Pologne  agitèrent 
trois  fois  la  question  du  partage  de  son  territoire.  S'il  eût 
été  moins  brave,  il  se  serait  faitmahométan  pour  mettre  fin 
à  des  luttes  qu'il  se  serait  senti  incapable  de  soutenir,  mais 
il  est  resté  orthodoxel...  Il  a  donc  été  brave,  et  l'on  verra 
que  ce  n'est  pas  lui  qui  a  lâché  pied  ni  à  Nicopoiis  m  à 
Varna.  Je  dirai  plus,  et  l'on  en  sera  moins  étonné  quand  on 
saura  que  le  sang /'rartc  et  gaulois  se  mêle  dans  ses  veines 
au  sang  romain  :  il  l'est  encore  !  Mais  il  a  perdu  presque 
tous  ses  droits  politiques  ,  mais  il  est  désarmé  ,  mais  il  est 
en  proie  à  des  influences  qui  redoutent  sa  bravoure,  se  pré- 
parent la  conquête  de  son  sol  par  la  corruption  ;  mais  il  est 
corrompu  par  cent  ans  et  plus  d'un  régime  essentiellement 
démoralisateur  sous  lequel,  semblable  à  ce  supplicié  obligé 
de  se  tenir  debout  entre  quatre  ha'ionnettes,  il  s'est  affaissé, 
comme  lui,  sous  son  propre  poids  ;  mais  il  est  démoralisé, 
sans  confiance  entre  les  membres  ,  sans  union  des  membres 
au  corps,  et  me  rappelle  ce  paralytique  de  l'Evangile  qui 
depuis  trente  ans  attendait  qu'une  main  charitable  voulût 
bien  le  mettre  dans  la  piscine!...  Quelle  sera  cette  main 
charitable?  car  il  n'y  a  pas  à  dire,  la  Romaine  (Moldo-Va- 
lachie)  attend  tout  du  dehors ,  son  développement  politique 
comme  celui  de  son  commerce. . .  Celle  de  la  France  !  oui , 
sans  doute,  les  Valaques  se  rappellent  ces  preux  de  Char- 
les \l,  avec  lesquels  leurs  pères  fraternisèrent  et  combat- 
tirent à  Nicopoiis,  les  Coucy  ,  les  La  Trémouille  ,  les  Jean- 
Sans-Peur  !...  Mais  qu'importe  aujourd'hui  la  Romanieà  la 
France?  Quel  intérêt  la  France  peut-elle  avoir  à  l'extrémité 
orientale  de  l'Europe,  à  six  cents  lieues  de  sa  frontière,  à 
l'embouchure  du  Danube,  au  bord  de  la  mer  Noire,  là  ou  il 
y  a  six  cents  ans,  sans  boussole,  sans  vapeur,  sans  rails  , 
sansargent.  sans  centralisation  ,  sans  autre  unité  enfin  que 
la  longue  échelle  féodale,  maîtresse  deConstanlinople,  elle 
combattit  pendant  cinquante  ans  pour  l'empire  du  monde, 
mais  où,  aujourd  hui  savante,  industrieuse,  active,  riche, 
unie,  féconde  en  honneur  et  en  courage,  et,  pour  vingt  peu- 
ples chrétiens,  étoile  de  salut  qu'ils  suivraient  religieuse- 
ment comme  des  mages;  non-seulement  elle  n'ose  plus  jeter 
dans  la  balance  quelqu'une  de  ces  lourdes  épées  de  Bien- 
nus,  deCharlemagne,  de  Montmorency,  de  Godefroi  ,  de 
Raymond,  de  Beaudouin.  de  Napoléon,  mais  parle  bas,  bas 
en  baissant  la  tête,  et  craint  de  développer  l'orgueil  de  son 
pavillon  sur  des  eaux  oii  Gênes,  Venise,  le  pape  lui-môme 
j;nvoyaienl  promener  leurs  galères  ;  c'est  qu'alors  il  y  avait 
un  Dieu,  que  tout  Français  disait  ;  Dieu  et  France.  C'est 
qu'aujourd'hui  il  n'est  plus  d'autre  Dieu  que  l'or,  et  que 
pour  chacun  la  France  est  moi;  c'est  que  le  titre  de  roi  trè.-^ 
chrétien  tombe  et  meurt  comme  celui  de  roi  de  Navarre  ; 
titre  glorieux,  cependant ,  le  plus  glorieux  des  titres,  résu- 
manl'en  lui-môme  l'orthodoxie  et  le  catholicisme,  Luther  et 
Calvin,  talisman  puissant,  magique,  divin,  auquel  obéiront 
un  jour  volontiers  tous  les  peuples  de  l'Évangile,  quand. 
République  très  chrétienne,  U  Franceen  saura  faire  usage.  » 
Giurgewo  est  un  des  points  les  plus  intéressants  de  la 
principauté  de  Valachie.  Le  mouvement  des  bateaux  à  va- 
peur de  la  Méditerranée  et  du  Danube  en   a  fait  depuis 
quinze  ans  l'échelle  valaque  la  plus  visitée  des  voyageurs. 
Bucharest  qui ,  avant  l'établissement  des  bateaux  à  vapeur 
du  Danube  et  de  la  Méditerranée  .  se  trouvait  aussi  sur  le 
chemin  de  tous  ceux  qui  se  rendaient  à  Constantinople,  ne 
laisse  pas  que  d'.  nvier  parfois  le  sort  de  Giurgewo  ,  Bu- 
charest fait  en  cela  preuve  d'une  haute  raison  politiijue  : 
en  effet,  les  progrès  faits  en  tout  genre  par  les  Moldo- Va- 
laques  ne  se  seraient-ils  pas  centuiilés  si  leurs  deux  capi- 
tales ne  s'étaient  tout-à  coup  et  à  leur  grand  regret  vues 
reléguées,  par  l'invention  de  la  vapeur,  dans  des  situations 
trop  méditerranées? 

Bucharest  et  Jassy  étaient  encore  il  y  a  vingt  années  les 
deux  villes  ou  les  ambassadeurs  des  grandes  puissances 
européennes  se  rendant  à  Constantinople  arrivaient  et  sé- 
journaient avec  le  plus  de  plaisir;  l'habitude  où  les  princes 
étaient,  par  ordre  de  la  Porte,  de  les  placer  sous  la  conduite 
depersonnages  importants,  qui ,  revètusdu  titre  de  mih- 
mandars .  les  faisaient  voyager  avec  apparat  et  vitesse, 
avaient  l'avantage  de  mêler  les  diplomates  importants  de 
tout  pays  au  mouvement  de  leurs  idées,  de  leurs  usages, 
de  leiir'histoire  ;  il  en  résultait  toujours,  de  part  et  d'autre, 
les  plus  intéressants  comme  les  plus  agréables  souvenirs 
Les  Hongrois  eux-mêmes  auraient-ils  une  importance  pa- 
reille à  celle  qu'ils  acquièrent  chaque  jour  si  leurs  deux  ca- 
fiitales  ,  Presbourg  et  Pesth,  n'étaient  pas  aujourd'hui  sur 
a  grande  route  de  lOccident  à  l'Orient...  le  Danube?... 

Les  Moldo- Valaques  devront  donc,  dans  un  terme  très 
prochain,  suivre  cet  exemple,  et  puisque  les  voyageurs  eu- 
ropéens se  sont  éloignés  d'eux,  c'est  à  eux  à  se  rapprocher 
des  voyageurs  européens.  Ce  jour-là  ,  la  capitale  moldave 
sera  à  Galacz,  et  celle  des  Valaques  à  Giurgewo. 


Fêtes  lie  Calais  et  Dunkeriiiie . 

L'administration  du  chemin  de  fer  du  Nord  vient  do  com- 
pléter son  réseau -ouest  par  l'ouverture  solennelle  des  ein- 
tirancliements  maritimes  de  Calais  et  Dunkerque.  Pans  est 
désormais  port  de  mer  ;  il  se  relie  par  les  voies  ferrées  aux 
cinq  principaux  ports  de  Flandre,  de  Picardie,  de  Norman- 
die: Dunkerque,  Calais,  Boulogne.  Dieppe,  et  le  Havre. 

L'inauguration  de  ces  nouvelles  lignes  a  été  célébrée  au 
commencement  de  septembre.  Le  premier  départ  a  eu  lieu 
de  Paris  le  vendredi  1",  à  six  heures  du  soir;  il  portait, 
avec  le  ministre  des  travaux  publics ,  M.  Recurt,  et  son 
collègue  de  la  justice,  M.  Marie,  bon  nombre  de  représen- 
tants, de  hauts  fonctionnaires  ,  d'employés  supérieurs  des 
ministères etd'écrivains,  conduits  par  les  principaux  admi- 
nistrateurs du  chemin  ,  MM.  James  de  Rothschild  ,  Dalon  , 
Delebecque  et  Pereyre,  dont  la  parfaite  courloisie,  les  em- 
pressements, les  bons  soins  ont  été  appréciés  du  moindre 
de  leurs  invités  durant  tout  le  cours  de  ce  rapide  et  long 
voyage  de  plaisance. 

Sept  heures  suffisent  pour  transporter  ce  train  de  grande 
vitesse  à  Lille,  où  l'on  arrive  vers  une  heure  du  aiatin.  Les 
voyageurs  se  logent ,  comme  ils  peuvent  ,  au  hasard  de 
l'hospitalité  ou  de  la  belle  étoile,  et  le  lendemain,  dés  sept 
heures,  on  est  en  route  pour  Calais. 

On  traverse  successivement  Perenchies,  Armantières, 
Steenweck,  Bailleul.  Hazebrouck  ,  où  on  trouve  une  impo- 
sante garde  nationale  sous  les  armes  ,  Eblinghem  ,  Saint- 
Oiiier,'près  duquel  l'œil  s'arrête  sur  une  église  gothique  en 
ruines  qui  fut  admirable  à  en  juger  par  ses  débris,  Walter, 
Audruick  et  Ardros,  dont  le  nom  se  lie  inséparablemeni 
au  souvenir  de  cette  royale  débauche  de  plumes,  de  ve- 
lours ,  de  joyaux  ,  de  passementerie  et  de  riches  armures 
que  les  contemporains  et  la  postérité,  après  eux,  ont  nom- 
mée le  Camp  du  drap  d'or  De  la  station  d'Ardres,  on  n'a- 
perçoit pas  malheureusement  la  vaste  plaine  située  entre 
cette  ville  et  Giiînes  où,  le  l"  juin  1320  ,  Henri  VllI  et 
F-rançois  I"  se  rencontrèrent  pour  faire  assaut,  un  mois 
durant ,  de  courtoisie  chevaleresque  et  de  magnificence 
ruineuse;  mais,  par  compensation,  voici  une  merveille  plus 
actuelle  :  c'est  le  fameux  pont  sans  pareil,  assis  précisé- 
ment au  point  d'intersection  de  deux  rivières  qui  se  cou- 
pent, à  telles  enseignes  que  ce  pont  n'est  pas  un  pont , 
mais  une  croix.  A  onze  heures  du  matin,  le  train  s'arrête  , 
après  un  parcours  de  104  kilomètres ,  non  point  à  Calais 
même,  mais  à  Saint-Pierre-lez-Calais,  un  faubourg  limitro- 
phe, sinon  plus  important,  au  moins  plus  populeux  que  la 
ville  môme.  C'est  là  qu'est  située  la  gare  provisoire  de  l'em- 
branchement qui  sera  bienlôttrapslérée  à  titre  définitif  dans 
l'intérieur  de  la  ville  et  à  proximité  du  port. 


li  était  temps ,  à  notre  sens ,  et  grand  temps  qu'un  tel 
auxiliaire,  qu'un  tel  deus  ex  machina  (à  vapeur)  vînt  en 
aide  a  l'antique  ville  d'Eustache  de  Saint-Pierre  et  de 
M.  Dessein.  Depuis  longtemps  Calais  était  malheureuse- 
ment tombé  en  voie  de  décadence,  et  j'en  gémissais  à  part 
moi  pour  cette  historique  cité. 

C'est  entre  Boulogne  et  Calais,  et  à  quelques  lieues  en 
deçà  de  cette  dernière  ville,  que  disparaissent  tout-à-coup 
les  falaises  remplacées  par  les  tristes  dunes,  et  que  com- 
mence la  grande  plaine  des  Pays-Bas,  qui  va  abaissant  son 
niveau  jusqu'en  Hollande  pour,  au  delà,  s'abîmer  sous  la 
mer  du  Nord.  Do  par  la  circonscription  géographique,  on 
est  encore  en  Picardie,  mais  déjà  paraissent  les  Flandres  , 
Fia  ndres  légèrement  pouilleuses,  il  est  vrai,  ternes  et  crayeu- 
ses, surtout  dans  le  voisinage  de  la  mer. 

—  Que  l'on  m'ouvre  le  cœur  après  ma  mort,  disait  en 
soupirant  Marie  Tudor,  on  y  trouvera  gravé  le  nom  de  Ca- 
lais.—Certes,  le  voyageur  aurait  quelque  peine  à  s'associer 
à  cette  passion  romanesque.  En  sa  qualité  de  place  forte. 
Calais  ne  peut  avoir  l'ambition  de  compter  parmi  les  sé- 
jours de  plaisance.  Une  grande  place  centrale  d'où  diver- 
gent comme  les  rais  d'un  astre  héraldique  toutes  Içs  mes 
aboutissant  uniformément  au  rempart,  tel  est  le  plan  fort 
simple  de  cette  ville  sans  air,  sans  mouvement,  sans  per- 
spective. Cerclée  et  comprimée  dans  son  étau  mural,  elle  a 
depuis  des  siècles  ce.ssé  de  respirer  et  la  vie  s'est  échappée 
djelle,  ou,  pour  mieux  dire,  c'est  la  ville  même  qui ,  lasse 
do  son  oppression,  a  peu  à  peu  rompu  ses  chaînes  et  a  dé- 
serté son  cachot.  Comme  les  demoiselles  que  ni  barbons  de 
tuteurs ,  ni  grilles,  ni  verrous  ne  sauraient  retenir,  elle  a 
enjambé  les  remparts  et  s'est  égrenée  dans  la  plaine,  autour 
du  hameau  de  Saint-Pierre,  qui  de  village  devenait  ville 
et  grande  ville,  tandis  que  de  cité  florissante  et  peuplée 
Calais  paraissait  graduellement  à  l'état  de  véritable  solitude. 
Tout  dernièrement,  il  est  vrai,  on  s'est  avisé  que  le  régime 
claustral  et  stratégique  un  peu  trop  prolongé  pouvait  bien  of- 
fusquerles  poumons  déjicalsde  la  prisonnière  et  lui  insuffler 
cet  ardenldésir  d'émigration.  Vite  alors  on  s'est  empressé 
de  démolir  un  pan  de  muraille  du  côté  de  terre  pour  intro- 
duire un  peu  de  lumière  et  d'oxygène  dans  la  geôle  Mais  il 
était  trop  tard  :  la  ville  fugitive"sélait  envolée,  et  dans  un 
avenir  prochain  ,  si  le  chemin  de  fer  n'y  met  ordre.  Calais 
menace  d'être  complètement  absorbée  par  l'ex-village  de 
Saint-Pierre,  lequel ,  du  reste  ,  n'est  rien  moins  qu'un  lieu 
de  délices  et  a  besoin  de  toute  la  puissance  de  l'antithèse 
pour  justifier  une  telle  vogue. 

11  restait  à  Calais  son  port  et  ses  bassins;  mais  un  mal- 
heur amène  l'autre.  Voyant  que  la  ville  même  abandonnait 
la  ville,  le  commerce  et  la  marine  n'ont  eu  garde  de  ne  pas 
suivre  cet  exemple  :  ils  ont  appareillé  et  cinglé  ,  vent  ar- 
rière, qui  à  Boulogne,  qui  à  Dunkerque.  Aujourd'hui,  bien 
que  touchant,  pourainsidire  ,  à  l'Angieterre,  dontlasépare 
un  unique  pas ,  assez  raisonnable  il  est  vrai ,  c'est  à  peine 
si  elle  se  survit  à  elle-même  comme  point  de  transit,  et  re- 
tient à  son  profit  une  petite  portion  de  l'immense  mouve- 


mentquichaquejours'opéreentrele  continentet  la  Grande- 
Bretagne.  Boulogne,  Dieppe,  Dunkerque  déshéritent  ou  du 
moins  déshéritaient  naguère  son  port ,  de  même  que  Saint- 
Pierre  dépeuple  ses  maisons  et  confisque  ses  habitants. 

La  bénédiction  du  chemin  a  lieu  sur  un  autel  dressé  dans 
la  gare  provisoire  de  Saint-Pierre;  elle  est  donnée  par  mon- 
seigneur de  La  Tour  d'.^uvergne,  cardinal  et  évoque  d'Ar- 
ras.  Puis  les  invités,  au  milieu  d'un  concours  imposant  de 
gardes  nationales,  prennent  le  chemin  de  Calais,  où  ils  sont 
introduits  par  la  magnifique  porte  de  Richelieu. 

En  temps  ordinaire,  de  longues  rues  où  l'herbe  menace 
de  pousser,  quelques  passants  silencieux,  de  vieux  logis  in- 
animés qui  ne  conservent  même  plus  la  physionomie  gothi- 
que ,  une  unique  promenade,  plantée  d'arbres  sur  les  rem- 
parts, où  les  habitants  vont  parfois  respirer  l'air,  comme 
les  prisonniers  des  époques  féodales  sur  la  plate-forme  d'une 
tour,  nul  commerce,  nulle  activité  dans  le  port,  et  peu  ou 
point  de  monuments,  voilà  Calais. 

Mais  aujourd'hui  rien  ne  ressemble  moins  que  Calais 
même  à  ce  portrait  Ses  rues  jonchées  de  fleurs  regorgent 
d'une  population  en  armes  et  en  habits  de  fête;  les  vivat, 
les  fanfares,  un  tumulte  joyeux  animent  la  ville  naguère 
encore  muette  et  morne  :  c'est  une  transfiguration  véritable. 
On  arrive  à  la  grande  place  où  sont  dressés  les  tables 
d'un  banquet  gigantesque  dédié  à  la  garde  nationale.  Voici 
le  beffroi  dont  la  tournure  sarrasine  annonce  les  Flandres 
espagnoles .  et  la  maison  de  ville  d'un  style  renaissance 
original  et  élégant,  au-devantde  laquelle  un  portique  fleuri 
et  délicatement  ouvré  supporte  les  bustes  de  plusieurs  hom- 
mes illustres  et  chers  à  la  mémoire  de  la  ville.  C'est  d'abord 
ce  noble  citoyen  dont  s'enorgueillit  la  potence,  Eustache  de 
Saint-Pierre,  portant  en  guise  de  cordon  de  Saint-Michel 
cette  corde  fameuse  dont  il  ceignit  son  cou  avant  de  s'ofl'rir 
en  victime  propitiatoire  à  Edouard  III  ;  puis  le  grand  car- 
dinal fondateur  de  la  citadelle  de  Calais,  et  enfin  Henri-le- 
Balafré  qu'une  inscription  surnomme  le  libérateur  de  lavUle 
et  qui  en  fit  lever  le  siège  en  1338. 

Pour  en  finir  avec  les  banquets,  disons  vite  que  la  muni- 
cipalité en  avait  fait  préparer  trois:  l'un  sur  la  grande  place, 
destiné  à  la  garde  nationale;  l'autre,  sous  les  beaux  arbres 
de  la  promenade  des  remparts,  autour  duquel  se  sont  assis 
douze  cents  ouvriers  du  port  et  du  chemin  ;  le  troisième 
enfin,  dans  un  local  couvert,  pour  les  invités  de  Paris. 

Ceux  de  nos  lecteurs  qui  ont  pris  part  à  l'inauguration  de 
la  grande  ligne  du  Nord  voilà  bientôt  deux  ans  et  demi,  ont 
sans  doute  présenteencore  à  la  mémoire  rancuneusede  l'es- 
tomac, cette cruelledéceplion  subie  chemin  faisantà  Amiens 
où  sur  le  renom  des  pâtés  de  ladite  ville  ,  chaque  touriste 
s'attendait  à  une  collation  splendide,  annoncée  au  reste  pom- 
peusement dans  le  programme  de  la  fêle,  et  où  quelques 
miettes ,  à  peine  dignes  de  Lazare,  quelques  os  à  demi  ron- 
gés, composèrent  pour  la  plupart  le  menu  du  festin  [iromis. 
Hélas!  tel  fut  à  Calais  le  sort  d'un  grand  nombre  de  voya- 
geurs qui  se  pressèrent  vainement  devant  la  salle  du  festin . 
L'édilité.  qui  n'avait  pu  inviter  tout  le  monde,  efi'rayée  de 
ce  prodigieux  concours,  eut  l'idée,  prudente  à  coup  sur, 
maisassez  peu  chevaleresque,  défaire  procédera  l'appel  no- 
minal de  ses  conviés.  H^las!  ily  eut  peu  d'appelés.  Le  croi- 
rait-on? il  se  trouva  ,  parmi  les  convives  à  jeun,  parmi  les 
estomacs  en  peine,  bon  nombre  de  personnes  haut  placées, 
des  chefs  de  cabinet,  des  représentants  même  et  jusqu'à 
un  vice-président  de  l'.Vssemblée  nationale,  M.  Corbon.  le- 
quel était  prêt  à  quitter,  non-seulement  la  place,  mais  la 
ville,  dans  un  accès  d'indignation  gastrique  que  le  procédé 
jéjunatoire  justifiait  trop,  lorsque  l'autorité  lacale  prévenue 
s'empressa  de  réparer  envers  M.  Corbon  et  ses  collègues 
l'omission  peu  parlementaire  dont  à  son  insu  évidemment 
elle  s'était  rendue  coupable. 

Au  reste,  je  ne  sais  pourquoi  il  était  écrit  que  la  ville 
de  l'aimable  M.  Dessein  serait,  bien  malgré  elle  sans  doute, 
inhospitalière  ce  jour-là.  Un  second  train,  arrivé  dans  la 
nuit,  dépose  dans  Calais,  vers  une  heure  du  matin,  M.  Du- 
piiialné,  M.  Charles  Dupin,  M.  Pagnerre,  M.  Bixio,  le 
digne  et  héroïque  blessé  de  juin  ,  et  quelques  autres  per- 
sonnages non  moins  consulaires.  Cei  messieurs,  à  cette 
heure  avancée  de  la  nuit,  se  mettent  en  quête  d'un  sou- 
per et  d'un  gîte....  soin  superflu,  vaine  entreprise!  D'un 
bout  de  la  cité  à  l'autre  et  de  la  cave  au  grenier,  tout  est 
[ilein.  Nos  représentants,  après  avoir  frappé  inutilement  à 
la  porte  de  tous  les  hôtels  de  quelque  apparence,  se  rabat- 
tent sur  les  auberges,  puis  sur  les  cabarets,  et  toujours  avec 
au.ssi  peu  de  succès.  Perdant  patience  à  la  fin.  ils  élèvent 
la  voix,  frappent  à  coups  redoublés  à  une  dernière  porte 
rebelle  dont  ils  prétendent  obtenir  l'entrée,  malgré  l'auber- 
giste effaré ,  et  font  tant  et  si  bien  que  l'hôte  picard  envoii? 
quérir  la  garde  qui  arrête  ces  me.-^sieurs  pour  tapage  noc- 
turne. Décidément,  les  vice-présidents  de  l'Assemblée  n'é- 
taient pas  en  veine  ce  jour-là.  Voyez-vous  M.  Dupin  ut 
M.  Pagnerre  au  violon  ?  Cette  aventure  ,  digne  de  Chapelle 
et  Bachaumont,  se  conclut  naturellement  par  une  recon- 
naissance et  un  coup  de  théâtre  qui  prosternent  la  garde  et 
le  cabaretier  aux  pieds  de  nos  représentants.  J'aime  à  croire 
qu'en  excipant  de  leur  titre  et  à  la  faveur  de  leur  neuf- 
centième  de  souveraineté,  ils  ont  pu  obtenir  en  fin  de 
compte  le  dédommagement  d'un  morceau  de  pain  et  d'un 
matelas.  Toutefois  ïa  chronique  ne  s'explique  môme  pas 
catégoriquement  sur  ce  point. 

Revenons  au  banquet  officiel.  Il  a  été,  comme  bien  on 
pense,  orné  de  toasts  de  tout  genre.  M.  Recurt  a  bu  à  la 
ville  de  Calais;  le  général  commamlant  la  division  a  porté 
avec  grand  succès'la  santé  du  général  Cavaignac;  M.  De- 
gouve-Denuncques ,  préfet  du  Pas  de-Calais.  a  porté  un 
toast  à  la  République.  On  a  trouvé  généralement  que  ce 
magistrat  n'avait  pas  été  bien  inspiré,  non  certes  dans  le 
choi\  de  son  toast,  mais  dans  les  développements  dont  il 
l'a  l'ait  suivre  et  en  flétrissant  avec  trop  d'amertume  ce 
qu'il  a  Domméles  turpitudes  monarchiques.  La  fête  n'avait 
rien  de  politique,  d'une  part;  du  l'autre,  le  banquet  comp- 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UMVERSEI 


Fêtes  de  Calais.  —  Banquet  de  la  Garde  Nationale  sur  la  grande  place. 


tait  parmi  ses  conviés  bon  nombre  d  An- 
glais (levant  lesquels  il  pouvait  n  être 
Sas  du  meilleur  goût  de  fulminer  contre 
une  forme  de  gouvernement  qui  est  la 
leur  ;  enfin,  cette  sortie  ne  pouvait  plaire 
non  plus,  dans  sa  forme  un  peu  trop 
acerbe,  à  la  ville  de  Calais  qui  n'est  pas 
républicaine  de  la  veille  ,  qui ,  la  pre- 
mière saluait .  en  1814  ,  la  renaissance 
des  lis  et  la  rentrée  en  France  de 
Louis  XVIII,  et  poussait  l'enthousiasme 
envers  le  restaurateur  bourbonien  jus- 
qu'à faire  graver  sur  le  bronze  I  em- 
preinte de  son  pied  royal.  Le  maire  de 
Douvres  a  recueilli  en  revanche  de  très 
nombreux  applaudissements  en  récitant 
un  petit  speech  en  langue  anglaise  où  il 
propose  de  boire  à  l'union  de  plus  en 
Iilus  élroile  de  la  France  et  de  l'Angle- 
terre et  au  développement  de  la  haute 
prospérité  commerciale  à  laquelle  elles 
peuvent  atteindre  conjointement,  à  l'aide 
des  nouvelles  voies  ouvertes  comme  in- 
termédiaires naturels  entre  les  États 
d'Amérique  et  les  nations  allemandes. 

Après  le  festin,  une  partie  des  invités 
sont  allés  faire  une  promenade  en  mer 
sur  le  joli  bateau  à  vapeur  leiîa(m,misà 
leur  disposition  pour  cette  journée  ma- 
gnifique; les  autres ,  M.  Recurt  en  tête , 
sont  allés  visiter  la  ville  et  ses  monu- 


ments dont  le  principal  est ,  après  le 
beffroi  et  la  maison  commune ,  Tt^list 
Notre-Dame  qui  remonte  aux  premiers 
temps  de  l'art  gothique,  l'époque  de  la 
force  et  de  l'austérité ,  où  les  maisons 
divines,  criblées  de  meurtrières,  flan- 
quées de  tours  et  de  donjons  sans  cesse 
retentissants  sons  le  pas  des  archers  et 
des  hommes  d'armes,  semblaient  autant 
de  forteresses.  Elle  ne  renferme  à  l'in- 
térieur aucun  objet  d'art  qui  mérite 
d'être  cité  ,  si  ce  n'est  toutefois  un  bel 
autel  de  marbre  blanc  volé  il  y  a  quel- 
que cent  ans  à  un  chapitre  de  Namur 
qui  s'en  plaint  encore  amèrement.  Voici 
comment  j'ai  oui  conter  par  les  Namu- 
rois  eux-mêmes  le  larcin  commis  à  leur 
préjudice.  L'autel,  commandé  à  un  mar- 
brier de  Gênes,  avait  été  chargé  sur  un 
navire  qui  devait  le  rendre  a  sa  desti- 
nation par  la  Meuse,  mais  qui ,  passant 
devant  Calais  ,  eut  le  malheur  de  faire 
naufrage.  Le  droit  d'aubaine ,  si  bien 
stigmatisé  par  Sterne,  était  alors  dans 
toute  sa  force.  Le  dépôt  sacré  du  navire 
belge  fut  considéré  comme  épave  par  le 
chapitre  de  Notre-Dame  qui  se  l'attri- 
bua .  malgré  les  instantes  réclamations 
des  jésuites  de  Namur .  lesquels  en  fu- 
rent réduits  à  faire  confectionner,  sur  le 
modèle  du  naufragé  ,  un  joli  autel  de 


Fêtes  de  Calais. —Bénédiction  du  Cheiuin  de  fer. 


•i;ii.i.l:stration,  journal  universel. 


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Fi-les  de  Dunkerquc—  L.i  l'rocessiou  du  lie 


ilb 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


mer  admirables ,  dans  les  Ilots  jaunes  que  soulève  la 
lame  en  s'imprégnant  de  sable  sur  cette  plage  habituelle- 
ment solitaire  ,  et  nous  avons  trouvé  fort  peu  d'imitateurs. 
Il  est  vrai  qu'il  faut  aller  chercher  le  Ilot  ii  une  grande  dis- 
limcc  ,  car  on  dirait  que  la  mer  trempe  dans  la  conjuration 
ourdie  contre  les  Calaisiens  et  que,  elleaussi  .prendà  plaisir 
d'en  abandonner  les  parages.  La  côte  ,  pourtant,  mérileune 
meillenrc  fortune  :  lagrcve  est  douce,  trésétendueetd'uTH! 
pente  presque  insensible,  bien  qu'un  peu  trop  accidentée  : 
il  y  régne  malheureusement  un  assez  fort  courant  vers 
l'oiiesl  ;  mais  c'est  la  chose  si  ordinairesur  toute  cette  cote 
que  les  mariniers  de  la  plage  ne  songent  même  pas  â  vous 
en  prévenir. 

L'établissement  des  bains  situé  sur  la  dune  même  ,  en 
avant  des  bassins  de  la  ville  ,  paraît  assez  considérable  ,  et 
lie  manque  pas  d'élégance.  Les  habitués  seuls  lui  font  dé- 
finit malgré  les  séduisantes  provocations  de  l'autorité  mu- 
nicipale. Néanmoins  il  s'y  donne  chaquemercredi  un  grand 
liai  ,  tant  que  dure  la  saison  des  bains.  Quelque  restreint 
(|ue  soit  le  nombre  d'étrangers  qui  réjionde  ii  l'appel  de 
l'imprésario  ,  ils  sont  toujours  les  bienvenus  ,  et  ces  occa- 
sions trop  rares  de  plaisir  tirent  la  ville  de  sa  torpeur. 

Nou<  avons  admiré  ensuite  ,  parmi  les  nombreux  ouvra- 
ges du  port  ,  un  très  beau  phare  de  près  de  cent  pieds  de 
hauteur,  construction  toute  récente  que  nous  avions  vu  fon- 
der il  y  a  moins  de  deu.x  ans ,  et  que  nous  retrouvons  au- 
jourd'hui entièrement  achevée  et  vraimenl  remarquable  ; 
la  jetée  ,  les  bassins  à  flot ,  et  enfin  l'écluse  de  chasse,  très 
beau  travail  dont  ceux  de  nos  lecteurs  peu  experts  dans  les 
usages  maritimes  nous  sauront  gré  de  leur  apprendre  en 
peu  de  mots  l'utilité  et  l'emploi. 

Une  écluse  de  chasse  ,  et  particulièrement  celle  de  Calais  , 
est  un  vaste  bassin  communiquant  avec  la  mer  par  quatre 
portes.  A  marée  haute  .  le  bassin  se  remplit  par  ces  quatre 
is>ues,  qu'on  a  soin  de  laisser  ouvertes.  Mais  aus.sitôt  (|ue  la 
mer  commence  à  rrfluer,  les  portes  sont  hermétiquement 
fermées  et  le  bassin  demeure  plein  ,  tandis  que  le  port,  se 
vidant  ,  laisse  les  bâtiments  à  sec  ,  en  équilibre  sur  leur 
quille  Puis  au  plus  bas  de  la  marée  ,  les  portes  sont  tout  a 
coup  rouvertes,  et  le  contenu  du  bassin  ,  se  précipitant 
brusi|uemcnt  dans  l'atterrissage  du  port  avec  une  puissance 
de  jet  (|ue  les  ingénieurs  évalueut  a  une  force  de  quinze 
viille  chevaux ,  repousse  violemment  les  sables  et  les  galets 
qu'amène  la  marée  montante,  et  qui  sans  ce  procédé  aussi 
ingénieux  que  simple  dedésobstruction  ,  ne  tarderaient  pas 
il  envahir  et  a  détériorer  gravement,  sinon  môme  à  combler 
le  port 

Ce  lutsurtout  la  nuitvenuoque  le  jeu  de  cette  écluse  gi- 
gantesque et  le  bouillonnement  des  eaux  éclairées  par  un 
l'eu  d'artifice  splendideet  une  pluie  multicolore  d'étincelles 
vertes,  rouges,  bleues  ,  blanches,  offrirent  un  coup  d'œil 
admirable.  Un  poète  de  l'école  impériale,  a  l'aspect  de  ce 
tableau  vraiment  magique  ,  n'eût  pas  manqué  de  dépen- 
ser une  pluie  d'allégories  ,  un  feu  roulant  de  métaphores  , 
pour  célébrer  dignement  cette  union  prestigieuse ,  mais 
adultère  ,  de  la  marinière  Amphitrite  et  du  citoyen 'Vulcain. 
S'ous  regrettons  de  n'avoir  pas  une  si  riche  palette  à  notre 
disposition  ,  et  nous  dirons  tout  simplement  que  ce  specta- 
cle grandiose  valait  seul  le  voyage  etétaitbien  au-dessusdes 
prétendues  merveilles  aquatiques  et  pyrotechniques  et  de 
toutes  ces  brillantes  confusions  d'éléments  qui  faisaient 
sous  le  grand  roi  (vieux  style)  l'orgueil  des  fêtes  de  Ver- 
sailles ,  et  dont  Molière  s'est  évertué  à  nous  retracer  les 
splendeurs 

Ce  superbe  effet  de  lumière  et  d'hydraulique,  combiné  en 
mode  hurmnnien ,  comme  dirait  un  disciple  de  Fourier,  et 
une  tentative  non  suivie  d'effet  pour  lancer  un  ballon  ,  ont 
clos  les  divertissements  de  cette  journée  ,  et  chacun  dans  le 
gîte  exigu  dont  il  avait  été  assez  heureux  pour  se  munir,  est 
allô  aussitôt  réparer  ses  fatigues  et  reprendre  des  forces 
pour  les  jouissances  du  lendemain  ,  car  il  fallait  partira 
iiuit  heures  pour  Dunkerque ,  où  toute  une  série  d'enchan- 
tements ,  do  surprises  ,  de  liesses  ,  d'attentions  délicates 
el  gracieuses  attendait  l'heureuse  colonie  parisienne. 

DE    CALAIS    A    nUNKEHOUE. 

De  Calais  à  Uunkerque  ,  il  faut  rétrograder  jusqu'à  Haze- 
lirouck  ,  où  se  bifurque  la  voie  ,  et  refaire  par  conséquent 
la  moitié  du  chemin  parcouru  lorsqu'on  vient  de  Lille  a 
('..dais.  Maison  ne  se  plaint  pas  de  ce  supplément  de  roule. 
.Malgré  ces  lignes  un  peu  droites,  un  peu  calmes,  tranchons 
le  mot ,  un  peu  monotones  peut-être ,  le  paysage  flamand  , 
avec  ses  magnifiques  cultures,  ses  beaux  villages  ,  ses 
maisons  peintes,  son  air  de  propreté  ,  d'aisance,  de  com- 
lort ,  ses  clochers  aigus  dont  l'azur  du  ciel  découpe  l,i  si- 
lhouette à  chaque  coin  de  l'horizon  ,  ses  plantiueiiï-cs allées 
d'arbres,  a  je  ne  sais  quel  charme  et  une  IkmuIo  seii'ine 
qui ,  pour  ma  part,  je  l'avouerai  ,  m'est  loiijouis  allée  droit 
au  cœur.  On  sent  que  ce  fertile  et  tranquille  pays  est  ha- 
bité par  dos  liommes  [irobes  ,  modérés  ,  laborieux ,  sensés , 
heureux  et  très  dignes  de  l'être  ,  car  ils  sont  bienveillants 
et  bons. 

La  premiers  station  ,  au  sortir  d'IIazebrouck,  est  au  pied 
de  ce  Jlont-C.assel  ,  le  Caucase  dos  Pays-Bas  ,  d'où  l'on 
aperçoit  trois  royaumes,  y  compris  une  république,  el  trois 
cents  villes  ou  villages.  11  nous  paraît  offrir  une  grande 
analogie  avec  la  butte  Montmartre;  car,  ainsi  qu'elle , 
il  est  couronné  de  moulins  à  vent  d'un  aspacl  des  plus 
agréables. 

Viennent  ensuite  Arnèko,  Esquolbecq  (  des  noms  à  faire 
frissonner  l'ombre  de  l)i<spréau\  ),  liermies,  la  ville  jumelle 
de  Dunkenpie.  doni  iMuisadiniroMS  Icï,  plaiil.itions  lu\urian- 
les.  etcnliii  la  noble  eue  inaritiiiic  ,  en  ïiwnrins  ICijlise  des 
Dîmes,  que  les  Flamands  iiommeiil  Vuiilierqiie 


—  Messieurs  ,  j'ai  bien  l'honneur  d'être  votre  très  hum- 
ble. Vos  passe-ports  ,  s'il  vousplalt'^ 

—  Les  voici. 

—  A  merveille.  Où  descendez-vous  ,  messieurs'?  On  vous 
les  remettra  chez  vous. 

—  Du  tout,  nous  voulons  les  attendre. 

—  Messieurs  ,  cela  sera  fort  long. 

—  Nous  ne  sommes  point  du  tout  pressés. 

—  Huit  passe-ports  à  enregistrer,  à  viser,  a  légaliser,  ce 
n'est  pas  une  [letite  besogne  ! 

—  Mettez-y  le  temps  nécessaire. 

—  J'en  ai  bien^our  une  heure  au  moins. 

—  Eh  bien  !  nous  attendrons  une  heure. 

—  Il  fait  nuit  ;  je  n'ai  que  ma  lanterne  pour  m'éclairer, 
et  encore  ne  suis-je  pas  bien  sûr  d'avoir  mes  lunettes  sur 
moi. 

—  Allez  les  chercher. 

—  Ah  !  si  fait ,  pourtant  les  voici....  Huit  passe- ports  I... 
Il  fait  grand  froid...  Messieurs,  vous  vous  enrhumerez. 

—  N'ayez  pas  peur,  digne  portier  ;  et,  puisque  vous  nous 
voulez  tant  de  bien  ,  tâchez  de  faire  diligence. 

Ce  petit  dialogue  signifie  quenoussommesà  Dunkerque  , 
ville  frontière  où  le  visa  des  passe-ports  n'est  point  une  vaine 
cérémonie  ,00  nul  voyageur  n'est  admis  s'il  n'a  en  poche  son 
portrait  d'après  nature  fait  par  l'adjoint  de  sa  commune. 
Appelés  municipal ,  à  deux  francs  la  i-éance  ;  que  le  portier- 
consigne  tire  un  fort  joli  produitde  l'enregistrement  desdites 
portraitures  sur  le  gros  livre  à  cet  effet  remis  en  ses  mains 
vigilantes,  à  cause  de  la  complaisance  qu'a  ensuitecet  homme 
obligeant  de  rapporter  à  qui  de  droit  ses  papiers  ii  domi- 
cile ,  marque  de  dévouement  et  de  bon  naturel  qu'il  est  trop 
juste  de  reconnaître  par  un  raisonnable  pourboire  ;  que, 
nonobstant,  la  compagnie  dontje  fais  partie,  c'est-à-dire  les 
voyageurs  de  la  voiture  de  Calais  ,  a  le  mauvais  cœur  de  se 
refuser  à  un  impôt  si  légitime  et  se  résigne  volontiers  à  at- 
tendre aux  portes  ,  non  pas  une  heure  ,  formidable  hyper- 
bole dont  elle  n'est  pas  dupe  ,  mais  quelques  minutes  au 
plus  ,  ce  qui  est  tout  juste  le  temps  nécessaire  au  digne  con- 
cierge pour  se  débarrasser  de  sa  facile  besogne  ,  laquelle  ii 
prend  le  parti  d'expédier  au  plus  vite  une  lois  bien  con- 
vaincu à  regret  que  toutes  les  lenteurs  du  monde  ne  par- 
viendront à  faire  entrer  ni  un  verre  devin  dans  son  gosier, 
ni  un  centime  dans  sa  bourse. 

Voilà  comment  naguère  les  choses  se  passaient  à  Dun- 
kerçiue  ,  ville  frontière  ,  el  nous  supplions  le  lecteur  de 
croire  que  nous  en  parlons  de  visu  et  de  audilu.  Mais  au- 
jourd'hui ,  arrêtez  donc  avec  un  portier-consigne  un  train 
lancé  à  toute  vapenr,  qui  prend  d'assaut  la  place  et  jettecinq 
cents  voyageurs  aux  portes  mêmes  de  la  cité  !  Dunkerque  a 
sur  Calais  ce  fort  grand  avantage 'que  le  débarcadère  de  sa 
ligne  de  fer  est  situé  dans  son  enceinte  même.  Nous  assis- 
tons dans  cette  gare  somptueusement  décorée  à  l'imposante 
cérémonie  de  la  bénédiction  du  chemin  par  deux  des  trois 
prélats-cardinaux  qui  représentent  le  clergé  français  au 
conclave  ,  Mgr  de  La  Tour  d'Auvergne ,  venu  de  Calais 
avec  nous,  et  MgrGiraud,  archevêque  de  Cambrai ,  digne 
successeur  de  Fénelon  .  sinon  par  les  talents  littéraires,  du 
moins  par  les  vertus  évangéliques. 

Nous  voici  dans  la  ville  ,  et  dès  les  premiers  pas  ,  ceci 
n'est  point  une  hyperbole  ,  nous  sommes  ravis  en  extase. 
C'estuncoupd'œil  vraiment  féerique  que  celui  que  présente 
à  nous  la  ville  disparaissant  tout  entière,  non  pas  sur  un 
point  isolé  ,  mais  d'une  extrémité  à  l'autre,  dans  son  en- 
semble comme  dans  ses  plus  modestes  quartiers  ,  sous  les 
bannières  ,  lesdrapeaux,  les  oriflammes,  lesbanderolles,  les 
tentures  oinnicolores,  ou  pour  mieux  dire  ,  ce  n'est  pas  une 
ville  ,  c'est  une  vaste  et  magnifique  décoration  d'opéra,  c'est 
une  kermesse  telle  que  jamais  n'en  ont  peinte  ni  rêvée  même 
les  Téniers  ou  les  Ostade.  Comme  il  serait  fort  difficile  de 
juger  Dunkerque  sous  tous  ces  miracles  de  mise  en  scène  , 
dépouillons-la  d'abord  de  cette  splendide  enveloppe  ,  quitte 
à  la  lui  rendre  bientôt ,  afin  de  ménager  nos  c//"e(s  ,  comme 
iloit  faire  tout  bon  machiniste  et  tout  passable  cicérone. 

ASPECT  GENÉnAL  DE  DUNKERQUE. 

Selon  moi ,  le  nom  seul  de  cette  ville  éveille  des  idées  de 
manoirs  gothiques,  detoitsaigiis,  de  (lignons,  do  ruellesen- 
chevêtiées  ,  de  hautes  tours  a  clochetons  et  de  timbres  ar- 
genlinf  qui  périodiquement  ébranlent  l'air  et  charment 
l'oreille  de  leurs  sonneries  cadencées.  Ces  imaginations  ne 
servent  qu'à  préparer  au  voyageur  littéraire  et  enthou- 
siaste une  véritable  déception,  Dunkerque  est  une  cité  ré- 
gulièrement neuve  ;  >(■>  laïucs  nirs  liiirdci>  d'éililices  mo- 
dernes se  coupent  a  aii^li  ,  (liniN  cniiiiiH'  les  .iM'iiues  d'une 
forêt  royale,  et  les  I.mi>  j.iniic.  ,  hlanr  dcl.iit  ou  \ert-olive  , 
sicliersà  la  prnprlclc  Ihiniaiidi'  ,  iciiiplarriit  iiiiiformément 
ces  tciiilcs  liniiH-s  ,  email  M'iiér.ilile  des  sin  les  dont  on  la 
supposail  ciiipri'iiite.  lluiilvcrqur  n  ,i  pUisipiun  beffroi  sans 
carillon  ;  pour  Icnile  euhsc  un  Iniiple  dcdie  a  Sainl-liloi , 
lecpiel  est  enliriciueiil  di  |iuui\u  d'iiitciél  auili'ilaiis,eldont 
lo|iortailrap|H'lle  .dassivlniii  li  rst  vrai  ,1a  laçadiMle  Saiiit- 
Sulpice.  Sur  la  grande  iilaieselcvc  la  statue  de  Jeaii-Uart, 
par  M-  David  (d'Angers) ,  car  Dunkerque  n'èlail  pas  ville 
il  rester  en  arrière  de  Dieppe  ,  qui  a  inaugure  lu  hrunze  de 
Du()uesno  ,  ni  de  Saint-Malo  ,  qui  a  fondu  sesvieuxcanons 
pour  en  tiior  l'effigie  de  son  Duguay-Trouin.  Le  Jean-Uarl 
do  M  David  est  passionné  et  expressif  comme  toutes  les 
œuvres  de  cet  llabilea^li^te.  La  pose  du  héros,  qui ,  la  tète 
haute  .  le  front  superbe  et  le  corps  fièrement  cambré  ,  jette 


un  défi  à  l'ennemi ,  est  pleine  de  fougue  et  denoblesse.  Peut- 
être  l'exécution  laissc-l-elle  à  désirer  sous  certains  aspects  : 
il  y  a  dans  ce  mouvement  une  certaine  roideur.  dans  cet 
élan  ,je  ne  sais  quoi  de  guindé  .  de  pétrifié .  si  j'ose  le  dire. 
Il  semble  que  le  bouillant  statuaire  n'ait  pas  pris  le  temps 
d'exprimer  toute  l'énergie  de  sa  pensée.  Il  l'a  déversée  li- 
quéliante  dans  le  creuset .  avant  d'élaborer  le  moule.  Néan- 
moins ,  le  Jean-Bart  jouità  Dunkerque  d'une  juste  popula- 
rité ,  et  le  premier  anniversaire  de  l'érection  de  la  statue 
(  .j  septembre  18i3  )  fut  fêté  ,  nous  dit-on  ,  par  une  ovation 
imposante ,  qui  s'adressait  non-seulement  au  grand  marin  , 
mais  au  sculpteur.  Les  femmes  et  filles  de  malelolsy  étaient 
en  majorité ,  et  elles  récitèrent  à  la  statue  un  compliment 
naif  qui  dut  aller  au  cœur  de  l'illustre  défunt ,  malgré  Vas 
(ripiez;  symbolique  qui  aujourd'hui  revêt  sa  vaillante  poi- 
trine de  soldat  el  de  navigateur. 

Dunkerque  se  divise  en  deux  villes  distinctes  :  celle  qu'on 
voit ,  neuve,  symétrique  ,  soigneusemcnlbadigconnée;  l'au- 
tre ,  invisible  et  souterraine,  dont  les  toits  sont  à  la  hauteur 
du  pavé  el  dont  les  persiennes  s'ouvrent  au  niveau  du  trot- 
toir. Sous  chaque  maison  s'élage  une  profonde  cave  (ce  sont 
les  anciens  greniers  à  sel  ) ,  et  ces  caves  renferment .  non  des 
bouteilles  ni  des  fûts  ,  mais  une  population  nombreuse.  J'i- 
magine que  l'habitude  des  bombardements  de  l'Anglais 
donna  aux  Dunkerquois  l'idée  de  s'inhumer  ainsi  vivants 
dans  ces  façons  de  casemates,  et  que  cet  usage  prudent , 
une  fois  passé  dans  les  mœurs  .  est  devenu  pour  eux  une 
seconde  nature  On  descend  dans  ces  grottes  ,  non  par  l'in- 
térieur de  la  maison  ,  mais  par  des  trous  carrés  percésdans 
le  dallage  du  trottoir,  auxquels  aboulil  une  rampe  et  que 
recouvre  ,  pendant  la  nuit  ,  ou  en  l'absence  des  habitants  , 
une  sorte  de  trappe  ou  de  plancher  mobile.  C'est  par  la 
même  voie  unique  qu'un  peu  d'air  el  de  lumière  pénètre 
dans  ces  terriers.  Je  n'ai  pas  été  peu  surpris  de  voir  de  tou- 
tes parts  ,  dans  les  rues  tie  Dunkerque  ,  ces  étranges  portes- 
fenêtres  s'ouvrir  comme  des  écailles  d'hullres  aux  premiers 
rayonsdu  soleil  ;  puis  apparaître  tout  doucement,  un  peu  au- 
dessus  de  la  dalle  ,  des  têtes  humaines  dont  les  corps  res- 
taient plongés  dans  les  entrailles  de  la  terre  ,  dételle  façon 
qu'elles  présentaient  à  distance  l'image  saisissante  de  ces 
supplicies  de  la  Chine  ,  qu'un  souverain  barbare  fai.sait  en- 
terrer vifs  jusqu'au  menton.  Je  n'ai  pas  à  discuter  le  mérite 
de  ce  mode  d'habitation  renouvelé  des  anciens  Guanches  : 
il  peut  se  faire  qu'il  offre  de  ténébreuses  jouissances  .  de 
mystérieuses  compensations  aux  citadins  qui  s'y  confinent  ; 
je  n'en  parlerai  qu'au  point  de  vue  du  promeneur  et  du  pas- 
sant qui  courent  à  chaque  pas  le  risiiue  de  s'abimer  dans 
un  insondable  dessous  comme  un  diable  d'opéra  ,  ou  démet- 
tre le  pied  sur  un  de  leurs  semblables,  en  croyant  foulerun 
pavé.  Je  ne  puis  songer  sans  effroi  à  ce  que  deviendrait  un 
aveugle  errant  dans  les  rues  de  Dunkerque.  Je  ne  suis  que 
myope ,  et  dès  mes  premiers  pas  dans  celte  ville  semi-sou- 
terraine, j'ai  failli  heurter  du  pied  un  couple  amoureux  qui 
prenait  le  frais  à  la  hauteur  de  la  chaussée  et  devisait ,  en 
respirant  la  brise  matinale  du  ruisseau.  Il  ne  paraît  pas  au 
surplus  que  ces  singuliers  logements  soient  exclusivement 
la  demeure  de  la  population  indigente  delà  ville,  comme  on 
pourrait  le  supposer.  L'ameublement  de  plusieurs  de  ces 
caves  révèle  une  certaine  aisance  chez  les  particuliers  qui 
s'y  blottissent  On  y  trouve  non-seulement  la  propreté  fla- 
mande ,  mais  des  prétentions  ,  parfois  justifiées,  à  I  élégance 
et  au  comforl.  Des  pots  de  fuchsias,  de  reines-marguerites, 
de  géraniums  et  d'hortensias  ,  pâles  fleurs  plus  souvent 
éclairées  par  la  lampe  que  par  les  rayons  du  soleil ,  garnis- 
sent fréquemment  les  marches  de  l'escalier  conduisant  à  la 
tabatière  ou  écoutille  extérieure  ,  qui  sert  ainsi  tout  à  la  fois 
de  balcon  ,  de  jardin,  de  porte  et  de  fenêtre.  Beaucoup  de 
propriétaires  font  la  spéculation  de  meubler  eux-mêmes  ces 
caves  el  de  les  louer  a  tant  par  mois  ;  c  est  ce  qu'indiquent 
quantité  d'écrileaux  appendus  aux  murs  etofl'ranl  invaria- 
blement un  dessous  de  maison  garni  à  louer,  fraîchement 
décoré,  soit  pour  le  prochain  terme  ,  soit  pour  une  immé- 
diate entrée  en  jouissance.  Cette  dernière  formule  me  pa- 
raît un  remarquable  abus  de  langue.  Je  n'aime  pas  non  plus 
le  dessous  de  maison.  Je  ne  vois  pas  pourquoi  on  n'oserait 
écrire  :  Un  souterrain  garni  à  louer 

Le  port  et  les  bas-ins  de  Dunkerque  ,  que  l'.Xnglais  a 
voulu  combler,  témoignant  ainsi  par  cette  rage  de  l'impor- 
tance q'uil  altachail  a  ce  débouché  maritime,  reviennent 
peu  à  peu  à  l'animation  el  à  la  prospérité  qui  leur  avaient 
valu  celte  étrange  marque  d'estime  cel  édit  de  proscription 
digne  d'un  Genséric  et  non  d'une  nation  civilisée.  Ce  crime 
de  lèse-humanité  ,  cel  outrage  sanglant  jeté  à  la  détresse 
d'un  grand  roi ,  n'ont  pasélé,  grâce  à  Dieu  ,  poussésà  leurs 
dernières  limites ,  et  Dunkerque  pourra  voir  renaître  sa 
S[ilcndeur  des  anciens  jours  ,  si  la  mer,  sa  féconde  et  riche 
fiancée  ,  ne  l'abandonne  pas  dans  celte  humeur  fantasque 
commune  aux  divinités-femmes.  C  est  là  le  sort  qui  attend 
peut-être  dans  l'avenir  le  pori  et  la  ville  de  Dunkerque  La 
mer  s  éloigne  lentement  et  les  deux  immenses  jetées  qui 
.semblent  la  poursuivre  ont  peine  à  atteindre .  malgré  leur 
hypcilii>li(]ui'  longueur,  le  flot  capricieux  chaque  jour  moins 
afiondant  et  plus  rclielle.  S'il  venait  à  tarir  dans  le  large 
chenal  qui  iiiriie  les  navires  au  port  ,  ce  serait  fail  de  Ta 
ville  qui  drvr.iil  des  ce  moment  se  résigner  au  sorl  funèbre 
d'Aiguos-Miirtes  el  de  Harfleur.  autrefois  des  ports  floris- 
saiils  ,  .injnuid  liiii  pei-dus  dans  les  terres  Mais  il  faut  se 
lliM  -  iii~  il  iiii  !ii\  puissantes  ressources  el  aux  progresin- 
d(liîn>  Ar  l.i  -CI'  lice  moderne  du  soin  do  prévenir  une  telle 
calaiiiiU'  n.ih.iiLile. 

La  même  circonstance,  jointe  sans  doule  à  la  position 
excentrique  de  Uunkerque,  reléguée  au  sommet  de  l'angle 
le  pliisseplenlrional  de  France,  a  parujusqu'ici  un  obstacle 
invincible  au  développement  de  son  elablissemenl  thermal. 
Uieii  lepriidaut  u'esl  epap,;iie  poin  y  .illln-r  les  longueurs 
L'clalili.s>ciiieiit  esl  élégant,  oommodo.  suflisamnient  spa- 
cieux. Un  \  sent  l'iufluenced'une  bonticdircclion.  Si  la  ville 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


lil 


n'est  pas  des  plus  gaies  ,  elle  vaut  bien  tout  au  moins  le 
séjour  d'Ostende.  On  trouve  de  l'affabilité  et  de  la  bonho- 
mie parmi  ses  habitants,  et .  qui  plus  est,  de  la  conscience. 
La  vie  y  est  facile,  large,  peu  dispendieuse,  et  faite  pour 
contenter  au  moins  de  frais  possible,  les  exigences  gastro- 
nomiques. Les  prix  de  l'établissement  sont  aussi  des  plus 
modérés.  Les  voitures-baignoires  sont  les  plus  agréables  , 
les  mieux  pourvues  et  les  moins  chères  que  j'aie  encore 
trouvées  en  France.  Néanmoins  la  plage  do  Dunkerque 
n'attire  dans  la  belle  saison  que  d'assez  rares  visiteurs.  Il 
faut  aller  chercher  la  mer  à  des  distances  olympiques,  pour 
ne  rencontrer  le  plus  souvent  qu'un  Ilot  grêle,  sans  pro- 
fondeur J'en  ai  fait  1  épreuve  et  je  puis  dire  que  j'ai  quel- 
quefois à  peine  trouvé  de  l'eau  dans  l'Océan. 

L'établissement  situé,  comme  celui  de  Calais,  au  haut 
de  la  dune,  renierme  une  longue  galerie ,  une  salle  de  bal. 
un  salon  attribué  aux  dames,  un  cabinet  de  lecture,  une 
salle  de  billard  et  un  café-restaurant  dont  le  service  et  le 
tarif  méritent  les  plus  grands  éloges.  Tout  cela  est  fort 
convenablement  décoré  et  meublé ,  quoique  sans  aucun 
luxe.  L'édifice  présente  sa  façade  principale  à  la  mer;  de 
l'autre  côté  le  chef  de  l'établissement  s'est  efforcé  de  plan- 
ter quelques  buis  et  quelques  arbustes  dont  la  réunion  est 
ambitieusement  qualifiée  de  jardin  anglais.  Il  était  difficile 
de  mieux  faire  au  surplus  sous  le  feu  dévorani  d'un  en- 
nemi mortel  a  toute  végétation  comme  l'àpre  brise  de  la 
Manche  .  et  ce  peu  de  verdure  dont  il  faut  remercier  le  di- 
recteur, anime  encore  et  réjouit  cette  grève  morne  et  sa- 
blonneuse. 

DÙNKEBQOE    LES    3    ET   i   SEPTEMBRE. 

Dunkerque  est  une  ville  agréable  on  tout  temps;  mais 
la  munificence  de  ses  habitants,  leur  émulation  à  fêter  di- 
gnement l'inauguration  de  leur  ligne  de  fer  et  leurs  hôtes 
parisiens  en  ont  fait  un  séjour  de  fées.  Nous  avo:.s  dit  que 
tout  Dunkerque  ,  port  et  cité  ,  maisons  et  navires,  ville  et 
faubourgs,  était  fleuri  et  pavoisé.  Mais  le  plus  étonnant , 
c'est  que  la  décoration  des  rues ,  places  ou  avenues  était 
variée  ii  l'iniini  :  pas  une  ne  ressemblait  aux  autres;  mais 
partout  avait  présidé  une  imagination  ,  un  goût  véritable- 
ment merveilleux.  Pour  n'en  citer  que  quelques-unes  (bien 
que  pour  être  juste  il  fallût  tout  décrire),  on  remarquait  la 
rue  Arago  toute  tendue  de  pavillons  et  garnie  de  rosen- 
huls  (littéralement  chapeaux  de  roses),  édifices  aériens  ap- 
pendus  sur  la  voie  publique  à  peu  près  en  forme  de  lustres 
et  composés  d'une  couronne  de  dentelles  noires  très  fines 
retenant  des  fils  innombrables  qui  supportent  eux-mêmes 
à  leurs  extrémités  des  rondelles  de  drap  de  couleur  écarlate, 
des  disques  de  métal  léger,  des  œufs  et  dos  verroteries  qui 
s'entrechoquent  et  résonnent  plus  ou  moins  harmonieuse- 
ment au  moindre  souffle  de  la  brise;  la  rue  Dupouy,  trans- 
formée en  une  avenue  verdoyante  ornée  d'innombrables 
bannières  et  de  lanternes  de  couleur ,  oii  s  élevait  un  arc- 
de-triomphe  en  feuillage  portant  à  son  fronton  l'esquisse 
tracée  à  grands  traits  d'un  chemin  do  fer.  et  au-dessus  cette 
inscription  :  A  lamémoiredu  citoyen  Dupouy  (ancien dé- 
puté et  ancien  maire  de  Dunkerque,  fort  considéré  et  fort 
aimé  à  juste  titre),  lequel ,  par  parenthèse,  est  tout  plein  de 
santé,  bien  que  cette  inscription  comménioralive  ne  tende 
à  rien  moins  qu'à  le  ranger  parmi  les  vivants  de  la  veille  ■■ 
enfin  la  rue  de  la  Marine  où  régnent,  avec  une  profusion  de 
bannières  et  de  rosenhuts,  deux  longues  liles  de  poteaux 
de  verdure  rattachés  entre  eux  par  des  écliarpes  aux  cou- 
leurs de  la  ville,  c'est-à-dire  mi-parties  bleues  et  blanches, 
et  où  sur  les  tentures  des  maisons,  de  chaque  coté,  une 
suite  d'élégantes  couronnes  circonscrivent  le  nom  de  toutes 
les  villes  auxquelles  Dunkerque  se  relie  par  le  nouveau 
chemin  de  fer. 

Sur  ces  quelques  échantillons,  vous  jugez  si  les  Dunker- 
quoi's  sont  passes  maîtres  en  l'art  des  fêtes  et  liesses  ;  mais 
vous  en  verrez  bien  d'autres.  L'autorité  n'intervient  pas  dans 
ces  solennités  publiques,  elle  n'a  que  faire  de  s'en  mêler. 
L'imagination,  le  zèle,  le  bon  goiitdes  habitants  lui  viennent 
puissamment  en  aide,  ou  même,  pour  mieux  dire,  suppléent 
entièrement  son  action.  Est-il  question  d'organiser  une 
grande  fête,  le  maire  en  avise  simplement  ses  administrés 
quelques  semaines  à  l'avance.  Un  bureau  de  renseignements 
est  ouvert  à  fhôtel-de-ville  pour  recevoir  les  plans,  devis 
et  conceptions  de  chacun.  Uncomitésupérieur  fait  un  choix 
entre  ces  diverses  propositions  artistiques,  arrête  le  pro- 
gramme et  nomme  pour  chaque  quartier  des  commissaires 
chargés  de  son  exécution.  Ces  derniers  surveillent  et  diri- 
gent les  apprêts,  passent  les  marchés,  et  ne  font  jamais  un 
seul  achat  sans  une  vente  immédiatement  correspondante , 
c'est-à-dire  que  ce  qu'ils  payent  1  franc  par  exemple  ,  est 
déjà  revendu  au  même  marchand  ou  à  tout  autre  pour  7j 
centimes  avant  d'être  mis  en  œuvre.  C'est  là,  à  vrai  dire, 
une  véritable  location  passée  dans  les  usages  du  pays,  et 
qui  a  le  double  avantage  de  ménager  les  deniers  des  sou- 
scripteurs en  obtenant  pour  peu  d'argent  des  effets  bien 
supérieurs  à  ce  qu'ailleurs  on  produirait  pour  des  sommes 
beaucoup  plus  fortes.  Quant  aux  frais,  ils  sont  supportés 
par  voie  de  coti>alion  volontaire  ;  riche  ou  pauvre,  cha- 
cun porte  son  offrande,  sauf  quel(]ues  récalcitrants  aux- 
quels n'est  infligée  d'autre  punition  que  de  voir  leurs 
maisons  ,  privées  de  tout  ornement ,  faire  tache  par  cette 
nudité  dans  les  splendeurs  universelles.  A  l'issue  de  la 
fête,  des  médailles  d'honneur  sont  décernées  par  un  jury 
spécial  aux  décorateurs  qui  se  sont  le  mieux  acquittés  de 
leur  tâche. 

Nous  avons  cru  devoir  rapporter  ces  détails  peu  connus 
parce  qu'ils  jettent  du  jour  sur  les  mœurs  de  cette  excellente, 
cordiale  et  trop  heureuse  population  flamande,  en  qui  l'a- 
mour des  fêtes  est  une  passion  sérieuse,  innée,  nationale,  à 
l'épreuve  des  soucis  et  des  graves  orages  politiques,  qui, 
partout  ailleurs,  chassent  les  plaisirs  devant  eux  en  môme 
temps  qu'ils  jettent  au  front  des  citoyens  la  maussaderie  et 
l'amertume. 


Le  comité  supérieur  qui  a  organisé  la  dernière  fête  de 
Dunkerque  mérite  de  passera  la  postérité  do  ['Illustration. 
Nous  avons  recueilli  les  noms  de  ses  membres  dans  un  élan 
d'enthousiaste  gratitude;  ce  sont:  MM.  Lefèvre  ,  Desgra- 
viers, Forcade,  Dutoit,  Delfosse  et  Malo,  tous  gens  de  goût 
assurément,  ils  nous  en  ont  fourni  la  preuve. 

Entamons  la  série  des  fêtes. 

Uu  banquet  magnifique  fut,  en  premier  lieu  ,  offert  aux 
invités  de  Paris,  où  la  gastronomie  dunkerqiioise,  qui  jouit 
d'uneréputation  méritée,  brilla  de  toute  sa  splendeur.  Nom- 
bre de  toasts  et  de  discours  furent  portés  et  prononces  ;  l'un 
par  M.  Marie,  ministre  de  la  justice,  l'autre  par  M.  Durand 
Saint-Amand,  préfet  du  Nord,  qui  fut  beaucoup  mieux  in- 
spiré et  plus  heureux  oratoirement  que  ne  favait  été  la 
veille  son  collègue  du  Pas-de-Calais;  un  troisième  enfin 
par  M.  Du|)in  aine,  qui  trouva  le  chemin  du  cœur  des  Dun- 
kerquois  en  buvant  à  leur  Jean  Bart,  et  eut,  au  dire  de 
chacun,  tous  les  honneurs  de  la  séance.  Enfin  il  n'y  eut 
pas  jusqu'à  M.  James  Rothschild  qui  ne  voulut  aussi  se 
lancer  bravement  dans  les  hasard  d'un  petit  speech  ,  et  ne 
s'en  tira  pas  trop  mal  pour  un  financier  allemand  dont  le 
métier  n'est  pas  d'avoir  de  l'éloquence  et  qui  pos.sé(ledans 
sa  caisse  une  collection  d'arguments  qui  le  dispensent  de 
tous  autres. 

Pendant  le  même  temps,  un  autre  banquet  était  offert 
aux  nombreuses  gardes  nationales  accourues  de  vingt 
points  différents  pour  prendre  part  et  contribuer  elles-mê- 
mes, par  leur  belle  tenue  et  leurs  musiques  admirables,  à 
l'éclat  de  cette  grande  fête. 

Au  sortir  de  table,  on  alla  dansl'arrière-port  tout  couvert 
de  bâtiments  pavoises,  assister  au  lancement  de- la  Biche  , 
beau  navire  à  vapeur  de  l'Etat,  tout  entier  en  fer  et  a  hé- 
lice, L'opération  dirigée  par  M.  Mimerel ,  ingénieur  mariti- 
me s'effectua  sans  aucun  encombre,  et  tandis  que  la  Biche 
prenait  majestueusement  possession  du  flot  amer,  le  Lé- 
vrier, un  joli  cotre  de  la  marine  nationale,  fêtait ,  par  une 
salve  de  neuf  coups  de  canon,  cette  intronisation  nautique. 
Pendant  ce  temps  le  capitaine  d'un  beau  trois-mâts  amé- 
ricain avait  eu  la  galanterie  de  mettre  toute  sa  toile  de- 
hors, misaine,  grand'voile,  artimon,  brigantine,  focs, 
huniers,  bonnettes,  afin  de  donner  une  idée  de  ce  qu'est 
un  grand  navire  sous  voiles  à  nos  touristes  parisiens  dont 
la  plupart  n'avaient  jamais  assisté  à  pareil  spectacle. 

D'autres  embarcations  furent  mises  ensuite  à  la  disposi- 
tion des  voyageurs  pour  des  promenades  en  mer  que  favo- 
risait un  ciel  magnifique;  aussi  la  plupart  s'empressèrent-ils 
de  répondre  à  ce  courtois  appel ,  y  compris  MM.  les  minis- 
tres qui  ,  toutefois,  à  peine  sortis  du  port,  se  virent  con- 
traints d'y  rentrer  ;  car  ils  étaient  montés  sur  un  navire  à 
voiles  et.  à  la  nature  de  la  brise  qui  s'élevait  en  co  moment  . 
il  aurait  fort  bien  pu  se  faire  qu'ils  allassent,  bon  gré.  mal 
gré,  visiter  les  côtes  britanniques  avant  de  rentrer  à  Dun- 
kerque, voyage  de  plaisance  forcé  qui  ne  cadrait  apparem- 
ment ni  avec  leur  goût  personnel,  ni  avec  les  exigences  du 
portefeuille. En  conséquence, le  bâtiment  qui  portait  MM.Rc- 
curt,  Marie  et  leur  fortune,  ne  tarda  point  à  virer  de  bord 
et  à  cingler  vers  le  rivage  ,  tandis  que  les  autres  navires 
tiraient  au  large,  à  la  grande  joie  de  leurs  passagers  moins 
illustres  et  moins  pressés  de  gagner  la  terre-ferme. 

Le  soir  il  y  eut  grand  concert  de  150  musiiiens  sur  Tune 
des  principales  places  de  la  ville,  et  ensuite  feu  d'artifice. 

Tels  furent  les  plaisirsde  celte  première  journée ,  laquelle 
n'était  au  surplus,  pour  ainsi  dire,  que  le  prélude  de  la  fête 
du  lendemain.  La  grande  difficulté  fut  de  trouver  un  gîte; 
car  l'affluence  était  énorme  ,  et  c'est  ici  que  le  côté  émi- 
nemment hospitalier  et  bienveillant  du  caractère  dunker- 
quois  se  montra  sous  son  meilleur  jour.  Non-seulement  les 
habitants  s'empressaient  de  céder  aux  étrangers  tout  ou 
partie  de  leur  logement ,  et  parfois  même  jusqu'à  leur  lit 
de  la  meilleure  grâce  du  monde;  mais  la  municipalité  avait 
poussé  l'attention  et  la  prévoyance  jusqu'à  faire  installer 
dans  les  édifices  dont  elle  dispose  ,  des  dortoirs  publics  , 
sorte  de  salles  d'asile,  à  l'usage  de  ceux  qui  n'auraient  pu 
trouver  une  place  où  reposer  leur  tête.  L'expérience  prouva 
que  la  précaution  n'avait  pas  été  inutile;  elle  ne  fut  pas 
môme  suffisante,  car  l'affluence  était  énorme,  et  il  était  en- 
tré dans  la  ville  deux  fois  plus  de  citoyens  qu'elle  n'en  pou- 
vait raisonnablement  contenir.  Plus  heureux  que  bien  d'au- 
tres, nous  avions  réussi,  par  grâce  spéciale  du  sort,  à  nous 
glisser  subrepticement  dans  l'excellent  hôtel  du  Chapeau- 
Rouge  situé  dans  la  ci-devant  rue  d'Orléans,  devenue  la  rue 
Arago,  et  là,  bien  que  nous  ne  fussions  pas  commis-voya- 
geur, on  avait  consenti  par  humanité  à  ne  pas  nous  mettre 
dehors.  Introduit  à  l'heure  du  dîner,  parmi  les  hôtes  habi- 
tuels ,  pour  ne  pas  dire  les  maîtres  absolus  de  cette  très 
confortable  hôtellerie,  nous  crûmes  tout  d'abord  voir  dans 
ces  messieurs  une  réunion  de  gens  de  lettres.  On  s'y  serait 
trompé  à  moins.  Le  mot  professionnel  d'article  pétillait  in- 
cessamment dans  leur  discours. — Excellent  article  !  disait 
l'un.— Voilà  un  article  que  j'aime  i— Je  viens  de  faire  mon 
article,  et  ainsi  ab  ovo  usque  ad  mala.  —  Et  quel  est  votre 
article?  me  hasardai-je  à  demander  à  mon  voisin  ,  conce- 
vant je  ne  sais  quelle  espérance  stupide  de  trouver  en  lui 
un  confrère. — Monsieur,  ce  sont  les  chicorées,  joli  article  ! 
— Me  voilà  pris  avec  ma  sotte  curiosité.  (,)uelle  branche  de 
littératurel  Toutefois  je  glisse  encore  une  timide  question. 
— A  quoi  bon,  monsieur,  cet...  or(ic(e.'— Comment  I  mon- 
sieur, s'écrie  mon  interlocuteur  du  ton  de  la  majesté  offen- 
sée, et,  sans  mon  article,  avec  quoi  ferait-on  le  café,  s'il  vous 
plaît?  —  Mais  avec...  —  Du  café  ,  n'est-ce  pas?Toujours  le 
même  refrain.  Ils  ne  savent  dire  que  cela  !  Le  café,  drogue 
malsaine  ,  irritante,  dont,  grâce  à  nous,  l'usage  est  à  peu 
près  abandonné. —  En  vérité?  —  Monsieur,  il  n'y  a  plus  de 
cafél  Ces  dernières  paroles  furent  dites  avec  l'accent  irré- 
sistible de  conviction  et  de  triomphe  dont  jadis  un  roman- 
tique barbu  ,  après  avoir  vu  Hernani ,  s'écriait  :  «  Enfctncé 
Racine  !  »  J'avoue  que  je  n'aurais  pas  cru  à  l'existence  d'un 


tel  article  .-  il  me  semblait  y  voir  une  vieille  calomnie  ré- 
trospective du  temps  du  blocus  continental.  Il  n'en  est 
rien,  les  mauvaises  herbes  ne  s'extirpent  point  si  aisément, 
et  celle-là  a  survécu  au  cèdre  impérial  qui  l'avait  fait  ger- 
mer. Le  département  du  Nord  continue  de  produire,  outre 
le  sucre  de  betteraves,  une  prodigieuse  quantité  de  ce 
moka  trop  indigène. 

Pardon,  lecteur,  de  ce  hors-d'œuvre  et  revenons  à  notre 
fête.  Le  lendemain  de  notre  arrivée  ,  4  septembre  .  la  jour- 
née fut  inaugurée  par  une  solennelle  distribution  de  mé- 
dailles ,  soit  aux  musiciens  ,  soit  aux  corps  de  musique  qui 
s'étaient  le  plusfait  remarquer  la  veille,  ou  parla  perfection 
de  leur  exécution,  ou  par  leur  ensemble  harmonique.  Les 
Flandres  sont  la  terre  classique  des  médailles  et  des  con- 
cours. —  Mais  en  voici  bien  d'une  autre!  Quel  monstre, 
quel  Titan  ,  quel  Cyclope  se  dresse  là-bas  sur  la  grande 
place?  —  C'est  le  Reuse  (géant)  de  Dunkerque.  Il  est  vêtu 
de  son  armure  ;  il  sort  de  la  grande  tour  où  il  est  enfermé 
comme  dans  une  caisse  d'horloge,  du  gothique  beffroi,  veuf, 
je  ne  sais  pourquoi,  de  son  proverbial  carillon,  le  seul  lo- 
gis qui  soit  à  la  taille  du  Reuse,  et  encore  n'en  peut-il  sortir 
que  tenant  sa  tête  à  la  main,  comme  feu  le  grand  saint 
Denis.  Voilà  maintenant  qu'on  la  lui  ajuste;  on  l'équipe  de 
pied  en  cap  ;  un  valet  de  ville  passe  délicatement  l'étrille 
dans  les  longs  crins  qui  lui  servent  de  chevelure,  avec  une 
gravité  imperturbable  qui  n'a  d'égal  que  le  sérieux  de  la 
population  attentive  à  ces  préparatifs  coi|uets.  Cette  toi- 
lette et  son  armement  terminés,  le  Reuse  (corruption  de 
l'allemand  Reise)  prend  position  sur  la  grands  place,  au 
pied  d'un  orchestre  formidable,  devant  la  maison  AUiaume. 

Puis  voici  deux  autres  colosses  apparaître  à  l'extrémité 
de  la  place  et  s'avancer  majestueusement  vers  le  Reuse  ? 
c'est  ici  un  congrès  de  géants.  Les  deux  nouveaux  venus 
sont  Gayant  et  sa  femme,  de  Douai,  suivis  de  leurs  fils  in- 
téressants, Jacot,  Bambin  et  quelques  autres.  Ils  viennent 
rendre  hommage  au  Reuse  ,  et  c'est  justice,  car  le  Reuse  les 
dépasse  de  toute  la  tête.  Un  train  spécial  de  chemin  de  for 
les  a  amenés  cette  nuit  de  Douai,  leur  patrie  ou  leur  berce, 
suivant  l'expression  douaisienne,  et  leurs  grands  corps,  im- 
menses mannequins  d'osier,  couvraient,  sous  une  pluie 
battante  qui  ne  les  a  point  heureusement  trop  déformés  , 
l'impériale  de  plusieurs  wagons. 

Il  n'est  pas  inutile  de  dire  ici,  je  pense,  que  Gayant  est 
un  chevalier  dont  la  bravoure  traditionnelle  ,  la  grande 
âme  et  la  grande  lance  paraissent  avoir  sauvé  pendant 
plusieurs  siècles  la  ville  de  Douai  d'un  imminent  péril 
Quant  au  Reuse,  c'était  un  grand  seigneur  du  pays  de 
Flandre  qui  était. éminemment  bienfaisant  et  qui  creusa  le 
port  de  Dunkerque.  Tous  deux  étaient  assez  beaux  hom- 
mes, à  en  juger  par  les  effigies  que  conservent  d'eux  leurs 
nationaux  reconnaissants.  On  les  promène  officiellement 
dans  les  grandes  .'Solennités  ;  il  n'y  a  pas  de  bonne  fête  à 
Douai  sans  Gayant  et  sa  femme,  ni  à  Dunkerque  sans  le 
Reuse.  Ce  sont  là  .  au  reste  ,  des  coutumes  évidemment  lé- 
guées aux  Flandres  par  les  conquérants  espagnols.  De 
même  que  Reuse  vient  de  Reise.  de  même  Gayant  est  sim- 
plement un  dérivé  légèrement  altéré,  quant  à  l'orthogra- 
phe ,  de  l'espagnol  Jayan  qui  signifie  géant  On  retrouve 
aujourd'hui  aux  îles  Baléares,  dans  la  Péninsule  mémo,  et 
particulièrement  dans  les  provinces  formant  l'ancien  royau- 
me d'Aragon,  ces  exliibitionsde  géants  libérateurs.  Il  paraît 
que  grande  taille  obligeait  autrefois,  à  moins  que  ce  ne  soit 
la  gratitude  des  peuples  qui  ait  grandi  à  celle  de  leur  vé- 
nération les  citoyens  ou  les  illustres  chevaliers  dont  ilsont 
reçu  quoique  bien.  Quoi  qu'il  en  soit,  Gayant  et  sa  femme 
font  au  Reuse  une  fort  aimable  révérence;  celui-ci,  en 
hôte  bien  appris,  la  leur  rend  aussitôt  ;  puis  tous  trois,  en 
vertu  d'une  motilité  des  plus  simples  dont  nous  n'aurons 
garde  de  vous  révéler  le  secret  peu  poétique,  exécutent  un 
menuet  aux  applaudissements  enthousiastes  d'un  peuple 
immense.  Ils  se  rangent  ensuite  côte  à  côte,  lo  Reuse  entre 
Gayant  et  sa  femme ,  les  enfants  devant,  pour  voir  le  dé- 
filé de  la  grande  procession  ,  qui  déjà  s'avance  en  bon 
ordre. 

Il  ne  faudrait  rien  moins  qu'un  poète  épique  pour  faire  le 
dénombrement  homérique  de  toutes  les  merveilles  de  ce 
cortège,  et  le  célèbre  défilé  de  la  Juive  nous  a  paru  singu- 
lièrement distancé. 

Un  corps  imposant  de  musique  de  la  garde  nationale  ou- 
vre la  marche. 

Apparaît  ensuite  un  grand  char,  ayant  la  forme  d'une 
dunette  de  navire,  et  portant  Jean-Bart ,  chef  d'escadre,  et 
lion  chef  de  câpres  ,  comme  lo  répètent  à  l'envi  cinquante 
journaux  sur  la  foi  d'une  bévue  typographique;  Jean-Bart, 
dis-je,  entouré  de  sa  famille  et  de  son  équipage  valeureux, 
historiquement  revêtus  des  costumes  du  temps  de  LouisXlV. 
époque  demeurée  particulièrement  chère  à  la  population 
de  Dunkerque. 

Ce  char  est  suivi  des  pêcheuses  de  crevettes  grises  vul- 
gairement nommées  dans  le  pays  grenades  Leur  bande 
joyeuse,  parée  de  ses  plus  beaux  atours,  est  facilement  re- 
connaissable  aux  divers  attributs  ou  instruments  de  pêche 
que  chacune  tient  à  la  main. 

Sur  un  autre  char,  voici  une  tabagie  flamande  au  grand 
complet  [panne  kuke  huys ,  maison  de  crêpes),  avec  son 
hôtelier  en  bonnet  de  coton  ,  ses  brocs,  ses  chopes  et  ses 
buveurs  intrépides  entre  lesquels  brille  de  tout  l'éclat  d'un 
tricorne  imposant  dont  la  vue  seule  doit  glacer  d'épouvante 
les  maraudeurs,  le  garde  champêtre  ou  garde-chasse  de  la 
commune  ,  —  nous  ne  saurions  dire  précisément  lequel. 
Pendant  qu'on  boit  dans  la  taverne,  qu  on  fume,  rit  et  fait 
des  crêpes  magnifiques,  la  poule  caquetant  au  haut  du  toit 
de  chaume,  le  dindon  qui  glousse,  le  pigeon  qui  roucoule 
complètent  l'illusion  de  ce  tableau  animé  de  Vun-Ostade 
ou  de  Brawer. 

Voici  venir  maintenant  les  bazennes,  matelotes  ,  c'est-à- 
dire  femmes  do  matelots,  avec  la  jupe  retroussée  du  temps 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL 


(11-  Louis  XV,  cl 
Iciiitlejolipi-titcos- 
liiinn  i'Oco(0  (li>  \;\ 
l'irmUs'wn  de  di.i- 

Uii  aulro  ch^ir 
s'avance  portaiil 
une  embareatiiui 
moderne  nionti'c 
|)ar  des  malelol;- 
ijayonnaisencosl  li- 
mes et  bérets  bas- 

(lUCS. 

Puis  c  est  uno 
noce  normande,  la 
mariée  et  le  mari(' 
grimpés  sur  le  nié- 
meclieval.ettoutli' 
corté};e  en  culoUcs 
courtes. colsdcclic- 
mise  démesurés, ha- 
bils  vert-pomme  ci 
diapeaux  -  troni- 
lilons  fabuleux  for- 
mant à  leur  suite 
la     plus    brillante 

cavalcade a 

ânes. 

Voici  maintenant 
uno  compagnie  de 
grenadiers  consu- 
laires dans  une  te- 
nue irréprochable. 

Plus  loin,  remor- 
ipiéparune  locomo- 
tive, le  char  de  la 
Itépublique  et  de  la 
ville  de  Dunkerque 

réunissant  leurs  attributs  et  leurs  emblè- 
mes. Ce  char  est  en  forme  de  conque  11 
est  immense  et  conlientungrand  nombre 
de  personnages,  entre  autres  des  groupes 
d  Amours  et  deux  allégories  vivantes 
qu'on  nousdit  être  \' UnitéellaFraternile 
commerciales..,  Accipio  omen...  Je  n'en 
veux  point  médire  ;  mais  convenez  que 
ce  sont  là  des  divinités  nées  d'hier. 

Un  autre  char  plus  petit  contenait  trois 
statues  grotesques,  trois  tableaux  plasti- 
ipies  affectant  les  poses  les  plus  ridicules, 
le  tout  dédié  au  musée  par  une  inscrip- 
tion votive  qui  provoquait  l'hilarité  uni- 
verselle. Pour  bien  saisir  le  sel  attique 
de  cette  épigramme  flamande,  il  faut 
savoir  que  le  musée  de  Dunkerque  ne 
brille  pas  précisément  par  ses  richesses 
artistiques. 

N'oublions  pas  de  mentionner  lesarmes 
marf/ianïfs  de  Dunkerque  portées  der- 
rière lechar  de  JeanBartpar  un  chevalier 
a  queue  de  sirène  et  en  pantalon  qua- 
drillé, formant  tout  à  la  fois  le  support 
et  le  cimier  de  l'écu.  Dunkerque  porte, 
si  je  ne  me  trompe,  parti ,  d'une  mer- 
d'argent  à  un  poissoti  nageant  de  cou- 
leur naturelle  ,  chef  de  gueules  au  lion 
d'or  passant. 

Devant  le  char  du  même  ,  on  voyait 
sa  bannière  portée  par  un  capitaine  de 
pèche  du  dix-septième  siècle  et  celles  des 
quatorze  amiraux 
qui  ont  vu  le  jour 
a  Dunkerque.  En- 
lin,  tout  le  cortège, 
entrecoupé  de  di\ 
corps  de  musique  , 
tous  excellents  , 
tous  très  noir- 
lireux  .  apparte- 
nant à  la  garde  na- 
tionale ,  était  pré- 
cédé d'un  héiaul 
en  costume  splcn- 
dide  qui  tenait  il  la 
main  la  bannière 
bleue  et  blanche 
ou  ,  pour  parler 
la  langue  héraldi- 
que, mi-partie  d'ar- 
gent et  d'azur  de  la 
bonne  ville  do  Dun- 
kerque. 


têtes  de  buukerque  —  Décoration  de  la  rue  Arago  et  mascarade  delà  noce  normande 


Fêtes  de  Dunkerque  — Décoiat'uu  de  la  rue  Dupouy 


On  s'abonne  rft'rec- 
temetit  unx  bureaux, 
rue  de  IVicliclicu,  60, 
l);ir  l'envoi  franco 
d'un  mandat  sur  la 
jiosU'  ordre  Lcrlieva- 
litTL'l  (■,",011  près  des 
dirccleurs  de  |i0bteel 
de  Mi'ssaReries,  des 
piincipaiix  libraires 
di'  lu  France  el  de 
l'èlranKcr,  el  descor- 
respondanrt'S  de  l'a- 
geucc  d'abount  aient. 


Celte  procession 
mémorable  et  tous 
les  épisodes  bur- 
lesques ou  bachi- 
ques qui  en  furent 
l'accompagnement 
obligé. rempli  rente 
peu  près  le  second 
jour  de  la  fêle.  Le 
lendemain,  il  y  eut 
de  fort  belles  réga- 
tes: mais  elles  n  of- 
frirent aucun  ca- 
ractère particulier 
et  d'ailleurs  nous 
ne  pouvons  songer 
â  les  décrire  faute 
d'espace.  Puis ,  le 
soir,  un  grand  bal 
donné  à  l'établis- 
sement des  bains 
termina  les  ré- 
jouissances. Celle 
réunion  fut  bril- 
lante et  les  danseu- 
ses n'y  parurent 
pointinférieuresau 
grand  renom  de 
beauté  dont  jouis- 
sent les  dames  de 
Dunkerque  ;  mais 
un  intermède  non 
prévu  el  une  illu- 
mination naturelle 
eurent  pour  effet 
d'en  effacer,  à  nos 
yeux  du  moins  , 
les  splendeurs.  Du 
cote  de  la  grève,  une  lueur  rougeStre. 
une  sorte  d'aurore  boréale  se  reflé- 
taient à  l'horizon.  Aussi,  à  cctaspect  im- 
prévu, nous  courûmes  au  bord  de  l'Es- 
planade, d'où  l'œil  embrasse  le  rivage. 
Nous  vîmes  alors,  non  point  une  mer, 
mais  une  lave.  Une  immense  traînée 
de  feu  léchait  la  plage  el ,  Çà  et  là  . 
des  lames  impétueuses  moutonnaient  en 
soulevant  des  gerbes  enflammées  qui  se 
détachaient  sur  le  fond  noir  de  ce  ma- 
gnifique tableau.  Maintes  fois  ,  dans  une 
autre  mer,  nous  avions  vu  la  quille 
d'un  navire  tracer  un  sillage  lumineux 
sur  le  flot  et  des  milliers  d'étincelles 
jaillir  le  long  de  ses  bordages,  mais 
rien  qui  put  se  comparer  à  ce  débor- 
dement igné,  à  cette  éruption  liquide. 
On  apercevait  distinctement  la  blan- 
châtre fumée  du  phosphore  se  dégager 
au-dessus  de  la  lame  brillante ,  comme  la 
vapeur  du  soufre  et  du  salpêtre  autour 
d'une  pièce  d'artifice.  Combien  pauvres 
sont  les  étoupes  et  la  limaille  des  Rug- 
gieri  auprès  de  cette  nappe  ruisselante 
d'or  et  d'argent  qu'allume  à  la  cime  des 
flots,  eu  certaines  nuits  mystérieuses  , 
la  nature,  ce  grandiose  et  poétique  arti- 
ficier ! 
Mais,  hélas  !  l'heure  du  départ  a  sonné 

enfin     Plaignez- nous Il   faut,   il 

faut  quitter  Dunkerque  !  Adieu ,  bonne 
ville  I  nous  empor- 
tons de  ta  cordia- 
lité, de  tes  splen- 
deurs naïves ,  un 
souvenir  cher  qui 
jamais  ne  s'efface- 
ra de  notre  cœur 
el  nous  le  remer- 
cious  surtout  de 
nous  avoir  fait  ou- 
blier ,  par  les  ré- 
jouissances qui  ont 
le  rare  mérite  de 
ne  pas  mentir  à 
leur  titre,  le  pesant 
fardeau  de  soucis, 
de  luîtes  el  d'agita- 
tions quolidennes 
qu'à  regret  nous  al- 
lons reprendre  loin 
de  toi  ! 

FM. 


PAULIN. 


Paris. 

imprimerie 

de 

COSSIN, 

rue 

du  Kour-Sanl- 
Germaîu , 


l  lïlos  do  Duiikeiqui  —  DiScontioa  de  la  ruo  de  la  Manui 


L'ILLUSTRATION, 


Ab.  pour  Paris.  3  mois,  8  fr.  —  6  mois,  16  fr.  —  Un  an,  30  fr. 
Prii  de  chaque  N»,  75  c. — La  collection  mensuelle,  br.,  2  fr.  75. 


N»  291.  Vol.  XII.  —  SAMEDI   Î3  SEPTEMBRE  1848. 
Bureaux  :  rue  RIcbelleu,  60. 


Ab   pourlesdép.  — 3  mois,  9  fr.  —  6  mois,  17  fr.— Un  an,  32 fr. 
Ab.  pour  l'étranger,    —    10  fr.        —       30  fr.        —      40  fr. 


SOMMAinE. 

HiBioIre  de  la  semaine,  le  parlement  de  FranefoTt.  —  Chronique 

musicale.  —  Courrier  de  ParlN.  signaux  des  insurges  irlandais; 
Uépauillemenl  des  votes  salle  Saint-Jean  ;  Distribution  des  bulletins  d'élections 
dans  tes  ruts  ;    Courses  d'ànes  sur  la  plage  de  Boulogne-sur- Mer.  —  Revue 

liiléraire  ,  par   AleiaiiJie   Uiifai.  —  Les  vliles  capitales,  lar 

Fi-jmcis  W*y.  —  Service  des  postes,  rue  extérieure  du  bureau  ambu- 
lant ;  Jnltfrieur  du  bureau  ambulant  ;  Portefeuille  des  lettres  recomman- 
dées: Collier  pour  la  fermeture  du  sac  aux  dépêches  ;  Sac  aux  dépêches  ; 
Pesage  de  lu  correspondance  anglaise  ;  Nouvel  omnibus  pour  ta  dislribtttion 
<     des  leltris   dans  Paris.  —   études  morales  ,  tiaduite>  de  l'anglais.  — 

Lettres  d'un  flâneur  .  \.  ~  Les    camps.  Costttme  des  élèves  de 


l'Ecole  de  Mars  en  1783  ;  Fêle  militaire  exécutée  le  30  frimaire  par  les  élèves 
de  l'Ecole  de  Mars.  —  Ktudes  de  moeurs  ,  par  Val  -niifi.  —  Let  voya- 
geurri  nouveaux  ,  pai-X.  Marmier.  —Bulletin  lilllUograpIlique. 
—  Correspondance.  —  Ascension  du  Peter-Botte.  —  Rébus. 


Hiatoire  de  la  Semaine. 

Quand  un  fait  considérable  a  terminé  la  série  d'événe- 
ments dont  il  a  à  rendre  compte  ,  un  historien  de  la  se- 
maine se  sent  une  furieuse  démangeaison  de  l'enregistrer 
tout  de  suite ,  et  il  lui  faut  vraiment  de  la  vertu  pourse  ré- 


signer à  commencer  par  le  commencement,  .aujourd'hui 
toutefois  notre  mérite  est  moinsgrand,  car  ce  dont  nous 
avons  à  entretenir  d'abord  nos  lecteurs  ,  c'est  un  discours 
de  M.Dufaure  ,qui ,  lui  aussi ,  a  été  un  événement  véritable. 
C'était  toujours  sur  ce  fameux  droit  au  travail.  L'Assem- 
blée avait  entendu  un  orateur  de  la  montagne  ,  M.  Martin 
Bernard  ,  qui  lui  avait  appris  que  ses  amis  et  lui  étaient  les 
hommes  de  l'idval,  assez  pauvre  qualité  pour  des  législa- 
teurs. M.  Billault  lui  avait  succédé  ,  moins  pour  défendre  le  ■ 
droit  au  travail  que  pour  attaquer  M.  Thiers  et  le  discours 
qui  ,  la  veille  ,  lui  avait  valu  un  si  grand  et  si  légitime  sue- 


Le  Parlement  allemand  de  Francfort  —  Séance  du  16  se,itemlre   1848 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


1  ri.  L'auditoire  dcmpiii-iil  finiil  cm  l'idnliint  l'opinion  fort 
peu  nette  do  l'ami. 'ii  >"ii-  ^rrrv:iirr  d  i;i;ii  du  l"  mars. 
(Miand  tout  à  coup  di.n  un  ;i .  ir  ulJur  .|i  Im  ni  nnnallre  un 

morilp.  cpIuI  d':uuir  ; ii.'   M    Uni r  ,<  \a  lidiuneet  de 

Im  ;iMiir  \nln  un  (Ir-  pin-  r,  InInnI-  MIC  n-  i|ni  nient  étéde- 
piii-  Inirjlrnip.^  Mlili-ini>  J.ini  i;-  I  nr.ilcni  ii  .iNnil  allié  une 
t,.||,.  ,.|r\:ili"n  dr  pcii-iv-,.  dr  Mn-  .1  d.'  l,in,M.-e  à  la  vi- 
Lçueuf  cl  a  rcncliaineniunt  de  h  Hinl,viM|nr  .{m  ili~liiii;ue 
ioujourssa  parole.  Il  a  traité  la  ipii-lmn  »  ,,  hjid  iii  nr,  en 
éciinoniiste,  en  philosophe,  en  lioiiiiiird  t.!,:!  ni  v,ni-lous 
ces  raiiporlsil  a  rir  rnniplcl,  Saus  viser  il  réloqnencc! ,  iU'a 
eonslaiiinient  reinmniVn  I  n  l.'t  et  l'énergique  expression 
de  la  l'oruic  n'oiil  |niiiji>  Iml  défaut  à  une  pensée  toujours 
ample,  nniAciiM' ri  lundc, 

L'eflél  dr  in  m. ijndiiiiie  discours  avait  été  tel  que  M.  de 
Laniarlimi  .nppnli'  n  In  tribune  par  un  ordre  d'inseriplion  , 
fnlal  pour  hu ,  y  est  demeuré  près  d'une  demi  -  heun,' 
les  bras  croisés  ,  attendant  que  l'Assemblée  se  remit  de 
son  émotion  ,  do  son  enthousiasme  ,  et  consentît  ii  lui 
|ijiHer  attention.  11  a  moins  cherché  il  coinlialli-e  M  Dii- 
IniiiT  qu'a  ralliei'  la  iiKiiorilé  n  un  ili-n|innn  (|iii  nn  lïd  pn- 
ccliii  delà  comiiiission.  ■|'oulrfiiis,  M  dn  l.nin.uiinr  un  ,',..1 
p.i.  rli.ii-L'é  de  l'nire  .■nniniilrn  I  nuinndninrnl  nniuniiidnnl 

!;:,„  dl-..n,r-nlnil   r.Ap.i-ndn,! if-    (    r,l   M    lil.n-  lil/nin 

Irinn-idinil  d.-ln  nninnn,  dn  l'.d.ii-   \,)h.ninl  ,  .|ni  r-1  vriin 

d,.|i,.ji,d.T.|ir.nir(niMl  d.in-  hi  Cni-lihi In  i  m,imvi-, 

ilu(;™,Vi//rM'.W.nMV  |urln  lln\nil  lin.iin  o,i|,  d  n-p,  il  -  ninl 
inllsontvu  Li  iinn  pm  lldir  ,  Ir  dn-,l  dr  l^lnrnr  In- .uImt-,,,,,- 
du  droit  nu  lrn\nil  d.in-.  In  Minninni  npp.n  i  iiln  dn  L':ni>  qui 

entendaient  refuseï  InM-lninv  ,i  Imi-n ■•i<'\    n-    .Mnllmu- 

reusement ,  le  ton  cl  In  l,iin;,i^i' iln  M  lil.n-  l'n/nin  n  nnt  pas 
suffisamment détriiil  reim  Mippii-iiinn  pmi  hinineidnidn  Du 
reste  ,  le  calcul  sou|)Çonnc  n'aurait  pas  produit  I  elletd  in- 
timidation qu'on  en  attendait ,  car  1  amendement  a  été  re- 
poussé par  596  voix  contre  187.  —  Les  autres  ont  eu  le 
même  sort  ,  et  l'arlirln  du  piniel  de  la  commission  a  été 
adopté  il  une  iminnn-n  iiinj'iiiln 

Le  préambule  se  hnn\nd  nnisi  adopté  par  le  vote  de  ses 
para^raphes  successifs  quand  I  Assemblée  a  été  appelée  il 
délibérer  sur  une  disposition  nddiliiHinnlIn  jiorlant  que  le 
pacte  fondamental  n'aurait  force  d'exeniliuii  iju'après  avoir 
été  soumis  à  la  sanction  du  peuple.  Les  partisans  les  plus 
déclarés  du  suffrage  universel  direct  ont  été  les  plus  ardents 
il  repousser  cette  proposition,  qui  a  été  écartée  par  la  ques- 
tion préalable. 

Au  sortir  du  préambule  ,  on  est  entré  sur  le  terrain  de  la 
constitution  même  dont  l'article  premier  formule  le  principL- 
de  la  souveraineté.  M.  Pierre  Leroux  .  au  nom  de  la  science 
politique  à  laquelle  il  dérlmnil  dninninirinnl  nepas  croire, 
a  attaqué  lesdefinilionsqiir  In  i  Miiniii--hin  n\nii  empruntées 
au  texte  de  la  ]ilupart  dr-  prni  ndrnlr-  innslitiitions.  Cette 
fois,  du  moins,  il  im  -  n-i  pi-  borné  au  rôle  decrititjue:  il 
a  produit  des  foriindn-  puni  In- substituer  il  celles  qu  il  dé- 
clarait mauvaises  1.  .Vs-cmlilne  ,  ii  l'unanimité,  a  reconnu 
les  siennes  détestables. 

Conformément  au  vœu  exprimé  par  M.  Isambert ,  l'As- 
semblée a  consacré  l'inviolabilité  du  domicile  par  des  ter- 
mes plus  explicites. 

L'article  S  du  projet  de  constitution  proclamait  l'aboli- 
tion de  la  peine  de  mort  en  matière  politiipie.  A  cet  é^ard 
nulle  dissidence  n'était  possible,  la  cmi-i minn  |Mililiqiie 
a  ,  dès  le  premier  jour,  ratifié  par  d'iim i  -  . m,  Lima- 
lions  le  décret  du  gouvernement  provismin  .  qn  d  s  n^nt  de 
consacrer  consliliiiiininnllniient.  Mais  l'Assemblée  s'est 
trouvée  inopinéim  ni  pLnnn  nu  présence  d'un  amende- 
ment dont  le  but  iiini  dn  pi  n\iii|uer  d'une  manière  absolue 
l'abolition  de  In  peine  dniiHHl  .\1  Cnipinml  .  l'un  dn- nii- 
inirsdecelnuieiidriiiniil  ,n  -urninrlninrnl  nNpn-r  In-nni-i- 
.lél-ationsplllliwiplnqnn-  inmnln- ni  rnliL;lnn-r>  ,,ni  iinlHnnl 
eu  faveur  de  celln  mlm  n,n   .\1\1    \  n  1,.,  dn  f  i  ,,nv    l,;dMniln.. 

Victor  Hugo  et  Virn-I    I  nlnmnuid   pnlrdmi-  In  innllin-ni- 

.Maisdeux'magistml-    MM    \^lln-nl  fin-lmi  ,  ,,nl  iiunqiiin 

pour  le  mailllinll  d  imn  pnndlln  ICI  rd.ln     l.l    Inind'  ni  inip"- 

santecOllMiInmli h-  mvr-ll,-  -n, mln-    l.rl,in_,l-n,pi  il, 

Ontfaitellinndirninll  p;ii  -1  -n\nllln  liniin-  pinjnn.i  nni.iu- 
viiir  que  celui  de  leurs  adveisaiien  ,  mais  il  >  adri>sait  a  la 
raison  froide  et  sévère  de  leurs  collègues ,  et  il  a  été  en- 
tendu. L'amendement  n'a  obtenu  que  216  voix  sur  71  i 
votants. 

L'article  6,  ponant  que  l'esclavage  ne  peut  exister  sur 
aucune  terre  française ,  a  été  voté  sansdiscussion. 

L'article  7  cnnsaire  pnur  chaque  niloyen  le  droit  do  pro- 
fesser librninnnl  -n  inliijinii  ,  ni  :j;irniil II  il  tous  pour  l'exer- 
cice de  leur  niilln  iiiic  n;_Mln  pnilnri nui  M.  Pierre  Leroux  a 
lu  n  ([■-ii|i  I  un  Ininj  di-niiiirs,diiiil  les  conclusions  so  résu- 
ni.nnid  dnii-  li  ■.uppin-~ion  de  tout  salaire  pour  les  cuMes. 
.Mm-  mile  liii.-  niniiin  les  conclu^ions  de  M.  Pierre  Leroux 

L'article  8  proclame  le  droit  qui  appartient  aux  citoyens 
de  s'associer,  de  s'assembler  paisiblement  et  sans  armes  , 
de  |iétiiionner  et  de  manifester  leur  pensée  par  la  voie  de 
la  presse  ou  autrement.  M.  de  Mimlaleuibnil  a  demandé 
(pi'oii  ajoiitilt  il  cette  oiiimiérnliiui  le  tlrnit  il  rnseijiiier.  La 
Luaude  question  de  la  liberté  dn  l'eiwni^'ueiiieut  a  été  ainsi 
porlée  a  la  tribune  par  l'un  de  sns  dnlnii-nm-  les  plus  ac- 
iieililes.  Mais  l'orateur,  qui ,  iiiin  pivnnmv  lins  ,  dans  la 
question  du  rachat  des  chemins  de  Im.  a\.iit  su  ,  par  la 
disliiiclion  delà  forme  de  sa  discussion  et  par  la  solidité 
du  tond  ,  captiver  conslammeiil  son  aiidiluire  et  gagner 
beaucoup  d'indécis  ii  son  opinion  ,  moins  heureux  en  cette 
occasion  nouvelle ,  moins  bien  préparé  ,  moins  bien  inspiré . 
a  vu  si'S  arguments  accueillis  par  l'incréilulilé  et  son  appel 
doniourer  sans  réponse.  SI.  de  Monlalembert  a  surtout 
soulevé  des  interruptions  qui  étaiiuit  de  concluantes  réfuta- 
tions, ipianil  ,  dépIdiMut  ipie  la  notion  ,  le  respect  du  prin- 
cipe d'autorité  soient  aussi  alTaililis  chez  nous  ,  il  a  pré- 
tendu que  le  sniil   remeilr  était  une  éiluialion  e.-senliellc- 


ment  religieuse.  (In  lui  a  crié  de  Iniilns  pari-;  £«  l'Italie! 

et  I  liljlilf/lir  '  l'nr  dn- n\iLnninn.d  nidrn  dn  |nur,  ce  disCOUrS 
a  nin  CMUpr  m  dnn\  .  ni  1,1  -r,  .indr  p.illlr  11  ,|  iHé  prOHOn- 
cénqunilllnrniil..   Iilill   hnlin-  np,  n-  In  p,  nnilnre. 

Deux  séances,  celle  de  samedi  de  la  semaine  dernière  et 
celle  de  mardi ,  ont  interrompu  la  discussion  de  la  Consti- 
tution. L'ordre  du  jour  de  la  séance  de  samedi  était  très 
chargé  de  lois  important  s  et  urgentes  ,  et  cependant  l'on 
ne  s'est  occupé  que  d'une  question  imprévue. 

Le  matin  même  le  National ,  qu'on  s'est  habitué  ii  consi- 
dérer comme  un  journal  semi-ofticicl ,  avait  publié  la  note 
suivante  : 

.  Les  luttes  elVroyable^  de  juin  ,   l'nioissinn   de  certaines 


:iln 

II.  ll.l 


ni  dn 


l'i 


11 


•llnl.ln-  ,\r  I    \  - -r 


Inpin-idnlil, 


n-li-dn| 
n!   nlln 


M     lii 


1  .  ii.n-  .1    mil  dn\ini    pimidln  niin  lun-ure 

In-  drpjilmiinnl-  -nr  In-  iiilmitnnis  vé- 

'!'''■  'l'In  I \"ii  liii-iiimiin  ,  pi  npre  en 

In.  (i| -  n-nni'-  :  Un  Certain   nom- 

-  nni.nmil  r\r  niiii\ iiqués co  matin  chez 
-ml  ,  .|ni  In-  .inind  priés  d'acce[iter  une 

1,11 1  mil!  ni-  Celte  mission  serait  toute  de 
niiinii  ,in--i  pour  objet  de  faire  connal- 

ni    In  \mihible  état  de  l'opinion  et  de 

1-  Ins  départements.  » 

I'  1  la  tribune  pour  demander  des  ex- 
plin.iliciiis  n  cn-ii|nl  .\1.  le  ministre  de  l'intérieur,  dont  le 
langage  Ir.dii— .ni  I  mnliarras  ,  a  essaye  de  les  donner.  Il  a 
dit.  si  iiini-  n— iiMiii-  de  résumer  sa  réponse  prolixe  :  Le 
temps  e-l  pinmnii\  ;  In-nirconstances  sont  difficiles  ;  le  pou- 
\iiii  e\ni  iilil  n-l  décide  avant  tout  à  fonder  le  gouverne- 
iiinid  II  indilii  ,1111  ,  il  faire  aimer  et  respecter  le  drapeau  de 
In  llnpiililnpin  ,  il  lient  d'une  main  mal  assurée  les  rênes  de 

I  ,idiniiii-ii,il  iiiii  ili'pni  lementale  ,  parce  que  ,  dansées  pre- 

uiim-  I mnl-iln  II  involution,  il  a  du  procéder  à  la  lé- 

gninni  ,1  nn n-d  inn\l tables  erreurs,  dans  ses  choix  nou- 

\  eaux  Cl  III II  lin  il.in-  In  iiiniulinii  de  quelques  choix  anciens; 
il  veut ,  pni  niin  -,,i  Ir  d  in-pnnlnni  Linii''i'ale  .  se  renseigner 
sur  l'étal  nnl  dn  |i.i\-     iM  piiiir  nnl,i  il   lui  faut  d'autrcs 

UKivens  d  iid iinm  .pin  ,nii\  ipi  d  piii-e  dans  les  corres- 

pinnl,iii.n-ri  d,iii-ln-  .1  .  I,i iMi mil- ,n m I r,ii iinl i .ires des mcui- 
l.iv-  d.-.lillminiln-d.'piil,ilnni-  Il  Iniil  .pin  I.'  payssoitin- 
leirugn  eu  luussniispai  un  regard  doulles  explorations  ne 
rencontrent  aucun  obstacle. 

Il  n'a  pas  été  difficile  à  .M.  Bazede  démontrer  dans  sa  ré- 
plique ,  que  des  représentants  seraient  beaiicoup  plus  in- 
cnnln-i.iM. 'III.  util  leurplace  ,  en  demeurant  occupes  àvoter 
c.'lln  I  ini-lilnli.in  pour  laquelle  ils  ont  été  nommés,  qu'en 
allant  Ijiic  le  métier  que  leur  assignait  le  programme  filan- 
dreux et  peu  adroit  de  M.  le  ministre  de  l'intérieur.  Il  a 
rappelé  que  si ,  dans  d'autres  temps,  des  proconsuls  furent 
envoyés  dans  les  provinces  et  aux  armées  ,  ils  tenaient  du 
moins  leurs  pouvoirs  de  f  Assmiibli'e  elle-même,  .\ujour- 
d'hui  ,  au  contraire,  c'est  un  | Mnr.lidéguéqui  choisit  ar- 
bitrairement des  représnnliid-  |i.nii  leur  confier  une  mis- 
sion ,  dont  le  cir.ininrn  iii.lnim  nnni'  -.'nierait  dans  le  pavs 
l'étonnement ,  riin|ni.iii.|n  ni  l.iili\i-inn;  c'est  le  pouvoir 
exécutif  qui  intcrpnsn  dns  r.'prn-.iiijuls  de  son  choix  entre 
les  populations  et  les  représentants  iju'elles  ont  élus. 

L'Assemblée  eût  repris  son  ordre  du  jour,  et  le  cabinet 
eût  eu  il  réHérhir  il  son  aise  sur  la  mesure  et  à  lensevolir 
Iranqiiilli'iiiniil  ihiii-  l'inibli  .  si  un  de  ses  imprudents  amis  . 
M  .''<ni  mil- .  In  jnuiin  ,  11  ,i\,iii  inuimis  l'enfantillage  de  venir 
glmilinr  .nlln  pnii-nn  .li'  iiii-sious.  Ses  arguments  n'exi- 
u.'.ii.iil  pas  dn  rnpdii-n  ,  nuiis  .M.  de  l-'alloux  y  a  trouvé  un 
pininxin  pinii  M'iin  [inrler  de  nouveaux  et  de  plus  rudes 
!■  inp-  ,1  II  m  dliminii-n  conception  ministérielle.  Le  repré- 
-mil,inl  il'  M.i lin' -.'1-1 -.lire  a  obtenu  un  lirillanl  succès  ora- 
l.inn  Sun  l,iiij,i^.'  pl.'iii  dn  nin-nr.'nl  nu  iiiéiiie  temps  de 
.l.'ni-nni    ,1  . '1,11.1111.   1   \-niiil,lnn    1.  .ipiiiiini  .1.' .-un  luiiiiense 

111, i|. Mil.'  Il  .'1,111  p,i-  .1 ii-n.  111,11- l'.'ll.'i'Mdi'iinesnni-ait  , 

.'I  In  pi.'-idnld  n.'lnll  .'.'  pilir-lnM  l',njli.'m'  nll.nl  .li'.'hl- 
ini  I  m,  id.'iil  M.l.'.'l  ivpinii.li.'r..r.lri'.liij.iii,'.  .pnindM  le 
luiiii-lri'  dn  la  juslinn  nsl,  monte  .i  la  tribune  pour  due  qu'a- 
près ce  débat ,  le  pouvoir  exécutif  voulait  être  éclairé  par 
l'expression  d'un  vote  formol ,  étant,  quant  ii  lui ,  déterminé 
il  persister  dans  la  mesure. 

Alors  éclata  un  orage  qu'on  ne  saurait  peindre.  Pondant 
plus  d'une  demi-heure  on  se  pressa  autour  du  banc  minis- 
tériel pour  essayer  do  faire  comprendre  au  cabinet  la  gra- 
vité d'une  position  qu'il  prenait  tout  gratuitement.  Le  (Con- 
seil se  retira  dans  un  bureau  pour  en  délibérer.  11  revinten 
séance  au  bout  d'un  quart  d'heure  ,  ell'on  fut  infurméque 
n'ayant  pa>  liiniM'>,in>  dniile  In  iiinyen  de  faire  une  re- 
traite Iioii.iimM  .  il  .'l.iil  .l.'lmininn  ;i  \aincre  ou  il  mourir 
pour  ses  c.iiiiuii--,iin'-  lii'j.i  I.'  i^mnial  Cavaignac  se  diri- 
geait vers  la  tribune,  quand  .\1.  Marrast  y  monta  pour  v 
lire  l'ordre  du  jour  motivé  que  venait  de  lui  remetlre  nii 
représentant  de  la  droite  :  "  L'Assemblée,  après  les  expli- 
c.it'inis  .'iitnii.liin-  .  I, lissant  il  la  responsabilité  du  pouvoir 
n\.'.  nid  riiiipri'riaiinii  de  la  mcsure  projeti'c  ,  pa.sse  ii  l'or- 
dii'  .In  |.iiii      C.'i  .11. lie  du  jour  a  été  voté  il  l'unanimité. 

II  s.iiunil  les  .iiiiiiurs-proprcs  et  laissait  au  pouvoir  sa 
liberté,  sauf  îi  n'en  pas  user.  Ainsi  finirent  les  coinmis- 
s.iiros. 

Dans  l'antro  séance  ,  enlevi''e  égah'inent  ii  la  discussion 
de  la  Constitution  ,  on  a  v.ii.'  .In-  .  r.'.lii-  n.nn.'iiux  puiir.se- 
cours  et  des  crédits  consul,  i.dil.'-  .'iil  indlnni-  puiir  entre- 
prendre la  colonisation  de  1  Al.unne.  Le  geiu'i.il  de  l.aniori- 
cièro  a  soutenu  son  projet  avec  talent  et  en  lionimc  nui 
connaît  le  terrain  et  a  expérimenté  la  matière.  La  nécessité 
d'employer  une  partie  des  bras  inoccupés  en  Franco  a  fait 
voter  en  une  seule  séance  un  projet  qui .  l'an  dernier,  cill 
occupé  la  Chambre  des  Députes  pendant  ipiinze  jours. 

Le  grand  événement  ,  qu'il  nous  a  lalhi  ne  mentionner 
qu'a  sii  date  dans  lor.lredes  f.iits,  c'est  l'élection  de  Pans. 


.Malgré  une  ineonlcslable  majorité,  les  opinions  modérées 
ont,  par  leurs  divisions,  ouvert  la  porte  ausocialismc.  D'un 
autre  côté,  rinfluenccdessouvenirsafaitsortiren  première 
ligne  de  l'urne  un  nom  que  plusieurs  autre^s  départements 
ont  également  inscrit  sur  la  liste  de  leur  représentation. 
Les  trois  élus  sont:  Louis  Bonaparte  ,  Achille  Fould  et  Ras- 
pail.  Grilce  ii  leur  vigilance,  à  leurspirituelle  entente,  les 
électeurs  auraient  pu  avoir  avec  Raspail  ,  .M.M.  Cabet  et 
Thoré,  Ils  n'ont  qu'une  partie  de  leur  bonheur. 

.Messineen  cendres,  occupée  parles  troupes  napolitaines, 
qui  ne  paraissent  pas  néanmoins  devoir  poursuivre  plus 
loin  la  revanche  de  leur  roi  ;  —  les  dispositions  militaires 
de  Charles-Albert ,  qui  font  croire  qu'il  a  moins  besoin  que 
I' \nli  inhe  de  la  prolongation  de  l'armistice  ;  — l'accepta- 
h  11  l'.u  le  parlement  de  Francfort  de  l'armistice  conclu  à 
.Mdni.n.  parla  Prusse  ,  entre  l'Allemagne  et  le  Danemark; 
~  In  dn\nloiipmni'nl  du  inoiivement  qui  tend  à  séparer  plus 
i]uejaniai-  I  i  llnuii.'  .1  I  .  inpire  d'Autriche,  et  la  conti- 
nuation (I  -  -II...-  mM.'iiii-  pur  les  Croates;  —  l'émotion 
populaire  iini  1.  jii.'  pi'ilninli  iniTil  a  Vienne  :— l'agitation 
qui  s'est  111,1  11  il. -1."  dm- 1,1  j  ii.ln  I  un --il 'Une.  a  l'.ilsil.iiu  ;  — 
le  départ  il.-  .'..m..  .1;' \ .  ni-i' .I.' 1,.  ll.ill.' -  irde  ,  aux  ordres  de 
l'amiral  Allniii  .l.nil  In  pr.'.-.-in  n  ,-]  -igu.'ileeii  Ancone;  — 
riir\"-iiiiiin  dn  -  lUM'iin'iuniil  il.'  rK-\ple  ,  solennellement 
m.id.'i.' '  n  lln,iliiiii-Pacli,i  par  le  siill.in  :  —  et  ,  enfin  ,  la 
ri'Mjinl  11.11  iln.^uleiiuan-Panha  .  ra]ipnléile  la  Valacliic,  pour 
avoir,  dit-on  ,  suivi  une  politique  Irop  vivement  déclarée 
contre  la  Russie  ,  voilà  ,  celte  semaine  ,  avec  les  progrès  du 
choléra  vers  l'Occident ,  le  bulletin  de  l'extérieur. 


Clironiqiie  niu^ticale. 

Pendant  que  l'été  prolon.L'e  avec  une  rare  complaisance 
ses  radieuses  joiiiii.n-  I,-  iln'àires  Ivriques  se  disposent 
avec  la  plus  loualil  '  .'innliinn  a  nous  faire  pas-ser  délicieu- 
sement  les  longue-  -.nm.-  .Iliiver.  L'Opéra  annonce  pour 
le  mois  d'octobre  un  omrage  oouveau  ,  Jeanne  la  Folle; 
puis  un  nouveau  ballet  di^  Perrot ,  dans  lequel  nous  rever- 
rinis  la  célèbre  l>rrito  !...  Viendronlensuite,  en  novembre  , 
lesdébulsdemnrlame  ViardnletdeRogerdansles //«juenob. 
Lu  iiimn.'  Ii'ni|i-.  pi. ■.■nsili'liul-iiiiporlants  auront  lieu  .  com- 
iiinii.'  T. ml  ln-niudi's.lu  l'ntjiliHc  ,  dont  la  première  repré  • 
s'iiLili.iii  M'1,1  d.iiiiiee  dans  le  courant  de  la  prochaine 
caiiip.i^'iie  Iheàtrale,  Celte  dernière  nouvelle  ,  nous  pouvons 
c'tte  fuis  laflirmer  ;  ce  que  nous  n'avions  pas  fait  encore  , 
ciiutrair.'uient  il  la  plupart  de  nos  confrères  :  mais  aujour- 
d  liui  ce  n'est  plus  douteux.  Meyerbcer  est  de  retour  parmi 
nous  depuis  une  semaine  ,  et  dès  le  lendemain  de  son  arri- 
vée deux  actes  de  sa  nouvelle  partition  ont  été  livrés  à  la 
copie.  Jeanne  la  Folle,  laCerrito  ,  madame  Viardot,  Roger, 
le  Prophète  ,  Jleyerbeer.  voilà  certes  qui  nous  promet  une 
ample  moisson  de  jouissances  musicales  et  une  longue 
sén.'  .1.'  splniiilides  magnificences. 

I.  (  ip.'i  ni.. inique,  de  son  côté,  prépare  une  nouvelle  par- 
liinni  .In  I  illii-liB  auteur  de  V  Eclair  e\,  des  ifousquetaires 
(le  la  Heine  Le  Val  d' Andorre ,  c'est  le  titre  de  l'ouvrasje 
nouveau  de  M.M.  Halévy  et  de  Saint-Georges  ,  sera  repré- 
senté .  assiire-t-on  ,  du  20  au  23  octobre.  La  première  re- 
]irésentationdesJ/on(c'nP5rms,deM.  Limnander,  ne  tardera 
pas  à  suivre  celle  du  Yal  d'Andorre.  La  reprise  du  Cheval 
de  bronze  précédera  peut-être  ces  deux  nouveautés  ,  et  l'hi- 
ver ne  s'achèvera  pas  sans  qu'une  partition  nouvelle  de 
M.  A.lnin.  ni  une  autre  de  M.  .-Vuber.  toutes  deux  compo- 
sé:'--iir  d.'- pnemes  de  M.  Scribe,  ne  paraissent  également 
au  lli.'.ilK'  delà  rue  Favart.  En  attendant,  d'autres  pièces 
nouvelles  moins  importantes ,  d'autres  reprises  d'anciens 
ouvrages,  et  desdébuts  de  nouveaux  chanteurs,  se  succè- 
dent sur  celte  .scène  avec  une  prodigieuse  rapidité.  \  peine 
viuiions-nniis  d'assister  à  la  premièrereprésentationd'/I  si- 
f/)wr  l'asrarelio  ,  dont  nous  avons  rendu  compte  dans  notre 
pri'i'eili'iile  rhninique  .   que  nous  assistions  à  la  première 

repiesnui  II .I.'  In  r.'prisedu  Muletier,  une  des  plus  cliar- 

mniili's  p.ii  iiinni-  .1  ll.'rold  Cet  ouvrase  fut  donné  pour  la 
preiuiern  l.n-  nii  ili.'ilre  Feydeau  en  182:!  Hérold  récrivit 
après  triii-  nnn.' .-.In  -il.n..''  p.iiir  ainsi  dire  forcé.  Us'élait 
vu  tout  n..  i.inp-  nu  .pi.l  |ii.'  sorte  repoussé  du  tliéAlre, 
malgré  le  L^niiin  iiiu<i.  al  ili Miuiiiiquc  le  plus  clairement  dé- 
cidé qui  se  puisse  voir,  coiiime  sa  carrière  l'a  prouvé  par 
la  suite  ,  et  bien  qu'il  eûtdéjà  produit  six  autres  ouvrages 
à  ce  même  théiitre  Feydeau  ,  seulement  de  1810  à  1820. 
Il  y  rentra  par  le  Muletier.  Eh  bien  I  le  croirait-on  ?  ce  ne 
fui  pas  sans  de  nouvelles  peines  et  de  grands  obstacles. 
La  pièce ,  écrite  par  M.  Paul  de  Kock ,  de  ce  style  re- 
trous.sé  tant  soit  peu  sans  façon  ,  qui  caractérise  les  romans 
de  cet  écrivain  devenu  si  populaire  ,  ne  fut  rien  moins 
que  courtoisement  reçue  par  le  public  .  à  ipii  ce  soir  là  , 
par  extraordinaire  .  il  prit  d'étranges  velléités  de  pudeur. 
Opendant  la  musique  du  Mutelirr  était  un  chef-<r(Puvrc. 
ni  plus  ni  moins  ,  d'un  bout  à  l'autre  ,  depuis  la  première 
note  do  l'ouverture  jusqu'à  la  dernière  du  chieur  des  ban- 
quettes ,  pour  nous  servir  d'un  mot  du  Muabulaire  des  cou- 
lisses. Aussi  ,  taudis  que  le  parterre  s'obstinait  à  .siffler. 
les  .ii'leurs  par  un  sentiment  des  plus  honorables  cl  des 
III. 1111-  1.']., 111. lus  dans  le  monde  oes  arts,  s'obslinèrcnl 
il  |..ii.'i  I  ..iiM,i-n.  si  bien  qu'il  atleignit  la  centième  i-epré- 
.•^eiiidh.n  II  . lui  sait, s'il  en  eiU  été  autrement .  ce  qu'il  se- 
rait advenu  d  llérold  et  do  son  admirable  talent  ?  Il  est  pro- 
bable que  nous  n'aurionsjamaiscu  ni  Marie,  ni  Zampa  ,  ni 
le  /'n'  (ii/r-r/ofs.  Pourtant  le  même  génie  qui  rayon  neavec 
tiiiil  de  splendeur  dans  ces  partitions  .  est  tout  entier  révélé 
daiiseelle  du  Miilrlifr.  bienqiieilansiincadre  plus  restreint. 
Mais  c'est  l.l  même  élégance  de  meludies ,  la  même  fraîcheur 
demiitil's.  la  même  richesse  il'iustriiineutation  ,1a  même  origi- 
nalilede.lélailsspiriluels.  piquants. gracieux. peignant  mu- 
sicalement l.i  situalion  avec  une  iniinit.ible  line.sse  de  coloris 
On  doit  donc  sinoirgrc  il  l'administra  lion  actuel  letleropéra- 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


51 


Comique  d'avoir  remis  au  lépcrtoire  un  pareil  ouvrage  ,  qui 
est  à  vrai  dire  tout-à-fait  neuf  pour  le  plus  grand  nombre 
des  amateurs  et  même  des  artistes  de  nos  jours. 

Quelques  jours  avant  la  reprise  du  Muletier ,  on  avait 
remis  en  scène  le  Déserteur  ,  cet  ancien  chef-d'œuvre  du 
genre,  vrai  modèle  d'exquise  sensibilité  etde  franche  bouf- 
fonnerie tout  à  la  fois.  C'est  M.  Bussine  qui  remplit  main- 
tenant le  rôle  d'Alexis  ;  il  le  chante  avec  beaucoup  de  goût 
et  d'élégance.  Dans  les  rôles  de  Monlauciel  et  du  grand 
Cousin  ,  MM.  Mocker  et  Sainte-Foy  font  toujours  le  plus 
grand  plaisir  à  voir  et  à  entendre  ;  il  n'est  pas  de  front  sou- 
cieux qu'ils  ne  parvinssent  a  dérider  sur  l'heure.  C'est  dans 
Je  Déserteur  que  se  trouve  le  fameux  air  de  basse  :  Le  roi 
passait  et  le  tambour  battait  aux  champs.  Sous  la  pre- 
mière IU'publi(|ue,  on  ne  voulu!  pas,  pour  un  mot ,  sacri- 
fier tout  un  bel  ouvrage.  On  eut  alors  1  ingénieuse  idée 
de  faire  chanter  ;  La  loi  passait,  etc.  De  nos  Jours  , 
c'est  bien  différent,  on  use  d'un  moyen  plus  simple  et  plus 
expéditif  ;  on  ne  chante  rien  ;  on  supprime  l'air  tout  bonne- 
ment. Sans  doute  on  a  trouvé  qu'il  était  ini|)Ossibie ,  il 
cause  du  rliytlime  musical  et  do  la  mesure  du  vers,  de  faire 
dire  au  chanteur  :  Le  chef  du  pouvoir  exécutif  passait  et  le 
tambour  battait  aux  champs.  En  vérité  ,  c'est  par  troj)  de 
susceptibilité  pour  un  air  de  basse.  Plutôt  que  d'en  priver 
le  public,  pourquoi  ne  pas  laisser  intact  le  texte  de  ce  bon 
Sedaine  ,  qui  n'a  certes  jamais  eu  la  prétention  de  révolu- 
tionner le  monde  avec  ses  poèmes  d'opéra-comique  ?  Le 
mot  roi  n'eût  probablement  pas  effrayé  le  public  aujour- 
d'hui, plus  que  celui  de  république  ne  l'effarouchait  il  y  a 
un  an.  Et  l'on  ne  se  faisait  pas  faute  de  l'employer  alors, 
ni  auparavant,  sous  toutes  les  dynasties.  Bref,  ma'intenant. 
dans  l'air  du  Ùéserteur,  il  ne  passe  plus  ni  roi ,  ni  loi ,  ni 
personne  :  il  n'y  a  que  l'air  que  l'on  passe;  et  c'est  grand 
dommage ,  car  il  est  fort  beau. 

Après  la  reprise  du  Déserteur  et  du  Muletier,  est  venue  la 
reprise  de  l'ilmiasiadricc,  pour  la  continuation  des  débuts 
de  madame  Ugalde-Beaucé.  Le  succès  obtenu  par  cette  jeune 
et  déjà  excellente  cantatrice,  dès  la  première  soirée,  n'a  fait 
que  s'accroître  depuis  et  grandit  chaque  jour  davantage,  à 
mesure  qu'elle  se  familiarise  avec  le  théâtre  et  le  public.  Le 
rôle  d'Henriette  lui  a  valu  un  nouveau  trionqilie  ;  elle  le 
chante  à  la  perfection  ,  et  bientôt,  nous  l'espérons  ,elle  le 
jouera  de  môme.  Mademoiselle  Darcier,  à  cette  reprise  de 
\ Ambassadrice,  s'est  chargée  du  rôle  de  Charlotte  Aucune 
actrice  ne  l'a  si  bien  joué  depuis  la  perte  si  regrettable  de 
Jenny  Colon.  Elle  dit  on  ne  peut  plus  spirituellement  les 
couplets  du  premier  acte,  et  on  ne  rit  pas  mieux  qu'elle  ne 
fait  à  la  scène  du  second  acte,  où  elle  rencontre  la  baronne 
Varnek. 

La  semaine  dernière,  on  a  donné  un  petit  ouvrage  nou- 
veau ,  mais  si  petit  que  c'est  à  peine  si  nousenavonsà  dire 
quelque  chose.  M.  Sauvage,  auteur  de  l'^au  merveilleuse  ol 
de  Gille  ravisseur,  a  été  moins  heureux  en  écrivant  la  Sour- 
noise. Celle  sournoise  a  pourtant  un  certain  reflet  de  bonne 
vieille  comédie  qui  n'est  ni  sans  charme  ni  sans  mérite.  Ce 
qui  manque  à  la  nouvelle  pièce,  c'estrélément  musical  ;  ou  le 
musicien  n'a  pas  su  l'y  trouver.  M.  Tins  a  écrit  en  effet  bon 
nombre  de  morceaux  pour  cette  partition  ;  mais,  à  l'excep- 
tion d'un  trio,  fait  avec  es|irit  et  vivacité,  et  la  seconde 
partied'un  air  chanté  par  mademoiselle  Lemercier,  nousnv 
trouvons  rien  qui  puisse  ajouter  à  la  réputation  d'agréable 
compositeur  de  romance,  que  M.  Thjs  s'est  depuis  long- 
temps acquise  dans  les  salons  d'un  monde  honnête  et  très 
modeste  dans  ses  prétentions  au  sublime  de  l'art. 

Nous  avons  encore  deux  débuts  à  signaler  à  l'Opéra-fo- 
niique,  qui  ont  également  eu  lieu  la  semaine  dernière,  tous 
deux  dans  la  reprise  d'Ha!,dé?c.  M.  Boulo  est  un  des  ténors 
aspirants  à  l'héritage  de  Roger.  Il  aurait  quelques  chances 
de  le  recueillir,  s'il  peut  parvenir  à  se  donner  la  distinction 
qui  lui  manque  dans  le  débit  ,  le  geste,  la  tenue  et  la  dé- 
marche ,  toutes  choses  indispensaCles  pour  un  bon  premier 
ténor  d'opéra-comique  II  a  d'ailleurs  des  cordes  sympathi- 
ques dans  la  voix,  principalement  les  sons  mixtes  du  registre 
aigu,  et  il  s'en  sert  avec  intelligence;  mais  les  notes  de 
transition  du  médium  à  la  voix  de  tête  sont  défectueuses , 
et  le  registre  grave  manque  de  sonorité.  En  somme  pour- 
tant ,  vu  la  disette  de  ténors  qui  afflige  les  théâtres  lyri- 
ques, M.  Boulo  peut  devenir  une  bonne  acquisition  pour 
rOpéra-Coniique.  Il  ne  faut  pas  oublier,  au  reste,  que  le 
rôle  deLoredano  dans  lequel  il  a  d  buté  est  le  dernier  où 
Roger  s'est  montré  avec  tant  de  sujiénorité ,  tant  par  la  dis- 
tinction de  son  jeu  que  par  le  charme  flatteur  de  sa  voix.  La 
comparaison  étaitdonc  danger,  use.  Mademoiselle Decroix  a 
fait  son  premier  début  par  le  rôle  do  Rapliaela.  C'est  une 
jeune  et  jolie  personne  qui  sort  du  Conservatoire,  où  elle 
s' était  fait  favorablement  remarquer  aux  deux  derniers  con- 
cours. Le  succès  qu'elle  a  obtenu  à  la  seène  de  la  rue 
Favart  n'est  donc  en  quelque  sorte  que  la  sanction  de  ses 
succès  déjà  obtenus  sur  la  scènede  l'école.  Le  personnagede 
Raphaela  n'offre  pas  assez  de  développement  pour  établir  un 
jugement  en  forme  sur  le  talent  de  mademoiselle  Decroix  ; 
toutefois  nous  pensons  qu'elle  remplacera  très  convenable- 
ment mademoiselle  Grinim  dans  ses  autres  rôles,  comme  elle 
a  fait  dans  celui-ci.  Grâce  à  ces  débuts  enfin  ,  la  belle  par- 
tition de  M.  Auber  a  été  rendue  au  public  ,  qui  ne  se  lasse 
pas  plus  d'entendre  la  musique  d'Haydéeque  celle  dotant 
d'autres  chefs-d'œuvre  de  l'illustre  directeur  de  notre  Con- 
servatoire. Mademoiselle  Lavoye,  MM.  Audran  ,  Hermann- 
Léon  et  Uicquier  sont  toujours'fort  applaudis.  Nous  devons 
rendre  justice  à  M.  Hermann-Léon  ,  et  reconnaître  qu'il 
saisit  mieux  et  traduit  par  son  jeu  d'une  manière  plus  com- 
plète qu'il  ne  fit  aux  premières  représentations  û'Haydéi-, 
les  nuances  difficiles  du  rôle  du  capitaine  Malipieri.  Il  \r 
chante  aussi  avec  un  sentiment  plus  juste  et  plus  de  fini.  Il 
dit  surtout  avec  un  goijt  parfait  sa  romance  du  premier 
acte. 

Les  jardins  publics  se  hâtent  de  donner  leurs  dernièrrs 
êtes  d'été  ,  pendant  que  la  saison  leur  est  encore  propice 


Le  Parisien  est  vraiment  un  être  privilégié  dans  ses  plaisirs  ; 
il  peut,  sans  sortir  de  l'enceinte  continue,  assister  à  toutes 
les  fêtes  de  l'univers.  Tandis  que  le  Jardin-d'Hiver  lui  sert 
une  fête  orientale  ,  le  Châleau-des-Fleurs  lui  offre  une  fête 
napolitaine  ,  et  le  Château-Rouge  une  fête  vénitienne.  Au 
fond,  cette  nomenclature  dejeu'etde  ris  cosmopolites  n'est 
qu'un  spécieux  prétexte  dont  la  musique  se  sert,  pour  con- 
server et  assurer  son  empire,  en  ces  temps  où  les  empires 
sont  si  peu  sûrs  et  d'une  conservation  si  difficile.  A  la  vé- 
rité, ce  n'est  pas  sans  quelques  pénibles  sacrifices  de  son 
fier  orgueil  que  la  musique  atteint  son  but.  Ne  pouvant  plus 
régner'mouicnl.uiénieut  d'un  |:OUVoir  absolu  .  Vart  musical 
se  voit  contraint  de  s'unir  à  la  pyrotechnie,  afin  de  pouvoir 
continuer  a  captiver  le  public.  Ce  n'est  pas  la  première  fois 
que  le  monde  parisien  est  témoin  d'une  semblable  mésal- 
liance. Il  y  a  précisément  cent  ans  ou  environ  que  pareille 
chose  arriva  à  la  Comédie-ltalienn*.  Les  acteurs  de  l'Hôtel 
de  Bourgogne  voyaient  tous  les  jours  le  public  déserter  leur 
salle,  dédaignant  leurs  pastiches  pour  les  joyeux  spectacles 
de  la  fiiire',  Alws  nrriva  ri'lt;ilie  le  premier  Ruggieri  qui 
vint  en  I-'humv  Ijuv  -nnivc  de  rriciires  artificiers.  Les  co- 
médiens iI.iIhmi^  -  riii|iir~M'rriii  ilf  m'  l'associer,  et  ils  don- 
nèrent sur  leur»  Ihealie  des  duertiîsements  mêlés  de  feux 
d'artifice;  ils  réchauffèrent  ainsi  le  zèle  des  amateurs  de 
musique ,  qui  avait  été  bien  près  de  s'éteindre.  Mais  on  en 
revint  bientôt  à  estimer  convenablement  les  véritables 
beautés  de  l'art,  et  a  les  distinguer  de  ce  qui  n'était  que  fu- 
mée. Chaque  chose  fut  remise  à  son  lieu.  La  Comédie-Ita- 
lienne en  fut  quitte  pour  la  peur  et  pour  avoir  dérogé  un 
moment. 

A  propos  de  Comédie-Italienne,  cela  nous  fait  penser  que 
le  Théâtre-Italien  doit  faire  sa  réouverture  sous  ;  eu  de  jours, 
et  l'on  dit  que  le  nouveau  directeur  de  ce  théâtre  n'a  pas 
encore  d'orchestre  ;  sans  compter  qu'il  n'a  plus  au  nombre 
de  ses  pensionnaires  ni  la  Grisi,  ni  l'Alboni,  ni  Mario,  ni 
Gardoni...  Est-ce  que  par  hasard  il  va  nous  arriver  d'Italie 
un  nouveau  Rueaieri  ?  . 

G.  B. 


C/'oiirrier  de  Paris. 

■Vous  aurez  beau  faire  et  beau  dire  ,  vous  devez  vous  ré- 
signer. C'est  une  nécessité  qu'il  faut  subir,  la  semaine  est 
politique  et  rien  que  politique.  Un  seul  mot  s'échappait  de 
toutes  les  lèvres  et  sonnait  délicieusement  à  toutes  les 
oreilles  :  Élection.  Les  nouvelles  de  Francfort,  la  destruc- 
tion de  Messine,  les  terribles  vengeances  de  l'Irlande  n'ont 
trouvé  que  des  lecteurs  distraits  et  indifférents,  et  c'est  pour 
en  conserver  la  date  que  V Illustration  leur  consacre  un 
dessin.  Pendant  cette  étourdissante  semaine,  vous  n'étiez 
plus,  comme  dit  la  Colombine  du  Tableau  parlant,  ce  que 
vous  êtes ,  i.imabics  Parisiens .'  ni  rentiers,  ni  commerçants, 
ni  artisans,  ni  artistes,  ni  flâneurs,  vous  étiez  des  électeurs. 
Le  devoir  politique  absorbait  tous  les  autres  ,  vous  ne  vous 
apparteniez  plus,  vous  étiez  et  vous  êtes  encore  les  escla- 
ves de  la  chose  publique.  Point  de  trêve,  point  de  répit,  le 
scrutin  est  ouvert,  que  le  nom  de  vos  représentants  sorte 
de  l'urne,  il  en  est  jusqu'à  trois  que  vous  devez  nommer. 
Sérieusement  parlant,  jamais  fièvre  électorale  ne  s'annonça 
par  de  plus  violents  symptômes.  Etes-vons  casanier  ou 
tout  simplement  paralytique,  ne  vous  dérangez  pas,  la  po- 
litique saura  bien  arriverjusqu'à  votre  fauteuil  ;  la  voici  en 
chair  et  en  os,  sous  prétexte  de  visite  amicale,  ou  bien  elle 
vous  est  venue  sous  bande  et  dans  le  simple  appareil  d'une 
candidature  qui  s'humilie,  ou  bien  encore  avec  la  har- 
diesse d'un  pamphlet  à  domicile.  Cependant  l'heure  des 
affaires  a  sonné .  ou  le  moment  est  venu  du  loisir  et  des 
nonchalances  pédestres.  Si  bien  que  vous  voilà  dehors,  en 
pleine  liberté ,  en  pleine  rue  ;  c'est  là  que  notre  politique 
vous  attendait.  Quelle  fête,  quelles  clameurs,  quel  specta- 
cle !  Les  murailles  sont  bariolées  de  rouge  et  de  blanc  en 
manière  d'affiches  où  M.  Pouff  a  fait  merveille.  C'est  un  feu 
croisé  d'annonces  admiratives,  de  paragraphes  louangeurs, 
de  recommandations  hyberboliques.  «  Citoyens,  nommons 
Cabochard,  nommons  Mercadet  pour  le  salut  de  la  patrie!  » 
Non-seulement  la  politique  vous  saute  aux  yeux,  mais  elle 
vous  saisit  au  collet,  elle  vous  secoue,  vous  pourchasse  et 
finit  par  s'insinuer  jusque  dans  vos  poches.  Cherchez  votre 
mouchoir,  il  est  remplacé  par  une  poignée  de  circulaires , 
un  nuage  de  çetits  papiers  a  crevé  sur  l'asphalte ,  et  plus 
d'un  crieur  officieux  que  le  progrès  social  a  démuselé  vient 
vous  hurler  sa  liste  à  bout  portant,  en  y  joignant  ce  com- 
mentaire pour  votre  instruction  :  «  Raspail  est  le  candidat 
des  patriotes,  et  l'humanité  souffrante  lui  doit  l'invention 
du  camphre  et  des  cigarettes.  Quel  orateur  !  il  vous  éthérise. 
je  veux  dire  :  il  vous  électrise.  Ainsi  de  Cabet,  le  père  du 
communisme,  etde  Thoré,  le  fondateur  de  la  Vraie  Répu- 
blique ,  ce  sont  trois  représentants  premier  numéro!.  .  » 
Que  si  le  passant  regimbe  aux  félicités  de  l'Icarie,  l'offi- 
cieux change  de  gamme  et  vous  traite  d'actionnaire  et  même 
de  réactionnaire  ;  que  si  encore  vous  avez  le  malheur,  qui 
est  le  mien,  de  rejeter  la  circulaire  Thoré,  notre  homme, 
plein  de  son  Tartufe ,  vous  lancera  celte  flèche  du  Parlhc  : 
Malgré  tout,  vous  serez,  pardieu,  tkorifié.' 

Ce  n'est  là  qu'un  épisode,  il  y  en  a  eu  cent  autres  non 
moins  mémorables,  autant  que  de  candidats,  cent  candi- 
dats de  toutes  les  conditions,  de  tous  les  âges  et  de  tous  les 
sl\l.'s,  '1  1  il,'(  Icui  n'avait  que  l'embarras  du  choix.  Mais 
a  i|iini  Imii  iii.niiiiiLiiil  allonger  le  chapitre  des  faits  accom- 
pli-. liMlr|.ijiMllrii,(iil  des  bullefins  a  eu  lieu  (voir  notre 
vignette),  le  vote  populaire  a  marqué_au  front  trois  nou- 
veaux élus  et  l'urne  du  scrutin  ne  co'ntient  plus  que  des 
cendres  qu'il  devient  inutile  de  remuer,  l'ne  observation 
seulement  :  Cette  grande  fêle  des  élections ,  qui  va  passer 


à  l'état  chronique,  tout  le  monde  en  reconnaît  les  avanta- 
ges; mais  jusqu'à  ce  que  les  mœurs  s'y  soient  faites,  le 
commerce  qui  nourrit  l'Etat  n'en  épronvera-t-il  pas  quel- 
que dommage  :  les  élections,  qui  raniment  dans  les  âmes 
le  feu  sacré  du  patriotisme,  rouvrent  la  porte  du  club  et  font 
partir  son  feu  d'artifice.  Ce  n'est  pas  autour  de  ce  mot-là 
que  la  République  s'organisera  sans  orage,  et  il  ne  faut  pas 
oublier  que  la  liberté  sans  l'ordre  est  la  plus  insupportalile 
des  servitudes. 

Du  reste,  le  sérieux  des  occupations  n'a  pas  brisé  tout-à- 
fait  la  chaîne  des  soins  frivoles  et  des  distractions  du  grand 
air.  Le  Parisien  est  toujours  cet,  homme  des  champs  célébré 
par  Delille ,  et  beaucoup  de  votes  ont  été  perdus  dans  les 
bois.  Plusieurs  de  ces  réfractaires  ont  pu  recevoir  à  Saint- 
Cloud  une  leçon  de  civisme  qu'ils  méritent  bien.  C'était  au 
sein  de  l'établissement  du  sieur  Cabassol,  premier  physicien 
de  la  République.  Une  foule  idolâtre  venait  d'applaudir  aux 
exercices  de  la  femme  géante  ;  cette  foule  avait  admiré  les 
soubresauts  du  serpent  de  mer  et  la  majestueuse  attitude 
du  grand  pélican  blanc,  il  ne  manquait  plus  que  la  parade 
pour  mettre  le  comble  à  son  bonheur  ;  mais  point  de  parade  ; 
où  est  Jocrisse  ;  qu'est  devenu  ce  bon  M.  Duval  auquel  Jo- 
crisse raconte  son  odyssée  et  ses  jocrisiades  ;  la  foule  ré- 
clame des  explications,  et  madame  Cabassol  les  lui  donne 
en  ces  termes:  «Messieurs  et  dames,  nos  hommes  sont 
restés  à  Paris  jusqu'à  tantôt  pour  l'exercice  de  leurs  droits 
électoraux  » 

Il  faut  bien  signaler  aussi  cette  ardeur  de  fraternisation 
qui  s'est  emparée  de  notre  garde  nationale.  Elle  fait  gémir  les 
rails  et  soupirer  les  locomotives  à  la  plusgrandejoiedeMM.les 
directeurs  de  chemins  de  fer.  On  part  pour  Dunkerquo,  on 
revient  d'Orléans;  hier  c'était  Bourges,  aujourd'hui  il  s'agit 
de  Boulogne-sur-Mer.  Allons,  braves  Athéniens,  on  fait  gril- 
ler le  poisson,  les  volailles  sont  à  la  broche,  les  gâteaux 
sont  pétris,  la  couronne  du  festin  vous  attend  ,  le  vin  est 
tiré,  et  soixante  lieues  après  tout  cen'estpasla  rierà  boire. 
Ainsi  arrivent  nos  camarades  de  la  6'  légion  dans  le  port 
qui  s'est  paré  pour  les  recevoir  ;  les  navires  sont  pavoises  , 
les  vivat  retentissent,  et,  au  moment  où  nous  parlons  ,  les 
verres  s'emplissent  et  se  vident  sur  la  plage,  et  l'on  échange 
bruyamment  le  baiser  de  paix.  Une  autre  fois  nous  sau- 
rons vous  donner  de  plus  amples  détails  sur  cette  fête,  dont 
la  vignette  ci-jointe  reproduit  le  plus  réjouissant  épisode. 
Les  paroles  ont  des  ailes  et  la  plume  a  beau  voler,  le  crayon 
cette  fois  aura  été  plus  vite  qu'elle.  Il  s'agit,  à  ce  qu'il  paraît, 
d'une  course  de  quadrupèdes  à  longues  oreilles,  montés  par 
des  jockeys  de  bonne  volonté,  et  la  joute  a  lieu  en  face  des 
splendeurs  de  l'Océan.  N'allez  pas  croire  néanmoins  à  une 
épigramme  ,  et  il  est  certain  que  les  Boulonnais  n'ont  pas 
voulus  montrer  à  nos  Parisiens  comment  ils  s'y  prennent 
pour  faire  courir  des  ânes  à  leur  fêtes. 

Des  ânes  de  Boulogne  nous  passons  à  des  savants  de 
Paris,  mais  le  bon  sens  du  lecteur  corrigera  ce  que  la  tran- 
sition peut  avoir  de  trop  brusque.  Dans  le  dernier  pro- 
gramme de  l'Institut  (Académie  des  sciences) ,  la  planète  Le- 
verrier  a  fait  place  à  la  question  de  la  domestication  des 
animaux.  On  avait  déjà  réhabilité  l'oie  dans  notre  estime,  le 
tour  du  phoque  est  à  la  fin  venu.  Ce  n'est  pas  que  cet 
animal  aquatique  ait  de  grandes  dispositions  pour  les  arts 
d'agrément  et  qu'on  en  puisse  faire  un  pianiste  ou  un  joueur 
de  dominos,  la  société  attend  de  lui  des  services  plus  utiles. 
La  vocation  de  ce  gros  poisson  est  d'attraper  les  petits.  La 
pêche  est  une  chasse  où  il  jouera  le  rôle  du  lévrier  Tous 
les  traités  d'histoire  naturelle  ont|déjà  rendu  hommage  à  la 
sagacité  de  cet  animal ,  qui  le  porte  a  courir  sus  aux  poisr- 
sons  nécessaires  à  sa  nourriture,  et  la  difficulté  ne  consiste 
qu'à  lui  faire  entendre  que  désormais  il  ne  chassera  plus 
pour  son  propre  compte,  et  qu'il  est  tem|is  que  notre  espèce 
humaine  recueille  le  fruit  de  la  peine  qu'il  s'est  donnée.  On 
va  le  raisonner ,  c'est-à-dire  l'élever  conformément  à  ces 
principes.  Jusqu'à  présent  les  phoques  soumis  à  cette  ex- 
périence l'ont  peu  goûtée ,  elle  pénètre  difficilement  dans 
leur  entendement,  et  sous  ce  rapport  bon  nombre  d'hommes 
seraient  phoques  ;  mais ,  à  quoi  servirait  la  science  sinon  à 
trouver  les  moyens  nécessaires  pour  triompher  de  tous  les 
obstacles  L'animal  une  fois  dompté,  le  phoque  suivra  le 
pêcheur,  ou  plutôt  c'est  le  pêcheur  qui  suit  son  phoque  en 
le  roulant  dans  un  tonneau;  l'attirail  est  peu  commode,  mai-; 
saurait-on  payer  trop  cher  le  bonheur  d'aller  à  la  chasse 
avec  un  phoque! 

Un  jour  ou  l'autre  le  rêve  de  Swift  ne  saurait  manque: 
d'être  réalisé,  et  l'exemple  du  phoque  doit  civiliser  le  cro- 
codile. Il  ne  S'agit  plus  que  de  persuader  à  ce  dernier  am- 
phibie, que  ses  Ijents  ne  lui  ont  pas  été  données  pour  son 
usage.  Viendront  ensuite,  dans  un  autre  ordre  de  bêtes,  les 
rhinocéros  qui  sernnl  iiltclé';  n  dc^i  nninilms,  et  l'orang-ou- 
tang que  l'on  pimir:ii[  iliv--ri  .1  1  rsnri.'.M'l  placer  en  Sen- 
tinelle, ce  qui  é|i, m  :-'iirMii  lin  -nvir  |iiMiihli>  à  la  garde 
nationale.  Quant  au  li^ie  ou  a  la  pjiillaie,  c'est  à  tort  que 
vous  leur  attribuez  un  caractère  peu  sociable  et  même  fé- 
roce, il  ne  s'agit,  vous  dira  le  même  savant,  que  de  savoir 
les  prendre. 

A  propos  de  science,  aux  deux  professeurs  de  mathéma- 
tiques qui  ont  bien  voulu  prendre  au  sérieux  nos  dernières 
observations,  au  sujet  de  la  planète  Leverrier ,  nous  répon- 
drons ceci  :  Notre  bévue  n  est  pas  aussi  grande  que  vous 
la  faites,  puisque  vous  convenez  que  cotte  planète  reste 
invisible  ,  même  aux  yeux  de  la  science  ;  en  d'autres  ter- 
mes, elle  n'existe  pas  encore  sçientiliiiuemenl.  Nous  n'a- 
vons pas  dit  autre  chose;  et  puisqu'on  nous  fait  honte  de 
notre  ignorance  en  invoquant  .\ristote  et  l'excellence  des 
iiialhiinaliqiir-.  im-  itiiix  professeurs  auront  lu  s.iii>  doute. 
(|;mi>  1  ■  ninir  \ii-liilr,  que  "  les  petits  i'iiliiil>  iIcMiiinenl 
ai-niicnl  ni,illiriii,iliiirns.  vu  qu'il  y  l'aul  |ilii>  ili' ii  rnioire 
,|„:.,!,.|irj,inriii,  -  Mil' ipini  Piisral  ajimlr,  ipi'  .  I.i  proba- 

illllli'  JMV  >,>  ilrLTi'-  llilliu-  r-l  1.1  IrlTi'  llir.illlllH'  (lu  ma- 
il,,.;,,;, 1 1.1, .,1 ,  1.1  |i,-,.iMr.  ,|iii'.  ,,-i  1.1 -11,11, V  ili>  baga- 
telles, •    et  d  Ali'iubrrt,    cnlin ,   ipie  ■    lL^  niallicuutiqucs 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


sonevoises. 
Cet 
hoiioiiible  financier .  dont  les  plus  beaux  jours  dataient 
de  la  Restauration  el  du  syndicat ,  était  connu  et  sera  re- 
gretté pour  la  libéralité  de  son  humeur,  la  magnificence  de 
ses  goûts  el  l'emploi  éclairé  qu'il  fit  de  son  immense  for- 


Insurrection  eu  Irlande.  —  Signaui  de  feu  dans  les  montagnes. 


tune.  M.  Baudon  est  l'un  des  créateurs  des  Caisses  d'épar- 
gne et  le  fondateur  de  la  Caisse  d'escompte  qui  porte  son 
nom.  Il  a  patroné,  en  outre,  plus  d'une  institution  chari- 
table, ce  qui  parfois  ne  l'empêchait  pas  de  semer  l'or  d'une 


manière 
moins 
fructueuse 
et  moins 
édifiante. 
C'est  ainsi 
qu'un  jour, 
la  jeune 
comtesse 

de  M. 

exprimant 

devant  lui 

le  regret 

de  ne  point 

avoir 
clé  invitée 

au 
brillant  bal 
que  donnait 
le  lendemain 
son  voisin 
le 
grand  James, 
M.    Baudon 


réparer  l'oubli 

d'une 

manière 

éclatante 

Pendant 

Id  nuit, 

illitconstruin' 

une 

salle  de  bal 

dans 
.~e>jardins 
de  Ihôlel 
Théluason , 
et  y  donna 
une  fête 
qui  éclipsa 
l'iiutre 
en  lui  enlevant 
l'élite 
et  la  fleur 
de  ses  invité* 
C'est 
licut  être 
au  bruit 
qui  se  fil 
de  celle 
magnificence , 
que 
M.  Baudon  dut  cette  parole  d'un  roi  chasseur  :  «  Monsieur 
Baudon  ,  j'irai  chasser  la  grosse  bêle  chez  vous!  •  Mais 
le  financier,  qui  savait  compter,  et  qui  se  rappelait  sans 
doute  la  fameuse  pêche  de  son  prédécesseur  Bouret,  répon- 


|ii-l..Miilloiii.Mil  ,lcs   \.iUs,  1.-  il  si-ploiulire  IS 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


(lil  au  roi  en  souriant  :  •  .Siiv,  je  n'y  suis  jamais:  »  Char- 
les X  comprit  et  en  resta  là  de  ses  jeux  de  prince.  Cette 
destinée  fatale  de  Bouret,  lélernel  épouvantail  des  finan- 
ciers trop  prodigues,  la  torluneen  réservait  pourtant  les  ri- 
Sueurs  à  notre  prudent 
linancier,  et  Ion  se  sou- 
vient encore  des  circon- 
stances qui  causèrent 
une  ruine  que  tout  le 
inonde  déplora. 

Qui  croirait  que  dans 
notre  monde  si  agité  il  se 
passe  encore  des  aven- 
tures qui  rappellent  les 
fantaisies  les  plus  folles 
de  l'ancien  régime  !  L'hé- 
ro'ine  est  une  républi 
c<iine  de  la  veille  ,  deve- 
nue a  peu  près  princesse 
du  lendemain.  Il  paraît 
que  cette  dame  ,  ayant 
lu  la  Précaution  inutile 
de  Scarron,  voulut  s'as- 
surer si  son  époux  con- 
naissait ces  récits  du  bon 
vieux  temps.  La  dame 
s'ennuie  dans  son  donjon 
fie  banlieue,  un  cavalier 
passe,  il  a  bon  air,  elle 
le  reconnaît ,  l'appelle 
par  un  petit  nom  ,  et 
voilà  le  couple  riant  et 
chuchotant  à  plaisir,  en 
tout  bien  tout  honneur; 
mais  une  voix  bien  con- 
nue se  fait  entendre,  et, 
dans  le  trouble  insépa- 
rable d'une  surprise,  le 
galant  s'esquive  dans  un 
cabinet  voisin  dont  ma- 
dame tire  la  clef.  L'ogre- 
mari  a  l'air  rie  sentir  la 
chair  fraîche,  et,  pour 
le  distraire,  «  Gageons, 
lui  dit-on  ,  que  vous  ne 
nommerez  pas  touslesin- 
grédients  d'une  porte,  • 
ot  ainsi  de  suite  jusqu'à 
la  fin  de  la  Gageure  im- 
prévue (  voir  la  pièce  de 
Sedaine).  Si  bien  que 
quand  madame  présente 
la  clef,  monsieur  la  re- 
fuse, et  c'estainsi,  ajoute 
la  chronique  d'hier,  que 
madame  a  gagné  sans 
que  monsieur  ait  perdu 
autre  chose  que  son  pari. 

La  Comédie-Française  reprenait  l'autre  jour  cetle  pièce, 
d'une  touche  si  franche  et  si  comique  et  d'un  dénoûment  si 
invraisemblable  ;  elle  a  repris  aussi  Hernani  e\,  Marion  De- 
lorme,  tandis  que  le  Théâtre-Historique  s'en  prenait  a  Ma- 
rie Tudor  avec  mademoiselle  Georges ,  et  à  Charles  VII 
avec  madame  Dorval ,  tant  il  est  vrai  que  nos  théâtres  let- 
trés aiment  à  travailler  en  vieux.  On  dit  pourtant  que  ce  ne 
sont  pas  les  nouveautés  qui  leur  manquent;  mais  ils  esti- 
ment que  le  moment  n'est  pas  encore  venu  de  les  mettre  en 
scène  et  d'en  tirer  parti. 

Marion  Delorme,  Marie  Tudor,  ces  chefs-d'œuvre  d'au- 
trefois et  d'un  temps  oii  le  beau,  c'était  le  laid,  on  s'expli- 
que peu  le  motif  de  leur  reprise,  et  le  silence  du  feuilleton 


est  une  preuve  nouvelle  et  surabondanlc  que  le  besoin  de 
cette  littérature  rétrospective  se  faisait  généralement  peu 
sentir.  Cependant,  pour  être  équitablejusqu'au  bout,  il  faut 
constaterque  la  reprise  d'AngUe,  ce  drame  d'une  puissance 


brutale,  œuvre  des  beaux  temps  de  M.  Alexandre  Dumas  , 
a  obtenu  un  assez  grand  succès  de  terreur  et  de  larmes. 

C  est  ainsi  que  nous  avons  eu  partout  le  drame  et  ses 
émotions;  il  s'est  montré  même  au  Gymnase  avec  la  Com- 
tesse de  Senneeet).  C'est  une  grande  dame,  jeune,  belle  , 
dont  l'existence  s'embellit  de  tous  les  prestiges  et  à  laquelle 
il  ne  manque  rien  absolument  que  l'amour  de  son  mari. 
Passionnée  comme  une  jeune  fille,  et  jalouse  à  la  façon  des 
épouses  vertueuses,  la  comtesse  pleure  et  gémit  de  cet 
abandon  immérité,  jusqu'au  moment  où  elle  découvre  le 
prétexte  de  tous  ses  malheurs.  M.  le  comte  lui  a  donné  une 
rivale,  à  ses  côtés  et  sous  le  même  toit.  D'abord  l'épouse 
outragée  a  recours  aux  moyens  anodins  pour  ramener  son 


.Mberldaiis  la  voie  du  devoir;  elle  tonte  de  marier  ipli,. 
Georgina  ,  qui  est  sa  cousine  ,  a  un  M  Berlel ,  estimable 
apothicaire  et  amoureux  parfaitement  ridicule;  mais  U 
mèche  est  facilement  éventée,  et  la  discorde  éclate  de  plus 
belle  entre  la  femme  ci 
le  mari.  La  colère  contn- 
celui  qu'on  aime  .  a  dit 
le  moraliste  ,  est  une 
véritable  démence.  L'a- 
mour de  la  comtes!>e 
tourne  en  véritable  fu- 
reur ;  elle  réclame  im- 
périeusement le  renvoi 
de  cette  lille  ,  et  Albert, 
cœur  de  bronze  et  vo- 
lonté de  fer,  veut  abso- 
lument qu'elle  reste  au 
château  pour  surveiller 
l'éducation  de  son  lils 
En  outre  ,  M.  le  comte  , 
déplus  en  plus  exigeant 
n'entend  pas  que  Bartel 
persiste  dans  ses  projets 
de  mariage;  la  situation 
est  terrible,  et  nous  n'en 
sortirons  que  par  quel- 
que chose  de  plus  ef- 
frayant encore.  C'est 
l'enfant  qui  s'est  laissé 
choir  dans  le  grand  bas- 
sin et  qu'on  apporte 
quasi-noyé  et  presque 
mort.  Vous ,  comprenez 
que  devant  un  si  grand 
malheur  il  n'y  a  plus  de 
place  pour  la  jalousie 
dans  l'âme  de  l'épou.sp, 
et  que  la  colère  de  l'e- 
poux  s'est  éteinte  dans 
le  cœur  du  père.  On 
mêle  ses  larmes ,  on  st^ 
réconcilie  ;  cependant. 
Georgina  ne  s'éloigne  et 
ne  s'éloignera  pas.  Lu 
plus  grand  sacrifice 
qu'une  femme  peut  fai- 
re ,  le  voilà  donc  ac- 
compli ,  mais  c'est  peu 
de  cette  soumission  de 
l'épouse;  la  concubine 
veut  aussi  frapper  la 
mère ,  et  l'enfant  sera 
remis  à  sa  tutelle  et  à 
sa  garde  C'est  une  lior- 
^=EL^-^  rible  action  que  ce  vol 

fait  à  une  mère  ,  et  par 
bonheur  c'est  une  scène 
très     habilement     con- 
duite et  que  les  auteurs  ont  sauvée  de  l'odieux  par  le  pa- 
thétique. 

Si  je  vous  dis  qu'après  tous  ces  bienfaits  et  tous  ces  for- 
faits, la  comtesse  trouve  au  milieu  de  la  nuit  cette  Geor- 
gina en  tête-à-tête  avec  Albert,  et  qu'à  la  suite  d'une  scène 
d'éclat,  la  malheureuse  femme  se  voit  réduite  à  écrire  une 
lettre  d'excuses  à  sa  rivale  ;  si  j'ajoute  que  le  comte  met  le 
comble  à  ces  humiliations  par  une  dernière ,  une  déclara- 
tion de  divorce,  vous  allez  vous  récrier.  Ainsi  pourtant  l'ont 
voulu  les  auteurs  qui ,  cette  fois,  à  vrai  dire,  ont  frappé 
trop  fort  pour  frapper  bien  juste,  de  sorte  que  vous  com- 
prenez que,  devant  tant  de  souffrances,  d'outrages  et  de  du- 
reté, la  malheureuse  femme  n'a  plus  qu'un  refuge,  elle  veut 


Kètes     de  lioulogoe.  —  Courses  d'iiiies  sur  la  plai;*,  i  Boulogne. 


■y!x 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


mourir  et  elle  s'empoisonne.  Avec  cette  agonie  commence 
pour  le  coupable  époux  l'heure  des  remords  et  des  regrets  ; 
il  maudit  ses  folles  amours,  il  maudit  sa  maîtresse  et  la 
maîtresse  senfuit ,  cl  quand  Georgina  a  disparu  ,  lorsque 
Albert  a  pleuré  ses  fautes  et  détesté  sa  conduite,  lépouse, 
échappant  ii  la  mort,  vient  donner  a  l'époux  le  baiser  de 
réconciliation  et  d'oubli. 

Sansd(iiilc,lc'sp(Mt;iclede  tant  de  douleurs,'cette  torture 
conjugale,  ces  l.iiiictitalions,  ce  désespoir,  ces  fautes,  ces 

haines  cl  <(■  iii I"iil  i-('l;i  est  un  |ieu  violentet  un  peu 

Ini-'iilirc  I  "111  l:i  -ii'iir  ilii  (iMiiii:i-r,  s.ins  compter  que  celle 
iicliiiii  ili'|;i  M  II  i^ii' i,i|i|,cl,iii  ;i  iiiii- les  souvenirs,  une  au- 
tre action  d  une  cLilr  iriciilc  ri  il  nue  horreur  trop  vérita- 
blement lamentable  ;  mais  on  était  ému,  on  se  sentait  in- 
téressé, et  l'on  a  oublié  volontiers  l'inconvenance  du  sujet 
en  faveur  de  la  pièce  qui  est  très  convenable  et  qui  a  élé 
parfaitement  jouéi',  cl  notaiiunenl  par  ninilanie  Knsc  Chéri , 
l'épouse  la  plus cliasti:  et  la  plus  |i.issiiinTicc,  l.i  plusM'nsible 
(les  mères  et  riiclncc  la  plus  intelli^'eiitc  et  la  plus  spiri- 
tuelle de  l'aiis. 


Keviie  littéraire. 

.le  viens  de  lire  le  niiuvel  ouvrage  de  M  lùlgard  ()uinel, 
et  si  je  sais  bien  qu'en  penser ,  je  ne  sais  vraiment  qu'en 
dire. 

Si  je  loue,  mémo  un  peu,  ma  conscience  en  gémira;  si  je 
l)làme,  je  crains  qu'on  ne  me  reproche  d'oublier  ce  que  je 
dois  à  l'érudition,  au  patriolisnie  si  courageux,  si  doulou- 
reusement éprouvé  du  r(''lébre,  de  l'illustre  professeur. 

M.  Quiiicl,  c'o-t  uncjiisliro  ;i  lui  rendre,  a  toujours  écrit 
sous  reni|ilrc  lllll-|ill  :iil"li-  ^^ll^H■ll,l■^  ,  il  n'.-i  j,iiii.iis|>risla 

plume  qui'  il^in^  h'^  illi'inrx  inh^iiiiiins  (lu  ninnilc.  Aussi 

beaucnii|i  Hc  ;_'cn-,  nnii  iiKnn-  lucii  iiilrnl ii.nnrs,  l'oiil  estimé 
et  vanir   -ui    I  cIiiIihIIc  ilr  mui  -:ii' ,  -;iii~  iMip  icg;inier  au 

fond,  l'nnr  v    i  Lui  ««  .i.linil.  iiuii,  ii  ,i\  (,n>  jiiiiiais  été 

de  ses  ailmir.ilrin^  l),iii>  les  plus  bcau\  jours  de  la  gloire 
de  M.  Edii.u-  (Juincl,  L'Idiie  a  jamais  évanouie  peut-être, 
nous  n'avons  pi iis  lairi'  a  son  étrange  façon  de  com- 
prendre et  d'cxpliipii'r  hi  littérature  et  l'histoire.  Nous  ai- 
mons les  esprits  nels.qui  conçoivent  clairement  et  expriment 
de  même  ce  qu'ils  ont  conçu  Or,  tel  n'est  pas  malheureuse- 
ment l'esprit  de  M.  Edgar  Quinet  :  il  y  a  presque  toujours 
eu  quelipie  clinse  de  nuageux  dans  ses  idées,  comme  il  y 
a  généraleinent  ihins  ses  expressions  quelque  chose  de 
vague  el  de  ilrrl.iiii;iloire.  A  cet  égard  ,  son  nouveau  livre 
ressemlilr  ,i  m-,  .iiiks  C'est  une  suite  d'images  et  de  for- 
mules, d :-r-  ijiii  brillent  aux  yeux  sans  éclairer  l'esprit, 

de  formulr>  rciriiii>>:inles,  mais  qui  font  beaucoup  de  bruit 
pour  rien. 

Sous  ce  titre  ambitieux,  Ui'voluUons  de  l'Italie,  M.  Edgar 
Quinet  s'est  proposé,  comme  il  nous  ledit  dans  sa  préface, 
d'écrire  r/Z/sfo/rc  de  l'dtiie  du  peuple  italien.  Écrire  l'his- 
toire de  I  il  II  H'  di!  Il  111  II'  111  il'  iidl  11  III,  irrles  le  projet  est  vaste 
et  d'une  cxéiulion  ililliiile  roiii  en  -,  enirà  bout,  s'il  se  peut, 
ne  faut-il  pas  interroger  successivement  et  profondément 
toutes  les  phases  de  l'histoire,  tous  les  monuments  de  la 
littérature  et  des  arts,  la  langue,  le  commerce,  la  religion, 
les  mœurs  de  ce  peuple  dont  on  vcul  pénélrer  et  manifester 
l'essence?  Mais  ,\1,  (Jiiinel  s'est  liini  g.inlé  d'interroger  tout 
cela.  11  lui  eût  f.illii  di'Soiuirrsrl  lies  Miliuiics  :  ce  qui  n'eût 
fait  ni  son  affaire  ni  celle  de  son  libraire.  11  a  trouvé  plus 
simple  de  découvrir  un  beau  matin  la  grande  vérité  qu  il  a 
résumée  dans  cet  axiome  : 

»  L'ilalie  romaine  avait  le  génie  pratique,  l'Italie  mo- 
derne a  le  géide  idéal.  » 

Sur  cette  fiinnulc,  le  célèbre  professeur  a  écritdeux  cents 
liages  de  ce  st\  le  brillant  et  brillante  qui  éblouit  les  faibles 
yeux,  et  qui  fait  dire  ii  des  juges  indulgents  que  si  M  Qui- 
iiet  n'est  ni  un  historien,  ni  un  philosophe,  ni  un  critique, 
c'est  du  moins  un  poète.  Glorieux  pis  aller,  et  dont  les  plus 
ambitieux  se  contenteraient  asMiiriiimi    ;\l,iis  M    (juinet 

n'est  qu'un  poète  en  prose,  un  |n  rir  i tw  M.iriiiiuitel  et 

Thomas,  el  autres  faiseurs  de  pni.-r  pniiii|iir  ilmii  liiuu  sait 
le  prix. 

D'ailleurs,  même  en  poésie,  le  premier  mérite,  la  condi- 
tion sine  qua  non,  c'est  d'avoir  le  sens  commun,  c'est  de  ne 
rien  avancer  qui  nesnil  vnii,  c'est  j  dire,  rien  (]iii  ne  tou- 
che le  cœur  ou  irinslnil^r  rr-pnl  Tnlllr-  11'.,  lirliiins  du 
poète,  tous  les  arlilins  ilmii  il  n^r  iir  i|(M\riil  iniilre  qu'à 
mettre  en  relief,  qu'a  l.iur  linllcr  d  nu  pliks  \if  cclat  cette 
vérité  que  riiisloiic  et  l.i  iiliilosophie  expriment  avec  l'élo- 
quente siniplii'ilc  1)111  lui  rst  propre. 

M.  Quiiicl  iii^l  p.is  siiiipir  |iam'  quil  ii  i-st  pas  vrai  :  faule 
d'idées,  il  a  rn-iini's  ;iii  hixr  ilrsiimiv  ;i  lViii|ili;Hr  ilrs  gran- 
des et  pdllipi'lls.'S  |Hinih-~,  srsijuijinlatiil  rnini  nuls  peSeZ 
dans  la  balance.  r\;iiiiini'/.ili'  pii>  li,iilr>  rr- siilmiiçlles  for- 
mules, et  vous  verrez  le  peu  qui  vous  en  restera. 

Sommes-nous  bien  avancés,  par  exem|de,  quand  nous 
vivons  appris  do  M.  Quinet  que  -  l'Italie  antique  avait  le 
génie  pratique,  el  que  l'Italie  moderne  a  le  génie  idéal?  ■ 
(Juoi  I  l'antique  Italie,  la  patrie  de  Virgile, "d'Horace,  de 
Lucrèce,  de  tant  de  grands  poètes  vivant  dans  tous  les  .sou- 
venirs et  de  gr;iiiils  :iiii^li>  dnnt  les  noms  seuls  ont  péri, 
n'avait  pas  le  gnnr  ilr  l  ulril'  c't  d'autre  part  l'ilalie  mo- 
derne, le  berci'iiii  il.^i.i,  -.nic  VII  et  (Wf^  Innocent  III,  îles 
Médicis  et  des  linrgia,  ilrs  .M.irlnavel  el  des  Guiciiardin.  se- 
rait dénuée  dr  sens  pialii|iir-,' l'Aiileiniiienl  lin  pi'iil  lenxer- 
serlapriip"siliiiiideM,(Jiiiiii'l,el  rllcirni  reslcra  m  moins 
vraie,  m  inniii^  l'.ius-r,  Ccsl  la  iiiir  de  ces  riirniiilcs  v.igues 
qui  ne  diseiil  rien  a  t'urce  d'eu  \ouloir  liop  dire 

Ailleurs  M  l'ilgiir  (Juinrl  s'm  i-e  de  ilccouvrir  a  la  féo- 
dalité une  origine  Imite  niunellr,  el  a  ce  propos,  il  t.iiiie 
vortoment  les  pulilicislcs  qui  cherclient  eiicinr  l.i  -mirlr 
féodale  dans  les  loiélsde  la  Germanie  l.e  pnirrssriir  ni.  \:, 
pas  si  loin  pour  la  Iroiuer,  .Selon  lui,  la  féodalité  politique 
-est  formée  tout  simplement  sur  le  patron  de  la  feodaliie 


n'iliiieiisr  iii-lituée  par  le  christianisme,  ou  du  moins  par 

rivjll-r  1  Inrlirnue. 

I.i  pniuiir  acte  moral  de  l'homme,  au  moyen  i\ge,  dit 
M,  (,)iiiiiel ,  e.-l  de  tomber  à  genoux  aux  pieds  liu  iirèlrc,  de 
lui  "faire  hommage  lige  de  smi  iiilrlli.i:eiiie,  de  sa  con- 
science ,  de  tout  son  èln^  nuirai  .\ppli(|oe/.  au  inoiide  civil 
ce  .sentiment  inlerieiir  derenoiicemeiil,  vous  eu  voyez  naître 
la  société  Icodaln,  Chaque  iiiiie,  s  étant  Joiiuée  il  un  prèlre 
coiiiine  a  son  seigneur  spirituel  ,  n'a  presque  rien  plus  il 
faire  pour  .-.e  ildiiiiei' a  un  M'igneur  tem|ion^l.  L'humanité, 
sans  dniii ,  ile-iiinee  il  elle-ineme  après  avoir  abdiqué  entre 
les  mains  du  iiei,^e,  ne  se  sentant  pas  la  force  de  s'appuyer 
sur  sa  pi'iipre  i  nnseieiiee,  se  mit  à  chercher  partout  en  de- 
hors de  SOI  un  aide,  un  patron  ;  le  serf  d'esprit  devint  serf 
de  corps.  » 

Si  ce  passage  datait  de  1748,  ou  même  de  1829,  du  régne 
de  la  CiinijieLMliiin  et  des  inbes  noires  du  Petil-Montrouge, 
il  ne  iiiiiis  siii  |iienilr,iii  imint  Nous  n'y  verrions  qu'une 
preuve  nom  elle  île  i  el  1  sj.i  11  lie  parti  qui,  dans  l'ardeurd'une 
poléniiipie,  lansse  siiu\eiit  les  enseignements  de  l'histoire 
|)ours'en  faire  une  arme  eunire  les  inlliieiH  es  qu'il  combat. 
.Mais  a  quoi  bnu  aujourd  liui  lei  imiiuenrei  K.i\  liai.  Boulan- 
ger ou  Dula  lire?. \  quoi  bon  nier  tous  les  pingiesde  la  science 
pour  faire  pièce  a  un  parti  qui  n'est  plus?  .\l  Ouinet  se 
croit  toujours  en  face  de  ces  mallieureus  ji'suites,  dont  l'i- 
mage I  obsédait  daes  sa  ,  baire  du  colli'ge  de  Kr.inee  ;  et  il 
s'en  prend  an  e.illiiilirisiue,  ,iii  élu  isli.inisiiie  nieiue  ,  des 
épigraiiiiiies  de  I  l'iiirns  iduiicux  .le  ne  !eliilei:ii  pas  en 
forme  son  étrange  npiniun  siu  I  uiigine  de  la  leudalré.  11  me 
suffira  de  reiivnver  les  lerleurs  à  ious  les  grands  historiens 
de  notre  é|)i)ipie',  qui  nous  ont  fait  assister  à  la  naissance  et 
aux  développements  de  la  société  nouvelle  durant  les  siè- 
cles d'épreuve  du  uiuMii  ,ige  1  nus  s'accordent  à  signaler 
l'inlluence  toute  hlieule  que  1  l.^lise  ne  cessa  alors  d'exer- 
cer, du  cinquième  an  di.ii/ieiue  sieele  particulièrement.  11 
est  môme  remarquable  qu'au  iiuheu  île  icuis  ces  Etals  fon- 
dés sur  le  principe  de  la  conipieie  ri  ilr  1  hérédité,  l'Eglise 
seule  olirait  limage  d'une  sociele  repiiliiu  ,iine.  sans  cesse 
vivifiée  et  régnant  par  l'esprit,  et  se  perpétuant,  s'organi- 
sant  par  les  libres  vocations  et  par  l'élection . 

Il  serait  long,  il  serait  fastidieux  d'aller  chicaner  M.  Qui- 
net sur  toutes  les  pages  de  son  livre  qui ,  presque  toutes , 
renferment  des  propositions  plus  ou  moins  aventureuses.  Ce 
qu'il  dit  de  Dante,  de  l'.^rioste  et  de  Boccace  prêterait  sin- 
gulièrement à  la  controverse  Sans  doute  il  faut  qu'il  ail  bien 
peu  lu  fauteur  du  Décaméron,  pour  oser  dire  cpie  ce  n'est 
qu'un  railleur  superficiel.  Qu'il  relise  le  conte  de  la  Conver- 
sion du  Juif,  et  tant  d'autres  charmants  récits  où  l'ironie 
n'est  le  plus  souvent  que  l'arme  dune  raison  supérieure  et 
line,  et  M.  Quinet,  je  l'espère,  pensera  un  peu  mieux  de  Boc- 
cace et  de  son  chef-d'œuvre. 

C'est  bien  il  contrecœur,  comme  on  le  croira  sans  peine, 
el  contraint  par  les  devoirs  d'une  rigoureuse  équité,  que  je 
juge  ainsi  un  homme  distingué,  un  professeur  populaire,  el 
qui  est  de  plus,  depuis  quelques  mois,  représentant  du  peu- 
ple et  colonel  d'une  légion  de  Paris 

Ces  deux  derniers  tilres,  M.  Edgar  Quinet  les  doit  ii  la 
Révolnliiui  lie  l'eviier;  et  de  là  on  serait  tenté  de  croire 
qu'il  \  ;i  LMLjne  .M.iis  le  fait  est  qu'il  y  a  perdu  ,  sensible- 
inentperilu,  l't  je  u  hésite  pas  à  le  ranger  au  nombre  de  ses 
victimes. 

Que  sont  en  effet  des  litres,  même  les  plus  considérables, 
auprès  de  ce  crédit,  de  cette  popularité  dontjouissait  M.  Qui- 
net,  quand,  du  haut  de  sa  chaire  du  collège  de  France, 
il  lançais  sa  parole  ii  tout  un  peuple  de  jeunes  gens  et  de 
belles  dames,  qui  lui  répondaient  par  d  unanimes  et  fré- 
nétiques applaudissements?  Ces  beaux  jours  marqueront 
l'apogée  de  la  gloire  de  M.  Quinet,  ii  qui  la  tribune,  du 
moins  je  le  crains,  ne  rendra  pas  les  triomphes  qu'il  a  con- 
quis dans  la  chaire.  La  chaire  elle-même,  s'il  y  remontait, 
ne  les  lui  rendrait  pas.  Car,  où  serait  alors  cet  esprit  d'op- 
position ipii  passionnait  autrefois  son  auditoire,  qui  le  ren- 
dait si  sympathique  avec  les  paroles  du  maître,  et  qui  n'est 
pas  entré  pour  peu  dans  le  bruyant  succès  de  ses  leçons  et 
de  ses  livres? 

Chaque  peuple  a  son  siècle,  et  clianuc  liommc  u  son  jour. 

Comme  M,  Edcar  Quinet,  M  Alexis Dumesnil  a  été  autre- 
fois un  pampldél'.uie  e,,. nié  el  rediinte  Les  liuiunies  île  qoa- 
raiile  a  ciiiqn.iiile  ,iii,-e  i,i|i|.ell(uil  eueure  le  tiiie  de  quel- 
ques-unes de  ses  liMielilue»,  que  ril.uenl  el  \, ml. lient  a  ipii 
mieux  mieux  le  ('uiisliluliiniinl  et  le  Counin-l-'iuin-ais. 
Les  plus  instruits,  ceux  qui  n  oublient  rien,  vous  parleront 
même  de  son  Histoire  de  l'Iiilippe  II.  ou  pour  mieux  dire 
de  son  Histoire  rnnire  l'IiiUppe  II.  conçue  dans  l'esprit  et 
écrite  dans  le  st\le  de  ll;i\iiiil,  et  où  l'Inquisition,  comme 
bien  vous  pense/,  teiuut  une  large  place.  Eh  bien,  depuis 
celte  époque,  M.  ,\le\is  IKunesnil  n'a  pas  fait  un  pas.  Son 
espiil  pelritie  en  lS-27.  en  est  encore  aux  rancunes,  aux 
eiileies  du  liliéraliMiie  de  ce  temps  contre  la  camarilla,  le 
ininisleie  Villeleet  l;i  congregiilion  .le  parlais  lont  a  l'heure 
de  .M.  Quinet.  (]iii  voit  des  jcsuiles  un  peu  piirliuit;  mais 
M,  Alexis  Dumesnil  est  bien  aulreiiient  possède  de  cette 
maladie  passée  chez  lui  a  l'état  cliioni(|ue.  Homme  d'oppo- 
sition par  lempéranient.  il  n'a  ces.sé  de  l'aire  la  guerre  il  tous 
les  gouvernements,  a  Ious  les  systèmes  qui  se  soni  succédé 
depuis  IHli'.l  jiisqu  a  le  jour.  Dieu  sait  s'il  ménage  les  répu- 
blicains de  la  veille  ou  du  lendemain,  els'il  nous  révèle  sur 
ce  chapitre  des  vérités  précieuses  auxquelles  on  nes'alten- 
dail  pas  du  tout!  Qui  aurait  cru,  par  exemple,  que  les 
jésuites,  comme  dit  .M.  Dumesnil,  •>  sont  iuijourd'liui  tout 
puissanls  parmi  nous;  ■  ipie  le  géncnil  Caxiiigiiac  n'esl 
qu'un  jésuite  déguise,  M,  Aruiand  Marrast  un  autre  jésuite, 
qui ,  au  .\ali(i)i<d  .  délèndait  siuunoisement  les  intérêts  de 
.  rh\pocnte  société  de  .Icsus.  « 

Toute  la  brochure  de  .\L  Alexis  Dumesnil  est  pleine  de 
CCS  vérités,  entrenièlees  d'injures  contre  vous,  contre  luni, 
coiilre  liiiil  le  iiimide    l'ruphete  de  sinistre  augure,  il  va 


même  jusqu'à  nous  annoncer  le  retour  prochain  de  la  Ter- 
reur, d'une  Terreur  plus  terrible  encore  que  celle  qu'ont 
vue  nos  pères,  et  Ion  sera  forcé  d'aller  à  confesse  ,  el  de 
lire  toutes  les  brochures  vieilles  et  nouvelles  de  M.  Alexis 
Dumesnil.  Seigneur!  Seigneur  mon  Dieu!  détournez-nous 
ce  calice. 

Je  préférerais  encore,  s'il  fallait  choisir,  relire  une  bro- 
chure rouge  intitulée  pompeusement  :  Lamartine  devantie 
tribunal  du  peuple,  par  un  républicain  de  la  veille. 

Cette  bniehure  n'est  pas  seulement  une  apologie  ;  c'est  un 
liosanna.  un  cantique,  un  nouveau  Cantique  des  Cantiques. 
ou  notre  républicain  de  la  veille  répand  à  profusion  les 
allégoriis  et  les  métaphores  orientales.  L'œil  de  l'aigle,  les 
rugissements  du  lion,  les  roucoulements  du  pigeon,  le  flux 
et  le  reflux,  les  valléps  el  les  montagnes,  les  poissons  et  les 
reptiles,  toute  l'histoire  naturelleenfin  figure  dans  ces  pages 
dithyrambiques,  et  aussi  pleines  d'images  un  peu  usées  que 
vides  de  raison  el  de  sens  commun.  Heureusement  M.  de 
Lamartine  n'avait  pas  besoin  qu'on  le  défendît  d'office;  il  a 
trouvé  dans  son  talent,  dans  son  âme.  et,  ce  qui  vaut 
mieux  encore,  dans  la  vérité ,  un  avocat  qui  vient  de  gagner 
sa  cause,  ou  qui  du  moins  a  fait  admettre  en  sa  faveur  bien 
des  circonstances  atténuantes.  Sa  Lettre  aux  dix  départe- 
ments restera  comme  le  monumel  d'un  beau  talent  et  d'un 
beau  caractère.  Ce  n'est  point  à  dire  que  M.  de  Lamartine 
n'ait  pas  commis  de  fautes,  el  même  de  graves  parfois;  mais 
ces  fautes,  il  ne  les  a  commises  que  parce  que  son  esprit  a 
été  la  dupe  des  plus  nobles  instincts  de  son  cœur.  Combien 
d'hommes  d'étal  pourraient  invoquer  de  pareilles  excuses? 

Du  dithyrambe  du  républicain  de  la  veille,  puisque  veille 
il  y  a,  passons,  je  vous  prie,  au  traité  d'un  nomme  prati- 
que, VEgalité,  par  M.  Victor  Uesal.  avocat  et  cultivateur 
à  Epinal,  (Junique  avocat.  M,  llesal  n'est  pas  cependant  un 
decesciilli\,ilenrs  inpartibus,  qui  n'ont  étudié  l'agriculture 
que  dans  les  manuels  Iloret  et  les  pots  à  fleurs  de  leurs  ter- 
rasses. M.  Resal  a  des  terres  et  les  cultive  :  il  vit  au  milieu 
des  paysans  ;  il  sait  leurs  mœurs,  leurs  habitudes  et  les  be- 
soins de  nos  campagnes.  On  lira  avec  fruit .  je  n'en  doute 
pas,  les  exeelleiits  eonseils  économiques  qu'il  nous  donne 
pour  le  siiiili-ement  de  la  classe  pauvre  ,  et  particulière- 
ment les  luiiyiLs  qu  il  indique  pour  rendre  à  l'agriculture  ce 
surcroit  de  population  industrielle  qui  ne  sérail  pas  moins 
utile  aux  campagnes  qu'il  est  funeste  au  repos  el  à  la  pros- 
périté des  villes. 

C'est  avec  le  même  bon  sens,  la  même  sagesse  pratique  que 
M  Amédée  Hennequin  vient  d'examiner  une  question  non 
moins  importante  :  le  piacement  des  oufriVr*.  Dans  ces  trente 
dernières  années,  ce  placement,  comme  on  sait,  était  de- 
venu la  matière  d'un  négoce  pour  de  petits  agents  d'affaires, 
souvent  improbes,  toujours  cupides,  et  qui  ne  voyaient  dans 
les  ouvriers  qu'une  genl  laillable  el  corvéable  à  merci.  Le 
gouvernement  provisoire  s'est  empressé  d'instituer,  en  fa- 
veur des  ouvriers  de  tout  état,  des  bureaux  de  placement 
gratuits,  et  fonctionnant  sous  la  surveillance  de  la  police, 
Mais  cette  mesure  partielle  eslfort  insuffisante. On  n'ignore 
pas,  en  effet,  que  souvent  les  ouvriers  surabondent  sur  un 
[loinl  du  territoire,  tandis  qu'ailleurs  les  bras  manquent  ; 
de  sorte  que  les  uns  chôment  pendant  que  les  autres  i-cgor- 
gent.  H  importe  donc  d'établir  dans  chaque  ville  des  bu- 
reaux de  placement  et  de  renseignement,  qui,  correspondant 
tous  les  uns  a\ee  les.iutres,  indiqueraient  ainsi,  à  tout  in- 
stant donné,  les  he-mn- de  I  haque  place  industrielle.  On  a 
déjà  fait  plusieuis  lenliiines.  plusieurs  essais  de  ce  genre, 
mais  qui  n'ont  éié  ni  assez  complets  ni  assez  suivis  pour  pro- 
duire tous  les  bons  résultats  qu'on  pouvait  en  attendre.  Le 
premier,  Tnrgot,  tomme  ledit  M.  Amédée  Hennequin,  avait 
reconiiii  ([ue  les  administrateurs  d'un  grand  État ,  si  cnli- 
chés  qn  ils  bissent  de  la  superstition  du  laissez-faire  ,  ne 
piHu  aient  se  passer  de  connaître  le  nombre  et  la  profession 
des  ouvriers.  Ainsi  dans  le  préambule  du  premier  édil  de 
1776 ,  on  lit  ces  lignes  remarquables  :  ■  En  assurant  au 
commerce  et  à  l'industrie  l'entière  liberté  et  la  pleine  con- 
currence dont  ilsdoivent  jouir,  nous  [irendrons  les  mesures 
que  lii  emisi  lA.itinn  de  l'ordre  public  exige  pour  que  ceux 
qui  pi,iiii|iieiil  les  ilitl'erents  négoces,  ariset  métiers,  soient 
connus  cl  cuuslilucs  en  même  temps  sous  la  protection  et 
la  discipline  de  la  police.  » 

Vn  registre  s'ouvrit  donc  à  cet  effet,  cl  l'on  eut  bientôt 
toutes  les  b.ises  d'une  slalislique  industrielle.  Un  membre 
de  r,\s-eiiililee  emisiiiuante  .  Malouel ,  dans  la  séance  du 
:i  iioùi  \',S'.t  |.i"|Hi>,i  lie  développer  ces  germes  précieux,  et 
d'élablu  p.ii  tmitc  l.i  fiance  un  vaste  système  d'information 
el  de  repiirtilion  des  travailleurs.  Mais  dans  son  horreur 
piiiir  linil  ce  qui,  de  prèsou  de  loin,  louchait  à  la  rcglemen- 
tiitionile  lindustrie.  l'Assemblée  rejeta  le  projet  de  Malouel. 
Quelques  années  après,  quand  la  loi  du  iî  germinal  an  XI 
eut  décrété  que  tout  ouvrier  serait  porteur  d'un  livret,  rien 
n'était  plus  facile,  avec  les  livrets  d'un  colé  et  les  patentes 
de  l'autre,  que  de  connaître  exactement  le  nombre  et  la  ré- 
partition des  commerçants,  des  chefs  d'alelers  el  des  ou- 
vriers. Par  malheur,  on  ne  donna  pas  suite  à  celle  idée. 
Seulement  quelques  bureaux  de  placement  pour  tous  les 
corps  de  travailleurs  furent  placés  alors  à  Paris  .  mais  ils 
passèrent  bientôt  des  mains  des  agents  de  l'Etal  aux  mains 
do  ces  spéculateurs  à  qui  la  révolution  do  février  n'a  pu  les 
arracli  r  complclemcnl. 

Opendanl,  dans  une  grande  ville,  à  Strasbourg,  l'admi- 
nistialioii  niiiiliciiiale  a,  depuis  quarante  ans,  oi^nisc 
des  bureaux  de  placement .  non  moins  utiles  aux  mattres 
cpiaiix  ouvriers  M.  Amédée  Hennequin.  dans  une  analyse 
claire  cl  précise,  nous  dévi'loppe  l'oi^anisjilion  de  ces  bu- 
reaux, les  perl'eetiiiiineinents  dont  ils  ont  élé  l'objet,  les 
garanties  d'ordre  cl  de  seeiuitc  qu'ils  pré.sonlenl.  Cette bro- 
cliiire  de  .M.  ,\nieilee  llcnnccpiin  merile  donc  d'être  re- 
niarqiice.  tant  peur  les  reiiseigiienienls  qu'elle  renferme  que 
pour  lii  manière  dont  l'iiutciir  les  cxpos-v  En  ouliT,  les  ré- 
flexions qu'il  \  a  eiitivniolccs  partent  d'un  bon  esprit,  ilun 
esprit  qui  recliciche  le  vrai  sans  préoccupation  svslémati- 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


55 


que  ,  et  qui  tient  coniplo  de  tous  les  résultats  de  l'expé- 
rience. 

Quant  aux  Républicains  modèles  de  M.  Fédix,  c'est  un 
bon  petit  livre,  illustré  d'images  jaunes,  et  très  capable  d'in- 
struire ceux  qui  voudront  bien  l'acheter.  Qui  sait  même  si, 
en  lisant  les  beaux  traits  de  la  vie  de  Régulus,  d'Aristide  et 
de  Washington,  etc.,  ils  ne  deviendront  pas,  eux  aussi,  les 
modèles  des  républicains  futurs?  M.  Fédix,  le  nouveau  Plu- 
larquedeces  nouvelles  vies  d'hommes  illustres,  n'a  pas  du 
reste  de  prétentions  littéraires,  et  il  a  bien  raison.  À  quoi 
lui  serviraient-elles? 

QuantàM.  Bonnal,  c'est  une  autre  afl'aire  Avez-vouslu  la 
force  et  Vidée  ?  Si  vous  ne  l'avez  point  lue,  ce  que  je  vous 
souhaite ,  vous  pouvez  vous  dispenser  de  la  lire,  car  ce  n'est 
guère  qu'une  centième  édition  des  premiers-Paris  de  la 
Presse,  depuis  le  24  juin.  La  Force,  c'est  le  général  Cavai- 
gnac  ;  YIdée.  c'est  M. Emile  de  Girardin,  cela  va  s'en  dire? 
Maintenant  placez  sous  le  premier  chef  toutes  sortes  d'im- 
précations, de  malétlictions  et  de  jubilations;  placez  sous 
le  second  tout  autant  de  félicitations  et  de  points  d'admi- 
ration qu'en  peuvent  exiger,  dans  un  récit  candide,  toutes 
les  vertus  théologales  et  cardinales  de  M.  de  Girardin,  et  ses 
grandes  idées ,  et  ses  petites  idées .  ses  idées  de  premier- 
Paris,  et  ses  idées  d' entre-filet,  et  vous  aurez  ainsi,  à  deux 
ou  trois  alinéa  près,  la  brochure  de  M.  Bonnal. 

Au  surplus,  lisez  dans  la  Presse  la  profession  de  foi  du 
citoyen  AlexandreWeill.  C'est  encore  du  Bonnal,  du  Bonnal 
germanisé  par  le  génie  et  le  savoir  de  M  Weill ,  cet  écrivain 
franco-germain,  qui  entend  l'allemand  comme  un  Français, 
et  qui  écrit  le  français  comme  un  Allemand.  M.  Weill  est, 
du  reste  ,  très  amusant  dans  sa  profession  de  foi,  dont  on 
nous  permettra  de  parler  même  après  les  élections  ;  carc'est 
un  document  historique  et  littéraire  plutôt  qu'une  lettre 
de  circonstance.  Entre  autres  phrases  mémorables,  on  y 
lit  celle-ci:  «  Comme  prêtre  sacré  de  la  vérité,  je  dois  vous 
dire...  »  Quoi  !  il.  Weill,  un  prêtre  sacré  de  la  vérité.^  et 
moi,  quibonnementavaiscru  jusqu'ici  que  M  Weill  n'avait 
été  que  le  grand-prèlre  des  lorettes .  dont  il  racontait  lon- 
guement, dans  le  Corsaire,  les  dits,  les  faits  et  les  gestes. 
Il  est  vrai  que  ces  dames  empruntent  souvent  le  mytholo- 
gique costume  de  la  Vérité ,  et  c'est  lii  sans  doute  ce  qui  a 
fait  croire  à  cet  heureux  petit  fripon  de  M.  Weill  qu'en  ser- 
\ant  les  unes,  il  s'était  dévoué  au  service  de  l'autre,  erreur 
d'une  âme  candide  et  dont  la  bonhomie  nous  désarme  I 
Aleï.4ndrf,  Dufa'i 


Capitale  (ville). 

Conséquence  et  agent  de  la  centralisation  ,  la  capitale 
d'un  empire  est  d'autant  plus  florissante,  que  l'unité  admi- 
nistrative et  politique  est  mieux  constituée.  Une  capitale 
joue  réellement  alors  le  rôle  de  la  tête,  par  rapport  à  des 
membres,  qui  sont  les  diverses  portions  du  territoire.  Ils 
répartissent  des  forces  à  ce  chef  dont  ils  reçoivent  l'impul- 
sion et  le  mouvement. 

D'ordinaire,  le  caractère,  le  génie,  les  habitudes  d'une 
nation  se  dépeignent  dans  la  physionomie  de  sa  capitale. 
Sanctuaire  d'un  empire  tout  spirituel ,  Rome  est  artiste  et 
religieuse  ;  Madrid ,  monacale  naguère  et  sans  industrie 
comme  l'Espagne,  est  sans  physionomie,  maintenant  que  la 
Péninsule  llotte  indécise  à  la  merci  des  essais  de  constitu- 
tion. L'Allemagne  est  sans  unité;  les  sciences,  les  arts  sont 
concentrés  vers  le  Nord  ;  le  peuple  de  l'empire  est  encore 
exclu  de  l'initiative  politique  :  Vienne  n'est  qu'une  ville  de 
divertissements. 

Foyerd'une  administration  militaire  puissante,  Berlin  est 
une  ville  essentiellement  politique.  Au  milieu  de  la  Belgique 
industrielle  et  quasi-française,  Bruxelles  poursuit  l'imitation 
des  allures  parisiennes  ;  c'est  Paris  en  miniature.  Par  des 
raisons  différentes ,  mais  sous  le  bénéfice  de  corrélations 
analogues,  Amsterdam  est  un  comptoir,  Munich  un  atelier 
de  peinture  et  d'archéologie,  Saint-Pétersbourg  un  grand 
palais  peuplé  de  courtisans.  Les  pays  qui  n'ont  pas  de  ca- 
ractère propre  ni  d'action  politique,  prétendent  en  vain 
animer  des  capitales;  Carlsruhe  n'est  que  la  statue  d'une 
\ille,  et  le  véritable  chef-lieu  du  grand-duché,  Bade,  est 
une  hôtellerie. 

Antique  et  vaste  cité  d'un  peuple  livré  à  l'industrie, 
d'un  peuple  qui  règne  sur  les  mers  et  doit  le  sceptre  est  un 
caducée,  Londres  est  une  immense  usine  devant  laquelle  un 
commerce  cosmopolite  amarre  incessamment  ses  navires. 
liien  ne  retrace  limage  de  la  guerre  dans  Londres ,  type 
achevé  d'une  capitale  industrielle.  La  politique  y  campe  une 
fo,s  l'an,  mais  n'y  réside  pas. 

Paris  est  la  ville  qui  réalise  le  plus  complètement  l'idée 
iiuel'on  conçoit  d'une  capitale,  parce  que  la  France  est  le 
pays  où  la  centralisation  a  reçu  sa  plus  entière  application. 
Chef-lieu  d'un  pays  essentiellement  guerrier,  Paris  a  un 
aspect  très  militaire;  c'est  la  plus  grande  place  forte  du 
continent. 

Le  principal  élément  de  la  fortune  publique  en  France  , 
c'est  I  exploitation  du  sol  Un  peuple  agriculteur  attache  un 
grand  prix  à  la  propriété  et  ne  s  éloigne  guère  de  1  objet  de 
ses  plus  chers  intérêts:  le  Français  est  peu  voyageur,  peu 
vagabond  de  sa  nature  ;  le  Parisien  est  casanier,  il  échange 
volontiers  son  capital  contre  des  immeubles  qu'il  adminis- 
tre lui-même;  aussi  la  propriété,  objet  d  un  mouvement  con- 
sidérable à  Paris,  y  est-elle  la  base  du  crédit  public.  Paris 
règle  le  taux  de  la  propriété  pour  toute  la  France. 

De  ce  fait  l'on  déduit  sur-le-champ  cette  conséquence  : 
Paris  ne  peut ,  sans  danger  pour  le  pays,  devenir  une  capi- 
tale industrielle.  Nous  développerons  cette  proposition  plus 
loin. 

Enfin,  symbole  animé  d'un  Etat  où  les  arts,  les  sciences, 
les  professions  libérales  de  tout  genre  sont  en  honneur, 
d'un  Etat  livré  aux  raffinements  du  goût,  aux  délicatesses 


de  la  civilisation,  Paris  est  le  centre  unique  du  mouvement 
intellectuel  ;  il  règne  par  la  pensée  comme  par  les  lois  ,  il 
est  l'arbitre  du  goiït,  le  loyer  des  lumières,  l'œil  qui  voit  et 
qui  juge,  le  cerveau  qui  conçoit,  l'oreille  où  tout  arrive,  la 
bouche  qui  fait  retentir  toutes  les  idées  nouvelles  :  il  est  bien 
réellement  la  léte  de  la  société  française. 

Une  centralisation  si  merveilleuse  a  pour  écueil  et  pour 
agent  de  destruction  son  excès  même  ;  elle  conduit  a  la  con- 
centration qui  absorbe,  isole  et  ne  rend  plus  rien,  bien 
(lu'elle  reçoive  toujours. 

La  centralisation  est  pour  un  pays  un  trésor  ouvert;  la 
concentration  est  un  gouffre. 

Les  gouvernements  de  l'ancien  régime  o.it  eu  de  bien 
bonne  heure  le  sentiment  des  périls  auxquels  risque  d'être 
en  butte  un  pouvoir  centralisé  dans  une  grande  capitale. 
C'est  sous  l'impression  de  la  révolte  des  Maillotins,  de  la 
tyrannie  populaire  exercée  sur  le  dauphin,  lils  du  roi  Jean, 
ainsi  que  de  la  longue  anarchie  fomentée  dans  Paris  par 
les  querelles  des  Bourguignons  et  des  Armagnacs,  désordres 
qui  finirent  par  livrer  aux  Anglais  les  clefs  du  royaume, 
c'est,  édifié  par  ces  souvenirs,  que  Louis  XI  évita  d'asseoir 
le  siège  de  l'autorité  e\écutive  à  Paris.  Il  se  plaignait  formel- 
lemenl  des  accroissemen  ts  excessifs  de  cette  cité,  assez  forte 
pour  balancer  la  prépondérance  royale,  et  il  se  retranchait 
aux  rives  de  la  Loire. 

t'ette  ligne  de  conduite  fut  imitée  par  les  Valois,  jusqu'au 
règne  de  Henri  IV,  qui,  contraint  de  s'appuyer  sur  l'élément 
populaire  et  d'opposer  l'unité  à  la  fédération  aristocratique 
de  la  noblesse  provinciale,  symbolisée  par  le  protestantisme, 
résida  au  Louvre  et  donna  à  Paris  une  suprême  importance. 
Il  y  fut  néanmoins  immolé  par  un  fanatisme  intolérant  et 
aveugle,  qui  sacrifia  en  sa  personne  l'adversaire  politique 
le  plus  efficace  du  calvinisme. 

Richelieu  continua  l'œuvre  de  ce  grand  homme  et  ci- 
menta l'unité  française  en  opposant  Paris  à  l'influence  féo- 
dale de  la  noblesse.  Mais,  des  qu'il  eut  les  yeux  ferniés,  les 
partis  comprimés  se  relevèrent  à  la  faveur  fluiie  iniiinrilé. 
source  de  division  et  de  faiblesse;  ils  exiihiiu-riMil  l.i  bour- 
geoisie parisienne,  ils  organisèrent  la  Fronde,  et  la  ruyauté, 
livrée  à  la  merci  de  l'insurrection,  en  subit  les  outrages,  les 
menaces  et  la  violence. 

Ces  leçons  du  jeune  âge  ne  furent  point  perdues  pour 
Louis  XIV;  elles  eurent  pour  résultat  la  création  de  Ver- 
sailles. Plus  d'un  siècle  après,  quand  Paris,  devenu  l'arse- 
nal des  idées  d'émancipation,  eut  mis  la  royauté  en  échec, 
il  ne  put  l'abattre  qu  à  la  condition  de  s'en  emparer  et  de 
l'emprisonner  dans  son  enceinte.  Les  journées  d'octobre 
décidèrent  du  sort  de  la  monarchie. 

.4  dater  de  cette  époque  commence  la  concentration  po- 
lilique  exercée  par  la  capitale,  qui,  non  contente  de  gou- 
verner, a  prétendu  régner  sans  contre-poids  sur  la  France, 
où  elle  tend  à  se  constituer  en  royauté  absolue  au  milieu 
de  la  république. 

Entraîné  par  les  séductions  déclamatoires  d'une  superbe 
périojle,  M.  de  Cormenin.  chantant  les  louanges  de  Paris 
dans  une  énumération  plantureuse  et  sonore,  s'écriait  sous 
le  dernier  règne  :  «  Paris  écrase  de  son  souffle  tout  ce  qui 
lui  résiste,  il  fait  et  défait  les  rois;  il  commence  les  révolu- 
tions et  il  les  finit...  » 

Ces  observations  sont  d'une  incontestable  justesse  ;  seu- 
lement il  est  fâcheux  que  Paris  fasse  des  rois  pour  les  dé- 
faire, et  qu'ayant  défait  ceux  qu'il  avait  eu  la  fantaisie  de 
faire,  il  puisse  à  son  gré  en  refaire  de  nouveaux.  «  11  com- 
mence les  révolutions  et  il  les  finit,  •>  ajoute  M.  de  Corme- 
nin :  la  première  partie  de  la  proposition  n'est  que  trop 
vraie  ;  quant  à  la  seconde 

Paris  a  commencé  une  révolution  il  y  a  soixante  arts 
bientôt,  et  depuis  lors,  loin  de  la  finir,  il  en  entretient  les 
germes,  il  en  réchauft'e  les  éléments,  il  en  prolonge  la  péri- 
pétie, il  en  suspend  les  conséquences  en  faisant  des  rois  , 
puis  il  les  exagère  en  abattant  ces  monarchies  il  bail  :  sa 
mobilité  impérieuse,  passionnée,  le  rend  peu  propre  à  com- 
biner ledénoilnientdu  drame  des  révolutions. 

Investi  de  cette  initiative  souveniiiic,  isolé  de  l'opinion 
française,  Paris  deviendra  semblahlr  ;i  un  (Irspote  fantas- 
que. Ne  l'avons-nous  pas  vu  iniiiiiilci  ms  laxnns  et  faire 
justice  de  tous  ses  flatteurs? Louis  XVI,  la  Montagne  répu- 
blicaine. Napoléon,  Louis-Philippe  furent  les  idoles  et  les 
victimes  de  ce  Paris  qui  les  fit  et  les  défit  de  sa  seule  auto- 
rité, mais  qui  semble,  moins  que  jamais,  disposé  à  en  finir 
avec  les  révolutions. 

L'autocratie  de  Paris,  c'est  le  ri^ime  permanent  de  l'é- 
meute. 

De  même  qu'une  capitale  reproduit  le  caractère,  la  phy- 
sionomie d'un  État,  de  même  elle  doit  en  représenter  les 
opinions  et  les  mœurs.  Nos  opinions  ne  sont  point  portées 
au  changement  perpétuel,  aux  bouleversements  sansfin  ;  nos 
mœurs  guidées  par  nos  véritables  intérêts  nous  rendent  peu 
favorables  au  développement  démesuré  de  l'industrialisme. 
L'abus  des  exploitations  industrielles  ruine  la  France  au 
profit  de  Paris  où  il  entasse  une  population  nécessiteuse  et 
remuante.  Chez  nous  le  gouvernement  ne  saurait  devenir  un 
contre-maître,  et  la  capitale  delà  France,  qui  n'est  pas  un 
pavs  de  [irotestants  ni  de  banquiers,  ne  peut  être  assimilée 
à  line  ville  anglaise,  sans  être  mise  en  dissidence  avec  l'es- 
prit national. 

Napoléon  comprenait  fort  bien  ces  vérités  lorsqu'il  s'atta- 
chait il  éloigner  de  sa  capitale  les  grandes  exploitations 
iii;iiiiiriH  hiiHii'.s,  multipliées  par  le  dernier  gouvernement 
(|iii  ,1  |iir|i:iir  ,.i  cliute  ct  rcudu  la  France  ingouvernable. 

Il, III,  lin  rniiiire  aussi  intimement  centralisé,  et  où  l'in- 
dustnuliMiii^  Il  est  qu'une  tendance  passagère  et  factice,  un 
gouvernement  réglé  pour  et  par  une  coalition  d'ouvriers  est 
un  non-sens  et  une  absurdité. 

La  prolongation  de  cette  situation  anormale  séparerait  les 
intérêts  de  Paris  de  ceux  des  provinces,  engendrerait  le  fé- 
déralisme et  aboutirait  à  poser  l'att'reux  dilemme  de  la  ruine 
de  Paris  ou  de  la  perte  de  l'Etat 


Il  s'agit  de  sauver  l'un  et  l'autre;  car  la  force  et  le  salut 
de  la  France  sont  liés  il  la  centralisation;  la  séparation  de 
la  tête  d'avec  le  tronc  ferait  périr  le  corps  et  la  tête.  Ces 
idées  sont  évidentes  jusqu'à  la  naïveté. 

Paris ,  tel  que  la  dernière  monarchie  l'a  organisé  dan? 
un  but  égoïste  et  maladroit ,  avec  ses  besoins  de  luxe,  sa 
prépondérance  commerciale  et  ses  industries  d'apparat  . 
Paris  devenu  atelier  et  bazar  de  frivolités  coûteuses.  Paris 
est  tombé  dans  la  condition  des  capitales  essenliellemen; 
monarchiques.  L'émigration  de  la  cour  ,  sous  l'ancien  ré- 
gime, l'avait  livré  auxinstinctsde  l'indépendance  et  du  li- 
béralisme. L'empire  et  la  royauté  de  juillet  ont  soumis  se.s 
besoins  ;i  la  monarchie,  sans  agir  sur  ses  opinions,  et  le 
pouvoir  s'est  efforce  d'accroître  cette  discordance. 

Il  ne  faut  pas  s'y  méprendre  :  la  République  tuera  le  Pa- 
ris de  la  monarchie.  Blessé  par  elle,  et  mortellement,  ce 
ténia  du  luxe  secoue,  désespéré,  ses  tronçons  endoloris:  il 
le  faut  tirer  hors  de  l'organe  qu'il  déchire  ;  il  faut  rendre  a 
l'équilibre  de  la  santé  la  capitale  de  la  France. 

Régulateur  d'un  empire  qui  prospère  à  l'abri  des  loi.- 
par  l'unité,  par  l'agriculture,  par  le  commerce,  par  l'indus- 
trie du  sol,  par  le  sentiment  de  la  propriété,  par  les  scien- 
ces, par  les  beaux-arts  et  les  travaux  intellectuels;  d'un 
État  qui  tire  sa  puissance  de  la  force  de  ses  armes  et  du 
respect  des  droits  de  tous,  Paris  est  une  ville  intelligente, 
militaire,  artiste.  Résidence  du  gouvernement,  elle  doit  de- 
venir le  séjour  de  la  paix  :  symbole  de  la  France,  foyer  de 
la  civilisation,  elle  doit  être  ce  qu'était  Rome  avant  le  tem|)s 
où  les  Césars  l'ont  perdue.  Recevoir  le  tribut  et  réaliser 
l'entrepôt  de  toutes  les  industries  nationales,  éclairer  de  ses 
lumières  et  vivifier  par  ses  idées  toutes  les  portions  du  ter- 
ritoire, telle  est  sa  mission  providentielle. 

La  tache  du  gouvernement  ou  même  des  gouvernement» 
qu'il  plaira  désormais  il  Paris  d'établir,  doit  donc  consister 
à  désindusirialiser  fans .  incapable  de  nourrir  a  la  fois  la 
consommation  et  la  production.  Sa  destinée  jusque-là  esl 
de  briser  tous  les  jiouvoirs  qu  il  aura  élevés. 

Que  cette  ville  magnifique  cesse  d'être  le  foyer  des  bar- 
bares de  la  civilisation,  qui  la  menacent  incessamment  du 
destin  que  les  barbares  du  dehors  ont  jadis  fait  peser  sur 
Rome. 

Si  l'argent  et  l'industrie  continuent  à  régner  à  Paris,  Pa- 
ris restera  tumultueux,  affamé,  et ,  comme  il  l'a  déjà  fait 
deux  fois,  il  rappellera  à  son  aide  l'or  des  monarchies  et  le 
luxe  des  cours:  las  enfin  de  contracter  des  baux  à  courte 
échéance  ,  il  croira  peut-être  les  garantir  en  invoquant  la 
perpétuité  d'un  principe. 

Nous  ne  saurions  le  redire  assez,  il  n'est  pas  l'heure  do 
d'guiser  les  vérités  les  plus  solennelles  :  —  Si,  consolidanl 
l'élément  des  factions  parisiennes .  la  République  éternise 
les  tempêtes,  la  légitimité  dynastique  sera  un  port. 

Fr.*scis  Weï. 


Service  des  Posleas  sur  les  Cheiuiiis  de  fer. 


URE.VUX    AMBULANTS. 


Les  tureauœ  de  poste  ambulants  sont  une  des  inventions 
les  plus  utiles  du  dix-neuvième  siècle.  Etablis  d'abord  en  An- 
gleterre et  en  Belgique,  ils  ont  été  importés  en  France  avec 
les  chemins  de  fer  dont  ils  étaient  une  conséquence  natu- 
relle. Mais  nous  les  avons  singulièrement  perfectionnés.  En 
général  ils  ne  sont  pas  aussi  connus  qu'ils  méritent  de 
l'être.  Les  faire  voir,  en  décrire  les  diverses  opérations,  en 
montrer  les  avantages,  tel  est  le  but  de  cet  article. 

Ce  service  a  pour  résultat  de  rendre  la  distribution  de.- 
lettres  plus  facile,  plus  prompte,  plus  sûre.  En  effet  il  se 
fait  pendant  le  trajet  des  dépêches  que  transportent  les 
chemins  de  fer,  et  n'employant  qu'un  nombre  beaucoup 
plus  restreint  d'agents  éprou% es,  il  diminue  considérable- 
ment les  chances  de  soustraction.  Enfin  comme  il  utilise 
tout  le  temps  du  parcours  au  profit  des  travaux  de  mani- 
pulation, il  rend  sinon  impossibles,  du  moins  plus  difficiles, 
une  foule  d'erreurs  causées  autrefois  par  un  trop  grand 
encombrement  au  moment  du  départ. 

Mais  nous  voulons  surtout  faire  comprendre  à  nos  abon- 
nés la  disposition  extérieure  et  intérieure  d'un  des  wagons 
spéciaux  affectés  a  ce  service  : 

Dispositions  e.rtérieures  Nous  ne  nous  étendrons  pas 
longuement  sur  cette  description  ;  le  lecteur  a  sous  les  yeux 
notre  dessin  qui  est  d  une  exactitude  pafaite.  11  suffit  de  co- 
lorer ce  dessin .  Le  corps  du  wagon  est  peint  en  laque  brune 
carminée  rehaussée  de  minces  filets  rouges  qui  détachent 
légèrement  les  panneaux  de  la  partie  inférieure.  De  chaque 
côte  ,  dans  la  partie  supérieure,  se  trouvent  deux  fenêtres 
à  jour  que  séparent  de  fausses  fenêtres  pour  la  symétrie 
du  coup  d'œil.  Ces  fausses  fenêtres  sont  encadrées ,  aussi 
bien  que  les  fenêtres  a  jour ,  par  une  étroite  baguette  de 
cuivre  poli  et  brillant  qui  dessine  une  courbe  gracieuse. 
Le  milieu  des  fausses  fenêtres  figure  un  jalousie  baissée. 
Les  ornements  saillants  des  angles  de  la  voiture  sont  en 
fonte  de  fer  d'une  simplicité  sévère  et  d'une  solidité  à  l'é- 
preuve du  temps. 

Comme  notre  dessin  ne  peut  pas  représenter  le  pavillon 
ou  partie  supérieure  du  wagon-poste,  ajoutons  pour  la  com- 
plète intelhgence  de  la  disposition  du  local ,  que  ce  pa- 
villon est  percé  de  cinq  fenêtres  à  l'italienne,  garnies  de 
glaces  dépolies  et  de  stores.  Au  moyen  de  ces  cinq  ouver- 
tures supérieures  et  des  quatre  fenêtres  de  côté,  le  wagon- 
poste  est  parfaitement  aéré  et  reçoit  un  degré  suffisant  de 
lumière  quand  la  disposition  du  service  oblige  à  faire  effec- 
tuer de  jour  tout  ou  partie  des  voyages ,  comme  le  bureau 
ambulant  qui  revient,  par  exemple,  de Boulogne-sur-Mer 
entre  quatre  et  onze  heures  du  matin. 

De  même  que  tout  a  été  prévu  à  l'égard  des  différentes 
heures  auxquelles  le  bureau  ambulant  peut  voyager,  tout  a 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


été  prévu  aussi  a 
l'égard  des  dilîé- 
l'ptites  saisons  de 
l'année.  De  joui 
comme  de  nuit  , 
sous  le  soleil  (  oni- 
nie  sous  la  pluie. 
qu'il  neige,  (|u'M 
gèle,  qu'il  vente  on 
qu'il  tonne,  aucun 
obstacle  ne  doit  ar- 
rêter ni  même  ra- 
lentir sa  course 
impétueuse.  Cette 
course  se  règle  ce- 
pendant suivant 
qu'il  est  néces- 
saire ,  au  moyen 
d'une  cloche  pla- 
cée sur  le  pavillon 
et  que  l'on  met  en 
mouvement  par  un 
ressort  dont  l'ex- 
Iréniité  aboutit 
dans  l'intérieur  du 
bureau.  Cet  inté- 
rieur ,  avons-nous 
dit,  est  aéré  à  vo- 
lonté en  toute  sai- 
son; ajoutonsqu'on 
l'échauffé  égale- 
ment à  volonté 
pendant  la  saison 
rigoureuse.  Un  ca- 
lorifère, en  forme  _ 
de  cloche  ronver- 
M'e  et  qui  peut 
donner  pendant 
huit  heures  une 
forte  chaleur  sans 

que  le  combustible  ail  besoin  d'être  renouvelé,  se  trouve  à 
cet  effet  placé  sous  le  truc  qui  supporte  le  bureu  anibulannt. 
I,a  plupart  des  trucs  affectés  aux  bureaux  ambulants  sont 
montés  sur  six  roues  au  lieu  de  quatre  roues  ,  auxquelles 
sont  bornés  les  trucs  des  wagons  ordinaires.  Nous  avons 
remarqué  (lue  l'emploi  de  six  roues  rend  le  mouvement  de 
va-et-vient,  appelé  lacet,  beaucoup  moins  sensible.  Au 
moyen  de  certaines  précautions  dans  la  disposition  des  res- 
sorts on  est  arrivé  a  ne  plus  éprouver  pendant  la  locomo- 
lion  la  plus  rapide  qu'une  légère  trépidation  presque  insen- 
>\\i\v   Même  dans  les  plus  fortes  secousses  on  peut  écrire  et 


Seivice  (les  postes.  —  Vue  extérieure  du  bureau  ambulant. 


chiffrer  avec  toute  la  promptitude  et  la  fai;ilité  que  récla- 
ment les  besoins  du  service  des  postes.  Nous  avons  eu  sous 
les  yeux  de  cette  écriture  et  de  ces  chiffres  tracés  ainsi  pen- 
dant une  marche  rapide  de  douze  lieues  à  l'heure.  Nous 
avons  voulusavoircomment  les  employéss'y  prenaient  pour 
obtenir  de  tels  résultats;  voici  ce  que  nous  avons  appris  : 
c'est,  de  préférence,  étant  debout  qu'il  faut  écrire  ;  les  cou- 
des pressés  contre  le  corps,  la  main  gauche  tenant  la  plan- 
chette qui  supporte  le  papier  et  sur  laquelle  vient  s'appuyer 
la  main  droite  de  manière  que  le  papier,  les  deux  mains  et 
le  corps  obéissent  ensemble  au  même  mouvement. 


Le  soin  attentif 
qui  a  présidé  aux 
dispositions  exté- 
rieures .  nous  l'al- 
lons  retrouver  et 
a  un  plus  haut  de- 
gré encore  dans 
tout  ce  qui  se  rat- 
tache aux  disposi- 
tions intérieures> 
Rien  qui  n'ait  son 
utilité  ,  son  but 
toujours  tendant  au 
bien  du  service 

La  longueur  to- 
tale du  wagon- 
poste  varie  de  cinq 
mètres  et  demi  à 
sept  mètres  ;  elle 
est  partagée  a  l'in- 
térieur en  deux 
parties  inégales. 
Le  bureau  propre- 
ment dit  occupe 
les  deux  tiei-s;  l'au- 
tre tiers .  consacré 
aussi  au  service  , 
forme  lavant-bu- 
reau. Ces  deux 
parties  peuvent 
être  séparées  par 
une  portière  que 
l'on  abaisse  ou  re- 
lève à  volonté 
Cette  disposition  a 
élc  adoptée ,  afin 
qu'en  hiver,  pen- 
dant rechange  des 
dépêches  aux  sta- 
tions ,  on  puisse  . 
au  moyen  de  la  iiortière  baissée,  conserver  à  la  majeure 
partie  du  bureau  sa  chaleur.  Le  plus  souvent  cette  portière 
demeure  donc  relevée. 

.\  hauteur  d'appui ,  règne  autour  du  bureau  une  suite 
d'armoires  garnies  de  rayons,  de  coffres  et  de  tiroirs.  Le 
dessus  de  ces  armoires  sert  de  tables  de  travail.  .Au-dessus, 
s'élèvent,  dressés  contre  les  parois  du  bureau  .  les  casiers  en 
forme  d'étagères  C'est  dans  ces  casiers  garnis  d'étiquettes . 
portant  le  nom  des  différentes  villes,  que  tous  les  objets  de 
correspendance  viennent  successivement  se  ranger  suivant 
leur  destination.  Dans  les  coffres  et  dans  les  armoires  en 


Service  des  poslo.*.  —  Intérieur  du  liurciu  .inibul.inl. 


L'ILLISTIUTION,  JOURNAL  UMVKRSEL. 


57 


place  les  sacs  en  peau  ,  de  toute  di- 
mension ,  au  moyen  desquels  sont 
expédiées  les  dépèches.  Dans  les  ti- 
roirs sont  les  divers  objets  servant  a 
l'exploitation  du  service  et  au  Iravad 
d'ordre  et  de  comptabilité  ,  tels  que 
écritoires  ,  papiers  imprimés  ,  ca- 
chets, tampons  des  encres  rouge  ou 
noire  à  timbrer,  timbres,  cachets, 
bougies,  serfiettes,  cire  à  cacheter, 
ficelle  de  diverses  grosseur»,  etc.  , 
etc.  Les  registres  ont  des  rayons  a 
part.  Dans  une  armoire  spécialement 
consacrée  à  cet  usage  ,  place  est  ré- 
servée aux  effets  personnels  de  cha- 
cun des  eniployé's.  Deux  autres  ar- 
moires, pratiquées  à  l'extrémité  du 
bureau  opposé  a  l'avant-buroau  , 
sont  destinées  a  contenir  les  pièces 
comptables  qui ,  en  assezgrand  nom- 
bre ,  accompagnent  les  dépêches  que 
reçoivent  chaque  jour  les  bureaux 
ambulants.  Entre  ces  deux  armoires 
est  ménagé  un  espace  libre  ,  au  mi- 
lieu duquel  s'élève  et  vient  s'ouvrir 
le  tuyau  conducteur  du  calorifère. 
Toutes  les  précautions  voulues  par 
la  prudence  ont  été  pri- 
ses :  aucun  accident  n'est  a 
craindre. 

Du  même  côté  que  le 
calorifère ,  mais  au-dessus 
des  casiers ,  et  touchant 
presque  au  plafond  cintré  , 
règne  un  petit  cartouche 
en  bois  sculpté  .  au  milieu 
duquel  est  enchâssé  le  cliro- 
jiomèlre  Comme  nous  l'a- 
vons déjà  dit ,  tout  est  pré- 
vu ;  et  le  chronomètre  joue 
dans  le  service  un  rôle  trop 
essentiel  pourquon  ne  l'ait 
pas  placé  bien  en  évidence. 
C'est  au  moyen  de  cet  in- 
strument que  l'employé  des 
bureaux  ambulants,  sans 
avoir  besoin  de  regarder  au 
dehors ,  connaît  au  juste 
la  distance  qui  le  sépare 
encore  do  la  station  vers 
laquelle  il  s'avance  ,  et  le 
temps  dont  il  peut  disposer. 

Mais  la  nuit  ,  s  écrie  le 
lecteur  impatient  ,  com- 
ment y  voir  assez  bien  ? 
Au  moyen  de  plusieurs  lam- 

fies  Carcel ,  placées  dans 
es  angles  du  bureau  ou 
fixées  solidement  au  pla- 
fond ,  et  qui  sont  disposées 
de  manière  a  projeter,  mal- 
gré les  cahots  .  malgré  la 
rapidité  du  parcours  ,  une 
lumière  suflisante  aussi 
égale  et  aussi  calme  que 
si  le  wagon-poste  restait 
en  place. 

Mais  poursuivons  notre 
description  intérieure. Nous 
avons  dit  qu'un  casier  en 
étagère  garnissait  tout  le 
pourtour  du  bureau.  Nous 
devons  faire  observer  que 
ce  casier  est  interrompu 
devant  les  deux  fenêtres 
latérales  qui  donnent  dans 
l'intérieur  du  bureau  De  chaque  coté 
de  ces  deux  fenêtres  ,  et  à  portée  fa- 
cile de  la  main ,  sont  suspendus  les 
timbres  destinés  a  constater  le  passage 
des  lettres  par  le  bureau  ambulant. 
Devant  l'une  de  ces  fenêtres  se  trouve 
un  cadre  de  bois  solidement  rem- 
bourré et  sur  lequel  on  timbre  les  let- 
tres sans  risque  de  les  endommager. 
Les  boites  contenant  les  encres  à  tim- 
brer rouge  et  noire  sont  en  bronze. 
Les  boîtes  à  ficelle  ,en  forme  d'urnes  . 
sont  en  même  métal.  Tout  est  solide  et 
fait  pour  résister  au  temps  et  aux 
chocs  imprévus.  C'est  pour  ce  motif  que 
les  sièges,  bien  que  commodes,  sont 
massifs  et  un  peu  lourds  ,  excepté  l'un 
d'eux  ,  qui  nous  a  paru  disposé  légère- 
ment et  d'une  forme  curieuse.  Que  l'on 
se  figure  une  selle  montée  sur  un  tré- 
pied et  que  l'on  enfourche  comme  on 
ferait  d'un  cheval ,  de  façon  à  permet- 
tre à  celui  qui  s'en  sert  de  travailler 
presque  debout,  et  cependant  sans  que 
les  jambes  posent  a  terre  ,  par  consé- 
quenten  se  fatiguant  le  moins  possible. 
L'avant- bureau  des  wagons-poste 
affectés  au  service  de  l'intérieur  de  la 
France  ,  n'est  pas  disposé  de  la  mémo 
manière  que  l'avant-bureau  des  wa- 
gons-poste consacrés  au  service  de  la 
corra-ipondance  étrangère.  Pour  le  sei- 


Sac  aux  dépèches.  Collier  pour  la  fernielure  des  sacs 

aux  dépèches. 


PurtL'Ieuille  des  letlres  lecoin- 
mandées  et  chargées. 


Pesa^je  de  la  correspond  uice  an^'la 


-  i^>   i*^-Si  îli  1^   ,  -  '  -- 


Nouvel  omnibus  pour  la  distribution  des  letlres  Jins  1  • 


vice  ordinaire  lavant-bureau  con- 
tient des  armoires  et  des  casiers 
comme  ceux  que  nous  avons  déjà 
décrits.  Pour  le  service  de  l'étran- 
ger, la  disposition  doilêtre  différente. 
Ùnelongue  table ,  sans  casiers ,  règne 
dans  la  largeur  de  lavant-bureau. 
Cette  table  est  garnie  de  balances,  et 
de  poids  de  différents  types ,  qui  ser- 
vent à  faire  la  pesée  de  la  correspon- 
dance venant  des  pays  étrangers. 
Cette  correspondance  se  reçoit  en 
bloc  au  poids  ,  à  raison  de  tant  les  30 
grammes,  .^près  avoir  pesé  les  pa- 
quets entiers,  on  reprend,  l'uneaprès 
l'autre  ,  chaque  lettre  pour  la  sou- 
mettre à  la  taxe  et  on  vérifie  le 
poids  en  détail  sur  les  balances  du 
plus  petit  modèle.  Ces  balances  sont 
d'une  justessi!  si  parfaite  que  la  tré- 
pidation de  la  marche  n'empêche 
aucunement  de  s'en  servir  avec  pré- 
cision. 

Les  portes  du  bureau  ambulant  se 
ferment  à  clef  et  au  pêne.  Pendant 
la  marche  on  ne  ferme  pas  à  clef  ; 
mais,  dans  la  crainte  que  le  simple 
pêne  ne  sorte  de  la  gâche 
par  l'effet  de  quelques  ca- 
hots, et  pour  prévenir  tout 
accident  ,  on  a  pris  une 
double  précaution  :  on  a 
ajusté  à  l'intérieur  un  dou- 
ble verrou  et  une  barre  de 
sûreté  en  fer  forgé.  L'é- 
change des  dépêches  aux 
stations  intermédiaires  .so 
fait  souvent  sans  que  les 
convois  s'arrêtent  complè- 
tement; dans  ce  cas,  la 
barre  de  sûreté  sert  de 
point  d'appui  au  garçon  rie 
bureau  qui ,  de  l'inlérieur. 
donne  et  reçoit  ainsi  les 
sacs  les  plus  lourds  sans 
danger  d'être  entraîné  par 
son  fardeau. 

Maintenant  que  nous 
connaissons  l'intérieur  du 
bureau  ambulant  et  la  plu- 
part des  objets  servant  à 
l'exécution  du  service  ,  et 
le  but  de  ce  service ,  il  nous 
sera  plus  facile  de  com- 
prendre comment  les  em- 
ployés exécutent  les  tra- 
vaux de  manipulation.  Ces 
travauxsontdedeux  sortes; 
la  réception  et  la  réexpé- 
dition des  dépêches ,  tant 
à  l'aller  qu'au  retour.  Les 
correspondances  de  toute 
nature ,  recueillies  en  route 
ouauxpointsdedépart,  ar- 
rivent pêle-mêle  au  bureau 
ambulant  ;  elles  doivent 
en  sortir,  peu  d'instanis 
après  ,  classées  ,  triées  , 
comptées,  réparties  entre 
une  foule  de  bureaux  diffé- 
rents dans  toutes  les  direc- 
tions possibles.  Au  moyen 
de  ce  travail  qui  constilue 
l'excellence  du  service .  des 
lettres  ,  qui  séjournaient 
autrefois  pendant  10,  l'i 
et  20  heures  dans  des  bureaux  de  pas- 
sage situés  il  quelques  lieuesseulement 
des  points  de  destination ,  arrivent 
maintenant  en  15  et  20  minutes  ,  et 
peuvent  être  mises  en  distribution  aus- 
sitôt après  leur  arrivée.  La>vilesse  se 
trouve  ainsi  plusque  centuplée. 

Pour  renfermer  les  dépêches  ,  on 
emploie  des  sacs  en  peau  dont  on  clôt 
l'ouverture  par  un  collier  de  cuivre  , 
sorte  de  cadenas  a  double  plaque ,  dont 
l'une  porte  gravé  le  nom  du  bureau 
ambulant  et  l'autre  le  nom  du  bureau 
de  destination.  Ce  cadenas  s'ouvre  au 
moyen  d'une  clef  ipii  reste  dans  les 
bureaux  de  destination  et  dans  le  bu- 
reau ambnlant.  On  le  ferme  facilement 
par  la  seule  (iression  d'un  ressort  inté- 
rieur. Ndusailonsdonnerledessin  d'un 
sac  ainsi  fermé  et  celui  du  collier  ; 
ajoutons  qu'il  y  a  des  sacs  de  diffé- 
rentes grandeurs  ,  suivant  le  volume 
ou  le  nombre  des  objets  il  expédier. 
Nous  représentons  aussi  un  petit  sac 
d'une  autre  forme  différente  de  celle 
du  premier.  Ce  petit  sac  est  spéciale- 
ment destiné  à  contenir  les  lettres 
chargées,  les  letlres  recommandées  et 
les  objets  précieux  que  l'on  dépose  à 
la  poste  avec  déclaration  estimative  du 
monlant  de  leur  valeur  Ce  petit  sac  . 
une  fois  rempli  ,  est  scellé  à  la  cire  de 


5rS 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL 


1  (Miipreiiile  du  cachet  du  bureau  n.i  bulaiit.  Inutile  d'a- 
iouter  que  ce  sac  spécial,  en  raison  de  son  contenu  ,  est 
Voliicl  de  soins  et  d'attentions  toutes  particulières.  Le  clief 
(lu  bureau  ambulant  en  fait  seul  I  ouverture  et  la  fer- 
meture. 

Dans  le  craml  dessin  destiné  a  donner  une  idée  de  1  e\e- 
nilion  du  'scimic  ,  ii"ii<  ivpiV'-nitons  les  eiii|iloyésau  niii- 
iiient  oii  le-  .li'|„'(lies  KTiK-  ;i  l.i  slalion  laissée  ilernerc 
\ieiinent  d'(Hn-(lr|ioiiilliv,  cl  \rnliées:  on  peut  levoiraux 
(leliris  légers  de  papier  que  l'on  na  pas  encore  eu  le  temps 
il  enlever  ;  ils  préparent  les  dépêches  à  laisser  à  la  station 
MTS  laquelle  on  s'avance  ,  et  qui  est  proche.  C'est  le  nio- 
Mieiitoiile  scrMce  leihinie  la  plus  jurande  activité.  Aussi, 
\iiycz-les  ;  (iimme  rli;iinii  e>l  a  snn  allaire  I  Quelle  promp- 
liliide  !  (pirllc  .iLililc  •  quel  nqiide  coup  d'œil  !  Kt  penser 
iiiie  tout  cel.i  >  ,11 1  uni|ilit  sur  un  plancher  mobile  qui  fuit 
.nn-  une  r.qn.lilr  .!.•  Kl,  12  et  quelquefois  i:i  lieues  a 
I  lieure;c(>l  iiirniilliii\  !..  Voyez:  la  slalion  est  proche, 
on  va  arriver  ;  le  nii>u\ement  riipide  de  la  inarciii^  lend 
dejii  il  se  ralentir,  signe  (pie  \iiiis  poii\e/.  apercevoir  les  si- 
L'iiaux  et  que  vous  allez  eiileiidic  le  Millet  darrét.  Les  ca- 
siers snni  encore  pleins  II  .semble  ipi  on  on  aura  pour  des 
liriiic-i'Hiiciv,  a  tout  disposer  ;  mais,  non,  tout  est  en 
(Mille  IJ  (|ii('l  iirdre  !  Pour  vous  ,  pour  moi ,  ce  serait  une 
iriexlni  aille  conlusion.  Tour  eux  ,  c'est  l'affaire  de  quel- 
i|iies  secondes. 

.\  chaque  station  ,  on  ne  se  borne  pas  ù  remettre  le 
*ac  destiné  pour  la  localité  oii  l'on  sarréte  ;  on  y  remet 
.I1I--1  (I  :iiilii'-  s:ir^  a  ii'c\|ic(lici'  :mi  iihimii  de  courriers 
(1  rliilirjllclicnirlil  >lir  le-  |irlilc~  mIIc-  \  "l.-llirs  ,  OU  même 
a-r/.  cliiiL-iin-  ilr~  stalioiis  Hall-  leur  relniir  surParis  ,  les 
bureaux  ambulants  présentent  un  avantage  de  la  plus  haute 
importance;  on  y  fait,  avant  d'arriver,  le  tri  par  quartier 
lies  lettres  pour  Paris,  Elles  peuvent  être  ainsi  ,  dès  leur 
irrivée,  di,-.hiliii(TS  dans  les  quartiersde  la  ville,  grâce  au 
service  de,-  nniiiilm-  rhibli  par  l'ancienne  administration 
pour  le  ljaii-|."il  r.ipiile  des  facteurs. 


ÛtiKirs  iiiornleB. 

LA    FEMME    MODÈLE. 

lille  ne  descend  jamais  pour  déjeuner  en  pa|)illoteB  ,  elle 
ne  gronde  pas  lorsque  son  mari  lui  amène  un  ami  à  dî- 
ner, même  ••  s'il  n'y  a  rien  il  la  maison  ;  »  elle  ne  s'oppose 
pas  il  ce  que  son  mari  pose  ses  pieds  sur  le  garde-feu  d'acier, 
elle  ne  pousse  pas  des  cris  s'il  oublie  d'essuyer  ses  bottes 
>iir  lepaillas.-on  placé  tout  exprés  il  la  porte  'd'entrée.  Elle 
ne  souscrit  a  aucun  cabinet  de  lecture  ;  et.  quand  elle  lit  un 
Kiiiian,  elle  s'endort  dessus  Elleconrectioiiiii'lcs  pâ:.'- a\ec 
1111  lalent  tout  parliculier,  et  elle  p.. ,-,"!(■  une  cniiiwi-ance 
profonde  des /)«(/(/(»(/«  Elle  ne  p.nlc  [.uiiai-  |niIiIii|iic  ,  ja- 
mais on  ne  1  entend  ni  désirer  d  être  morte  ,  ni  regietler  de 
n  être  pas  un  homme,  ni  fermer  brusquement  les  portes  ou 
seufermer  dans  sa  chambre  à  coucher  sous  le  prétexte 
qu'elle  a  un  mal  de  tète  nerveux.  Elle  ne  pleure  pas  faci- 
lement ,  et  elle  ne  croit  guère  aux  attaques  de  nerfs  Elle 
iiiiisent  il  ce  qu'il  v  ail  un  chien  dans  la  iiiaismi  Elle  va  il 
I  enlise  ,  mais  ce  n'est  pas  pour  se  moipier  îles  coilVures  des 
.iiilr 'S  femmes.  Elle  ne  er.nnl  |.,is  de  descenilre  a  la  cuisine 
puni  chercher  (pielqur  (  Im-c  ,lr  cliaiiil  pour  le  souper  ;  elle 
r.iil  faire  du  feu  dans  sa  eliaiiibie  a  coucher  pendant  les 
1 1 miles  nuits  d'Iiivtr  ;  nul  brin  de  poussière  n'échappe  il  son 
legard  perçant,  maiselle  n'assomme  pas  son  mari  de  plaintes 
eoiitinuclles  au  sujet  de  ses  domestiques ,  et  elle  no  se  rend 
p,i>  malade  ii  mourir  pour  un  laquais  en  liviée  ou  pour  un 
page  en  boutons.  Elle  peut  sortir  ii  pied  et  marcher  sans 
.rvoir  de  petits  souliers  ou  sans  être  suivie  par  un  JEAMES. 
lille  préfère  la  bière  de  table  au  vin ,  et  elle  ne  s'évanouit 
p.i>  a  la  seule  pensée  d'un  grog  ;  en  fait ,  elle  ne  s'évanouit 
l.iiiiais.  Elle  ne  pense  pas  ipul  soit  nécessaire  d'aller  il  la 
lampagnc  pour  la  >,lllle  de  m'S  rlirl-  rni;iliN  l-'lle  Suit  les 
modes  ,  il  est  vrai  .  mn-  ,i  |.ln-iriii-:(hiirc,.lrilislance  ;  elle' 
,1  la  plus  faible  alVn  li.iii  y.  —  AAr  |miii.  I,-- Ihjoux  ,  et  elle 
lialiille  ses  enfants  avec  -r-  \h'iII(-~  mlies  Elle  n'est  ja- 
mais délicate,  et  elle  nui-.' un  il  il  i  iiMiyer  chercher  le  mé- 
decin seulement  parce  ipullr  m'  m  niiiint  abattue.  Une  de 
se,-  amies  achétc-t-elle  un  nouveau  bunnet,  elle  n'en  fait 
pas  la  confidence  ii  son  mari  ,  et  ne  s  écrie  pas  avec  euthoii- 
<i,isme  qu'elle  a  vu  la  veille  dans  la  cité  un  si  joli  caclie- 
iiiiie  ,  s  extasiant  ensuite  sur  la  modicité  du  prix.  Elle  ne 
drcachète  jamais  les  lettres  de  son  mari,  el  elle  conserve 
-.1  robe  de  noce  avec  un  respect  virginal.  Elle  ne  se  trouve 
p.is  a  plaindie  si  elle  reste  a  la  ville  le  jniir  (le<  cdiirses 
d  ,\scot ,  et  elle  ne  se  met  pas  enpéiiiliMiiril:iii-  -mu  ai  i  irir 
-,ilon  ,  si  elle  ne  va  pas  il  la  campagne  Im  qur  1 1  ■.in-mi  r-i 
icrniinée.  Elle  raccommode  ses  bas ,  el  elle  laii  desinnli 
Unes  au  sucre  et  au  vinaigre  qui  no  laissent  rien  il  désirer  ; 
elle  no  refuse  pas  de  sortir  avec  son  mari  ,  parce  qu'elle  n'a 
pas  une  belle  robe  ;  elle  demande  rarement  de  l'argent ,  et 
elle  aimerait  mieux  je  ne  sais  quoi  que  de  gagner  un 
(  enlinie  sur  la  dépense  du  ménage;  elle  s'habille  toujours 
pour  le  dîner  ;  clic  ne  cache'jamais  le  passo-partout  :  elle 
lait  rarement  la  coquette  ,  et  la  tôto  lui  tourne  trop  pour 
qu'elle  puise  valser  môme  avec  un  officier. 

La  femme  modèle  attend  son  époux  jusipi'aux  heures  les 
moins  conjugales  ,  et  pourtant  elle  ne  prend  pas  un  visage 
>ombrc;  elle  iies'éirie  pas  qu'il  la  tue.  S'il  revient  avec  le 
jour  ou  même  avec  le  lait,  elle  seille  le  haut  du  corps  pen- 
ché sur  les  ileniiers  restes  du  l'eu  ;  épi, ml  la  pendule  du 
I  eg.ird  ,  s'al,u  niant  ilu  moindre  bniil  ,  s  él.ini-aiit  a  l,i  fenêtre 
dès  qu'elle  eiilerid  venir  une  Miiliire  ,  liemliiaiileile  l'riiid  et 
engourdie  parle  somiiieil ,  n'a  va  ut  poiii  lui  leriir  compagnie, 
dii'iarit  celle  longue  nml  il',itlehle  ,  que  l,i  M.iirisqui  rlierclie 
,s,i  nniiri  iliire  dans  le  buM'et  ,  iiii  le  grilliui  ipii  erre  auliiur 
"l'elle  dans  la  chambre  ,  et  ne  peiisaiilqu'a  riii(]iiielu(le(pie 
lui  laiisL'son  absence  ,  ipi'ii  la  craiiilequ  il  ne  lui  soit  arrive 


cpiehiue  malheur,  i;ileimc'l'i''l'l"''l"  "     '"■"-  lain.n- 'l'Vanl 

lui;  et  surtout  — eidiilc/lii-iMcn  ,  ni.' r-.l  \irjlcn-ire  ! 

—  elle  ne  lui  l'ait  |.iiii.ii-  de  irpimlir-  |.,r-qii  (.Ile  le  tient 
enfin  sous  le  rideau  nuptial ,  et  qu  elle  sait  qii  il  ne  peut 
plus  lui  échapper  1 

LE    MARI    MUIILLE. 

Il  se  promène  avec  sa  femme  les  jours  de  la  semaine  .  et 
un  magasin  de  lingère  ne  l'épouvante  pas.  Il  a  toujoursde  la 
monnaie  lorsqu'on  lui  en  demande  ,  et  il  n'y  fait  jamais  au- 
cune allusion.  Il  con,-ent  volimliers  il  porter  un  gros  paquet 
de  papier  gris,  ou  un  parapluie  de  coton  .  ou  des  socques,  ou 
même  il  tenir  1  enfant  sur  ses  bras  dans  un  omnibus.  Il 
court  en  avant  pour  frapper  à  la  porte  quand  il  pleut.  Si  la 
voiture  est  pleine  ,  il  monte  ii  coté  du  cocher.  Il  ss  couche 
le  premier  lorsqu'il  fait  froid.  Il  se  levé  au  milieu  (ie  la 
iiiiii  pour  bercer  feulant  ou  aller  voir  qui  sonne.  Il  permet 
a  -a  belle-iiiere  de  loger  chez  lui.  Il  boit  il  sa  santé  el  il 
la  laisse  liliic  de  (lc|ciiiier  dans  sa  chambre.  Il  mange  delà 
viande  iniidc  >.iii-  -e  pl.iiiiiln  nu  suis  conserves,  el  il  ne 

prend  qu  iii iliniir  micici  ,iii\  p,ilé,-  et  aux  puddings. 

.lamais  Ir  h  (miml'i'  ne  lui  m'hiIiIc  I  mp  Inrt  .  la  bière  et  le  thé 
li-up  r,iililc-    Il  mul  .iii\  ,ill;ii|ur-  (le   iici  l's  ,   et  une  larme 

r;ip;ii>c  in>l,iiil,iiiriiHnl     H    iiiel  In ne  I Ile  avec  une 

robe  de  \el"iir-  ,  cl  il  (li>sipe  Imis  le-  iiiiage-a  l'aide  d'une 
excursion  a  Epsuni  ou  d'une  promenade  au  parc  le  diman- 
che. Il  va  régulièrement  ii  l'église  et  il  mène  sa  femme  ii 
l'Opéra  une  fois  par  an.  Il  lui  rembourse  tout  l'argent 
qu'elle  perd  au  jeu  et  il  lui  donne  celui  qu'il  gagne.  Il  ne 
se  met  jamais  en  colère  au  sujet  de  ses  boutons  ,  jamais  il 
n'amène  d'amis  il  souper.  Ses  habits  ne  sentent  jamais  le 
tabac.  Il  respecte  les  rideaux  et  il  ne  fume  jamais  chez  lui. 
Il  découpe,  mais  il  ne  se  réserve  pas  le  meilleur  morceau. 
Il  respecte  la  fiction  de  l'âge  de  sa  femme  ,  el  il  se  brûlerait 
pluliil  les  (Idigls  que  de  toucher  Ic  tisonnier  poli.  Jamais  il 
n'eu  lie  1 1,1  11-  il  1  iiiM  ne  ,  et  il  ne  songerait  pas  plusâ  chasser 

un  diiiiic,-li(|iic  ipi  ,1  ( lander  le  dîner.  Il  n'a  aucun  passe- 

partout  sur  la  cdii-cieiice. 

Le  mari  modèle  permet  il  sa  famille  d'aller  à  la  campa- 
gne une  fuis  cli,ique  année.  Et  pendant  son  absence  il  reste 
il  la  ville  avec  un  couteau  el  une  fourchette,  n'ayant  pour 
tout  siège  (|u'une  chaise  de  toi!e  écrue  ,  couchant  dans  un 
lit  sans  rideaux  et  servi  par  une  femme  de  ménage.  Il  va  a 
la  campagne  le  samedi  et  il  revient  le  lundi ,  portant  le 
linge  propre  et  rapportant  le  linge  sale.  C'est  lui  ipii  règle 
lesnotes  de  la  blanchisseuse.  Il  donne  sans  méliance  tout 
l'argent  ipi'on  lui  demande  pour  le  ménage  el  il  ferme  les 
yeux  sur  les  articles  intitulés  dépenses  diverses.  Il  est  très 
doux  et  très  all'ectueux  ,  il  célèbre  ponctuellement  1  anni- 
versaire de  son  mariage  ;  il  ne  se  plaint  jamais  si  le  diner 
n'est  pas  prêt ,  il  fait  lui-même  le  (lejeiiiier  si  personne 
n'est  descendu;  il  permet  à  sa  feiuuie  de  \,il-rr  et  de  boire 
du  ])orleren  société;  il  fait  loule-  -c-  ((Muuiission?;  solde 
toutes  ses  dépenses,  et  pleure  comme  un  eiifant  ii  sa  mort, 

l'eNFAXI    MODtLli 

C'est  limage  de  son  pore,  à  moins  que  ce  ne  soit  le  por- 
trait vivant  de  sa  mère.  Il  a  le  meilleur  caractère  du  monde, 
ne  crianl  jamais,  si  ce  n'est  au  milieu  de  la  nuit,  et  ne  pleu- 
raiil  ipie  Inr-qii'ou  le  lave.  C'est  étonnant  comme  il  reste 
lr,iiii|iiille  i]iiuii(l  il  prend  sa  nourriture.  Il  comprend  tout, 
et  il  pi  iMi\  e  le  ilésir  qu'il  a  de  s'instruire  en  arrachant  les 
feiiillii-.  lie  liiii-  les  livres (jui  lui  tombent  sous  sa  main,  et 
sai-i-Miiil  lie-  lieux  mains  les  gravures  qu'on  lui  montre.  Il 
n  aj.iiiiai-  e\i-le  un  enfant  plus  joli  et  plus  intelligent.  Il  a 
dit  papa  ou  quelque  chose  d'approchant  lorsqu'il  avait  à 
peine  un  mois.  Il  apprend  de  bonne  heure  il  arracher  les 
favoris,  el  il  préfère  ceux  des  étrangers.  On  n'a  pas  en- 
core vu  un  enfant  aussi  extraordinaire.  Il  n'aime  pas' 
à  sortir  de  chez  lui  ,  et  il  prolonge  rarement  ses  visites 
plus  d'un  jour.  Il  éprouve  une  répugnance  bizarre  pour  les 
bonnets  et  le  nez  de  sa  nourrice  ,  qu  il  saisit  cl  qu  il  serre 
dans  ses  mains  avec  une  ténacité  sauvage  pour  peu  qu'il 
soit  irrité.  Il  n'est  heureux  que  dans  les  bras  de  sa  mère. 
Il  préfère  le  parquet  ii  son  berceau  d.iiis  le  piel  il  ne  reste 
que  le  moins  do  temps  po,-sible.  Il  niue  biMiudup  a  jouer, 
il  SB  plaît  il  enlever  la  nappe  de  l,i  lalile  ,  .i  ll|■l^er  les  por- 
celaines de  la  cheminée,  ouii  ren\ei>ers<i  soupe  sur  n'im- 
porte qui  II  invente  un  nouveau  langage  qui  lui  appartient 
en  propre,  presque  avant  d'avoir  pu  parler  et  qui  est  par- 
faitement iiilelhgible  pour  ses  parents  bien  ipie  personne 
ne  puisse  le  comprendre  11  a  lesduerli— eniinl-  luiMirsen 
horreur;  a  peine  a-t-il  a.ssi.-le  ciih|  niiiiule^  ,i  nu -peitacle 
qiiele pie  ipi  il  m-  iiiel  a  pleurer.  Il  delesle  la  peilidie  .-i.us 

i|llelque  liiinie   ilUelle  e.-,ne  lie  le  IroilipeC,  Cl    il     rCpOU.SSC 

une  I  iiilleiee  lie  -iieie  lei-,pi  il  s'imagino  qu'il  y  a  unepoii- 
die  1 ,11  liée  au  liiuil  lue  uieilecine  est  sa  plus  forte  aver- 
sion, après  l'eau  froide  ceiiendanl.  Il  n'a  aucun  goiit  parti- 
culier pour  la  loilelte,  car  en  général  il  déchire  en  mor- 
ceaux ses  plus  beaux  ajustements,  surtout  lesdentelles.  dés 
qu'on  l'en  affuble.  Il  veut  tout  savoir,  et  il  éludie  spé- 
cialement la  fabrication  des  tambours,  l'organisation  inté- 
rieure des  boîtes  ii  ouvrage  el  l'anatomie  des  poupées , 
qu'il  préfère  de  beaucoup  sans  tête  cl  sans  bras.  Il  a  une 
haine  instinctive  du  médecin,  cl  il  lultc  avec  sesdeux  jam- 
bes, ses  deux  bras  cl  ses  premières  dents  contre  ses  cajole- 
rie- Il  aime  pa-sionnément  les  couleurs,  el  il  suce  avec  un 
eiii|>ie— eiiieui  el  un  ,ieliariiemeiil  exlraordinaircs  tous  les 
j>iii|eu\  lie  Imii>  peiiil  qu  un  lui  liiiniie.  En  un  mol.  il  n  \ 
eut  j, 1111,11-  il  eiiliiiil  -eiiiblable  .  el  il  le  prouve  en  digérant 
touf.  les  biiiibnusdiiiil  mi  le  regale,  el  eu  siir\i\anl  s'urliiul 
a  loules  les  ilini;iies  qiiese  dispiilenl  le  droit  de  lui  admi- 
nislrer.  pour  le  guérir  quand  il  est  malade,  ou  le  forlilier 
lorsqu  il  se  porle  bien,  ses  grands  parents  des  deux  lignes, 
ou  les  amis  iiiliinesdu  mari  et  de  la  femme  modèles  qui  lui 
ont  donné  le  jour 

lldilKiliIll  1'im:h,' 


l.ettreM  d'un  Flâneur. 


ClItCCLAIRES  ,    JOCK.SACX    ET    CANAnDS. 

17  septembre  1848. 

Semaine  électorale,  s'il  en  fnt,  monsieur  le  directeur  ;  on 
ne  parle  que  candidatures,  on  ne  lit  que  des  circulaires,  on 
ne  travaille  qu'à  la  confection  d'une  liste  ;  la  nuit  même,  si 
on  parvient  ii  .s'endormir,  on  rêve  aussilot  urne  el  scrutin. 
Deux  amis  qui  s'abordent  ne  se  demandent  plus  ;  Comment 
vous  portoz-vous,  mais  Qui  portez-vous!  Cesla  [icinesi  la 
Constitution  obtient  chaque  jour  une  fugitive  pensée.  L'affi- 
che, tolérée  par  l'aulorite,  a  repris  possession,  avec  une  au- 
dace superbe,  de  tous  les  murs  dont  elle  avait  été  obligée 
depuis  deux  mois  de  respecter  le  badigeon  immaculé  ,  el , 
comme  autrefois,  elle  a  rassemblé  devant  et  autour  d'elle 
des  attroupemens  plus  ou  moins  bav.inU  ou  les  conversa- 
tions sont  devenue- (le-  di^i  u— imi-  el  de-  |,;i'  lica lions  peu 
vertueuses.  Les  cluli-  mil  Mnueri  h  m-  |Hiiie-  ;i  leurs  Iftbi- 
tués  pour  leur  tenir  des  di-i  mii-  (|ue  je  u  e-ei.ns  certes  pas 
vous  répéter.  Pendant  ce  tem|i-  ,  le-  in.nnn-  journaux  el 
les  pamphlets  renaissaient  de  loii-  ente-  e.iuiiiie  les  lêtesde 
l'hydre  de  Lerne,  et  déjà  l'on  voy.nl  riiiler  d,ins  les  rues  et 
sur  les  places  des  groupes  de  ces  fameux  travailleurs  qui 
n'onljamais  travaillé  et  qui  ne  travailleront  jamais  qu'à  la 
désorganisation,  —  ils  disent  la  réorganisation  —  de  la  so- 
ciété. 

Toutefois,  il  ne  faut  pas  non  plus  s'exagérer  le  danger. 
Cette  agitation,  —  passagère  je  l'espère.  —  avait  une  cause, 
un  prétexte,  je  dirai  même  une  excuse;  la  nomination  de 
trois  représentants.  Pour  bien  choisir,  il  faut  connaître  Or 
comment  connaître  sans  voir  ,  sans  entendre  ,  sans  sentir, 
sans  loucher ,  sans  goûter  ,  selon  la  nature  de  l'objel  qu'on 
est  tenu  de  préférer?  Lés  électeurs  ont  donc  voulu  voir  et 
entendre  les  amateurs  qui  sollicitaient  leurs  voix,  et  Je  les 
approuve.  Mais  .'300, ooo  cilnyens  ne  pa--eiit  pas  en  revue 
une  cinquantaine  de  (  .ludidii-  ei  ne  e.iu-eni  p,is  avec  eux 
sur  une  foule  de  que-iinu-  peihiupie-  ieli_-ieii-ej,  sociales, 
artistiques,  industiielles,  liUeiairc-,  liii.iiinerc?,  scientifi- 
ques, etc.,  sans  qu'il  n  en  résulte  un  peu  de  brouhaha.  Les 
hommes  en  général  et  les  Erançais  en  particulier,  surtout 
les  Parisiens,  ne  sont  pas  des  petits  saints,  —  hélas!  Uni 
s'en  faut.  Uassurons-nous  donc  ,  monsieur  ,  el  constalons 
avec  plaisir  ijue  si  la  tranquillité  publique  a  paru  menacée, 
elle  n'a  pas  été  sérieusement  troublée. 

L'affiche  a  pourtanl  un  reproche  à  se  faire.  Elle  a  abusé 
de  l'autorisation  temporaire  qui  lui  a  été  accordée;  elle  s'est 
trop  amplement  dédommagée  de  ses  deux  mois  de  vacances 
forcées.  Jamais,  depuis  la  révolution  de  février,  il  ne  s'en  était 
fait  en  si  peu  de  temps  une  si  monstrueuse  consommation. 
A  peine  celle  qu'on  venait  d'apposer  élait-elle  collée  sur  la 
couche  de  ses  sœurs  ainées  qu'elle  recouvrait,  qu'à  son  tour 
el  le  d  isparaissait  pour  toujours  sous  une  couche  épaisse  et  ba- 
riolée de  sœurs  cadettes.  Tel  candidat  qui  est  riche  en  a  a 
lui  seul  placardé  plus  de  \iii;;l  eu  un  jeiir,  et  chacune  avec 
un  titre  différent.  U  est  dillii  de  d  ,(ilr,i|ier  plus  habilement 
son  monde.  Le  charlatan  le  un  nu- Iule  n  emploierait  pas  des 
moyens  plus  grossiers,  je  \eux  due  plus  ingénieux  ,  pour 
attirer  à  sa  boutique  les  badauds  de  la  foire  Qui  eût  pu  s'i- 
maginer que  des  princes  eldes  maréchaux  de  Erance,  voire 
même  des  raffineurs  de  sucre  ,  se  recommanderaient  aux 
électeurs  parisiens,  à  pou  près  comme  un  saltimbanque  an- 
nonce du  vulnéraire,  du  cirage  ou  de  leau  pour — on  de- 
vrait dire  contre  —  les  punaises? 

H'OÈtnnons-le. —  €'#•  ilefÊtifr  tttol.  —  Jt« 
nteilleuÊf  choijc.  —  Mttfnntie,  etc. 

La  plupart  des  affiches  de  septembre  m'ont  semblé  fort 
insignifiantes.  Elles  se  bornaient  presque  toutes  à  reproduire 
des  circulaires  déjà  publiées  dans  les  journaux.  Seulement, 
j'ai  fait,  en  les  parcourant  du  regard  une  observation  qui  a 
son  inlérêt  Sur  cent,  j'en  ai  complé  quatre-vingt-dix-neuf 
dont  les  autcursso  déclaraient  solennellement  et  pour  toujours 
amis  du  p;iu\re  p.i-  un  ne  ni,iiiire-l,iil  le  plus  léger  sym- 
ptôme il  alleel  mu  |inni  le  nelie  .l.ii  ,ippris  cette  nouvelle 
avecplaiMi  ,1e  m  -,i\  n- p,i-(pie  j  eu— e  tant  d'amis.  Pour- 
tant, je  fax  eue,  je  II  ai  pu  me  ileleinlre  d'un  sentiment  de 
compassion  en  faveur  des  propnel.iires  ou  capitalistes  aux- 
quels jélais  heureux  et  lier  d  être  preléré  Pour  pou  que 
cela  continue  ,  savez-vous  que  le  nielier  de  riche  deviendra 
un  fort  mauvais  et  fort  insupportable  métier?  .  Quant  à 
moi  je  ne  voudrais  pas  lexercer  maintenanl  Désormais. je 
mange,  je  bois,  je  fume,  je  pri>e,  je  jniie  tout  ce  que  je  ga- 
gne, I)  abord,  le  jour  du  parl.ige  \eiiii  je  n'aurai  pas  le  re- 
gret de  donner  a  quelque  gr.i  ml  gaillard  de  fainéant  la  moitié 
de  ma  fortune,  fruit  d'un  travail  assidu  el  de  privations  pé- 
nibles ..  Ensuite...  mais,  sans  \eii-  eiiunieier  ici  tous  les 

ennuis,  tous  les  chagrins,  tous  le-  del e-  que  j'éviterai, 

ne  me  rcsiera-l-il  pas  jusqu'à  ma  dernière  heure,  pour  me 
leiiuliiii  de  la  richesse,  rattachement  tendre,  profond,  dé- 
M.iie  |, 1—1. unie  de  MM.  les  candidats  do  toutes  lesrépubli- 

Je  m  étais  lait  une  véritable  fête  de  lire  la  proclamation 
au  peuple,  —  à  son  peuple,  —  du  ciloyeii  Thoré  .  ,  l'ex-ré- 
dacteur  en  chef  de  l'ex-rniie  République .  tuée  deux  fois  en 
deux  mois,  une  première  fois  par  le  pou\oire\écutifau  pro- 
fit de  la  paix  et  de  la  morale  publiipios.  une  sivonde  fois  par 
un  arrêt  de  tribunal  au  bénéfice  de  la  République  de  M.  Eu- 
gène li.iresle  MHisètes  prie  de  ne  pas  confondre  ladite  Ré- 
piililupie  ,i\ec  l;i  république  frani.MW,  jeu  de  mois  a  parlV 
.\l.ii>  leisipie  ,  fendant  a  grand  peine  li  foule  innombrable 
des  amateui'S.  j  apA\us  au-dessus  du  chapeau  Tliori'  d'un 
petit  socialiste  à  tous  crins,  la  première  ligne  do  l'exorde 

.\u  beau  milieu  du  portail  îles  vieilles  églises  du  mojcii  âge... 
—  j'ai  peut-être  penlu  une  des  dislraclions  les  plus  agréa- 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


5'J 


blés  de  ma  vie  —  je  ne  me  suis  pas  senti ,  je  l'avoue,  le  cou- 
rage d'entrer  dans  ce  monument 

D'ailleurs  il  y  avait  à  peu  de  distance  une  petite  circu- 
laire qui  sollicitait  si  humblement  et  si  honnêtement  mon 
attention  ,  qu'il  me  fut  impossible  de  résister  à  sa  prière. 
Elle  était  grise,  mais  d'un  gris  pâle,  et  sans  les  ordonnances 
de  police  elle  eût  eu  certainement  la  candide  blancheur  de 
la  neige,  du  lis  ou  du  cygne.  Elle  avait  un  petit  tilre  mo- 
deste qui  la  distinguait  autant  que  sa  couleur  de  ses  ex- 
travagantes rivales  aux  nuances  tranchantes,  aux  airs  éva- 
porés, aux  grandes  et  grosses  lettres  Tout  en  elle  me 
plaisait,  m'attirait,  me  per.-iuadait  d'avance;  bref  son  exté- 
rieur aimable  et  pudibond  avait  fait  ma  conquête Je 

m'approchai  et  voici  ce  que  je  lus,  vous  l'avez  peut-être  lu 
comme  moi  : 

—  Je  me  fais  canilidal.  ... 

—  Qu'etes-vous  I  vdlie  passd  !  votre  présent  et  \olrc  avenir  ! 
Bien  vile!  (!épêcln'Z-vous  !  cclutrez-nousl  nous  qui  ne  vous  con- 
naissons pas  et  qui  avons  besoin  de  libéraieiirs. 

—  Mon  passé  :  Enfant  de  père  et  iiiùre  modelés  suus  tous  les 
rapports... 

Et  ce  jour-la  je  non  lus  pas  davantage...  comme  dit 
Dante... 

Jen'aurais  jamais  cru,  avantd'en  avoir  les  preuves  entre 
les  mains  ,  qu'une  révoluiion  pût  rendre  imbéciles  ou  fous 
un  si  grand  nombre  d'êtres  doués  de  raison.  Les  ravages 
que  la  république  a  faits  depuis  six  mois  et  qu'elle  fait 
chaque  jour  encore  dans  les  âmes  ne  sont  pas  moins  ter- 
ribles que  ceux  qu  on  reproche  au  choléra.  Mieux  vaut 
mourir  que  tomber  dans  l'enfance  ou  dans  la  démence.  Le 
nombre  des  victimes  de  l'insurrection  de  juin  ne  s'élève, 
assure-t-on,  qu'à  1,600  environ,  bien  quej'aie  entendu  hier 
encore  deux  ouvriers  qui  votaient  pour  Louis  Bonaparte  afin 
d'avoir  le  pain  à  bon  marché  ,  affirmer  qu'il  dépassait 
10,000.  Mais  ne  serait-il  pas  temps  de  calculer  aussi ,  pour 
l'instruction  et  l'édification  du  peuple,  le  chiffre  total  de  tous 
les  malheureux  qui  vivent  encore  physiquement  parlant , 
et  dont  la  république  dcmocraïi'jue  et  socia(c  a  tué  à  jamais 
l'intelligence  et  le  cœur?... 

A  propos  de  la  république  démocratique  et  sociale,  je  dois 
une  mention  à  ses  affiches  J'en  ai  compté  plusieurs  dans 
lesquelles  elle  se  souhaitait  à  elle-même  longue  vie  et  pro- 
spérité. Mais  si  j'étais  condamné  à  faire  un  choix  entre 
toutes,  je  préférerais  sans  hésiter  celle  qui  s'adressant  tout 
il  la  fois  aux  citoyens  et  aux  citoyennes  ,  priait  ces  dames 
d'accompagner  leurs  époux  et  leurs  frères  jusqu'à  l'urne 
électorale,  pour  soutenir,  en  cas  de  besoin  ,  leur  courage 
chancelant  (au  figuré,  j'espère).  Je  me  borne  à  vous  la  re- 
commander, car  j'éprouve  le  besoin  de  vous  entretenir 
quelques  instants  de  deux  circulairesmodèlesquun  heureux 
hasard  a  fait  tomber  entre  mes  mains. 

L'une  a  pour  titre  :  Discours  qui  sera  fait  au  club  dans 
la  soirée  d'aujourdhui,  par  le  citoyen  F...,  propriétaire 
et  entrepreneur.  En  voici  l'exorde. 

«  Je  suis  un  citoyen  républicain ,  mieux  et  meilleur  que  peut- 
être  vous  ne  pensez  pas.  Veuillez  m'excuser,  si  dans  mes  paroles 
je  fais  des  fautes»  soit  pour  la  manière  de  m'expliquer  ou  tenir 
un  raisonnement  qui  ne  soit  pas  bien  suivi,  mes  inslructions  ne 
sont  pas  assi'z  grandes  pour  pouvoir  causer  comme  il  y  a  beau- 
coup d'autres.  Mais,  c'est  ég.Tt,  ce  que  je  vais  vous  direct  ce 
que  je  vous  dis,  prenez  le  juste;  car  je  n'ai  jamais  cotmn  que  le 
juste,  malgré  que  plusieurs  pourront  et  pouriaieiit  cioiie  et  le 
<lire,  je  vous  observe  à  présent,  cl  c'est  positivement  ce  que  je 
veux  vous  dire. 

»  Il  n'y  a  pas  un  bomme  qui  soit  sur  la  terre  qu'il  n'ait  des 
ennemis,  cl  suuvenl  les  ennemis  qu'il  a  ne  savent  pas  pourquoi  ; 
car  si  on  leur  disait  la  raison  pourquoi,  ils  seraient  souvent  em- 
barrassés de  le  dire. 

n  Observez  ee  que  je  vous  dis  là,  c'est  pourquoi  que  je  vous 
ai  mis  plus  haut  que  mes  inslructions  n'avaient  pas  été  assez 
lorles. 

»  Ainsi  je  suis  un  citoyen  qui  a  eu  l'occasion  de  se  trouver 
dans  bien  des  circonstances  (pie  beaucoup  de  vous  n'avez  pas 
eu,  j'ai  su  les  remarquer  ,  les  comprendre,  les  coimaître ;  c'est 
pourquoi  je  me  présente  où  je  vous  le  dis,  comprenez  ma  ques- 
tion ;  je  ne  vais  pas  plus  loin,  n 

Moi  aussi  je  vous  le  dis  ;  comprenez  et  je  ne  vais  pas  plus 
loin  ,  car  j'ai  beaucoup  d'autres  révélations  non  moins  cu- 
rieuses h  vous  faire.  Ainsi  vous  ignorez  sans  doute  que 
Vinvetiteur  de  la  médecine  nalurcUc,  M.  X....  a  découvert 
une  poiiliquc  naturelle  ou  républicaine,  et  que  si  nous  l'ap- 
pelions il  llionneur  de  nous  représenter,  vous,  moi ,  et  tous 
les  abonnés  de  VJllustration ,  a  l'assemblée  nationale  .  il 
ferait  ajouter  à  la  Constitution  qu'on  discute  en  ce  moment 
des  articles  d'une  incontestable  utilité  et  auxquels  per- 
sonne, pas  même  M.  Pierre  Leroux,  n'a  encore  sonjré. 
Exemple  : 

a  Les  boissons  fermenlées,  surtout  le  vin,  élevant  les  forces 
physiques  et  morales  (jui  arment  les  mnins  de  la  fondre  popu- 
laire, il  est  d'un  besoin  impérieux  d'en  produire  le  plus  pos- 
sible. 

»  Les  vêtements  sont  aussi  d'une  nécessité  absolue.  Par  con- 
séquent, on  doit  s'efforcer  de  multiplier  le  plus  possible  les  lins, 
les  chanvres,  les  laines,  qui  seuls  conviennent  aux  Français  , 
parce  que  ces  tissus,  comme  les  cheveux,  abi'itenl  le  mieux 
contre  la  chaleur  et  le  froid  ,  tandis  que  les  colons,  ne  convien- 
nent (ju'aux  infimes  des  contrées  brûlantes. 

»  La  nation,  en  recouvrant  sa  liberlé  en  (|uelques  heures,  a 
prouvé  par  son  énergie  qu'elle  pouvait  tout,  blnsuite  eu  biinica- 
dant  les  routes  sur  les  fronlières,  ainsi  que  je  l'ai  écrit  le  pre- 
mier, la  I''r.nice  étant  invulnérable,  et  les  peuples  voisins  étant 
devenus  nos  amis,  c'est  dire  que  l'arinHc  doit  être  fortement  di- 
minuée. 

n  Les  impôts  sont  sacrés,  absolument  saci'ùs;  un  centime  bien 
employé  produit  des  fr.incs;  mais  pour  le  rendre  tel  il  faut  qu'il 
soit  unique  comme  l'impôt  immobilier  et  qu'il  pèse  sur  tous 
sans  nulle  exception.  Alors  si  l'on  réfléchit  qu'en  suivant  nos 
principes  les  produits  seraient  inlinis,  la  consommation  propor- 
tionnée ù  ceux-ci  ;  que  l'armée,  en  rendant  la  jeunesse  a  la  so- 


ciété ,  produirait  an  lien  d'être  une  charge  ;  que  les  deux  ou  trois 
cent  mille  eiuplnvés  qui  reviendraient  aux  travaux  communs, 
priiduir.ii.  nt  jusm  iiumensémelU  en  portant  tous  les  jours  leurs 
pindiiils  dans  l,i  société,  et  qu'alors  les  producteurs  et  les  con- 
somnialeors  pourraient  rendre  des  trésors  ù  la  Hépublique,  et 
ajouter  des  millions  i>  des  millions;  il  est  bien  vrai  que  les  im- 
pôts seraient  incalculables,  cl  que  Ton  pourrait  prélever  à  volonté 
des  milliards. 

Moins  heureux  que  l'affiche,  la  presse  n'a  pasété  éman- 
cipée, même  temporairement.  Le  double  régime  de  l'état  de 
siège  et  du  cautionnement  est  évidemment  contraire  à  l'ac- 
croissement de  sa  nombreuse  faiiiilli' ;  elle  n'a  enfanté  en 
quinze  jours  que  deux  ou  trois  pi-iils  aMnicinonts  qui  sont 
mort-nés.  J'en  excepte,  bieneuU'inhi,  \  Elmlrde  la  France, 
s,ii^iirr  .\iiliiy  Foucault,  imprimer  \,:\t  S.ipia,  et  destinée  il 
t'iimIiiiiv  (Lins  la  bonne  voie  l"ii>  le-;  .inm'iis  abonnés  de 
I  v\-(i(i:,tlc  (/(■  Fronce  et  tous  li> . I  II  tir,rii(i\  eus  curieux  de 
suivie  la  iiieiiie  direction.  Je  n'y  coinpivnilspas  non  plus  les 
huit  ou  dix  catiards  ,  publiés  par  la  maison  Alexandre 
Pierre  etc.',  dont  je  me  réserve  de  vous  parler  tout  a  l'heure, 
ni  le  Guide  des  électeurs  qui  ne  se  charge  de  mener  ses  lec- 
teurs (|u'ii  deux  ou  trois  circulaires ,  pour  lesquels  il  me 
semble  épris  d'une  trop  vive  tendresse. 

Les  nuuveau-nés  sont  ï Impitoyable  ,  le  Canon  d'alarme 
et  le  Journal  des  pauvres. 

V Impitoyable  a  paru  le  dimanche  3  septembre.  Il  se 
vend  1  sou.  Il  paraîtra  ledimanche  et  le  jeudi.  Il  a  un  sous- 
titre  :  Journal  de  tous  les  Abus  publics;  et  deux  épigraphes  : 

i>  Les  abus  sont  des  ennemis  destructeurs  qui  minent  sourde- 
ment l'édifice  social. 

Jen.-  puis  rien  iirmmersi  ce  ii'..sl  pat- son  i,oin, 
J  :i|.|..!llc  Mil  L'Iial  im  c'iial  ei  Rullit  un  rripun. 

Son  rcdacteuren  chef,  M.  Victor  Letellier,  fonda teurde  l'ex- 
joiirnal  l'Artisan,  déclare  qu'il  a  pour  collaborateurs  tout 
le  pays.  Je  n'ai  pas  lu  le  second  numéro;  le  premier  était 
un  prospectus-programme  peu  divertissant,  terminé  par  un 
post-sctiptum  en  l'honneur  de  M.  de  Boissy.  Du  reste , 
M.  Letellier  se  montrait  animé  des  meilleures  intentions. 
Nous  l'attendons  à  l'œuvre. 

Le  Canon  d'alarme  coûte  le  double  de  V [mpitoyble  ■ 
10  centimes.  Il  ne  paraîtra  qu'une  fois  parmois,  du  l"  au 
o.  Son  rédacteur  en  chef,  M.  Allain  ,  s'est  gratifié  du  titre 
d'avocat  auquel  il  n'a  aucun  droit.  (Voyez  le  tableau.)  — Je 
serais  fort  embarrassé  de  vous  exprimer  une  opinion  quel- 
conque sur  ce  journal.  J'en  ai  lu  quatre  fois  de  suite  le 
premier  numéro,  en  le  commençant  par  tous  les  bouts  ,  et 
je  n'y  ai  absolument  rien  compris.  Pour  vous  donner  une 
idée  "du  style,  je  vous  citerai  les  trois  premiers  paragraphes 
du  premier  Paris  : 

0  Parti  du  sommet  des  Alpes,  un  vent  mêlé  d'éclairs  et  de  feux 
s'est  déchaîné  vers  les  quatre  coins  de  l'iiorizon.  Il  s'est  eu  un  clin 
(l'œil  abattu  sur  l'Europe;  et  l'on  ne  citerait  pas  en  ce  momenl 
une  existence  privilégiée  contre  sa  furie. 

n  Peuples  et  lojauiiies  ont  été  déracinés  comme  des  arbres. 
Un  tourbillon  de  ténèbres  et  de  poussière  dérobe  le  ciel  qui  sem- 
ble fermé. 

"  Tout  est  devenu  relatif  au  milieu  de  l'Océan  comme  sur  la 
terre,  el,  dans  cet  immense  impôt  de  ruines  que  les  événements 
ont  prélevé  sur  le  monde,  tous  tant  que  nous  sommes  nous  n'a- 
vons pas  moins  besoin  de  charité  que  d'énergie.  » 

Ainsi  du  reste  de  l'article,  jugez-en  par  cet  échantillon. 
Outre  cet  article ,  le  Canon  d'alarme  contient  un  feuilleton, 
une  fable,  une  élégie  en  prose  d'un  insurgé  de  juin, diverses 
fariboles  du  même  genre ,  une  pièce  de  vers  du  citoyen 
Raymond  Brucker,  et  environ  cent  pensées  de  deux  ii  cinq 
lignes  précédées  d'un  astérisque.  Malgré  toute  ma  bonne 
volonté,  il  m'est  impossible  de  vous  fournir  des  renseigne- 
ments plus  positifs.  Tout  ce  i]ue  j'ai  cru  deviner,  c'est  que 
la  couleur  de  cette  énigme  n'était  pas  rouge  ;  du  reste,  voici 
doux  ou  trois  des  pensées  que  le  Canon  d'alarme  vient  de 
lancer  dans  le  monde. 

« .-.  Dans  un  siècle  assez  sourd  pour  être  inatlentif  au  langage 
effrayant  de  l'Eternel,  nous  ne  serions  pas  très  scandalisés  qu'un 
missionnaire  de  l'avenir  usurpât  le  uiasqne  impassible  el  se  plût 
îi  cunlrefaire  la  voix  moqueuse  du  démon  pour  lancer  an  milieu 
du  monde  une  grète  de  vérités  nécessaiics. 

»  .-.  La  première  condition  pour  renouveler  l'ordre  social  de 
fond  en  comble,  c'est  de  refondre  l'homme  lui-même  dans  un 
nouveau  moule,  absolument  comme  s'y  prennent  les  fondeurs  de 
cuillers  d'étain, 

n  .'.La  similitude  entre  ces  deux  œuvres  peut  se  formuler  de 
la  SOI  te  à  l'image  d'une  régie  de  trois  : 

Fondeur  :  tiuiller  ;  :  Dieu  :  x  —  l'homme. 

»  .-.  Ce  ne  sont  pas  ceux  qui  possèdent  le  sof  que  l'on  doit 
regarder  comme  les  grands  propriétaires:  ce  sont  ceux  qui  pos- 
sèdent des  sous. 

n  .'.  Si  vous  ne  comprenez  pas  ce  que  j'ai  l'honneur  de  vous 
dire,  ayez  la  boulé  de  le  relire  trois  fois.  Le  nombre  trois  est 
cabiilibtique.  » 

Le  Journal  des  pauvres  a  une  a|i]iarcnre  plus  sérieuse  , 
bien  qu'il  ait  pour  fondateurs  et  pour  l'iHri'spdiiiJaiilsdeux 
ex-pairs  de  France,  MM,  de  Boissy  el  il'.Miini-.'-ilii'i'  Il  sera 
mensuel.  Le  nom  de  son  directeur-gérant  fondateur  Louis 
Deplanque  sent  terriblement  le  club  et  la  commission  du 
Luxembourg,  mais  au-dessous  de  son  litre  on  lit  : 

Travail ,    Propriété,    Asaocialion. 

Voyons.... 

A  vrai  dire,  le  premier  numéro  àa  Journal  des  pauvres  ne 
contient  qu'un   article,  car  je  ne  puis  qualifier  de  ce  nom 

une  binL;ra|iliir  riiliriilc  <m  le  cilnw'ii  d'Alton-Shée  est  com- 
paré a  MiiiIhmii  ,  ri  l.i  ieiniprr>- du  Projet  de  Constitu- 
tion ;  uidiM  ri  Jihilr,  iiililulrilr  1,1  propriété,  est  sérieuse- 
ment tra\  aille  et  plein  iriiiteièt,  il  lait  il  coup  sûr  honneur 
a  son  auteur  M.  Louis  fieplanc]ue.  Je  suis  loin  d'en  adopter 
foutes  les  idées ,  cependant  je  le  recommande  aux  médi- 
tations des  amateurs..  Il  commence  ainsi:  »  Qu'est-ce  que 


la  propriété  ?  r-  C'est  le  vol,  a  dit  M.  Proudhon.  A  cette 

question  ,  je  réponds  ,  moi ,  c'est  la  liberté 

ti  A  l'œuvre  donc  I  s'écrie  M,  Louis  Deplanque  ;  à  l'œuvre,  pen- 
seurs de  toutes  les  écoles,  économistes,  socialistes;  à  l'œuvre  , 
travaillons  ù  éclairer  le  peuple  ;  guidons-levers  l'avenir  que  Dieu 
lui  prépare,  el  prenons  garde  qu'on  ne  cherche  a  l'égarer  dans 
les  sentiers  de  l'erreur,  q'iavailloiis  surtout  a  améliorer  la  posi- 
tion matérielle  du  peuple,  ù  faire  qu'il  arrive  lui-même  i  la  pro- 
priété, lu  est  tout  le  problème  de  la  réorganisation  sociale,  car 
aussi  bien  en  théorie  qu'en  pratique,  la  propriété  c'est  l,i 
liberté.  « 

Je  mentionne  seulement  pour  mémoire  la  Guerre,  récla- 
mation en  l'honneur  de  la  guerre  signée  Henri  Carred  ,  et  le 
Penseur  républicain ,  ramas  de  mavimes  et  pensées  confec- 
tionnées par  M.  F.  Poulet ,  et  j'arrive  à  la  collection  des 
canards  publiés  la  quinzaine  dernière  par  M.  Alexandre 
Pierre  et  C'.  Depuis  quelques  jours  on  lit  dans  les  annonces 
des  grands  journaux  une  réclame  qui  coinmence  ainsi  : 
HUE  DES  xoïEns,  27,  a  pabis. 
ALEXANDRE-PIEURE  et  Os 

lidUntm' de  toutes  tes  fctlilteg  pubtlifUes. 

«  Font  savoir  à  MM.  les  libraires  el  colporteurs  qu'ils  font  pa- 
raître régulièrement  trois  nouvelles  feuilles  par  semaine,  annon- 
çant les  faits  les  plus  sérieux,  avec  gravures  el  caricatures. 

»  MM.  les  libraires  et  marthaiids  colporteurs  trouveront  chez 
M.  Alexandre-Pierre  et  C"^  une  collection  de  toutes  les  feuilles 
et  canards,  biographies  ,  gravures  et  caricatures,  etunecollei- 
tion  de  tous  les  anciens  journaux,  n 

Ce  M.  Alexandre  Pierre  n'est  point  un  inconnu  ;  il  a  eu 
avec  la  police  correctionnelle  des  démêlés  qui  l'ont  rendu 
célèbre.  Condamné  à  quinze  mois  de  prison  par  le"  tribunal 
peu  de  temps  avant  la  Révolution  de  février,  il  s'était  peu 
de  lemps  après  entendu  condamnera  la  même  peine  par  la 
cour  d'appel.  Mais  le  ministre,  alors  dispensateur  des  grâ- 
ces, s'empressa  d'accorder  à  l'influence  de  l'avocat  du  con- 
damné ce  que  la  justice  avait  cru  devoir  refuser  à  son  élo- 
quence. Sur  la  demande  de  M'^  Cauvain ,  M'  Créinieux 
ordonna  la  mise  en  liberté  du  citoyen  Alexandre  Pierre  qui, 
renonçant  au  dangereux  métier  qu'il  avait  voulu  faire  . 
fonda  il  la  même  adresse  ,  au  lieu  de  je  ne  sais  quelle  es- 
pèce de  police  suspecte ,  l'établissement  assez  original  que 
vous  connaissez  maintenant. 

Cet  établissement ,  je  n'ai  point  été  le  visiter,  je  ne  vous 
en  ferai  donc  pas  la  description  ,  mais  je  puis  vous  parler 
de  visu  des  marchandises,  je  devrais  dire  des  drogues  qui 
s'y  fabriquent  et  s'y  débitent.  Cette  quinzaine  ,  M.  Alexan- 
dre Pierre  a  tenu  ses  engagements  envers  le  public  ,  il  a 
publié  cinq  nouvelles  fouilles. 

Le  Peuple  Représentant ,  journal  mensuel. 

La  Réponse  d'un  ours  il  M.  Alexandre  Dumas 

La  Réponse  d'un  cochon  a  M.  Alexandre  Dumas. 

La  Colère  de  M.  l'abbé  de  Lamennais. 

La  Misère  vaincue  par  l'œuvre  de  M.  Roux. 

Sur  ces  cinq  feuille  une  seule ,  le  Peuple  Représentant,  a 
l'apparence  d'un  journal.  M.  Alexandre  Pierre  ,  qui  signe 
l'an  I"  de  l'état  de  siège  et  qui  se  dit  le  cousin  du  Peuple 

du  citoyen  Proudhon,  adresse  à  M.  le  procureur de  la 

République  des  questions  qui  me  semblent  passablement  in- 
discrètes. Il  a  tort,  en  vérité,  de  se  rappeler  au  souvenir 
de  messieurs  du  parquet.  Qu'il  devienne  nioins  question- 
neur et  surtout  plus  honnête  s'il  ne  veut  pas  quitter  sou 
établissement  de  la  rue  des  Noyers  pour  venir  habiter  la 
Conciergerie  nu  quelque  autre  maison  de  détention.  Opi- 
nions piililiqiirs  à  p.irt  ,  ses  spriulahons  ressemblent  à  s'y 
mépreniliv  a  ilrsrsrrnipiriirs.  la  Répotise  d'un  cochon  Oil 
exactement  semblable  ,1  la  Réponse  d  un  ours,  t^'cstla  mênii' 
épître  —  et  quelle  épitre  !  —  sous  deux  titres  différents. 

Il  a  paru  encore  cette  quinzaine  un  petit  livre  de  llii 
pages  qui  mérite  une  mention  honorable.  11  a  pour  titre  : 
Physiologie  de  la  presse,  ou  catalogue  completdes  nouveaux 
journaux  qui  ont  paru  depuis  le  24  février  iusqu'au  20  août, 
avec  le  nom  des  principaux  rédacteurs.  Plus  développé,  ce 
travail  eût  offert  plus  d'intérêt;  mais  tel  qu'il  est —  pour 
ne  pas  parler  de  quelques  erreurs  faciles  à  corriger  —  il 
sera  lu  et  consulté  avec  profit.  L'auteur,  qui  signe  un  Chifl'iui- 
nier,  y  a  réuni  un  grand  nombre  de  renseignements  utiles 
sur  deux  cent  quatre-vingt-trois iournaiw.  Parmi  cesjour- 
naux  ,  j'en  ai  vainement  clierdié  un  qui  avait  paru  au  mois 
de  mars  et  qui  vient  d'être  réimprimé.  Son  titre  était  pour- 
tant assez  caractéristique;  il  s'appelait  la  Guillotine,  par 
un  vieux  jacobin.  Grâce  a  une  brave  femme  qui  me  pro- 
cure .  il  lies  prix  raisonnables,  tous  les  journaux  défendus, 
je  puis  comlilrr  la  laruneque  je  signale  dans  la  Physiologie 
de  la  presse.  J'ai  sous  les  yeux,  en  écrivant  ces  lignes,  ou 
exemplaire  de  la  tiiiillnlinr.  Spectacle  assez  peu  agréable, 
car,  entre  cesilnix  r|ii  ji  ;i|ilirs  :  1793,  tout  le  monde  y  pas- 
sera IHIK,  |)risriinr  n  \  |).i-.-^i'ra,  on  aperçoit  une  gravure 
sur  bois  repi'ésriilaiit  l.uuis  Philippe  eiitr'ouvrant  son  gilet 
et  sa  chemise  et  montrant  sur  sa  poitrine  nue  le  fameux  in- 
strument de  mort  qui  a  ininiortalisé  le  nom  do  Guillotin. 
Mais,  honnêles  gens  qui  avez  la  bonté  de  me  lire,  n'éprou- 
vez aucun  saisissement  fâcheux  en  jetant  les  yeux  sur 
ces  lignes.  Il  n'y  a  rien  de  moins  inoffensif  que  ce  canard 
signé  Olusi  Lippephi  que  d'esprit!  ).  C'est  une  lourde  et  in- 
digeste ciinipilatiuii  liisturiiiiie  ou  vous  tiiiiivcrez seulement 
(les  ren.srigiiciiiriils  plus  1111  moins  aiillirnliipic.  sur  l,i  date 
de  l'iiivcntidii  lie  la  giiillnlinr,  sur  (.iiiilliitiii.  les  exécuteurs 
et  la  famille  Sanson,  les  principales  exécutions,  et  cnlin  la 
décadence  de  la  guillotine.  Il  y  a  plus,  l'auteur  demande 
l'abolition  de  la  peine  de  mort.'.  Quelle  infamie  !  J'ai  bien 
envie  de  dénoncer  cet  Olusi  Lippephi  au  procureur  du  roi 
comme  trompant  le  public  sur  la  nature  de  la  marchandise 
vendue,  art,  lî'^  du  Code  pénal.  Qu'en  pensez-vous?  Mais  , 
patience!  en  dédommagement  on  nous  promet  pour  la  se- 
maine prochaine  le  premier  numéro  de  la  Gu'tUotine res- 
suscitée ,  une  bonne  aubaine  pour 

Le  viErx  FrANFeri  ' 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UMVLnSF.L. 


Les  camps  clablis  ii  Paris  cl  d.ins  les  environs  ont  ('le  ri 
sont  encore,  pourio  r.iri>ii'n>.  un  ojjjcl  lri>\  ildc  iiino.-ili'-: 
cela  secon(;olt;  ile|iiii>  ciiii|u.inlc-(|uatrc  ans  |iaii'il  >|>t'i- 
lacle,  sur  une  jurande  écliulle,  ne  .s'élail  offert  a  leurs  yeu\. 
Il  faut  donc  être  au  moins  sexagénaire  pour  se  souvenir 
ilavoir  vu  un  grand  nombre  d'hommes  abrités  par  ces 
maisons  de  toile  ,  maisons  très  perméables  en  temps  de 
|ilnie,    surtout  au  cou nicmcnt  de  rtmilrc  cl  avant  cpjc 

I  humidité  n'ait  resserre  les  li  lires  du  lissu  (In  kmiI  bien  (pic 
le  chaud  et  le  froiil  y  |iciiclrcnt  plus  racilciiienteni  circcpic 
la  pluie  ;  mais  la  chaleur  y  est  plus  supportable  ipie  la  gelée, 
et  sans  doute  nos  soldats  n'auront  pasapprissans  une  grande 
satisfaction  que  l'on  s'occupait  de  leur  préparer  des  habita- 
lions  moins  légères  et  susceptibles  d'être  chauti'ées. 

Le  camp  établi  à  la  plaine  des  Sablons  en  17'Ji,  pour  les 
élevés  de  1  École  de  Mars,  est  en  effet  le  dernier  qui  ait  pré- 
cédé les  camps  actuels.  L'intervalle  de  temps  est  assez 
long,  et  nous  nous  serions  fort  bien  passés  de  ceuK-ci .  puis- 
que nous  ne  lesdevonsqu'aux  funestes  journées  de  mai  etde 
juin;  ainsi  l'ont  voulu  les  insensés  de  la  veille  et  de  l'avant- 
\eille,  socialisiez  cl  cummiiiiislcs 

La  plaine  des  Sabliiiis  ne  ressemblait  guère  alors  il  ce  que 
iiiiusla  voyons  aiijoiinlhiii  :  le  village  de  Sablonville.  élevé 

II  y  a  vingl-cini|  ou  lii'iilc  ans  n'cvizlail  pas,  cl,  s.iul  les  ar- 
bresde  la  roule  ipii  hingc  le  lioisde  liiiulogiic.  on  n  aurait  pu  y 
apercevoir  un  bi  in  di'  vcgchilmn  Celte  routeétait  enfermée 
dans  le  camp,  qui  sciciidait  di'  la  porte  Maillot  à  Neuilly; 

en  sorte  que  les  piélmis,  coi les  voitures,  étaientforcés 

(II'  s'acheminer  par  la  vieille  route,  qui  commence  à  la  bar- 
rière du  Kouie. 

Le  camp,  environné  de  chevaux  de  frise  et  de  palissades 
peintes  aux  trois  couleurs,  renfermait  env.ron  trois  mille 
cinq  cents  élèves  ilc  -.l'i/.r  ;i  di\-sept  ans  ,  divisés  en  trois 
milleries  de  fusiliers  ci  ipu'iipics  centuries  de  piquiers , 
sans  compter  les  ca\;ilicrs  cl  Icsartilleurs  choisis  parmi  les 
élèves  que  l'on  avait  jugés  les  plus  propres  à  ces  armes  spé- 
ciales. 

Kn  quelques  semaines  ,  ces  jeunes  gens ,  arrivés  de  tous 
les  points  de  la  France,  manœuvraient  comme  de  vieux 
.soldats  ;  c'est  un  miracle  que  la  garde  mobile  vient  de 
renouveler  sous  nos  yeux.  Les  uns  et  les  autres  présentent 
d'autres  points  de  ressemblance  L'École  de  Mars,  appelée, 
disait-on,  pour  servir  d  appui  a  Robespierre  et  à  son  cruel 
système,  n'a  pas  peu  contribué  a  le  renverser  le  9  thermi- 
dor: comme  la  garde  mobile  s'est  portée  avec  une  coura- 
geuse .irdciir  a  enlever  les  barricades,  quoique  les  insurgés 
lie  juin  .iticiidis.scnt  d'elle  au  contraire  un  puissant  secours. 
H  lui  dcrlaïc  par  la  Convention  que  les  élèves  de  l'École 
de  Mars  a\aicnt  bien  mérité  de  la  patrie,  déclaration  qui 
vient  d  élrc  renouvelée  par  l'Assemblée  nationale  en  faveur 
de  la  garde  mobile. 

Que  l'on  jette  un  coup  d'œil  sur  le  costume  des  élèves  de 
l'Kcolede  Mars  que  nous  reproduisons  ici  et  dont  le  modèle 
avait  été  dessiné  par  llavifl  :  on  y  verra  la  même  tunique 
adoptée   maintenant  pour  l'armée  et  même  pour  la  garde 


lien  Caiiip*  <l«  Paris. 

n.ilionale  .\insi.  il  a  f,illu  cini|uante-quatre  a;ispourquun 
vclcmciil  (iimmiidcel  favorable  a  la  santédu  soldat  fut  géné- 
ralciuciil  admis,  clcncorc  en  a-l-on  laissé  de  coté  une  partie 
essentielle.  Au  lieu  des  épaulettes,  assi  inutiles  et  souvent 
gênantes  que  l'on  s'obstine  a  conserver,  une  peau  de  bul'lle 


Costume  des  él 


recouvrait  les  épaules  des  élevés  de  l'École  de  Mars,  ce  qui 
aidait  puissamment  à  supporter  le  poids  du  sac.  Faudra- 
t-il  cinquante  ansencore  pour  que  l'on  songe  à  procurer  ce 
soulagement  k  nos  troupes?  Sauf  la  forme  romaine,  le  sabre 


de  l'École  de  Mars  n  est  autre  chose  que  le  poignard  actuel 
de  l'infanterie  La  ceinture  des  élèves  servaitdecartouchiere 
et  cela  valait  bien  la  giberne  si  disgracieuscment  atUichée 
aujourd'hui  ii  iinceinturon  blanchi.  Il  est  vrai  que  dans  l'an- 
cienne Hépiililique  pas  |iliis  que  SfjusIEmpire,  pendant  nos 
grandes  guerres,  il  n'élaitvenudans  l'idée  de  personne  d'im- 
poser aux  offiiicrs  d'infanterie  une  sorte  de  demi-sabre  de 
cav;]|cric,  -.uziiciidu  de  la  manière  la  plus incomuKxie pour 
riioimncic  |,lcd 

Ilipuis  le  i\  février,  nous  avons  vu  plusd'une  parorlie  de 
l'ancienne  Itépubliquesans  pouvoir  y  rien  découvrir  i(uisoil 
a  l'avantage  du  temps  présent,  il  s'en  faut. —  Par  exemple  . 
lin  a  construit  a  grands  frais  une  salle  pour  recevoir  le» 
1)00  membres  de  lAssemblée  nationale;  et  ils  ne  peuvent  y 
tenir  qu'à  la  condition  qu'il  y  aura  toujours  une  centaine  de 
représenlanls  absents,  pour  le  moins  :  condition  a  laquelle 
un  plus  grand  nombre  se  soumet  volontiers,  si  nous  en  ju- 
geons par  les  scrutins  Cette  salle  d'ailleurs  a  un  autre  pe- 
tit défaut  pour  une  Assemblée  délibérante  :  c'est  qu'on  n'y 
entend  ni  les  orateurs  ni  même  le  président,  à  moins  qu'ils 
no  soient  doués  d'une  voix  de  Stentor  Eh  bien  :  dans  un 
mois  à  peine,  une  salle  avait  été  construite  dans  l'enceinte 
du  camp  des  Sablons,  les3, 300  élèvesyétaienl  assis  à  l'aise 
sur  des  gradins  à  demi  circulaires  ,  comme  â  l'ancienne 
Chambre  des  députés,  ayant  devant  eux,  derrière  la  tribune 
des  professeurs  une  statue  de  la  Liberté,  de  vingt  pieds  de 
haul  l.c.  pK.lr.srurs  y  étaient  distinctement  entendus  de 
toulc>  le-  pl;ii  .'■.,  iiièmeHassenfralz  malgré  son  bégaiement 
Tous  Ic-s  Irais  de  celte  salle  avaient  consisté  dans  l'élévation 
d'une  charpente  revêtue  en  dedans  et  en  dehors  de  forle 
toile  peinte  aux  trois  couleurs,  et  bourrée  de  foin  entre  les 
toiles;  le  jour  venait  d'en  haut  par  un  ample  vitrage,  que 
lc<  ilclinsmatériels  et  humains  de  lexplosion  delà  poudrière 
di' (liiiii'lle  vinrent  effondrer  un  jour,  au  moment  d'une 
Il  que  les  élevés  écoutaient  attentivement.  Est-ce  que 
nos  architectes  auraient  moins  de  génie  révolutionnaire  que 
les  architectes  de  la  Convention  ? 

Il  est  bien  à  craindre  qu'il  en  soit  ainsi  des  ordonnateurs 
de  nos  fêtes  publiques ,  comparés  à  ceux  de  la  première 
République.  Voici  un  dessin  de  cet  ancien  temps,  représen- 
tant une  fête  militaire,  exécutée  au  Champ-d(»-Mars  ,  le 
lîll  vcnilciiiiairean  III,  par  les  élèves  de  l'École  de  Mars,  en 
cclclir:iiinii  de  l'expulsion  des  ennemis  du  territoire fran- 
çai>  Clic  montagne  ayant  au  sommet  un  arbre  touffu  delà 
Liberté,  telle  qu'on  la  voit  figurée  ici ,  occupait  le  centre  du 
Champ-de-Mars  ;  la  Convention  et  les  autorités  constituées 
étaient  groupées  de  la  manière  la  plus  pittoresque  dans  les 
anfractuositesde  cette  montagne,  qu'avoisinail  une  colonne 
aussi  haute  que  celle  de  la  place  Vendôme  ,  et  ayant  surson 
chapiteau  une  statue  de  la  Liberté  ,  environnée  de  vingt 
tionipettes  donnant  le  signal  des  évolutions  militaires,  l'n 
fort,  élevéà  la  placeoù  débouche  maintenant  lepontd'Iéna. 
élait  occupé  et  défendu  par  une  partie  des  élèves ,  pendant 
qu'il  était  attaqué  par  l'autre  partie  de  l'École,  commandée, 
comme  le  fort,  par  desélèvesdontc'était  le  tourdecomman- 


ilciiienl  Dans  celte  petite  guerre,  Merlin  de  Thioinillc  cl  le 
tcprésciiiaiil  Milliaud  ,  qui  a  acquis  depuis  une  grande  ré- 
piilaiioii  cniimic  général  de  cavalerie,  s  étaient  mis,  aides- 
de-ciimp  vchinliiires,  sous  les  ordres  des  commandants 
de  l'attaimeetde  la  défense,  aux  acclamaliuiis jn\cii-cs  de 
Idus  les  élèves.  On  sent  bien  ipie  le  fori  ilul  s.mln  piuii 
icrminer  l'action  ,  et  on  peut  en  voir  l'explo^nui  sui  l.i  i;i;i- 
Mire;  mais  ce  ne  fut  pas  sans  qiiel(|ucs  llles^urcs  remues 
dans  l'ardiMir  du  conibiil 

Celle  simple  dcsci-iplion  doit  suffiie  pour  faire  juger. 
com])aralivciiicnt.de  l;i  iKiuvrele  des  l'êtes  données  sous  nos 
\  eux  d;iiis  CCS  derniers  mois    Pour  ne  parler  que  d'un  seul 


(loint  .  (]u'est-ce  que  riiiliirme  slatue  de  la  Itepublupie  oc- 
cupant grotesquement  le  milieu  du  Cliamp-de-Mars.  au  lieu 
de  la  monlagne  et  do  la  colonne  cicvccs  il  la  mt^me  place 
en  17!lt?  Dans  la  nremierc  Ucpulilii]uc  lout  était  grandiose 
piircc  ipi'on  avait  la  foi,  celle  loi  ipii;i  soulevé  le  monde  avant 
que  le  Ccsiir  des  temps  modernes  im  n  soit  venu  régulariser 
les  clans  Sansduule  l.i  lièvre  re\olulionn,iire  a  f;iit  com- 
mettre alors  des  excès  déplorables  cpie  la  présence  des  en-_ 
nomis  sur  le  territoire  no  juslilio  pas  ,  mais  qu'elle  peut" 
cxpli(]uer.  Certes,  c  clail  uii  affreux  conlrasle  que  ce  qui  se 
passait  à  la  place  de  l;i  UcMilulion  et  à  la  barrière  du 'l'rônc 
peiidani  ipic  l'on  cli.inlait  dans  les  fêles  publiques  : 


Peuples  qui  Rémisiici  sous  des  jougs  lyraiiniqiics , 
Vi'iici  voir  les  Kraiiçai'i  il  leurs  fêles  ciiiqucs: 
Onmparci  Sx  vos  fers  cc<  Riiirloiidcs  légères, 
Que  porte  en  s'eiubrassaiil  tout  un  peuple  de  fièrfs! 

Hais  n'v  a-t-il  pas  «piclque  compensation  dans  l'expulsion 
si  pronipio  des  eiuunii- du  >ol  de  la  patrie  par  les  qua- 
kirze  armées  levées  il  un  sii;iic  et  composées,  pour  la  plus 
grande  partie  ,  de  \olonlaiies  sachant  il  peine  charger  un 
iusil  V  l  est  qu'alors ,  il  faul  le  répéter,  on  avait  la  FOI 
celte  foi  oui  transporte  les  montasnes.  comme  dit  Bossuel 
'V.  L. 
Anciiii  èlè\c  ilo  l'iVolc  de  Mars. 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


61 


*'!Jf 


Études  de  mœurs,    par  Valentin. 


■l    ^i,!,,S|l;i,,Çi|f]|i|,|ii^.»=._.=_. 


'jyfiuif'iiy 


Le  premier  coup  de  fourchette. 


Le  dernier  coup  de  fourchette. 


l 


II 


\r  ■ 


i^%ffuJK  ;( 


La  première  coatredaiise. 


Li  dernière  contredzinse. 


G-i 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


lies  Voyageurs  noMveBMX. 

BEISE    OUBCH    miSSl.AND    NACH    DEM    KAUKASISCUEN    ISIHMUS. 

foya/je  à  travers  lu  /iiissiV  à  t'Islhme  du  Caucase,  fait  en  1836, 
1837,  1838,  par  M.  Cii.  Koch,  professeur  d'Iiisloire  nalurille  à 
rUiiivcrsitù  (l'K'iia  ()). 

Il  est  des  rontrte  dont  les  tendances  de  plus  en  plus  positives 
de  l'esprit  liumain  n'ont  pu  altérer  encore  le  prestige  poùticpie. 
Pendant  une  longue  série  de  siècles  les  voyageurs  les  ont  explo- 
rées, les  géographes  les  ont  décrites,  les  historiens  en  ont  reiracé 
les  annales,  les  savants  en  ont  observé  les  phénomènes.  On  ne 
peut  plus  les  ranger  dans  la  catégorie  de  ces  pays  qui  e\cilenl  la 
curiosité  par  leur  éloignement  et  occupent  l'imagination  par  le 
voile  doni  ils  sont  enveloppés.  Mais,  malgré  ;ies  nombreux  récits 
(jui  nous  en  ont  parfois  assez  sèchement  révélé  l'état  physique  et 
social,  ces  conirécs  privilégiées,  nous  apparaissent  au  milieu  de 
notre  prosaïsme  dans  une  sorte  de  pénombre,  enlourées  d'un 
charme  singulier.  Telle  est  celte  terre  du  Caucase,  islhme  ver- 
doyant étrcini  par  trois  mers,  barrière  de  montagnes  entre  l'Eu- 
rope et  l'Asie,  roc  de  Prométhée,  plage  fabuleuse  de  l'Odyssée, 
empire  du  sommeil,  région  grandiose,  région  superbe,  habilée 
par  une  race  héroïque  désignée  très  nettement  dans  les  périples 
de  l'antiquilé,  traversée  par  G.  de  Ruliruquis  cl  plusieurs  autres 
voyageurs  du  moyen  .Ige,  étudiée  par  Pallas,  Polocki,  Clarke, 
Klaproth,  Parrol,  Marigny,  Hammer,  dépeinle  minuliensemcnl 
par  M.  Dubois  de  Montpcrreux,  illustrée  par  un  des  chefs-d'œu- 
vre de  X.  de  Maistre,  par  un  poëme  de  Pucbkin,  et  un  spiriluel 
roman  du  jeune  et  malheureux  Lermonlof. 

C'est  celle  contrée  qu'un  savant  allemand  a  de  nouveau  entre- 
pris de  décrire.  Pour  ceux  même  qui  ont  déjà  lu  les  livres  des 
énivains  que  nous  venons  de  citer,  celui  de  M.  Koch  ne  sera  point 
une  lecture  superllue.  Tout  en  se  servant  des  travaux  île  ses  de- 
vanciers, le  professeur  d'Iéna  les  a  rertiliés  sur  plusieurs  points, 
et  ses  éludes  joinles  à  ses  propres  observations  l'ont  mis  en  état 
de  tracer  un  tableau  lucide  et  complet,  quoique  resserré,  de  la 
Circassie,  du  caraclère  et  des  mœurs  de  ses  habitants.  De  plus, 
il  y  a  dans  sa  relalion  des  pages  inléressantes  sur  ces  tribus  de 
cosaques  que  le  vent  des  révolutions  jeta  un  jour  comme  une 
nuée  d'oiseaux  sauvages  sur  les  bords  de  la  Seine.  C'est  par  lu 
que  nous  commencerons  noire  analyse. 

A  l'époque  où  l'empire  de  Gengis-Kan  se  dissolvait,  où  la  puis- 
sance de  Timurs  n'avait  qu'une  courte  durée,  ou  les  Kans  de 
Crimée  ne  pouvaient  foiuler  un  étal  paisible,  où  les  princes  de 
Russie,  divisé»  entre  eux  et  opprimés  par  les  Mongols,  conser- 
vaient à  peine  quelque  pouvoir,  où  l'on  ne  savait  plus  qui  élait 
maître  et  qui  était  esclave,  aux  quatorzième,  quinzième,  seizième 
siècles  on  vil  apparaître  des  troupes  de  hardis  aventuriers  qui 
des  sieppes  situées  entre  le  Don  et  le  Volga  s'avançaient  le  long 
des  cûles  de  la  mer  d'Azof  et  sur  les  bords  du  Dnieper,  envahis- 
saient les  villes  et  s'en  retournaient  dans  leur  pnlrie  chargées  de 
butin.  Les  Génois,  les  Vénitiens,  qui  possédaient  alors  des  éla- 
blissemcnls  de  commerce  sur  les  rives  de  la  mer  d'Azof  et  de  la 
nier  Noire,  cxcilaient  surtout  la  convoitise  de  ces  bondes  do  pil- 
lards. C'étaient  les  bandes  de  Cosaques.  On  a  lieu  de  croircqu'elles 
provenaient  de  la  race  tclierkcsse  (cricassicnne).  La  première  for- 
teresse qu'elles  élevèrent  porta  le  nom  de  Tcherkask,  et  de  nos 
jours  encore  les  ïcherkesses  sont  désignés  par  plusieurs  de  leurs 
voisins  sous  le  n(.ni  de  Cosaquef.  Il  faut  remarquer  en  oulre  que, 
comme  les  C.sIqMi  •.|H(ifrssaieiil  le  rlirisliaiiisme,  ils  ne  pouvaient 
être  que  llu^-cs  nu  1 .  lui  Kism  ^  cl  iinri  puml  Mongols.  Enfin,  il 
élait  dans  les  iiabiludis  des  Tthui  kesses  de  se  livrer  au  vol  et  à 
la  piraterie,  et  l'on  comprend  aisénicnl  que  quelques-uns  d'entre 
eux,  séduits  par  l'appùl  des  caravanes  qui  passaient  près  de  leurs 
domaines,  aient  pris  les  armes  pour  les  piller. 

Quoi  qu'il  eu  soit  de  leur  origine,  les  bordes  de  Cosaques  s'é- 
tabliient  dans  les  steppes  du  Don,  sans  femmes,  sans  eufanis,  et 
y  formèruil  nue  snrie  de  république.  Avec  leurs  agiles  chevaux, 
ils  s'élanrainii  ilr  l,i  laiiiili  niriii  .'i  la  u.  liiiche  de  leur  proie,  et, 

en  ras  de  |i"mi- ,  iK  iimn il  .1  ms  Uiir-  plaines  sauvages  un 

refuge  a-Min-,  la  ^  pniH.  s  ihvm  s  si  ll'iii.  rentd'entreti  uir  de  pa- 
cifiques rel.ilioiis  a\ic  les  ln;u|n.s  t;iurrières,  et  ce  fiéau  mena- 
çant se  porla  sur  lis  lerres  des  princes  Nogais,  des  kans  de  Ci i- 
niée,  des  domaines  d'Azof, 

bous  le  règne  de  Jean  IV,  suinoininé  le  terrible,  l'helmau  Sé- 
riasman  donna  b  .ses  tribus  une  nouvelle  oiganisalion  il  fonda  la 
ville  de  Tcherkask.  Kn  1522,  il  reconnut  la  suprématie  de  la 
Russie,  planla  des  croix  sur  ses  frontières,  déclara  la  guerre  nus 
peuplades  musulmanes,  et  força  la  contrée  d'Azof  à  lui  payer  un 
tribul. 

Ainsi  vivaient  dans  leur  superbe  indépendance  ces  Bédouins  des 
slcppesiniirllrs,  apprryés  sur  Iniis  aviiH  s,  passioririrs  pniir  ii  m  s 
chevaux,  laill.ilé|ii,iMl  .a  ri  la,  ili m,  ,r  il. s    ussaillrs,  Il  raïa- 


lilial 


breuses.  Les  plus  liiavrs  ilVi.li  r  i  um  ■ainil  appi-lrs  au  laiigdr 
chefs,  et  envoies  décelé  el  il'aiilre  par  l'helmau  pour  prendre 
des  lenseignemeirls- el  rapporter  à  liuis  frères  un  projet  d'ex- 
pédllion. 

Bientôt  la  colonie  se  divisa.  L'amoirr  du  pillage  en  entraîna 
une  parlie  sur  les  bords  du  Dnieper  et  du  Volga.  Les  Cosaques 
se  livrèrent  là  à  des  aeles  de  brigandage  que  les  eiforls  des  princes 
russes  ne  piiienl  léprirniT.  Deux  habiles  marchands,  qui  avaieirt 
plus  d'une  fuis  soiiIVrit  lie  ces  depi c  il  iliuiis,  eurent  le  bonheur  de 
l.iiii'  luiiiiii  r.i  liinpiiilii  l'isiuil  ail  iiliiii  iixdeceslégionsrapaces. 
I)i  ii\  lueuiliiis  de  la  riilie  famille  îles  SliogonolT,  Jacob  et  Gré- 
goire, animés  de  celle  audacieuse  ardeur  qui  cnllaniinail  Pizarre 
eu  Amérique,  résolurent  de  tenter  l'invasion  d'une  vaste  contrée 
sur  laquelle  ils  n'avaienl  que  de  vogues  noiions,  la  Sibérie.  Us  ur- 
rniriril  eiiviriiu  .10(1  AlIrrri.iiiiK  il  l.illiuaiiiins,  déteiminèrent 
riirliuau  ilii  Viilna,  Jiriiiak   I  iimisi  i.  Il  ,i  sr  juiuilie  à  eux,  etavec 

iillr  iriiuiir    va-ali Ii l    a  II  diiiniiialiiirr  russe  toule 

une  rOgioir  dont  les  llusses  saiaieiil  a  pLine  le  uoiu. 

Après  l'anéautissenienl  de  la  puissance  mongole,  après  la  con- 
quête de  Kusan  el  d'AsIrucan,  les  grands-ducs  de  Russie  firent  de 
nouveaux  elfiirl»  pour  asservir  les  Cosaques.  La  lulle  dura  long- 
temps sairs  l'ésultal  définitif.  Enfin,  sous  le  lègue  d'Alexis  Micliae- 
lowilsch,  l'helmau  Steriko  Rasiu  ayanl  été  fait  prisoirnier  i  la  léle 


(I)  1  i'..l. 


,  SlliUBiill,  18«. 


de  200,000  hommes,  les  Cosaques  se  soumirent.  Alexis,  par  une 
prudente  politique,  leur  laissa  une  parlie  de  leurs  anciens  privi- 
lèges et  leur  organisalion  militaire;  mais  le  souvenir  de  leur  an- 
cienne indépendance  fermeulail  encore  dans  leur  esprit.  Ou  sait 
l'histoire  de  Mazeppa  et  celle  de  l'inliépide  Cosaque  Pugalschelf 
qui  souleva  la  moitié  de  l'empire  russe  el  effraya  Cathe- 
rine IL 

Les  guerres  de  la  Révolution  française  firent  connaître  les  Cosa- 
ques il  l'Europe,  el  resserrèrent  les  liens  qui  les  unissaient  ii  la 
Russie.  Dès  celle  époque,  ils  se  sont  considérés  comme  les  défen- 
seurs de  l'empire  russe,  et  ils  professent  à  présent  pour  leur  em- 
pereur un  dévouement  qui  ressemble  à  une  sorte  d'idolâtrie.  La 
parole  impériale  est  leur  parole  suprême.  Ils  la  suivent  avcuglé- 
nieul  I.'hérilier  du  Irûne  porte  le  titre  d'helmon  des  tribus  cosa- 
qiiis.'ii  il  luiiiiiiirlui  iiiénie  l'iilliiiir  i;iii  le  siippléi-  dans  ces  fouc- 
limis.  Cpiu  laiil  ils  s,.  ra|i|irlleiil,  ils  perpélueul  par  la  tradition 
l'Iiisloire  des  aiieieiis  jours  el  des  linuls  fails  de  leiiis  aïeux.  Ils 
ont  des  héros  populaires  dont  ils  chantent  les  expluiis  comme  au- 
trefois les  Grecs  chanlaient  ceux  de  la  guerre  de  Troie. 

La  terre  occupée  par  celle  race  singulière  est  peu  cullivée. 
Elle  pourrait  alinieuler  une  population  cinq  à  six  fois  plus  consi- 
dérable. Le  Cosaque,  avec  sa  nalure  guerrière,  n'aime  point  le 
travail  des  champs.  Il  ne  s'y  livre  qu'autant  qu'il  y  est  contrairil 
par  la  nécessité.  Au  lieu  de  labourer  les  steppes  et  d'y  faire  des 
irrigations,  il  s'abandonne  au  plaisir  d'errer  à  cheval  de  côlé  et 
d'autre,  el  à  celui  de  s'assoupir  mollement  au  pied  d'un  arbre. 
Naguère,  par  suite  de  cet  éloignement  pour  le  travail,  la  con- 
trée élait  souvent  désolée  par  la  famine.  Pour  prévenir  un  tel 
fléau,  le  gouvernemeril  russe  a  établi  de  grands  magasins  où  cha- 
que Cosaque  est  leiiu  de  déposer  une  partie  de  sa  récolle.  Grâce 
à  celte  précaulion,  le  pays  peut  mointenont  supporter  une  ou 
deux  années  de  mauvaise  moisson,  et  pourtant  ses  babilanls  ont 
eu  bien  de  la  peine  ù  adopter  celle  sage  mesure. 

Parmi  les  Cosaques,  on  trouve  les  Kalmouks  qui,  l'été,  parcou- 
rent les  sieppes  avec  leurs  troupeaux  de  bœufs,  de  chameaux,  s'en 
vont  de  pâturage  en  pûlurage,  puis  se  retirent  en  hiver  dons  lu 
province  du  Caucase. 

Les  Cosaques  n'ont  qu'un  très  petit  nombre  de  beiliaus.  Toute 
leur  olfeclion  se  concentre  sur  leurs  chevaux.  Us  en  prennent  plus 
de  soin  que  de  leurs  femmes  el  de  leurs  enfouis. 

Lo  même  incurie  qu'ils  opporlcnt  dons  le  travail  agricole  se 
mauifcslc  parmi  eux  dans  l'emploi  des  rivières  navigables  qui  sil- 
lonnent leur  conliée.  Ce  n'est  qu'à  regret  qu'ils  se  déterminent  à 
s'embarquer  sur  le  Don  ou  sur  quelque  autre  rivière  pour  s'en 
aller  échanger  une  partie  de  leur  récolle  ou  une  cargaison  de  pcoux 
conire  des  étoffes  el  de  l'eau-devie.  Ils  se  construisent  alors  un 
grossier  coirol  à  voiles  non  ponté,  qui  peut  porter  douze  ù  quinze 
hommes.  An  moindre  venl,  celle  embarcation  vacille  comme  si 
elle  était  près  de  chavirer.  Le  Cosoque  y  entre  pourlont  sans 
crainle.  Comme  les  Turcs,  il  a  un  sentiment  de  fatalité  qui  le 
porte  à  braver  froidement  le  péril.  Cependonl,  comme  il  est  chré- 
lien,  il  n'oublie  pos  d'invoquer  saint  Nicolas,  'e  patron  de  la  con- 
trée. «J'ai  lu,  »  dit  M.  Kock,  «  dans  la  silualion  lo  plus  ciiliqiie, 
des  Cosaques  assis  tronquilemenl  sur  leur  mauvais  canot,  el  fu- 
monl  leur  pipe  avec  une  parfaite  quiélude.  « 

Tous  les  six  ans,  le  Cosaque  quiltc  sa  demeure  pour  s'en  aller, 
perrdont  le  nième  nombre  d'années,  garder  les  frontières  les  pins 
éloignées  de  l'empire  russe.  Ceux  qui  restent  cultivent  le  sol,  pren- 
nent soin  du  béloil  el  s'arrangent  de  telle  sorte,  que  ces  occupa- 
lions  lui  loissent  de  longs  loisirs  pendant  l'hiver  et  l'élé  jusqu'il 
l'époque  de  la  récolte;  ils  vivent  la  plupart  du  temps  dans  une 
molle  indolence,  possent  de  longues  heures,  ossis  sur  une  peau  de 
mouton,  à  firiuer  en  silence  leur  pipe.  S'ils  s'arrachent  à  celle  al- 
litude  inerte,  c'est  pour  prendre  leurs  armes,  les  nettoyer,  les  polir 
jusqu'à  ce  qu'il  n'y  resie  pas  la  plus  légère  loche.  Pendant  les 
jours  de  frnid,  ils  se  lienncnl  au  sein  de  leurs  familles,  prés  du 
foyer  ardent,  et  reslenl  ainsi  séparés  du  monde  err lier. 

Le  prinlenips  réveille  leur  octivilé  et  leur  donne  une  nouvelle 
vie  Les  jeûnes  rigoureux  qui  précèdent  Pâques  attrislent  forlpour 
eux  la  fin  de  l'hiver  et  leur  fout  plus  vivcmcnl  désirer  le  relo:;r  de 
la  belle  saison.  A  Pâques,  tous  les  habitants  de  la  Slanitzn  se  réu- 
nisseul  en  plein  air.  Le  cri  religieux  :  f'hristos  voskrcss  (le  Christ 
est  ressuscité),  qui  reteiitil  dans  toute  la  Russie,  est,  pour  les  (Co- 
saques du  Don,  le  signe  d'une  joie  universelle.  Après  celte  fêle 
solennelle,  chaque  dinianclie  les  gens  du  village  vont  s'asseoir  fio- 
lerriellement  sur  l'herbe  verte.  Les  vieux  Cosaques,  rangés  en 
cciTle,  raconlenl  tour  à  lour  leurs  aventures.  Celui-ci  se  vaille  des 
eoiiibals  qu'il  a  souleiius  contre  les  Circassiens,  cet  autre  ra]'pelle 
le  leiups  où  leur  gloiii  nx  empereur  les  conduisait  dans  la  capi- 
tale de  la  Fiance.  Un  lioisième  narre  les  hauts  fails  do  leur  dur 
lielmou  Plalolf.  Un  qualrièuie  célèbi'e  l'époque  où  leurs  aïeux  ne 
rcconnaissaienl  aucun  ni;iîlre  dans  la  vaste  étendue  des  sieppes. 
Le  jeune  homme  qui  n'a  poinl  encore  quille  le  loit  palernel 
écnuie  avec  avidité  ces  récils  naïfs  el  enllronsiastes.  Mais  bientût  il 
aura  aussi  lin  devoir  mililoire  à  remplir;  bientôl  il  faudra  qu'il 
ahaiiiluniie  pour  six  longues  années  amis,  fières,  pareiils  el  lo 
iriiiir  lilli'  qu'il  vieni  d'épouser.  Sa  femme  lui  apporle  en  pleir- 
tani.  niai^  suis  muriimnT,  ses  armes  brillanles  et  nu  soehet  rem- 
pli ili  II  m  |iii,r  aiipu's  ilii  foyer  nalal.  Sa  mèr'e,  qui  a  souvent 
siilu  la  (Inulriir  d'un  tel  moment,  rassemble  ses  bardes  et  y  joint 
quelques  proiisious  deehoix.  Et  le  Cosaque  part  pour  la  Finlande 
on  les  rives  du  Danube,  el  sur  les  plages  loinl;iines,.  (luand  uir 
Irisle  regret  s'empare  de  son  coeur,  il  songe  aux  larges  plaines  ar- 
rosées par  le  Don,  il  regarde  la  croix  suspendue  à  son  cou  près  du 
sachet  où  est  enfermée  une  parcelle  de  la  terre  natale.  Celle  lei  re 
esl  pour  lui  sacrée.  S'il  tombe  malade  ou  s'il  est  frappéd'une  balle, 
il  tire  le  talisman  de  son  sein,  le  porte  à  ses  lèvres,  et  meurt  en 
adressant  une  dernière  pensée  à  sa  pairie. 

La  femme  que  le  Cosaque  a  laissée  dans  sa  demeure  vil  comme 
une  veuve,  à  l'écart  des  fêles  du  villoge,  uniquement  occrrpée  du 
soin  d'élever  ses  enfants  et  de  cultiver  son  patrimoine.  Après  sa 
longue  absence,  son  mari  revient,  le  fioni  hiïlé  par  le  soleil,  le  vi- 
sage ridé  par  les  fatigues;  mois  il  o  devant  lui  une  pérspecliie  de 
six  années  de  lraui|iiillilê  diiiiu  slique,  et  ses  enfouis,  qui  oui  elia- 
ijur  ji.ui  eiilen.lu  pai  In  il,  lui, ,  luiivut  à  sa  reiiroulie  el  le  soluent 
de  leurs  ,i  is  ile  juiu.  M.iis  mmiiiui  il  orriie  qu'un  de  ces  pauvres 
gordiens  de  l'empile  russe  que  l'on  a  cru  niorl,  Iruuve  en  renlronl 
dans  sou  pays  sa  femme  reinuiiée  el  sa  maison  occupée  par  un 
étranger. 

Dès  sa  première  enfance,  le  Cosaque  se  prépare  par  ses  exer- 
cices à  la  vie  militaire.  On  lui  remet  eiire  les  mains  une  lance, 
ou  lui  apprend  à  gouverner  un  cheval.  A  peine  peut-il  manier 
un  fusil,  que  déjà  il  aceompogne  son  père  à  la  chasse.  Tous  ses 
jeux  sont  des  siurulocres  de  guerre.  Dans  sa  viellesse,  c'e-t  lu 


guerreencore  qui  occupe  la  plus  grande  place  dans  ses  souvenirs, 
qui  enflamme  sa  pensée.  A  sa  mort,  il  demonde  qu'on  dépose  der- 
rière la  croix  de  sou  tombeau  so  lance,  son  fosil,  son  fouel. 

Les  femmes  vivent  là  dans  un  passif  élal  de  subordination. 
L'homme  esl,  à  la  letlre,  mailre  absolu  dons  sa  maison.  Les  filles 
s'assrieienl  aux  travaux  domestiques  de  leur  mère  cl  ne  se  mèlenl 
oux  jeunes  gens  qu'au  mois  de  moi  el  de  juin,  au  temps  des  fêlc'S 
de  la  PenleciJle.  Elles  se  rassemblent  alors  sur  la  pelousi-,  el  l'une 
d'elles  reçoit  solennellement  la  couronne  de  la  beauté.  On  lui 
donne  le  lilre  de  reine  [zaritzn).  Chacun  vient  lui  rendre  ho  ii- 
moge,  et  elle  choisit  un  roi  qui,  jusqu'à  l'année  suivante,  conserve 
dans  le  village  une  grande  iniluence.  Après  celle  double  proclama- 
tion, la  jeune  reine  s'asseoit  sur  un  siège  élevé,  tenant  à  la  main 
une  cruche  pleine  d'hydromel  qu'elle  offre  généreusebient  à  ses 
sujets.  Puis  on  se  range  autour  d'elle  el  l'on  chante  des  chants  po- 
pulaires. En  voici  un  qui  peut  donner  l'idée  des  naïves  coraposi- 
lioiis  de  la  race  cosaque. 

Oh  I  mon  poirier,  mon  poirier  vert  (1  ).  Sous  le  poirier  repose  une 
jeune  fille,  el  elle  s'écrie  :  Hélas  !  dans  quel  temps  sommesnousV 
Les  braves  guerriers  alDigenl  les  femmes  Les  amis  éloignés  tour- 
meulent  le  cœur  des  jeunes  filles.  Chaque  fille  s'est  choisi  un  ami. 
—  Un  ami  qui  est  loin,  quelle  anxiété  !  Un  ami  qui  est  près,  c'est 
une  joie  perpéinelle  Elle  conjure  son  ami  de  relarder  son  départ 
d'une  heure,  de  lui  donner  encore  un  jour,  un  semaine.  Elle  veut 
le  forcer  à  l'aimer.  Le  Cosaque  répond  :  On  ne  me  force  poinl  à 
aimer.  On  n'obtient  point  mes  baisers  par  la  contrainte. 

A  celle  même  époque  de  l'année,  les  babilanls  des  slanilzas  si- 
tuées sur  les  rives  du  Don  célèbrent  aussi  la  beaulé,  les  bienfaits  de 
ce  fleuve  qui  ne  leur  inspire  guère  moins  de  vénération  que  le  Nil 
aux  figypliens.  Ils  l'appellenl  le  doux,  le  pacifique,  ils  le  cbantcnl 
dairs  une  quoulilé  de  chansons  gaies  ou  mélancoliques,  lis  lui  ap- 
pliquenl  l'usage  des  Russes  qui  joignent  ou  nom  de  famille  de 
chaque  individu  le  prénom  de  son  père,  el  comme  ce  fleuve  sort 
du  lac  Jean,  dans  le  gouvernement  de  Tula,  ils  le  nomme  Don 
Iwaiiowilich  (Don  fils  de  Jean). 

Par  un  beau  jour  de  mai  ou  dejuin,  le  fleuve  esl  couvert  de  bar- 
ques, et  des  chairls  joyeux  retentissent  sur  ses  deux  bords.  Si  une 
ilc  s'élève  au  milieu  de  ses  flots,  c'est  là  le  poinl  de  réunion,  c'est 
là  que  l'on  prépare  le  banquet.  Enire  celle  île  el  la  slanilza,  il  y 
a  un  mouvement  perpétuel  de  canots  qui  vont  el  viennent,  lanlôl 
appertant  de  nouveaux  promeneurs,  lonlùl  des  provisions  :  cru- 
ches de  kvas  (2)  el  d'eau-de-vie,  pâtés  de  pois-on,  gibier. 

L'un  des  plus  grands  plaisirs  du  Cosaque,  pendant  Ii-s  années 
de  reposqu'il  passe  dans  son  pays,  esl  la  chasse.  Autrefois  l'helman, 
porrr  occuper  l'aclivilé  de  sa  tribu  et  exercer  son  adresse,  organi- 
sait lui-même  de  grandes  chasses.  Des  milliers  d'hommes  enlaçaient 
dans  un  cercle  un  vosle  espace  de  terrain  et  se  resserraient  peu  à 
peu  jusqu'à  ce  qu'ils  formossent  une  baie  épaisse  au  milieu  de  la- 
quelle on  fiiisoil  un  effroyable  carnoge  de  bêles  fauves  Placé  sur 
une  houtenr,  l'helman  observoit  toutes  les  évointions  de  sa  !roupi>, 
encourageait  l'ardeur  des  uns,  ctiliquail  la  lenteur  des  autres,  el 
applaudissait  aux  mouvements  des  plus  agiles.  Maintenant  CCS  sortes 
de  parades  guerrières  ont  cessé.  Le  Cosnque  s'en  va  seuleniei.l 
avec  quelques  conipoguons  à  travers  les  forêts,  poursuivant  comme 
un  tjuanclio  la  gazelle. ou  le  cheval  sauvage  avec  son  loccl,  el  bra- 
vant avec  son  fusil  la  force  de  l'ours,  la  rage  du  loup. 

La  première  forteresse  foniiée  dans  les  steppes  par  les  Cosaques 
fut,  cuinme  nous  l'avoos  dit,  celle  de  Tscberkask.  Autour  decette 
forteresse,  il  se  forma  peu  à  peu  une  ville  qui,  à  la  fin  du  sit-cle 
dernier,  renfermait  plus  de  dix  mille  babilanls.  Mois  elle  était 
dans  une  silualion  malsaine  et  exposée  aux  inondations.  Pour  la 
remplacer,  on  bàlit  à  quelque  distance,  sur  une  hauteur,  une  au- 
tre cilé  qui  por-te  le  nom  de  Novvo-Tscherkask  (nouvel  eTscher- 
kosk),  Legouvernemenl  russe  a  lui-même  dirigé  cette  conslructiun 
et  lui  a  donné  la  régularité  des  villes  modernes  de  l'Europe.  Les 
rues  sont  ti'ées  au  cordeau,  les  édifices  publics  sont  larges  et  éle- 
vés .  et  les  maisons,  bâties  pour  la  plupart  en  bois,  ne  manquent 
pas  d'une  certaine  élégance  exiérieure.  Il  y  a  déjà  là  quelques  in- 
slitulions  de  civilisation  :  une  école  élémentaire,  un  gymnase,  un 
bazar. 

De  l'autre  côté  du  Don  s'étend  une  vaste  steppe  tri-le,  inanimée, 
où  l'on  ne  trouve  qu'à  de  longues  dislances  quelque  pauvre  sla- 
nilza servant  de  relais  de  poste.  Au  delà  de  celle  immense  plaine 
silencieuse  esl  Slauropol,  capitale  de  la  province  ciscoucasienne, 
terre  <le  sable  brûlée  par  le  soleil,  égayée  seuleracnl  çà  cl  là,  comme 
les  déserts  de  l'Arabie,  par  quelques  vertes  oasis.  Elle  occupe  un 
espace,  de  1,630  milles  carrés,  dont  770  milles  sieppes  incultes, 
125  rivières  cl  niorois,  el  530  sol  cultivable.  On  n'y  compte  que 
186,000  babilanls,  la  p'uparl  colons  et  soldais  russes,  les  autres 
Arméniens,  Druses,  Ossetes,  el  les  Nogais,  el  les  Kalinouques  no- 
mades. 

Les  plus  anciens  babilanls  de  celle  contrée  sont  les  .Nogais,  mé- 
lange de  race  turque  el  de  race  mongole.  Leur  nom  leur  vienl  du 
vaillant  Nogai  qui,  vers  la  fin  du  treizième  siècle,  vint  s'élabli'-au 
nord  et  à  l'est  de  la  mer  d'Azof  el,  dans  une  de  ses  expéditions 
guerrières,  s'avança  jusqu'au  sein  de  la  Hongrie. 

Après  lo  conquête  d'AsIracan  (1557),  une  parl'c  des  Nogais  se 
rallia  on  se  soumit  à  lo  puissance  russe.  Les  autres  gardèrent  leur 
iudépeniiance  el  ne  furent  assujettis  qu'en  1695,  lorsque  Pierrc- 
le-Gr-aud  s'empara  d'.4zof. 

Il  existe  à  présent  dans  In  région  ciscaucasienne  environ  76,000 
Nogais  nomades.  A  leur  front  étroit,  à  leurs  lèvres  épaisses  el  à 
leurs  pommelles  saillantes,  il  est  aisé  de  recoiinaitre  encore  le  type 
mongol,  moins  caractérisé  cependant  que  celui  des  Kalmouks. 
D'une  nolure  indolente  el  ennemie  du  travail ,  ils  passent  leur* 
journées  dans  une  molle  oisiveté  près  de  leurs  troupeaux  el  aban- 
donnent à  leurs  femmes  lous  les  soins  du  ménage.  Le  gonvcrne- 
nieiil  russe  a  essové  de  les  délonrner  des  habilndes  de  leur  vie  no- 
made, il  a  fail  en  certains  endroits  construire  des  villages.  Mais 
dès  que  l'été  revienl,  l'inslinct  vagabond  l'eraporle  clie»  eux  sur 
loule  idée  de  labeur  agricole,  cl  ils  s'en  vont  de  pâturage  en  pâ- 
turage ovec  leurs  Iroupeaux.  L'hiver,  ils  reslenl  dans  leurs  chélives 
cabanes,  ai'cronpis  aulour  de  leur  foyer,  souiTrant  du  froid,  sou- 
vent de  la  faim.  Apixis  celle  rude  saison,  il  u'en  est  pas  un  qui  ne 
soit  pâle  el  alfaibli. 

La  prinripole  tribu  nomade  qui,  avec  les  Nogais,  occupe  celle 
même  rêginu  est  celle  des  Kalmouks,  que  a  Russie  n'est  par- 
venue à  assujettir  qu'A  la  fin  du  sîiTle  dernier.  De  même  que 
les  Nogais,  ils  n'onl  pu  renoncer  à  leurs  habitudes  nomades.  Mais 


(il  t:>l«'cili'  li!érelri»lilible. 


^  le  stmlMleilelii  iIouK-ur. 


L'ILLUSTRATION,    JOURNAL    UNIVERSEL. 


63 


ils  se  distinguent,  au  milieu  des  autres  peuplades  d'origine  mon- 
gole ,  par  la  vivacité  et  la  gaité  de  leur  caractère.  Souvent  ils  se 
réunissent  dans  des  fêtes  et  accueillenlavec  empressement  rélr.in- 
ger.  On  connaitia  laideur  de  leur  type  national,  cependant  il  n>st 
pas  rare  de  trouver  parmi  eux  des  femmes  à  la  figure  gracieuse 
qui  nattent  leurs  cheveux  a\cc  une  cot|uettcrie européenne,  qui 
seulement  ont  tort  d'altérer,  selon  la  conlume  orientale,  la  fraî- 
clicurde  leur  teint  par  l'emploi  journalier  des  cosmétiques. 

Slauropol ,  clief-lieu  de  la  province  ciscaucasienne,  est  une 
ville  de  deux  mille  âmes,  agréablement  située.  C'est  la  résidence 
d'un  gouverneur  militaire  et  le  point  central  d'un  commerce  d'é- 
change d'étoCfes  de  soie  et  de  laine ,  de  fourrures  et  de  denrées 
coloniales  dont  la  valeur  totale  s'éîève  ù  environ  1,600,000  fr.  par 
an.  Les  Nogais  et  les  Kalmoucks  y  amènent  du  bétail,  des  peuux 
d'Astracan  ,  des  tissus  en  poil  de  chameau;  tes  Arméniens  y  ven- 
dent ù  un  haut  prix  diverses  marchandises. 

A  quelque?  centaines  de  werstes  de  Stauropol  sont  les  slanilzas 
des  Cosaques  de  la  ligne ,  cordon  militaire  organisé  à  peu  prts  sur 
le  même  plan  que  celui  qui  entoure  les  possessions  de  l'Autriche 
en  Hongrie.  Pieire-le-Grand  en  posa  les  premières  bases  ,  Cathe- 
rine II  l'agrandit.  Cette  colimie  militaire  est  destinée  à  protéger 
contre  les  invasions  des  Circassiens  les  provinces  soumises  ù  la 
Russie.  Mais  elle  ressemble  à  ces  rivières  impétueuses  qui  sans 
ci'sse  roiigf'nl  leurs  rives,  élargissant  leurs  lits.  Delempsù  au'rc  , 
elle  dépass"  sa  frontière,  s'en  va  construire  une  redoute  ,  unefor- 
teresse  sur  le  sol  ennemi ,  et  resserrede  pluscn  plus  dans  ses  ma- 
nœuvres stratégiques  les  domaines  des  Circassiens. 

Cette  armée  de  sentinelles  cosaques,  chargée  de  conserver  les 
auciunnes  conquêtes  des  Russes  et  de  leur  en  préparer  de  nouvelles, 
se  compose  de  neuf  rcgiment'i  de  cavalerie,  de  trois  compagnies 
d'artillerie  ,  en  tout  13, 20U  hommes,  dont  le  chef  porte  le  litre 
d'helniau.  En  cas  de  besoin  ,  ces  13,000  soldats  peuvent  être  ren- 
forcés par  12,000  hommes  de  la  colonie  ,  tous  prêts  ix  quitter  le 
foyer  de  la  stanilza  et  le  soc  de  la  charrue  pour  prendre  l;i  lance. 
Depuis  183^,  la  Ru^-siccntrelienl  de  plus  dans  cette  même  région 
nue  armée  régulière  de  70,000  hommes.  C'est  Cflle-ci  qui  est  une 
hturde  charge  pour  le  trésor  Impérial.  Les  Cosaques  de  la  ligne  , 
grâce  â  leur  régime  de  colonisation  ,  coûtent  fort  peu  à  l'État.  Le 
sol  qu'ils  cultivent  est  affranchi  de  tout  impùt.  Ils  sont  tenus  seu- 
lement de  le  défendre.  Si  le  service  mililaire  les  conduit  hors  d'un 
rayon  de  cent  werstes  autour  de  leur  staullza  ,  ils  ont  dioit  alors  à 
une  ration  de  vivres,  de  fourrage,  et  ù  une  solde  très  minime. 
L'oflicier  reçoit  par  trimestre  15  à  17  francs.  Le  fourrage  n'est 
p;iyé  que  du  16  octobre  au  16  avril  ;  le  reste  du  temps  ,  les  che- 
vaux doivent  trouver  leur  nourriture  dans  les  steppes. 

La  colonie  cos:ique  se  divise ,  selon  l'âge ,  en  quatre  catégories  : 
Irscnfanls,  les  ji^uncs  gens  de  dix-huit  ù  vingt  ans ,  les  hommes 
(le  vingt  ù  soixante,  qui  composent  l'armée  active  ,  lesvieillards, 
La  moitié  des  ho:nmes  fait  le  service  militaire,  l'autre  laboure  le 
wol,  prend  soin  des  troupeaux  ,  mais  doit  entrer  en  campagne  au 
premier  a,>pel. 

De  même  que  le  Cosaque  du  Don  ,  celui  de  la  ligne  s'exerce  dès 
son  jeune  âge  à  monter  le  cheval  fongueux,  à  se  servir  de  ses  ar- 
mes en  le  lançant  au  galop  Ses  armes  et  son  cheval ,  voilà  ce  qui 
surtout  charme  ses  regjrds  et  sourit  à  son  orgueil.  Malgré  son 
humeur  sauvage,  son  cœur  n'est  point  inaccessible  aux  tendres 
sentiments.  Implacable  dans  sa  haine  et  sa  ïenge;ince,  il  garde 
avec  reconnaissance  le  souvenir  des  bienfaits.  Confiant  et  hospita- 
lier, il  vient  avec  empressement  en  aide  à  l'étranger  égaré  stir  sa 
route  ,  et  dés  que  cei  étranger  a  franchi  le  seuil  de  sa  demeure,  il 
e''t  l'ami  de  l.i  famille.  Plus  heureux  que  ses  frères  du  Don,  il 
n'est  point  obligé  de  s'en  aller  pendant  six  ans  camper  à  des  cen- 
taines de  lieues  du  sol  natal.  Son  service  ne  l'appelle  que  de  loin 
en  loin  hors  des  limites  de  sa  stanitza.  Il  goùle  les  joies  du  foyer 
domestique ,  il  voit  ses  enfants  grandir  sous  ses  yeux  ;  son  devoir 
l'oblige  â  se  tenir  toujours  en  éveil ,  prêt  ù  prendre  sa  carabine, 
prêt  à  courir  au  feu  ;  mais  cet  état  d'agitation  plaît  ù  son  cœur  de 
soldat.  La  stanilza  qui  renferme  tout  ce  qu'il  a  de  plus  cher  au 
inonde  est  entourée  d'une  palissade  ou  d'un  rempart  eu  terre  assez 
fort  pour  arrêter  au  moins  quelque  temps  une  troupe  ennemie. 
La  nuit  des  patrouilles,  accompagnées  d'une  meule  de  chiens, 
circulent  aux  idenlours  de  la  rustique  forteresse.  Le  jour  ce  ser- 
vice d'observa  lion  est  encore  plus  actif.  Des  Cosaques  parcourent 
le  terrain  exiérieur,  examinant  avec  soin  les  champs  de  roseaux 
où  souvent  se  cachent  les  Circassiens.  Des  |iostes  de  soldats  sont 
établis  de  distance  en  distance  sur  des  plutes-Ibrmes  en  bois  ,  éle- 
vées sur  quatre  pieux  à  vingt  ou  quarante  pieds  au-dessus  du  sol. 
De  là  le  factionnaire  promène  au  loin  ses  regards  ;  dès  qu'il  aper- 
çoit quelque  mouvement  sur  la  nmntagne,  Il  allume  son  majok^ 
espèce  de  torche  en  bois  résineux.  Aussitôt  de  poste  en  po-te 
apparaît  le  même  signal.  Les  cavaliers  montent  â  cheval  et  se  pré- 
cipitent vers  l'endroit  menacé.  Les  habilanis  delà  stanilza  sont 
sur  leurs  gardes ,  les  portes  sont  fermées.  Souvent  ce  n'est  qu'une 
fLiusse  alerte.  Les  torches  s'éteignent  successivement  et  le  Cosaque 
rentre  dans  sa  demeure. 


X.  MARMIER. 


{  La  suite  au  Numéro  prochiiin.  ) 


Bulletin  bibliosraiiliiqice. 

Du  gouvernement  arabe  et  de  t'inslilution  qui  doit  l'exercer  , 
par  CuABLBsRicHVBD,  capitaine  du  génie  ,  chef  de  bureau  des 
olTaires  arabes  de  la  subdivision  d'Orlêansville,  brochure  in-8" 
délie  pages.  —  Alger,  Rastlde  ,  1848,  2  francs. 


l\r.  Charles  Riehard ,  Tauteur  de  VE/mlc  sur  niisurrcction  du 
IKihra ,  dont  nous  avons  rend»  compte  il  y  a  deux  ans  en\iron  , 

—  l'historien  de  Bou-Maza  en  Afrique  et  son  cicérone  6   Paris 

—  vient  de  publier  sous  ce  titre  :  Du  gouvernrmcnt  arabe  et  de 
l'institution  qui  doit  C exercer  ^  une  brochure  d'un  vif  inlérêl; 
ear  elle  est  remplie  d'observations  nouvelles  et  de  sages  conseils, 
cl  ,  dans  les  circonstances  actuelles  elle  peut  être  d'une  gr;inde 
Mtililé  pratique.  Le  style  manque  peut  être  en  certains  passages 
(le  facilité  et  de  netteté  ;  mais  ces  défauts  ,  insignilianls  (railleurs 
<lans  un  ouvrage  de  ce  genre,  qui  n'a  évidemment  aucune  pré- 
tention littéraire,  ont  une  explication  et  une  excuse  malheu- 
rrusemenl  trop  pkiusibles.  Pendant  snn  dernier  séjour  à  Paris, 
M.  Charles  Richard  eut  le  chagriit  de  se  \oir  voler  son  manus- 


crit le  jour  même  oCi  il  venait  de  le  terminer.  Toutes  ses  recher^ 
ches  pour  le  retrouver  sont  demeurées  sans  résultat.  Il  a  donc  été 
obligéde  le  lécrire  entièrement  à  son  retour  en  Afrique  ,  sans  au- 
tres matériaux  que  de  simples  souvenirs,  et  comme  il  le  déclare  avec 
raison,  c'est  lu  une  de  ces  tâches  pleines  d'ennuis  et  de  contra- 
riétés qui  ne  peuvent  être  entreprises,  qu'on  en  soit  certain  ,  sans 
un  désir  profond  de  dire  quelque  chose  d'utile  et  de  servir  une 
grande  cause. 

M.  Charles  Richard  connaît  mieux  que  personne  les  difficultés 
qui  s'opposent  à  l'œuvre  de  la  domination  et  au  gouvernement 
du  peuple  ariibe.  Loin  de  les  dissimuler,  il  les  expose  avec  nue 
entière  franchise  ;  mais  il  ne  pense  pas  qu'elles  soient  insurmon- 
tables. Dans  son  opinion  ,  si ,  d'une  part  ,  le  caractère  de  ce 
peuple,  ses  instincts,  ses  tendances  nous  sont  d'une  hostilité 
irréconciliable,  d'autre  part,  certaines  circonstances,  indépen- 
dantes de  lui ,  nous  sont  toutes  favorables  et  nous  aideront  dans 
notre  entreprise.  Pour  atteindre  notre  magnifique  but,  il  nous 
faut  trois  choses  :  le  temps  ,  le  nombre  et  l'institution.  Or,  nomme 
le  temps  et  le  nombre  sont  deux  éléments  au-dessus  des  simp'cs 
finces  de  riiomme,  il  s'occupe  seulement  de  rinstitulion.  Un  jour 
il  essaiem  de  déterminer  d'une  manière  claire  quelles  sont  les 
niodifieiitions  transitoires  qui  ,  en  Algérie ,  doivent  servir  de  pas- 
sage â  nos  institutions.  «  Pour  le  moment  ,  je  ne  traite,  dit-il  , 
que  de  l'institution  la  plus  importante  ,  puisque  c'est  elle  qui  doit 
appliquer  les  autres  et  en  être  le  pivot  ;  il  veut  parler  de  celle 
<|ui  ,  ù  peine  ébauchée  ,  est  connue  sous  le  nom  singulièrement 
adminislralif  de  bureau  arabe. 

Décrire  les  caractères  généraux  du  bureau  arabe  et  fixer  ses 
altribulions  futures  administratives,  judiciaires  et  n  ilitaires  , 
telle  est  donc  la  lâche  que  s'était  imposée  M.  Richard.  Peut-être 
a-t-il  accordé  une  trop  grande  importance  à  cette  institution  , 
peu  -être  s'esl-il  exagéré  les  services  qu'elle  est  appelée  à  rendre; 
niuis ,  à  coup  sûr,  nul  de  nos  oOiciers  n'était  plus  capable  que  lui 
de  soulever  et  de  résoudre  une  pareille  question  ,  car  nul  ne  l'a- 
\aitétJidiée  plus  longtemps  ,  p'us  consciencieusement  approfon- 
die. C'est  nu  théoricien  pratique  ;  ses  idées  s'appuient  toujours 
sur  des  faits.  Chacun  de  ses  chapitres  contient  qui  Ique  révélation 
nouvelle  sur  la  chose  arabe  ,  comme  il  dit,  qui  n'est  si  peu  com- 
prÎNe ,  en  général ,  que  parce  qu'elle  est  encore  voilée  par  les  mys- 
tères de  l'inconnu.  Ain^-i  alors  même  qu'on  ne  parlajerait  pas  ses 
opinions  sur  l'avenir  des  bureaux  arabes,  on  ne  profilerait  pas 
moins  pour  cela  des  renseignements  positifs  qu'il  a  su  recueillir 
pendant  son  séjour  dans  la  subdivision  d'Orléansville  et  des  indi- 
cations uliL'S  qu'il  donne  â  ses  collègues  présents  et  futurs. 

«  Les  nuances  ù  mille  reflets  que  présente,  dit-il  ,  la  surface  du 
peuplearabe,  oITrent,  commeconséquence,  desdiflîcullés  très  gran- 
des dans  ta  manière  d'agir  sur  lui,  nécessitent  des  études  très  sé- 
rieuses et  beaucoup  d'observations  sur  ceux  qui  sont  le  moyen 
d'action. 

»  Un  chef  de  bureau  arabe  ,  nouvellement  arrivé  sur  un  point, 
a  un  long  a))prentissage  ù  faire  avant  de  connaîlre  ce  qu'il  lui 
faut  pour  tenir  tous  les  fils  secrets  qui  remuent  le  pays  cl  rendre 
de  bons  services.  On  peut  dire  que  chaque  tribu  au  moins,  pour 
ne  pas  descendre  plus  bas  l'échelle  des  <livisions ,  exige  un  sys- 
tème particulier  de  commandement ,  et  aussi  une  mesure  dilfé- 
rente  dans  ses  actes.  Ainsi,  par  exemple,  dans  le  cercle  d'Or- 
/cntisvitlc ,  il  serait  de  la  dernière  maladresse  de  demander  aux 
Sebéhhas  ce  qui  peut  être  facilement  obtenu  des  Onled-Kosséiri  ; 
et  souverainement  injuste  de  punir  de  la  même  peine  une  même 
faute  dans  chacune  de  ces  iribus.  Les  légistes  et  les  magistrats 
qui  ne  spéculent  que  sur  des  sociétés  unies  ,  ont  de  la  peine  à 
admettre  la  jusiice  dans  l'inégalité  des  châtiments  pour  une 
même  faute  ;  rien  de  plus  équitable  pourtant  devant  le  droit  na- 
tuiel  ,  qui  domine  tous  les  autres.  Vous  avez  à  gouverner  un 
peuple  essentiellement  dilTércnt  du  nôtre  :  il  ne  faut  pas  évaluer 
les  crimes  par  leur  résultat ,  c'est-à-dire  le  mal  qu'ils  p  oduiseiit 
réellement,  mais  seulement  par  l'importance  qu'on  leur  attribue 
dans  le  pays  et  le  degré  d'borieur  qu'ils  inspîreuL  Un  Sebéhha 
aceoutnmé  à  payer  15  doiiros  le  meurtre  de  son  voisin  ,  ne  peut 
pas  êlre  puni  aus-i  sévèrement  qu'un  Kosséiri ,  ayant  reçu 
d'abord  de  la  nature  des  mœurs  moins  féroces,  et  ayant  appris 
par  un  corïtacl  de  cinif  ans  avec  nous  combien  un  crime  paicil 
est  airuce  et  qoel  est  le  châtiment  qui  l'attend.  Les  hommes  des 
Onled-Joiines  ,  dans  le  Dahra ,  qui  sont  tous  voleurs,  et  qui 
e\  'rreiit  eeite  piofession  hors  la  loi  avec  la  même  sécurité  qu'un 
bonnetier  petit  en  mettre  à  vendre  ses  bonnets ,  doivent-ils  être 
sérieiisi'inrni  elioiiés  avec  la  sévérité  que  les  h^glslations  de  tous 
les  |i;i\s  rivilisés  eonimandent  en  parei'le  circonstance. 

D  La  cnlMlai^s;lncc  des  hommes  offre  des  d'flicnltés  plus  gran- 
des eMrnre(ine  celle  des  tribus.  Les  masses  ont  des  traits  saillants, 
péri(nli(|nes  nu  permanents,  qui  permettent  de  saisir  assez  faci- 
Icineiit  l'ensemble  de  leurs  caractères.  L'analyse  exacte  de  l'Arabe 
est  un  dédale  ténébreux  qui  n'est  jamais  éclairé  que  par  de  faibles 
lueurs  arcidenlelles ,  et  dans  lequel  il  est  presque  impossible 
de  marclnr  sans  faux  pas.  Quand  on  interroge  un  Arab",  m'ine 
SU'-  un  fait  très  indlféi eut ,  la  première  inspiration  ([ui  lui  vient 
est  celle  du  men»ongc.  Il  ment  non  pas  toujours  par  in'érêt, 
mais  souvent  par  plaisir  et  par  simple  amusement  de  l'esprit.  Le 
mensonge,  c'est  sa  poésie;  il  s'y  livre  avec  entraînement,  avec 
charme,  et,  chose  curieuse,  soit  illusion  naturelle  chez  lui, 
soit  habileté  digne  d'un  meilleur  but ,  il  arrive  souvent  à  le  co 
lorer  par  cet  air  respectable  de  la  conviction  qui  impose  toujours. 
Quand  deux  Arabes  sont  en  présence  et  débattent  leurs  intérêts  , 
ni  celui  qui  a  tort  ni  celui  qui  a  raison  ne  présente  les  choses  sous 
lein- véritable  aspecL...  On  conçoit  d'après  cela  quel  délicat  dis- 
cernement il  fani  appoitiT  dans  les  relations  les  plus  élémentaires 
avec  ce  peuple  de  prolées..  » 

Un  des  chapitres  les  pins  curieux  de  cet  utile;  travail  est  celui 
qui  a  l'impôt  pour  suj(  L  iW.  Richard  y  prouve  qu'on  a  eu  tort 
de  traiter  avec  dédain  l'impôt  et  les  divers  revenus  arabes,  sous 
prétexte  qu'ils  ne  sont  pas ,  quant  à  présent ,  d'une  grande  im- 
portance ,  et  qu'ils  ne  dépasseront  jamais  une  certaine  limite. 
Ces  divers  revenus  sont  au  nombre  de  six.  Evaluant  ce  qu'ils 
peuvent  produire  en  totalité,  M.  Richard  arrive  ù  la  somme  de 
ir>  millions,  c  Somme,  dit-il,  qui  vaut  bien  la  peine  d'être 
poursuivie,  et  qu'une  bonne  constitution  des  bureaux  arabes  per- 
mi  tira  d'atteindr-e  rapidement,  si.  comme  tout  le  fait  espérer, 
la  paix  daigne  nous  favoriser  du  temps  nécessaire.  »  A  l'en  croire, 
elle  pourrait  facilement  être  portée  de  15  à  30  millions,  u  Du 
reste,  ajoute  t-il ,  le  chiffre  de  15  millions  ,  porté  plus  haut ,  n'a 
rien  de  lourd  pour  la  population  ,  ainsi  qu'il  est  facile  de  s'en 
convaincre.  Cette  somme,  répartie  sur  tonte  la  population, 
donne  5  francs  par  tète.  En  France,  pays  placé  dans  d'autres 
conditions  ^\c  progrès  et  de  bonheur,  l'impôt  réparti  par  têle 
doime  plus  de  iO  francs.  En  tenant  compte  de  la  dilVérence  de 
vu'eur  de  l'argent  dans  les  deux  pays  ,  et  en  admettant  ,  ce  qui 


est  exact,  que  cette  valeur,  toujours  en  proportion  inverse  de  la 
rareté ,  soit  en  Afrique  double  de  ce  qu'elle  est  en  France ,  les 
5  francs  de  l'Arabe  représentant  10  francs,  il  en  résulte  qu'i'l  ne 
paie  encore  que  le  quart  de  ce  que  donne  le  contribuable  de 
France.  Quand  l'impôt  aura  atteint  la  limite  de  30  millions,  le 
contribuable  arabe  aura  encore  une  charge  moitié  moins  lourde 
que  celle  des  Français.  Ainsi  donc,  devant  le  trésor,  lu  peuple 
vaincu  se  trouve  mieux  traité  que  le  peuple  conquérant,  consé- 
quence qui  montre  manifestement  que  la  pensée  d'atteindre  suc- 
cessi\ement  les  chiffres  posés  pêche  plutôt  par  la  timidité  que  par 
la  hardiesse." 

Instruit  par  l'expérience,  M.  Richard  indique  les  moyens  qui 
pourront  être  employés  avec  succès  par  les  bureaux  arabes  pour 
tenir  et  conduire  les  chefs  indigènes,  surveiller  les  hommes  sus- 
pects, percevoir  les  impôts,  émanciper  les  femmes,  développer  le 
goilt  que  manifestent  pour  les  constructions  en  maçonnerie  les 
Arabes,  qui,  en  général,  n'aiment  que  médiocrement  les  tentes, 
leur  enseigner  les  premiers  éléments  de  l'agriculture,  les  déter- 
miner à  utiliser  leur  argent,  qu'ils  ont  l'habitude  d'enfouir;  li- 
miter le  territoire  des  tribus,  préparer  le  terrain  d'invasion  â  la 
colonisation,  etc.,  etc.  Ai-rivé  ainsi  à  leurs  atti-ibutions  judiciaires, 
il  démontre  l'impossibilité  morale  et  matérielle  de  l'application 
de  notre  législation  à  un  peuple  musulman;  il  en  tiie  cette  con- 
séquence, qu'il  faut  laisser  aux  Arabes  des  lois  musulmanes,  en 
les  soumettant  à  une  surveillance  intelligente  dans  leur  applica- 
tion, et  de  manière  à  préparer  les  invasions  successives  de  nos 
lois.  Il  termine  enfin  par  l'exposé  d'un  nouveau  système  d'orga- 
nisation mililaire  sur  lequel  nous  nous  contenterons  d'appeler 
l'attenlion  des  hommes  compétents. 

Après  avoir  ainsi  traité  de  la  fonction,  M.  Richard  consacre  un 
dernier  chapitre  aux  agents  de  cette  fonction.  Constitués  par  une 
décision  ministérielle,  les  bureaux  arabes,  n'ont  été,  jusqu'à  pré- 
sent, qn*une  simple  mesure.  M.  Richard,  qui  voudrait  en  faire 
une  institution,  pose  les  bases  d'un  décret  qui  aurait  pour  but 
et  pour  effet  de  leur  donner  cç  caractère  légal  qui  leur  manque. 

(I  II  est  bon,  écrivait  M.  Richard  en  concluant  le  1"  février 
ISâS,  il  est  bon  de  rappeler  souvent  la  grandeur  de  l'œuvre  pour 
aiguiser  l'intelligence  et  l'exciter  à  bien  fairç.  Nous  n'avons  pas 
seulement  ici  ù  féconder  un  sol,  nous  avons  encore  ù  féconder 
un  peuple.  Le  premier  de  ces  deux  buts  est  compris  par  tout  le 
monde,  le  second  préoccupe  moins  les  esprits;  il  est  de  ceux  que 
les  masses  poursuivent  presque  à  leur  insu,  poussées  par  le  doigt 
providentiel  qui  dirige  tout  ici-bas.  Je  serais  heureux  si  j'avais  pu 
parvenir  à  dessiner  celui-là  d'une  manière  moins  confuse,  et  à 
poser  quelques  jalons  de  la  route  qui  doit  y  conduire.  Notre  tâche 
est  lourde,  ne  l'oublions  pas,  car  nous  avons  charge  de  peuples 
devant  la  postérité.  Gardons-nous  donc  d'aller  au  hasard  avant 
d'agir,  assurons-nous  de  bons  instruments;  et  rappelons-nous 
souvent  ces  pai'oles  mémorables  de  Montesquieu,  qui  semblent 
avoir  été  dites  tout  exprès  pour  nous  :  «  La  conquête  laisse  lou- 
jnurs  à  payer  une  dette  hnmense,  pour  s'acquitter  envers  la  na- 
ture humaine,  b 


Mclan'ia  d'économie  potitiq>fc,  tome  II.  —  Collection  des  prin- 
cipaux économistes,    tome  XV.    Un  volume  grand  in-S". 

Paris,  18^8.  Guillaumin.  10  fr. 

Encore  un  volume,  —  les  OEuvres  diverses  de  J.-B.  Say ,  -  et 
la  belle  collection  des  principaux  économistes  que  publie  M.  Guil- 
laumin sera  cimiplèle.  Le  tome  XV,  le  dernier  de  la  collection, 
mais  ravant-dernier  dans  l'ordre  de  la  publication,  vient  de  pa- 
raître; c'est  la  suite  des  Mélanges  d'économie  •politique.  Le  pre- 
mier volume  des  Mélanges  contenait  les  principaux  ouvrages  de 
David  Hume,  Forbonnais,  Condillac,  Condorcdt,  Lavoisier  et 
Franklin.  Le  deuxième  se  compose  des  matières  suivantes  :  Dia- 
logues sur  le  commerce  des  blés^  par  Galiani  ;  de  la  Législation 
et  du  lommerce  des  grains,  par  Necker;  de  ^Influence  qu'ont  fet 
diverses  espéas  d'impôts  sur  la  moralité,  l'activité  et  Citidustric 
drs  peuples,  par  M.  de  Montyon  :  la  Défense  de  l'usure,  par  J. 
Benlham.  (hacun  de  ces  traités  est  précédé  d'une  notice  histori- 
que sur  son  auteur  et  accompagné  du  commentaire  et  dénotes 
explicatives,  par  M.  Gustave  de  Molinari. 


Correspondance. 

M.  V.,  à  Paris.  —  Puisque  vous  paraissez  croire,  Monsieur, 
que  ClUnstration  doit  savoir  mieux  que  personne  où  en  est  la 
souscription  ouverte  en  librairie  avec  primes,  il  faut  qu'elle  vous 
rassure.  Cette  souscription  est  parfaitement  autorisée,  le  Cata- 
logue s'imprime  et  rien  ne  saurait  faire  obstacle  à  uneopéralion 
qui  assure  du  travail  ù  25,000  ouvriers.  La  lettre  qui  vous  a  fuit 
douter  est  l'œuvre  ridicule  de  cinq  citoyens  dont  l'envie  ne  peut 
pas  prijvaloir  contre  un  tel  intérêt.  Nous  savons  bien  que  la  Ré- 
publique court  le  risque  d'y  per-dre  le  dévouement  de  M.  Char- 
pentier et  la  valeur  héroïque  de  M  Feret;  on  dit  même  que  les 
révoltés  ont  juré  de  renverser  le  gouvernement  si  la  souscription 
n'est  pas  interdite.  M.  Charpentier  n'en  fait  pas  d'antres  :  c'est 
lui  qui  a  fait  tontes  nos  révolutions  parce  qu'on  l'a  contrarié , 
et  sans  l'épée  de  M.  Keret,  capitaine  de  la  garde  nationale,  nri 
ne  sait  pas  ce  qui  serait  arrivé  en  juin  dernier.  Et  M.  Rigaud  , 
drmcll! 

Quand  vous  verrez  Fontaine,  souvenez-vous  de  Goujon. 

Mademoiselle  Z.  L.  U  est  probable,  iMademoisclle,  que  le  Mo\:- 
sicur  y  consenl'rail,  mais  quel  métier! 

M.  P.  D.,  à  Paris.  Nous  l'avons  déjà  dit,  Monsieur,  les  Jour- 
nées illustrées  de  la  révolution  de  18^8  ne  sont  pas  une  repi-o- 
dnction  de  l'Illustration.  C'est  une  histoire  complète,  une  ap- 
préciation réfiéchie  des  idées,  un  récit  fidèle  des  faits  accomplis 
depuis  février.  C'est  également  la  réunion  de  tous  les  sujels  qui 
ont  fourni  des  gravures  à  tous  les  recueils  illustrés  qui  traitent  de 
l'histoire  contemporaine  en  Angleterre,  en  Allemagne,  en  Itati" 
et  en  France,  La  part  de  l'Illustration  est  considérable,  m-iis 
rillnstrutcd  London  news  et  la  Gazette  illustrée  de  Leipziq  ont 
aussi  fourni  une  part  précieuse  à  ce  livre,  digne  de  votre  intérêt 
et  de  votre  curiosité. 

M.  J.  W.,  à  Genève.  Même  réponse. 

M.  T.  D.  Il  ne  nous  est  pas  permis,  Monsieur,  de  nommer 
l'auteur. 

M  H.  P.  L'abondance  des  matières  a  relardé  lecoraptc-reudo 
de  votre  cxcelleut  Mémoire, 


Cà 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


Le  Peler-Botte  —  est-il  besoin  de  le  rappeler? —  est 
une  montagne  fort  extraordinaire  de  l'Ile-de-France  (Mau- 
rice) ;  elle  attire  de  loin  les  regards  de  tous  les  étrangers 
qui  naviguent  dans  ces  parages.  En  effet,  elle  s'élève  à  1  ex- 
trémité dune  longue  chaîne  de  montagnes,  dont  elle  est  sé- 
parée par  une  gorge  profonde ,  bien  qu'elle  paraisse  s'y 
rattacher  sans  solution  de  continuité.  Sa  hauteur  est  de 
1,000  mètres.  Mais  c'est  surtout  sa  forme  particulière  qui 
lui  a  valu  sa  célébrité.  Elle  se  termine  par  un  rocher  de 
100  mètres  de  hauteur,  assez  semblable  a  la  flèche  d'une 
cathédrale,  couronné  lui-même  par  un  bloc  de  pierre  de 


Ascension  du  Peter-Botte. 

20  mètres  de  haut  et  de  10  mètres  de  largeur,  qui  dépasse 
de  tous  côtés  la  base  sur  laquelle  il  repose.  On  a  appelé  ce 
bloc  de  pierre  la  tète ,  le  rocher  le  cou,  et  la  partie  supé- 
rieure de  la  montagne  l'é'paule. 

En  jetant  les  yeux  sur  le  dessin  ci-joint,  on  comprendra 
mieux  encore  combien  l'ascension  du  Perter-Botte  offre  de 
difficultés  et  de  dangers  :  aussi ,  bien  que  tentée  souvent , 
a-t-elle  rarement  réussi.  Il  y  a  Ifi  ans  environ  ,  le  capitaine 
Lloyd  parvint  jusqu'au  sommet.  Depuis  deux  touristes  aven- 
tureux se  sont  procuré  cette  satisfaction ,  le  capitaine  Sta- 
vely  en  1830  ou  38 ,  et  M.  Henry  Hayter,  officier  du  vais- 


Ascension  du  Peter-Botte  le  20  mai  1848. 


^'!y»  de  la  Compagnie  des  Indes  orientales,  le  Samaranii 
qui  a  envoyé  à  notre  confrère  de  Londres,  Vllluslraicd 
Lnndon  news  ,  le  dessin  et  le  récit  que  nous  publions  au- 
jourd'hui. 

«  Le  20  mai  1818,  dit  M.  Hayter,  nous  parlimos  en  voi- 
ture do  Port-Louis,  éloigné  d'environ  11  milles  du  pied  de 
la  montagne.  Nous  étions  huit.  Après  un  voya^e  assez  dés- 
agréable sur  de  mauvaises  routes ,  nous  arrivâmes  chez  un 
plantoir  français  ,  dont  l'habitation  .se  trouve  située  ii  un 
demi-mille  de  la  baie,  et  qui  nous  accueillit  avec  la  plus 
aimable  hospitalité.  Le  lendemain  matin,  à  six  heures,  nous 
nous  mettions  en  route.  Trois  nègres  nous  accompagnaient  ; 


ils  porlaiont  dis  | 
tre«  dcsiiiir  ;i  m'i 
provisiniis  (le  liiii 
iesdéchaigiMil,.  I,  „ 
lourds,  car  a  iliiiq 
ils  restaient  I 


|l„.U,l,. 


lin  liniuliiiii  de  10  inè- 
dc. 


I    11'-   in.inclM'  ,1    iKiiiv  ,ii',i|,eaii  ,   et 

I"'   M.">  M"iis  II s  v„n,.iit  obliges  lie 

l.iriii;iii\.  qui  n  Vtiiient  cependant  pas 
'  iM^l.int  ils  refusaient  de  marcher  et 
iriere 


»  Il  nous  fallut  d'abord  gravir  la  pente  escarpée  de  la  gorge 


que  domine  le  Peter-Botte  il  travers  un  bois  épais,  où  la 
rosée  nous  mouilla  ju.squ'aux  os.  .\u  sortir  do  ce  bois  seu- 
lement nous  pùiiirs  nous  f.iireunc  idée  vraie  des  difficultés 


et  des  daii^i 
pnule,  ipic  ruiiis  ili\ 
II'  CHU  .  qui  sr  dri'ss. 


\n 


\  notre  droite  s'élevait  l'c- 
iird  escalader  avant  de  gravir 
au-dessus  de  nous,  couronné 
niions  liMilciniMil,  car  la  pente 
v:  le  nnnil.riMlcsarliieseldes 


nsi  utile  secours 
is ,  et  nous  ne 
siilide.  Souvent 
s  nous  mettions 
avec  le  bruit  du 


iIcM'nail  lie  plus  en  phis  vaiili 
buis.soMs,|iiin"iisavairnl  i.nMcnis,|n  ;,l,,i 
diminnail  a  iiii'sinc  (|iii.    nnii,  ikhis  rlr\ 
Irouvinils  ,|u  .n,-,-    p.Miir    lill   |miiiiI  ,1  ,i|i| 
lespierirsrl   les  l,l,„>  ,lr  rn.-llrr  sur  1rs,] 

les  pieds  ,  roulaient  au  fond  du  precipi 
tonnerre  ,  et  auraient  pu  blesser  dans  leur  chute  ceux  de 
nos  compagnons  qui  nous  suivaient  à  quehpie  dislance.  Les 
plus  grandes  précautions  étaient  donc  nécessaires  pour  soi 
et  pour  les  autres  :  aussi   n'allcigntmes  nous  le  haut  de 

l'cpoKlc  qu'après  deux  heures  do  fatigue 

"  Nous  nous  dirigeâmes  ensuite  le  long  d'une  crélo  ro- 


cailleuse très  étroite  ,  dominant  à  droite  et  à  gauche  deux 
précipices  à  pic,  jusqu'à  la  base  de  deux  rochers  perpendi- 
culaires d'environ  13  mètres  de  hauteur  C'était  là  que  tous 
les  touristes  précédents,  sauf  deux  ,  avaient  rebroussé  che- 
min ,  effrayés  des  difficultés  en  apparence  insurmontables 
qu'il  leur  restait  à  vaincre.  Nous  tînmes  conseil.  Après 
une  longue  délibération  ,  où  de  nombreux  avis  avaient  été 
ouverts,  nous  nous  arrêtâmes  au  parti  suivant.  Nous  po- 
sâmes contre  la  surface  presque  per[)€ndiculaire  du  rocher 
qu'il  s'agissait  de  gravir  le  bambou  que  nous  avions  ap- 
porté pour  arborer  un  drapeau  en  cas  de  réussite.  Son 
bout  inférieur  était  appuyé  le  plus  solidement  possible  sur 
un  petit  plateau  de  50  centimètres  de  largeur.  Je  grimpai 
jusqu'à  l'extrémité  supérieure,  et  je  constatai ,  à  ma  grande 
joie  ,  qu'à  partir  du  point  que  je  venais  d'atteindre  le  ro- 
cher présentait  certaines  inégalités  invisibles  d'en  bas,  et  à 
l'aide  desquelles  je  parvins  à  me  hisser  jusqu'au  sommet. 
Trois  de  mes  compagnons  m'eurent  bientôt  rejoint.  Mais 
les  quatre  autres  attendirent  pour  monter  que  nous  leur 
eussions  jeté  une  corde  solidement  attachée  ;  car  la  moindre 
oscillation  du  bambou  le  long  duquel  nous  avions  grimpé 
comme  des  chais,  aurait  pu  nous  faire  perdre  l'équilibre  et 
nous  précipiter  dans  un  gouffre  de  700  à  800  mètres  de 
profondeur. 

Nous  n'étions  encore  qu'à  la  moitié  du  chemin.  Un  se- 
cond bloc  de  rocher,  plus  escarpé  que  le  premier  et  haut 
d'environ  7  mètres  ,  fut  escaladé  seulement  avec  l'aide  des 
pieds  et  des  mains,  et  quelques  minutes  après  nous  attei- 
gnions le  cou  sans  trop  de  peine.  Restait  la  tète.  Comme  elle 
surplombe  de  tous  côtés,  le  secours  d'une  corde  nous  était 
absolument  nécessaire.  Le  charpentier  du  .Samarang  qui 
m'avait  suivi  jeta  un  plomb  de  sonde  attaché  à  une  ligne 
par-dessus  la  tête ,  et  quand  ce  plomb  retomba  de  l'autre 
côté,  nous  y  attachâmes  une  corde  qu'il  retira  et  dont  il  se 
servit,  pendant  que  nous  la  tenions  solidement ,  pour  se 
hisser  jusqu'au  sommet ,  où  nous  ne  tardâmes  pas  à  monter 
à  notre  tour. 

Nous  ne  nous  repentîmes  pas  de  notre  témérité,  car  nous 
découvrîmes  un  magnifique  panorama  ,  un  des  plus  beaux 
sans  contredit  qu'il  soit  donné  à  l'homme  d'admirer  sur 
celte  terre.  Après  avoir  arboré  le  drapeau  de  la  Grande- 
Bretagne  ,  nous  bûmes  à  la  santé  de  la  reine  Victoria  avec 
du  Champagne,  et  nous  entonnâmes  en  chœur  le  Godsave 
the  queen!  puis  d'autres  chansons  patriotiques  Les  habitants 
de  l'île  ,  qui  de  tous  côtés  avaient  suivi  tous  nos  mouve- 
ments, poussèrent  de  longues  acclamations,  et  battirentdes 
mains  quand  le  drapeau  que  nous  venions  d'arborer  se  dé- 
ploya à  leurs  regards.  Avant  de  descendre,  nous  déposâ- 
mes dans  une  fente  du  vénérable  crâne  du  Peter-Botte  une 
feuille  de  plomb  sur  laquelle  nous  avions  gravé  nos  noms. 
Par  une  singulière  coïncidence ,  nous  étions  trois  -Anglais, 
en  Écossais,  un  Irlandais  et  un  Gallois... 

La  descente  ne  fut  pas  des  plus  faciles;  mais  nous  arri- 
vâmes tous  sans  accident  chez  notre  excellent  hôte,  où  un  dî- 
ner succulent  nous  attendait ,  et  le  soir  du  même  jour  nous 
étions  de  retour  à  Port-Louis. 


Rébus. 


ESPLIC.MIOX    Df    DERNIER    «ÉEIS. 

I..1  vie  est  composi'e  de  biens  et  de  ma 


On  s'abonne  directement  aux  bureaux .  rue  de  Richelieu, 
n"  (iO,  par  l'cuNoi /"runco  d'un  mandat  sur  la  poste  onln? 
I.erlievalier  et  C',  ou  près  des  directeurs  de  poste  et  de 
messagerie* ,  des  principaux  libraires  de  la  Krance  et  de 
l'étranger,  et  descorrespondaiicesde  lagencedabonnemenl. 


l'.IS.  —  IMPnitllIUE  PE  COï!iO>,   HCK   lit    FOCÏ 


L'ILLUSTRATION, 


Ab.  pour  Paris.  3  mois,  8  fr.  —  6  mois,  16  fr.  —  Un  an,  30  fr. 
Prix  de  chaque  N",  73  c. — La  collection  mensuelle,  br.,  2  fr.  75. 


^»  292.  Vol.  XII.  —  SAMEDI   30  SEPTEMBRE  1848. 
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Histoire  de  la  semaine.   i'ortraU  <le  m.  Gat/em  ,   préstdenl  au  Parlemfnl 

<ie  Francfort.  —  Courrier  de  Paris.  —  Le  banquel  du  22  seplein- 

bre.  Banquet  ries  Reprêitcnlants  dans  le  jardin  du  Chtitet.  —  Caricatures 

de  Cliam.— Revue  agricole.  —  Leilres  d'un  iianeur,  XI.  — 

Album  moldo-valaque.  Vn  consul  général  étranger  en  voyage^ ,  il  après 
M.  DoussaiiU:  Dames  rùtaques  en  costumes  orientaux  ;  Ruines  de  l'église  ca- 
tlioliiiued'Argiscli;  Château  de  Dihrestein  sur  le  Danube;  la  ville  de  Bel- 
grade, ilessins  de  M.  Bouqu*?r;  Czemy-Gcorges ,  liospodar  de  Servie;  La 
princesse  Bibesco  \  Portrait  et  signature  du  sultan  Abd-ul-Meijid.  —  Pas- 
sions polillques.  par  Francis  Wpy.  —Dieppe  et  BrIghIOn.  Fra- 
ternisation des  gardes  nationattx  à  Dieppe;  Église  d'Auffay  ;  Château  de  Lon- 
gueville  ;  Port  de  Dieppe  ;  Pont-jetee  a  Brighton  ;  Vue  générale  de  Brtgliton; 
Carte  du  chemin  de  fer  de  Rouen  a  Dieppe.  —  Bulletin  bibliographique 

—  Grand  festival  au  Jardin  de  l'Elysée  IVatlODal ,  avec  une 

gravure,  —  RebUfi. 


Hiatoire  de   In    seninine. 

Ce  n'est  qu'au  commencement  de  cette  semaine  que  le 
résultat  d'euî^emble  des  réélections  de  septembre  a  été 
connu.  Dans  la  Charente-Inférieure,  dans  la  Corse,  dans  la 
Moselle,  dans  l' J'onnc,  M,  Louis-Napoléon  Bonaparte  a  été 
élu.  Dans  lavant-dernier  de  ces  départe- 
ments il  succède  à  M.  Dornès  ;  dans  les  trois 
autres  il  est  replacé  sur  une  liste  dont  sa 
démission  l'avait  fait  rayer. 

Il  en  est  de  même  pour  le  département 
de  la  Seine  où  M.  Louis  Bonaparte  a  obtenu 
une  cinquième  élection.  Les  deux  autres 
élus.  MM.  Achille  Fould  et  Raspail  ,  rempla- 
cent M,  Thiers  et  M.  le  général  Duvivier. 

Dans  la  Haute-Loire,  M.  Charbonnel  , 
une  autrevictimedesjournéesdejuin  ,  a  eu 
pour  successeur  M.  le  général  Rulliiéres  . 
ancien  pair  de  France  ,  un  des  ofliciers  du 
cadre  de  l'état-major-général  frappés  par  le 
décret  d'avril. 

Dans  le  Finistère  ,  c'est  le  nom  de  M.  le 
colonel  Ledo  qui  est  sorti  de  l'urne  à  une 
ara  i\de  majorité. 

Dans  la  Gironde  ,  M.  Mole  succède  à 
M.  Thiers  11  a  été  élu  par  25,224  suffrages. 
Son  concurrent ,  le  procureur  de  la  républi- 
que du  tribunal  de  Bordeaux  ,  en  a  obtenu 
t,'>,.i71.  M  Louis  Bonaparte  a  recueilli  là 
encore  3,420  voix.  Les  marches  électorales 
semblent  particulièrement ,  dans  ce  départe- 
ment, fatiguer  les  citoyens,  carsurl73,778 
électeurs  inscrits ,  li6,G06  avaient  pris  part 
au  vote  du  23  avril ,  64,220  à  celuide  juin , 
et  4o,S2a  seulement  se  sont  rendus  aux  sec- 
tions le  17  septembre. 

Le  département  de  la  Mayenne  a  eu  le 
bon  esprit  d'envoyer  pour  le  représenter  à 
r.\ssemblée  nationale  M.  Chambolle.  La  vic- 
toire a  été  débattue.  L'élu  a  obtenu  24,239 
voix  ;  son  concurrent ,  M.  de  la  Broïse,  en 
a  réuni  24,200.  M.  Louis  Bonaparte  a  vu  son 
nom  figurer  sur  2.601  bulletins. 

Dans  leiVord  ,  M.  le  colonel  Négrier  a  été 
nommé  en  remplacement  de  son  si  regret- 
table oncle,  par  26,123  suffrages.  M.  Louis 
Bonaparte  en  a  compté  encore  de  ce  côte 
19,683.  M.  de  Genoude  ,  que  nous  retrouve- 
rons dans  l'Kcrault ,  14,815. 

L'Orne  a  élu  M.  de  Vaudoré  ,  candidat  de 
l'ancien  parti  légitimiste.  Le  vainqueur  n'a 
pourtant  réuni  que  10,619  voix  sur  38,587 


votants.  MM.  Hippolyte  Passy  et  Mercier  ont  eu  ,  le  premier 
7,852  voix,  le  second  6,238  appartenant  a  la  même  opi- 
nion. Dans  l'Orne  encore  M.  Louis  Bonaparte  a  trouvé  9,734 
partisans  de  son  élection. 

Le  Rhône  sera  représenté  par  M.  Rivet ,  qui  a  obtenu 
41, 850  suffrages.  Son  concurrent  était  M.  Raspail ,  porté  par 
les  voraces  de  Lyon . 

Dans  le  Vaucluse,  M.  Alphonse  Gent ,  dont  l'élection  avait 
été  annulée  par  l'Assemblée  ,  a  été  réélu  par  42.073  voix. 
Le  défaut  d'union  a  amené  ce  résultat ,  car  les  concurrents 
de  M.  Gent  ont  réuni  ensemble  un  nombre  de  voix  beau- 
coup plus  considérable. 

Le  résultat  de  l'Hérault  nous  parvient.  M.  Laissac  a  été 
nommé  à  une  forte  majorité,  contre  M.  de  Genoude.  On  peut 
voir  que  les  électeurs  ,  déjà  si  fatigués  d'opérations  qui  se 
succèdent  à  si  peu  d'intervalle  et  de  déplacements  conti- 
nuels ,  vont  avoir  encore  à  procédera  des  élections  nouvelles 
dans  quatre  départements  ,  par  suite  de  la  quintuple  élec- 
tion de  M.  Louis  Bonaparte.  On  annonce  que  l'élu  de  Vau- 
cluse ,  M.  Gent .  n'a  pas  pu  survi\Te  à  une  grave  blessure 
qu'il  a  reçue  le  lendemain  de  sa  nomination  dans  un  duel 
au  pistolet  avec  un  rédacteur  d'une  feuille  légitimiste  qui 
se  publie  à  Avignon.  Enfin  les  départements  du  Tarn  et  du 


Monsieur  de  Gngern,  président  du  Pirlemenl  de  Fn 


Calvados  ont  à  remplacer  MM.  d'.4ragon  et  Durand ,  décédés. 
Plusieurs  des  nouveaux  représentants  ont  déjà  pris  siège 
à  l'Assemblée.  M.  Mole  ,  M.  Rivet  ,  M.  Achille  Fould  sont 
venus  s'y  asseoir  les  premiers.  Mardi  dernier  M.  Louis  Bo- 
naparte a  assisté  au  rapport  fait  au  nom  du  bureau  chargé 
d'examiner  les  opérations  électorales  du  département  de 
l'Yonne.  Le  nouvel  élu  ,  qui  au  milieu  d'un  mouvement  de 
curiosité  très  vive ,  était  entré  accompagné  de  l'ami  de  sa 
mère  et  du  .sien  ,  son  collègue  M.  Vieillard  ,  et  qui  s'était  as- 
sis à  côté  de  ce  représentant  à  la  troisième  travée  de  gau- 
che ,  a  ,  après  la  proclamation  par  le  président  de  son  ad- 
mission ,  demande  la  parole,  que  M  Marrast  lui  a  accordée. 
11  est  venu  lire  d'une  voix  forte  quoique  émue  ,  un  discours 
convenable  et  court ,  écouté  avec  intérêt. 

Si  le  rapport  sur  les  élections  du  département  de  la  Seine 
ne  pouvait  plus  soulever  de  question  quant  à  M.  Louis 
Bonaparte  ,  qui  venait  d'être  admis  pour  l"ionne  ,  il  n'en 
était  pas  de  même  quanta  un  des  deux  autres  élus  de  Pa- 
ris. M.  Raspail ,  en  ce  momenldétenuàVincennes,  par  suite 
de  son  arrestation  en  flagrant  délit  lors  de  l'attentat  du 
15  mai.  Plusieurs  questions  se  présentaient  toutes  très  dé- 
licates ,  celles  de  savoir  s'il  y  avait  lieu  d'ajourner  l'admis- 
sion jusqu'à  l'issue  du  procès  dans  lequel  M.  Raspail  est 
impliqué  ,  ou  bien  si  l'Assemblée,  en  admet- 
tant M.  Raspail  ,  autoriserait  immcdiatement 
la  continuation  des  poursuites  conformément 
à  un  réquisitoire  déposé  par  M.  le  procureur- 
général  ,  ou  enfin  si  M.  Raspail-,  étant  déjà 
sous  la  main  de  la  justice  au  moment  de  son 
élection  ,  les  poursuites  continueraient  de 
plein  droit  contre  lui. 

'Le  procureur-général  ,  M.  Corne  ,  est  ve- 
nu soutenir  cette  dernière  thèse  avec  force 
et  talent.  11  a  parfaitement  établi  que  les 
électeurs  ayant  pris  leur  élu  sous  un  mandat 
de  dépôt ,  ds  l'avaient  pris  comme  il  était , 
et  que  l'Assemblée  ne  pouvait  le  recevoir 
que  comme  il  avait  été  pris.  Il  a  fait  obser- 
ver que  s'il  avaitdéposéun  réquisitoire, c'est 
que  ne  pouvant  prévoir  l'opinion  qu'elle 
adopterait ,  il  avait  dû  ,  dans  tous  les  cas  et 
pour  toute  éventualité  ,  sauve-garder  les  in- 
térêts et  l'action  de  la  justice. 

Les  conclusions  fort  peu  nettesdu  bureau  , 
les  explications  contradictoiresque  plusieurs 
de  ses  membres  ont  apportées  de  ces  con- 
clusions à  la  tribune  ;  la  tournure  passion- 
née que  messieurs  de  la  Montagne  ont  voulu 
donner  au  débat ,  n'ont  pas  permis  de  résou- 
dre cette  grave  question  en  s'appuyant  sur 
les  vrais  principes  et  en  les  mettant  en  lu- 
mière. L'élection  a  été  validée.  M,  Raspail  a 
été  admis  ,  puis  immédiatement ,  sur  la  de- 
mande du  ministre  de  la  justice  ,  M.  Marie, 
l'Assemblée  ,  ayant  déclaré  l'urgence,  a  au- 
torisé la  continuation  des  poursuites  contre 
M.  Raspail.  Le  résultatest  le  même  ,  mais  k- 
principe  souffre. 

Ces  diverses  résolutions  ont  été  prises  ,i 
une  immense  majorité.  Vingt  ou  vingt-ciiii| 
montagnards,  ayant  en  tête  M.  Lcdru-Hid- 
lin ,  s'ysontseuls opposés.  L'urgence  surtout 
les  indignait  !  Ils  voulaient  que  la  demande 
d'autorisation  fut  renvoyée  aux  bureaux  .  et, 
qu'on  entendît  M.  Raspail  avant  de  se  |)ro- 
noncer.  —  Nous  l'avons  entendu  le  15  mai  ! 
leur  a  répondu  de  son  banc  M.  Dufaure. 

Cette  discussion  a  interrompu  celle  du 
projet  de  constitution  qu'il  nous  faut  repren- 


L'ILLUSTRATION,   JOCJÎNiï,  Ul^IYEftSkL.  • 


f 


ili.-  lie  11(1  vr  n't\r.   Niiiis  ;i\ioiis  dans  iiulrn  ilcmicr  liiillcliii 

raruiilr  I  i„„Hr,>,]r   .M    ,1c  MoilUll lirM     .M..lr   I'    Hn.is  , 

llohi   lr-n|, ..-nril  lir,.uCHl|)  |,lu>  pr..!  |,|IM  -  ;,ii|Hi,r,l  ,\r 

viicL:(.u\cri.riiJCJil.ili|uc>-dle5de.-<JM  njllc.unr  ,  jv.iMlurun- 
vni'  ïii  (It'liiilc  .  cl  lui  a  liiit  i-clircr  son  iirrieiideinonl,  mais 
51.  Diipin  ,  (iiii  est  siins  |iiliù  inùnio  pour  les  vain.cus,  a 
ncconi|iat;iic  ci'Ui.'  ri'li-ailo  par  une  boutade  qui  se  terminait 
|)ar  ilcuiaridi'rla  lili:  ilcdcl  cii-i'iL'ni'nicnt.  mais  avec  io^a- 
ruiilu'  lie  1(1  Un  l't  lii  siirrcilhnicf  lie  I  Etat.  Cette  eonclu- 
sifin  a  de  Iro  laNoLdlrnicnt  accucdlie  par  l'Assenibléc. 

(_lii('l(|ur-.  dix  n~-iiiii^  se  sont  partielleuiont  eii;;a^ccs  sur 
I  arhrlc  iiliiil  ,1  la  Id.riirdo  la  pressé,  (..luidip»'.-  oialcurs 
iiinaii  iil  viinhi  i\\ir  la  mesure  du  caulioiiru'ua'iil  lïd  assn- 
<Mi'c  a  l.i  [iic^i  1  i|iiiondont  lacensure  est  liappir  I,  \>-iaii- 
IjIit  -  cl  K  lii-ii'  a  projuger  une  question  cpn  -la.i  idha  m  u 
rcuirnl  Msiilia'  piiruneloi  spéciale.  — La  uaini'  M'^.i\ra 
pn'\alu  ru  ce  qui  concerne  la  censure  Ihéùtrale  et  1  or^aiii- 
ïotioji  de  riiiipiiuierie. 

L'arlK  le  '.I  laiiienait  encore  la  question  (le  la  liberté  de 
rensei-iieiiii'iil    M.  de  Tnie\-  n'a  pas  été  plus  heureux  que 

M    (le 'm aleiiilierl  ;  M    H'iiiIhIim  \   .'^.iiiil-llilaiic  ,  en  lui 

répniidaiil  sC>l  prul-èhv  lai^r  .illri  a  di>  Iniulules  trop 
ahsnliirs     ma  s  M    llidaiiie,   au   nmii  de  l.i  rommissiiHi  ,  a 

pn.ilaihe      , .\l    lliipil.  la  \rllh'  .    mal~d  il Il  moins 

rouilr  ,    1,1   lll  rrlr  d  rnMiL-nrmrli  I   -mi-,  la  ir-ri\cde-r Il- 

lioiis  dr  r,i|iarila.  1  .h'  i ;d  J  e  ,|lll  serulltlivee.- l'a  r  lr>  lois 

et  SMii-   1,1   -inNrlIl.ilirrdr   I   1.1, il 

l.i-i  pioiiiie  ~.iii- di-i  II-  iiin  qu'ont  été  adoptes  l'arti- 
cii-  m  qui  iim-.ieiv  I  ,idiiii-il.ililé  de  tous  les  citoyens  aux 
eiupldis  pulihes  et  ipii  alioliL  les  liires  et  disliiirl  mus  imbi- 
luiires:  -  l'arliele  llipn  ilerlareriuvic.l.didiledr  Innir.  les 
pro|iriélés;  —  l'arlu-le  l'Jcpii  pniMTil  a  j.im,  i-  l,i  nadi^ra- 
lion  ;  —  l'arlirlo  13qui  i;iiranlil  l.i  lilierlc  du  lra\,iil  ri  dr 
l'industrie  ,  et  détermine  sou-  i]iirlli'-  Im  nu--  ei  d,ins  i|m'llr- 
conditions  s'exercera  la  prolrrlinii  qm  a  ele  priimi>r.iii  lr,i- 
vail  ;  —  enlin  l'article  1  i  qui  proclame  I  inviolabililc  de  la 
delte  publique  et  do  tous  les  engagements  contractés  par 
IKlat. 

L'article  l.'i  était  destiné  à  un  plus  Ion?  et  plus  éclatant 
débat  et  a  un  Midalune  plus  i;raiide  porlée  puliliqur  t'.et 
article  est  relalit  a  la  pari  que  cliaqiii' citn\  eu  dmt  suppoi- 
(ei-  d.m-le-cliai'jesdel  Idal  .   el  la  lamimissmii  eu  le  réili- 


ih'lr 


iliel 


de  lu 


riail   dejielii 
maaipdere. 


p|,.|rn,.|,l  l,M,m■-nnnd,■..,^.. 
ou  pru^re^.-il.  Neaiuuuiu.-  i  el 
quiélante  pour  le  pays  aux  m 
l.aiits.  Un  d'eux  ,  M.  Ser\  leia 
pour  faire  trancher  la  quesimmai  la\eiirdii  .^\-,lenii'  pro- 
portionnel ,  elilasnuleilll  >a  priipii^ilhni  a\ee  (airrjir  lain- 
victioneltalent  M  Mallnen  de  la  linmir  I  a  niml.nlue. 
S'il  se  fût  borné  allure  Irpn.ia-a  la  pii,pni1miiiialilr  lelle 
qu'elle  est  aujouriTliui  élalilie  ,  il  eùl  iiiirnidie  pliisil  a>sen- 
liment  dans  ses  auditeurs  ;  néauiiioins  la  i-onuiiissmii  lenait 

loujdiiis  pour  le  wi Ii>  s  i  réil.Nimu.  M.M    de  Chareiicey 

el  Llii'i'belte  avaient  parle, ■onlrerim|iMl  pr.i.-i.'ssif,  M.Gue- 
rin  ravaitilélémlu  ,  mais  iiialL-iv  lali  la  di~,  ii-mn  ne  sem- 
blait point  laire de  ijrandspas.  ,pian,l,'sl  m, ml,' a  la  tribune 
le  ministre  des  linances.  M  Goudchaux  ,li'il,ii,nl  pieuilre 
la  parole  conimo  représentant,  quand  le  piesaleid  ,lii  ,im- 
seil  se  levant  l'a  autorisé  ii  parler  au  nom  ,lii  l-hiim'iii,'- 
ment.  Le  langage  d,- M  ('.,ai,leli,iii\  .  ,pii  ,aii|iriiid,iil  ,i  ,,'ll,' 
déclaralion  une  haiile  pmliv  pnlilHiiii^ ,  a  ilunii,-  [ilniie  >,i- 
tisfaclion  à  ceux  ,pii  ,  i,iii:iiai,ail  ,1e  mmi    Ii'   ^■(hui  i  ii,aii,'iil 

s'eimaLaial,iiiMlr>  iiiim\  .ihiiiis  liiiamaia  ,s  iiiiai.ie >  pour 

la  |ao|iralr     v\  v^^  in,ilii,'  liiiips  il  a,l ■  pi-i,,  >,i  lis- 

|,i,a„.ii  ,111  d,-n  de  \,iir  la  proporlmiinaliic  s,a  leiiM' ni  et 

e,piilaldeui,'iil  applapiee  \\  le  ministre  des  liuauce.-<  a  l'or- 
nielleiueut  ilemamle  ,  au  nom  du  gouvernement ,  qu'on  nio- 
ililiâi  lartiili'  l.'i  en  ces  li'iuH^s  ;  «  Chacun  y  contribue  en 
vrop(,rlioii  i]r  s,'S  I.Hidles  el  di'salorliine  »  .M  jlulaure  , 
au  nom  (le  la  i',iiiimissi(m  .a.amsi'iin  a  ,aa  ameiidiMiii  ni    qui 

;i  ,aeail,ipléau  s,TUliuil,',ll\i-mn  pi|-  dll  mhx  , iVII, 

L'elletilc  resserrement  ,1,'  la  iiiai.nilrd,.  I  \-rmlilc,.  au- 
lour  du  pouvoir  exéculit ,  par  suile  d,.- d,'.  Lu  ,i|imiin  du  ^,'- 

uéral  Cavaignac  et  de  M.  Cioudchanx  ,iaii~  ,,ai a  ,i-i,iii  , 

a  élé  iiiimeusi'.  l'eu  de  jours  aupaiiuaid  .  I,- pii'-i,l,'iil  ,lu 
Conseil  (les  ministres  ,  sentant  qu'une  certaine  froideur  ré- 
gnail  dans  les  rapports  du  pouvoir  avec  la  représentation  , 
iivail  provoipie  d  elle  un  vole  de  confiance.  C'est  une  de  ces 
satisfactions  qui  ne  se  refusent  qu'à  une  administration 
qu'on  est  absolument  résolu  à  renverser  et  surtout  qu'on 
est  en  mesure  de  remplacer  immédiatement.  11  ne  faut  donc 
rien  conclure  de  ces  votes.  Celui  qu'il  attendait  n'a  point 
clé  niarclianilé  au  général  Cavaignac,  mais  la  séance  de 
lundi  lui  aura  prouvé  que  les  actes  enlèvent  les  voles  de 
coiiliance  avec  une  toute  autre  puissance  que  les  simples 
paroles, 

La  question  de  savoir  si  l'on  aura  une  ou  deux  Cbam- 
bres  a  ,-eninien,-é  à  être  déliatlue  èi  la  lin  de  cette  même 
sii.m,  !■  ,1e  bm,li  M  liu\  eiLii.'r  de  llauraune  ,  partisan  de 
deux  Cliambres,  a,le\,'loppe  son  opinion  dans  un  discours 
s,iii,l,'et  pupiaiil,  lieaueoupirorateurslui  ont  suc,  (''dé,  mais 
iusi|u'au  m, im, Mit  ,111  nous  e,  rivons  ,  ]ieu  oui  ajmiléaux  rai- 
sons ijuil  a  ilonnées.  Quanta  ceux  ipii  les  ombaltent,  leur 
ri'il,'  est  plus  facile  ;  l'opinion  de  l'Asseioblée  paraît  faite 
d'avance ,  et  la  Chambre  unique  obtiendra  une  majorité 
considérable. 

Klle  l'a  obtenue  :  la  si''ance  de  mercredi  a  eu  pour  résultat 
I,'  rifl  ,1e  rauH'iHlemi'ut  de  M.  Duvergier  d,'  llauiaiiiu'  a 
la  m,i|onle  ,||.  ;;;!I1\,mx  contre  iXW  La  ipu'slioii  ,i  ,•!,■  lie- 
ballii,.  ,  daiisie  te  séance ,  entre  M .  de  Lamartine  el  M,  (l,li 
liiii-U,irr,it  avec,  une  vérité  ,  une  profonileur,  une  sincérité 
{vv-  iiii'sdans  les  discussions  parlementaires.  C'est  au  nom 
,1,-  p  rils  du  pavs  fX  de  la  société  que  M,  de  Lamartine  a 
re,  l,imi'  nu,'  siMile  Chambre  ;  c'est  pour  parer  avec  plus  do 
lapaliii'  ,'i  <le  \igueur  aux  coups  qu'il  chaque  instant  les 
laeliiuis  piuMut  tenter  de  porter  il  l'oitlre  politique  et  so- 
cial :  e  l'st  1  ,'l,ili|issenieiit  d'unediclature  parlementaire  ,pie 


M  ,1,' Lamartine  a  demandé  Daiij;. quatre  ans  j'hésiteriiis  , 
peut  lll, ■  a  ihl  l'oialHur;  (Juj,.)Ur,l  hiii  je  ne  jaiir'ipnyifis  |'^ 
, pi 'lll  la-iir  11  ,  agit  liii^h  lie  calculer  1,'  meeabisnie  (te 
re>.nil,|i>  pins  l,iM,r,,ble,s  au  jeu  n-;..,ili,.r  ,1,-;  p,iiis,urs! 
Il  s'agit  de  reunir  ilaii>  iiiii'  -rnl,.  (  lumliiv  i.mlr  l,i  |,a,e. 
louteîa  volonté,  l.mle  l,i  -.hum  imiih'Ii' ,Ji'  l;i  Liaiiri'  pour 
écraser  les  fH(itions,  sml ,  ailes, pu  menaemd  la  pi  upi  irli' lU 
la  famille,  soit  celles  qui  neciuii;iii\,Mit  laHé|iidili,pi,'i|ii  ap- 
puyée sur  les  assignats  et  sur  l'éclialaud,  soil  i  elli^ijui  rê- 
vent la  chimère  d'un  Inine  impérial  ou  (j Une  lamtiv-révo- 
lution.  —  (ju'auriez-vous  fait  des  deux  (Chambres  dans  les 
journées  de  juin,  quand  il  fallait  que  les  décrets  du  pouvoir 
li''gislalif  frappassent  comme  la  foudre  et  qu'ils  fussent  pré- 
.-rnlés,  nnidns   publié-,,  ixée, dés  dan-  l;i  u  éiii,'  heure! 

,M     ,1e   I  ,>ln,illllii>.i  pailr  ,11   laiiin I  Kl.il   ,,\e,-  une  élo- 

qiieii,  ,Ma  un,'  iii,ii;imIi,  lan  i  ,|r  Liiii;,!-,,  ,pii  lll. Il  II, 'toujours, 

(pioi,pi,ui  s\   ,illrnd,'     qii I  il    |iiriiil   la   panili'  dans  les 

grandes  etsol,'nm'llesdi-rii--nms  r,rp,,|i,|ant  l'elfet  |iroduit 
parcedi.seinirs  iia  p.unl  p,ii„K-e  irlni  ilu  discours  de 
Ai.  Odilon  li.iiinl.  qui  s,.|,ni  rh,i',  La- d,' r,'|„milr,..  Si  M  Odi- 
lonBarrol  u  .,  p,is  irannpli,' dan- 1,'  Ma,',  -1  les  lieux  Cham- 
bres ont  su,',' Il,'  iiMlL'ie  -Mil  .Hliinialil,'  ,ler,'nse,  la  faute 

en  est  aux  circoiislaiices.  Le  diioius  de  M,  Udilon  Barrol 
restera  comme  un  monument  de  raison  et  d'éloquence. 
Quand  on  voudra  revenir  aux  principes  de  la  liberté,  quand 
on  voudra  constituer  la  lléjiublique  ,  non  pour  la  guerre  , 
mais  pour  la  paix  et  pour  I  ordre,  (juand  les  factions  seront 
vaincues  ou  qu'elles  auront  désesjiéré,  on  reviendra  au  dis- 
cours de  M,  Odilon  Barrot. 

M.  Dupin.  au  nom  de  la  majorité  de  la  Commission  ,  a 
répondu  ii  M.  (Jdilon  Barrot;  mais  tout  avait  été  dit  entre 
M  Odilon  Barrot  et  M,  de  Lamartine  LediscoursdeM.  Du- 
piii  punira  ,'lr,'  , 'L'ai, 'm, 'lll    r,qip,'l,'  un  jour;  mais  ce  sera 

I' ■  melh,'  1 1'  ili-niiirs  in  ,  laii  i  ,Hliri  mu  avec  M.  Dupin. 

In  jenii,' ,l,'pi,l,' ,  .M  lliHdii'i,  ,u.iii  ouvert  la  séance  en 
détendant  le  sysleii  e  des  deux  IJiambres  avec  un  vrai 
talent. 

Le  discours  de  M.  Odilon  Barrot  a  étésouvent  interrompu 
par  (1,'s  inlerjeeiions  di's/,  ndaiil  de  la  Montagne;  laissons 
ci'lti'jiiie  ,1  II  ,M"iii,ijnr  Si- f,i,ili'urs  deviennent  fous,  ses 
Inusités  n'i'iisiinl   |us  pin- -pi,  ,ii„.|s, 

.M,  liaillieleui)  S.iiiil-lliLinr  ,i  proposé  un  amendement 
porlaiil  ,pic  I,'  pouMiir  li'^isLiiil  ,'.|  ili'lr-iié /irariso/rcMif/i* 
a  une  seule  Chainlire  ('.cl  aiiirial  'ii  eiil  ,  ,|ui  est  une  trans- 
ailmii  hiinorable,  doit  être  disi  ulc  dans  la  séance  dejeudi , 
el  le  sini ,[ui  l'attend  n'est  pas  douteux. 

Dan-  ses  séances  consacrées  à  l'ordre  du  jour  courant , 
l'Asseinliléea  votéun  décret  qui  ap|ielle  l'ftiat  ii  concourir, 
par  une  subvention  extraon'inaii'e  de  d  (IIIO.OIIO,  a  l'achè- 
vement et  à  l'entretien  des ,  lninns  m, maux  Ldli-a  de  |ilus 
entendu  la  discussion  géner.d,'  .-iii  I,'  pmji'l  ir,'iiseigneiuenl 
agricole,  discussion  il  la  suile  d,'  Impielle  1  ajournement  (le 
ce  projet  avait  été  demande  (',,'11,'  pmposition  é;é  repous- 
sée et  l'on  passera  à  la  fin  de  eetle  semaine  il  l'e.xamen  des 
articles. 

Outre  les  harangues  que  r.4sseniblée  nationale  a  enten- 
dues ,  il  en  est  une  autre  que  quelques-uns  de  ses  membres, 
l'ciix  qui  siègent  sur  la  crête,  sont  allés  applaiiilirau  Chalet 
le  picmier  jour  de  l'An  cinquante-sept  de  In  HrpuhUque 
fi'iiiniise  ,  OU,  comme  nous  disons  nousaulii's  reaclion- 
II, m, 's.  I,'  2i!  du  mois  ilernier.  Si  le  repas  il. ni  an-si  éiiicé 

iliir  U'  ,lis,',Hiis  de  M    l.edru-Kollin,   la  cnis n,iliiiii  ili's 

liquides  a  du  elri'  edi,!; aille.  L'ancien  niemlar  ,lii  ;.''iiivi'r- 
ueuieid.  provisoire  a  ele  sans  pitié,  il  a  niéine  Iraih'  Im  I  du- 
rement l'impôt  des  quarante-cinq  centini, s  Isl-ii'qnim 
aurait  mis  son  nom  au  bas  de  ce  décret  poui  Ini  inini  piiiT  ' 
Les  nouvelles  de  l'étranger  ont  fail  l'onniiin' l'illn  s,'- 
maine  plusieurs  faits  iiiqu'i  Imi-  Iii-  disnidn-  sanulmis 
ont  éclaté  il  Francfort  aussiliii  a|irr-(pir  In  Mac, In  iiaile- 
UH'id  iialional  ,   sur  la  queslmn  ilr  I  ,ii  nn-.lu'e  de  .Maliiioc  , 

lui  a, ,111111    11,'iix  ri'pri'si'niinls I,.  lues.  La  lutte,  par- 

l"i-  inli'iH'nipne  ,  a  iliiir  lim-  jiaiis  La  victoire  est  de- 
mrnirea  l,i  iii,i|ni  ilr  il'  r.\-s,'iiilili'i'  Mais,  il  côlé  de  celte 
\  1,1, me  ,111  lll' 1  l'Ile  iii'Ne  ,  il  nous  faut  mentionner  l'agita- 
linn  qui  , aiiiliniii' ,1  \  H'iinc,  qui  prend  des  proportious  alar- 
ma id, 'S  lia  US  la  l'i'iis-e-Khénane,  surtout  à  Cologne,  sa 
capitale  el  qui  paraît  mettre  tout  en  question  dans  le 
grand-duché  de  Bade. 

Les  noi.velles  do  la  Hongrie  sont  assez  contradictoires.  Ce 
qui  est  constant  c'csl  qu'a  Vienne  la  diète  a  refusé  d'inter- 
venir dans  la  querelle  entre  les  Hongrois  el  le  pouvoir  im- 
périal. 

.\  neiliii,  le  ininisli're  fnnné  siiiis  1,1  pi','si,I,'iu'e  ,lu  mènerai 
de  riiii'|s,'-|  pn'srnl,',,  |  \-,,m|i|,.,.  iial  mii,i  le  ,'l  \  ,i  ,'sposé 
son  |ir,i^i',niiiii,'   In  phaml  l,inl  d,' ,iiiidialli,'l,ii,li''  1,'nlalive 

re.i, i,iir,',  I,'  inniM'aii  e.ihim'l  prend  aussi  I  eiigagiMueul 

d,'  ilelemli','  pliissiii,','reineiil  ,  ,'l  surliiut  plus  courageuse- 
nii'id  ,pi,'  ses  piTiléi'e^seurs  ui'  lout  fait,  les  prérogatives 
neias-auesde  la  i,i\aide  et  ,lii  p,iovoir  executif.  Cette  dé- 
claration a  pi',i,luil  une  si'u.salion  1res  vive  dans  la  ville.  Le 
parti  extrême,  ih'j.i  urite  par  la  conccntralion  de  troupes 
,ip,'r,'e  ,l,'puis,piel,pi,'s  jniMs  au  lourde  Berlin,  el  par  la  no- 
iniiialmn  du  ijeiieiM I  de  W  i  iii'jel  au  l'omm.iiideuieut liecetle 
ai'iiii',' ,  siejiU'i'l  1,111  des  , -liais  piiurdéli'riniiier  une  iiou- 
\elli'  l'xpliismn  La  siin.ilioii  ,  uimnenee  a  devenir  très  cri- 
tiipiede  ce  l'olé. 

L  armistice  réclamé  par  les  amiraux  anglais  et  français  a 
été  accepté  simultanément  par  le  roi  de  Naples  et  le  gou- 
vernement provisoire  de  l'aleriue.  l'Iusieurs  villes  impor- 
lanli's  nul  l'ait  leur  soumission  il  l'aiiliMilé  ruvale. 

L'insurrection  deLivourne  parait  êlredeliiulivenieulcal- 
uu'e  ;  par  un  ordre  du  jour  dalédu  17  seplemlui'  le  grand- 
duc  de  Toscane  a  renvov é  chez  eux  les  gai, les  nationaux  (]ui 
étaient  accourus  il  l'ise  pour  y  défenilre  son  gouvernement , 
H  ne  croit  plus  avoir  besoin  de  1,'iii'S  services. 

A  Home,  le  souviMiiin  pnnlile  v  ieiil  do  constituer  un  nou- 
veau ministère  choisi  par  M  Kossi ,  <  liargé  de  l'int(M-ieur. 
M.  Uossi  est  l'ancien  ambas-adeur  de  France,  qui.  après 


êlre  ni-  Italien,  est  devenu  Suisse,  Fiançais,  et  qui  est  Uo- 
main  poqrje  moment  actuel. 


qui  expirent  le  i"  Octobre  doivent 
élrerenourelés pour  qu'il  n'y  ait  point 
inirnuptinn  dans  l'envoi  du  Journal. 
S'adresser  aux  hiliraires  dans  chaque 
rillr,  aux  Directeurs  des  l'ostes  et  des 
Messageries .  —  ou  enioyer  franco 
w(i  bon  sur  Paris,  à  l'ordre  de 
A.  LECHEVALIER  tr  (.' 
rue  Itichelieu,  00. 


Courrier  de  l'nriiii. 

Si  vous  vous  rappelez  notre  automne  des  anciens  jours, 
c'était  la  saison  des  plaisirs  candides  et  des  joies  paisibles, 
peu  de  paroles  el  encore  moins  d'actions;  1  heureux  temps 
,pie  c'était  pour  les  esprits  qui  se  contentent  de  peu  !  Plus 
li'alfaires  ni  de  soucis;  on  allait  rêver  à  la  campagne  dans 
h'sgramis  bois,  ou  bien  s'ébattre  dans  les  champs  et  cueillir 
la  gripp,'  eni-nre  verdelelle'.  I,'  tliéàlre  élevait  a  peine  une 
voix  limide  pendaiil  ,'i'  Inrlnin'  mnis  d,' septembre,  béni  de» 
aniaids,  dis  rli,iss|.|irs  l'i  .|,'s  ,'r,ilii'r-,  c'était  bien  la  belle 
saison.  1,1  11,  lu  i'e[iusct  ,lcs  buiiheuis  lempérés.  Même  noire 
saison  ,'l,id  si  douce,  elle  avait  l'humeur  si  commode  et  si 
avi'iiaiil,',  ,'lle  rendait  son  inonde  si  heureux  qu'on  avait  Uni 
parla  traiter  comme  on  traili-  les  bonni'sàmescl  les  gens  de 
trop  facile  composition.  (_'.  ,'l,iii  Imiieiirnn'  unebeautè,  mais 
une  beauté  sur  le  retour,  i|iii,  l'enr  pi, m,',  avait  besoin  des 
ressources  de  la  toilette;  l'Ile  a\,iii  luaii  prodiguer  ses  tré- 
sors et  déployer  ses  S|ilendeurs,  c'est-a-tlire  la  sérénité  de 
son  ciel ,  le  doux  éclat  de  ses  nuits,  el  s'embellirde  sa  cou- 
ronne de  pampres,  de  [irés  verts  et  d'arbres  dorés,  ce  n'é- 
tait déjii  plu-  que  la  pale  aulomne,  comme  disent  les  élé- 
giaqnes,  el  qui,  -mis  |iii'texte  de  se  prêter  à  tous  les  bon- 
heurs, ne  ji, lin  ail  ,'ii  a-siirer  aucun.  Déjii  fort  attristée  dans 
les  champs  ou  elle  souillait  le  froid  et  le  chaud  dans  lu 
même  journée,  elle  n'était  pas  supportable  dans  la  ville  où 
elle  prolongeait  la  disette  des  plus  grands  biens,  tels  qu» 
le  sp,',  l.icle  du  forum,  l'élotiuence  du  barreau  el  les  en- 
,  Ininlemenls  du  salon. 

.M.iisi'iilin  les  plus  difficiles  doivent  être  réconciliés  avec 
noire  automne,  et  ils  ne  l'accuseront  pas  de  tiédeur.  Ceux 
de  nos  Parisiens  qui,  comme  les  grenouilles  de  la  fable. 
demandaient  un  roi,  c'est-à-dire  une  siison  ardente  et  in- 
satiable, doivent  être  contents,  I  aulomne  les  dévore  On 
lui  reprochail  de  n'avoir  aucune  physionomie,  el  elle  les  a 
toutes;  de  s'endormir  dans  la  moleise,  el  jamais  elle  ne 
fut  plus  agitée  ;  de  n'olfrir  que  des  plaisir.s  d'écoliers,  et  voilà 
qu'elle  en  jette  ii  lout  le  monde. 

Pour  ne  parler  que  de  la  présente  semaine,  les  politiques 
ont  eu  le  dîner  du  Chalet,  les  rentiers  la  surprise  du  paye- 
ment de  leur  semestre;  voici  pour  les  dilettanli  la  rentrée 
de  la  troupe  italienne,  pour  les  badauds  des  exercices  mi- 
litaires et  des  ascensions:  les  dînei-s  de  cérénionie  sen- 
cliainonlauxconcertsd'agréme.nts;»^  est  permis  de  com- 
parer le  monde  ii  un  spectacle  et  d'envisager  Paris  comme 
une  scène  où  se  joue  la  connkiie  en  tout  genre,  nousdirons 
que  toutes  ses  troupes  ont  donné 

Au  premier  rang  el  dans  le  genre  terrible,  nous  avons  eu 
une  reiirésentation  donnée;  ar  les  .alarmisles.  On  sait  qu'en 
geiiér.il  h's  iiiveulious  de  ces  iressicurs  sont  peu  goùlées. 
d  est  vrai  qu  ils  s'eiileiident  ineiliocreuient  il  varier  liiur  ré- 
pertoire. Pour  cette  luis  i','p,'niiant  il  ne  s'agissiiit  pas  d« 
inlir  el  ,pie  le  bon  sens  public 
,,il  p,is  il.ivanlag,'  du  mass;irre  a 
i'-s,iiniiu'ul.  ni  de  lempoisoniu»- 
,  unie  la  falsilicaliendela  lisiino 
liions  semblables  qui  londenl  a 
les  Parisiens  ont  eue  jusipi'a  pi-é- 


la  fameuse  iiuiie  ipii  v,i 
évente  si  vite,  il  n,'  s  .i;;i 
domicile  ipii  auia  Ihii  ii 
meut  des  bornes-leid.iin, 
populaire  .  el  autres  a.s: 
«'  'l'ii' 


seul  d.iiis  leui-s  marchands  de  coco:  nos  alarmistes  s'en  U^ 
liaient  a  un  simple  enlèvement.  Sur  le  signal  donné  par  un 
Itmnulus  de  la  républuiue  rouge,  cimpianle  Uomains  delà 
.Montagne  devaient  enlev(M'  celle  nation  sabine  des  modé- 
rés, diie  réunion  de  la  rue  de  Poitiers,  qui  ne  compte  guère 
moins  de  trois  cents  membres.  Du  reste,  les  ravisseurs  (le- 
vaient V  nietlre  des  proci'-dés.  el  les  viclimes  n'auraient  élo 
ploiigei's  dios  d  alVr,  nx  cachots  qu'avec  li>s  égards  dus  a 
leur  lilr,'  de  represenlant.  Cent  citadines  étaient  comman- 
,lees  p,iur  le  Iransporl  des  prisonniers  ,dis<Mil  toujours  Ici 
alarmisles,  et  si  ce  lour  de  force  a  maïupié  son  effet,  il 
faut  l'attribuer  à  la  pusillanimilé  de  ceux  ,les  conjurés  qui 
n'ont  pas  trouvé  toute  la  garantie  desirible  dans  leurs 
moyens  d'exécution   Kn  même  temps,  el  a  une  autre  lau- 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


nion,  les  ffiiimes  se  laissaient  enlever le  droit  d'assister 

à  un  club  où  ces  dames  venaient  affublées  du  co-tiinie  mas- 
culin :  «  Ail  moment  où  la  préfecture  de  police  fut  insli- ^ 
tuée,  dit  à  ce  sujet  l'historien  du  Consulat  et  de  l'Empire  ,  i 
le  désordre  était  partout;  beaucoup-de  femmes  avaient 
"quitte  les  liabits  de  leur  "sexe,  on  leur  enjoignit  de  les  re- 
prendre, attendu  (ce  ^ont  les  expressions  du  préambule) 
que  les  femmes  tr^vestie.s  sont  exposées  à  une  infinité  de 
désagréments  et  même  aux  méprises  des  agents.  »  Une 
prescription   de  bienséance  imposée  aux  anciens  clubs, 

alors  SUrluul  iiuc  !>•  Ihmu  mac  1rs  rrr(|lH'nl:iil,  r'rl.iil  .vile 
qui  forimll.ill  irllr  .■liiii-;' s;i,T,inN'iiirllr  :  lu,-  nus,- ilrmilr 
est  de  ri  (j  mur  (In  ni' s.iiiimh  li"(i  I,i  iM|i|H'lri- ;in\  (ujlrnrs 
de  club  t|ui  .ilionlciit  la  Inliune  dans  une  Icnuc  nisunis.iiiUv 
L'un  de  ces  enllanmiés  ayant  lait  l'autre  jour  un  accroc  a 
son  vêtement  essentiel,  dans  la  chaleur  de  I  im|iro\isali(iu, 
le  président  voulut  lui  ôter  la  parole  :  »  I.;ms-,'z  le  |i;iilrr 
dirent  les  assistanls,  un  sans-culotte  peu l  lium  >  cvin  imcr 
in  naturalibus.  ••  Un  alarmiste  vousduinl  (im'  Ir  nuinliv 
s' accroît  de  ces  réunions  où  se  propagent  cl  se  iiréclienl  les 
doctrines  de  Tragaldabas-Proudhon;  la  vérité  la  plus  vraie 
cependant,  c'est  que  les  adeptes  se  dégoûtent  fort  de  cette 
viande  creuse,  et  que  les  plusgrands  prédicants,  déserteurs 
de  la  capitale,  s'en  vont  transportant  leurs  prêches  dans  les 
bourgades  de  la  banlieue.  L'un  d'eux  disait  hier  :  »  Nous 
avons  commencé  par  Montmartre  et  nous  finirons  par  IJia- 
ronton.» 

Voici  quelque  chose  de  plus  réjouissant  et  de  plus  neuf  : 
des  gardes  nationaux  de  Paris  qui  reviennent  de  Londres, 
où  ils  sont  enirés  le  sabre  au  poing  et  le  drapeau  tricolore 
en  tète,  et  John  Bull  a  fail  le  meilleur  accueil  a  nos  compa- 
triotes. Ils  ont  chanté  la  Marseillaise,  et  on  leur  a  répondu 
par  (lod  save  tlie  Icing,  en  vertu  de  1  entente  cordiale.  Le 
drapeau  d'Austerlilz  et  de  Wagram,  qui  est  hélas!  celui 
de 'Waterloo,  salué  et  applaudi  par  l'aristocratique  Angle- 
terre, n'est-ce  pas  lit  un  petit  fait  plein  d'enseignements? 
Nos  Français  ravis  et  enchantés,  bien  que  harassés  de  fa- 
tigue, se  sont  laissé  conduire  par  leurs  hôtes  à  la  Bourse, 
aux  Docks,  à  Westminster  ;  six  heuresde  monuments  forcés, 
ce  n'était  pas  trop  pour  reconnaître  cette  gracieuse  hospita- 
lité de  nos  éternels  ennemis.  Dans  VVest-End,  une  autre 
surprise,  celle  de  la  collation  leur  était  réservée.  L'hôlel.ou 
plutôt  le  palais  où  on  les  héberge,  estétincelant  de  dorures  ; 
sur  lesmuiai.li's  t,i|ii-sées,  ils  retrouvent  l'image  et  les  in- 
signes de  leur  pays,  p.irtout  éclatent  les  initiales  i}.  F  qui 
se  détacheiU  eu  li'itrrs  monstres eten ronde-bosse  sur  l'ivon-e 
et  la  porcelaine,  si  luen  qu'ils  se  croient  encore  en  France  ; 
on  leur  permet  celte  illusion  jusqu'au  moment  ou  un  indis- 
cret leur  révèle  la  véritable  signification  de  ces  majuscules 
R.  F-,  c'e.st-a-dire  Uothscliild  frères.  C'est  ainsi  qu'on 
passe  la  Manche  et  qu'on  se  retrouve  dans  la  rueLaffitle. 
A  propos  de  riie.^,  quand  fera-t-on  cesser  la  confusion 
qui  régne  dans  les  noms  attribués  à  ces  voies  de  communi- 
cation? Telle  a  deux  noms,  une  autre  en  compte  trois,  par 
compensalion  il  en  est  d'anonymes,  exemple,  la  rue  ci- 
devant  Raiiibuteau  ,  baptisée  Barbés  et  que  les  habitants 
intitulent  au  gré  de  leur  envie  ,  selon  la  nuance  do  leur 
opinion  et  la  préférence  de  leur  [lolitique.  Un  s'est  élevé 
déjjj  et  on  ne  manquera  pas  de  s'élever  encore  contre  cette 
autre  coutume  non  moins  perturbatrice  de  débaptiser  des 
rues  anciennes  pour  leur  appliquer  le  nom  de  personnages 
vivants.  Le  moindre  inconvénient  de  ces  substitutions,  c  est 
de  donner  lieu  à  des  réclamations  sans  fin;  quelquefois 
d'ailleurs  vous  croyez  ne  frapper  qu'une  étiquette  insigni- 
fiante et  môme  ridicule,  et  il  se  trouve  que  vous  attentez  à 
une  illustration.  C'est  ainsi  qu'un  contribuable  prend  fait 
et  cause  pour  la  mémoire  de  son  aieul,  l'illustre  (2oquenard, 
supplanté  par  Lamartine.  On  ne  saurait  trop  approuver  ce 
noble  orgueil  de  famille  sans  lequel  tant  de  grands  noms 
périraient,  et  après  cet  exemple  personne  assurément  n'o- 
sera plus  voter  le  moindre  changement,  pas  même  celuide 
la  rue  Aidard,  un  nom  peu  noble,  mais  qui  l'ut,  peut-être, 
celui  d'un  glorieux  charcutier.  «  Immortalisons  nos  conci- 
toyens, a  dit  Fouché  dans  un  rapport  connu,  mais  que  ce 
ne  soit  pas  aux  dépens  d'autres  immortels,  et  ne  soull'rons 
pas  le  cumul.  »  Par  ces  paroles  généreuses,  Fouché  voulait 
dénoncer  s.ins  iliiiilc  l'jéronaule  Monlgolficr,  qui  a  donné 
son  nom  a  |ilii-.i  in-ile  nos  rues. 

Notre  hMn|is  II  \  H  [laitir  tant  de  ballons,  qu'il  n'accorde 
presque  plu^  il  ;iiii  nlmn  à  ceux  qui  ehercheni  la  gloire  sur 
cette  rouir  l;i  l,  iniiv|iide  M.Green,  qui  s'élève  de  l'Hippo- 
drome Ions  h  s  iliir.iinlies  et  part  pour  les  étoiles  comme 
s'il  s'agissait  il  a  Un  a  Nanterre,  aura  quelque  peine  à  laisser 
son  nom  dans  la  mémoire  des  hommes.  La  curiosité  publi- 
que a  tant  d'autres  dérivatifs  qu'elle  n'a  pas  songé  seule- 
ment à  connaître  le  nom  des  quatre  audaclouxqui  laccom- 
Eagnaientdans  son  voyage.  Cependant  avec  un  peu  de 
onne  volonté  on  peut  comparer  cette  ascens  on  à  celle  qui 
mit  en  l'air  la  ville  de  Lyon  en  1781,  il  est  vrai  que  c'était 
la  première.  Monigolfier,  qui  montrait  le  chemin  à  Gieen 
et  à  tant  d'autres,  s'éleva  des  Brolteaux  en  compagnie  du 
princede  Ligne,  du  comte  de  Laurencin  et  du  marquis  de 
Bassompierre,  et  sous  les  yeux  de  trois  cent  mille  specta- 
teurs. Ballotté  d'un  bout  de  la  ville  à  l'autre  et  jeté  finale- 
ment, par  un  coup  de  vent,  jusqu'au  coniluent  du  Rhône  et 
de  la  Saône,  il  alla  s'abattre,  plus  rudement  que  M.Green, 
dans  un  marais,  mais  aussi  avec  infiniment  plus  de  gloire. 
L'un'  de  ses  compagnons  avait  le  nez  cassé,  un  autre  était 
manchot,  et  Monigolfier  lui-même  en  devint  lirerhe-denl, 
et  c'est  dans  cet  étal  victorieux  qu'ils  luiinl  rannins  en 
triomphe  à  l'Hôtel-de-ville.  L'année  pin nlrnir,  1  rN|ir- 
rience  delà  nir)Hf(/ii//;n'eavaiteu  lieua  1' n  i-,  :mi(  li.niip-ilr- 
Mars,  nu  11-  lin, ,  .Insriih  et  Bernard  .Mnii^julliri'  M'i.iienl 
vus  coiiriuini-.  ni  |i;i'srilCe  de  la  poplllnlmll  ri  ilr  liiiilr  la 
cour,  et  tii  iiiiiii  n  ,1  pas  manqué  de  signulcr  tout  au  long 
l'événement  dans  son  journal.  Devant  tant  de  gloire  où  en 
serait  pourtant  M,  Green.nonobstanlsa  soixante-quinzième 
ascension,  si  l'Hippodrome  ne  |rêtait  pas  à  la  nacellj  de 


rrt(Tii)i(iii(e  le  lest  de  ses  exercices  équestres  ,  si  surtout 
\' lllnshdiinii  nr  I  aidait  pas  a  gonfler  son  ballon?  Il  n'y  a 
pj-  liiii^iriii|i-  que  la  veuvedu  dernier  de  ces  Monigolfier  a 
ijiiiiir  ,  i  ii.i,  monde  après  avoir  fait  une  chose  aussi  rare 
a>Miirni  ni  iine  l'invention  de  sa  famille,  c'csld'avoir  vécu 
plus  ilr  .■nil  ans, 

•Ir  nr  sais  plus  quel  philosophe,  qui  n'était  pas  un  grand 
philosophe,  prétend  qu'il  fautchoisic  son  ininnent  pour  mou- 
rir, et  mettre  de  l'a-propos  dans  i  r  ilnnin  acte,  faute  de 
quoi,  le  plus  célèbre  risque  fort  ilr  ?  rn  alln  comme  il  était 
\rnii.  sans  plus  de  bruit  etde  fanfares.  C,  est  le  cas  d'un  vieux 
ilr  1,1  Mi'illr  (innédie,  de  cet  excellent  Armand  Dailly,  qui 
Mriii  ilr  iniiinn  ;  il  a  mal  pris  son  temps.  D'abord,  il  avait 
i|iiille  le  théâtre  depuis  plusieurs  années,  et  le  meilleur 
iniiyen  de  n'être  pas  oublié,   c'e>t  a~>niniu  ni  de  se  mon- 

livr  loiijours  en  scène;  demande/,  aux  r nlinis  et  niêiiie 

a  rrii\  (|ui  nelesontpas  Armand  Daill;  \  it  de  beau >  jours 
.111  riii-alre-Français,  où  son  naturel,  sa  joyeuse  humeur  et 
>i  L' iirir  le  faisaient  applaudir  à  coté  de  Monrose  ,  de  Sam- 
suii  cl  des  autres  de  la  bonne  tribu  et  de  la  belle  lignée 
comique.  Tout  Frontin  qu'il  était  d'oiigine  et  de  vocation, 
Armand  n'arriva  pourtant  qu'assez  l-ard  au  sanctuaire  de  la 
rue  Richelieu,  et  son  existence  de  comédien  est  un  roman  il 
plii-iriiis  chapitres.  Le  premier  s'ouvre  en  province,  et  il 
ilr\  ail  r;;,i\rr  plus  d'un  chef-lieu  avant  de  faire  rire  Paris, 
et  il  rr^a\',iil  si  bien  que  le  bruit  des  éclats  de  rire  parvint 
jusqu'à  Picard,  alors  directeur  de  l'Odéon,  qui  prit  Armand 
pour  son  théâtre  et  lui  donna  des  rôles  il  sa  taille.  Un  se 
souvient  peut-êlre  de  ces  joyeuses  soirées  des  Deiij-  l'hiU- 
fcertetdu  Voyage  à  Dieppe,  où  Armand  D.iilK  l'.ns.iil  mer- 
veilles sous  la  livrée  de  Gaspard  et  suiis  l.i  rr.liii,-nlr  de 
Derbelin  ;  il  était  naïf,  gai,  plaisant  et  ciinnqiir  ?.iiis  rllort, 
dans  cette  comédie  de  Picard,  si  iialurrllrinml  plaisante  et 
rieuse.  Quand  la  Comédie-Franraisr  1  rui  a|ipelé  a  elle, 
Armand  se  livra  tout  entier  au  cnllr  ilr  rrs  \ieux  maîtres 
toujours  jeunes,  qui  s'appellent  lluline,  llancourt  et  Ite- 
gnard,  et  il  mit  à  leur  service  et  jusqu'à  la  lin  ce  naturel 
exquis,  cette  allure  franche  et  cette  verve  joyeuse  que  nous 
avons  si  souvent  applaudie.  t:omme  Talma,  comme  Monrose, 
comme  les  plus  renommés  et  les  plus  habiles,  le  vœu  d'Ar- 
mand Dailly  eût  été  de  mourir  sur  son  champ  de  bataille  et 
déjouer  la  comédie  jusqu'à  la  dernière  extrémité;  mais  sa 
mémoire  devenait  rebelle  et  son  oreille  paresseuse,  et  les 
infirmités  hàlèrent  pour  lui  l'heure  de  la  retraite.  On  voit 
qu'il  ne  devait  pas  mojrir  tout-à-fait  oublié. 

Les  théâtres  qui  font  leur  provision  d'hiver  ne  se  met- 
tent pas  en  urands  frais  de  nouveautés;  la  Montansicr  s'est 
montrée  la  seule  prodigue  entre  toutes  les  scènes  secondai- 
res. Agénor  le  Oangcreux  vous  représente  un  béolieii  de 
Pans,  cherchant  partout  des  propriétés  à  vendre  et  par 
conséquent  à  acheter,  à  l'ett'et  d'y  dérouvrir  des  truffes.  En 
courant  par  monts  et  par  vaux  a  la  irrlinrlie  du  tubercule 
parfumé,  il  tombe  dans  le  traqiirnaiil  il  i lainille  de  pe- 
tits bourgeois  qui  luicéde,moyeniiaiililrii\  uni  inillr  francs, 
une  propriété  qui  en  vaut  bien  Ir  quail  .M,i;s  1,'  nian  lir  ne 
tient  pas,  pourquoi?  Agénor  n■(•^l  |'.i>  1.'  |),in;;rrni\  |iimii 
rien.  11  effarouche  la  pudeur  ilniir  hrllr-ninr  ilmil  1  ,i.;;r 
mûr  date  des  Cosaques  et  ses  prerrJunlsde  Lo\elacesu|j- 
posé  épouvantent  l'expérience  d  une  veuve  qui  rêve  des 
secondes  noces.  Mais  Agénor  arrache  un  secret  par-ci, 
usurpe  une  confidence  par-là  et  fait  si  bien  que,  la  propriété, 
la  veuve  et  les  truffes  lui  restent.  Le  dénnniiirnl  a  l'ir  en- 
trelardé de  sifflets,  mais  la  Montansier  nr  |i;miI  |i.i>  -r  llaU 
ter  d'avoir  deu\  succès  par  semaine,  c'esl  bien  ,i>srz  d'avoir 
enlevé  celui  du  Camp  de  Sainl-Maur.  à  la  pointe  du  nez 
d'Alcide  Tousez  et  au  fil  de  la  ba'ionnetto  que  manie  trés- 
gcMiliinent  mademoiselle  Sciiwaneck.  La  p  èce  ressemble 
a  iiMiirs  Ir-,  pièces  OU  l'on  a  planté  des  soldats  et  où  vieil- 
li ni  ilr-  ;:!, srll.es.  On  y  voit  un  colonel  qui  dit  à  un  trou- 
pier lilmlm  :  ..  Pacot,  j'aurai  l'œil  sur  toi!  »  etun  grognard 
(le  sergent  qui  dit  au  petit  de  la  mobile  :  »  Tu  m'as  sauvé 
la  vie.sois  mon  fils  !  »  On  y  voit  aussi  un  mari  qui  cultive  le 
calembour,  et  sa  femme  qui  cultive  les  sous-lieutenànts, 
prnilanl  qu'une  la  nie  fiiliclionne  se  jette  à  corps  perdu  dans 
lr>  (iiirs  lin  1-, lin  ,111, 1  r  qui  inspire  naturellement  au  calem- 
liiiunjniis  rr,  ilmililr  cmi-a  1  àne  :  «  Je  ne  m'attendais  pas 
a  Irii'uver  ma  tante  paiiiii  tant  il'nntrrs  'lentes)  et  enfin: 
j'étais  venu  pourvoir  le  caniii,  ri  mi  inr  inriilir  Ir  cancan,  » 
Quant  au  drame  joué  au  Tlirairr-l'r.im.Mi-  rt  (|iii  siiili- 
tul('  niaisr  Pnsritl  .  vous  nmrrMv,  1(111111  11  \  s,iiii'ait  trou- 
ver Ir  pin-  jH'lil  liiMl  |Miiii'  nir     Diiiir  lii~ Ilr  rrrueillie 

par  li.n  In  il  n-iilli  i.nl  qur  I'immI  lui  ; rii\  .  r  rst  sur 

Ceriillilrniriil  lirslr.m.ir  i|iir  1  aiilriira  liali  -r .  i|iial  rr  actes 
inii  se  pa-M-nl  il, m-  rnirrinlr  ilr  ri.rl-lliu  .il    I..1  pasMiui  du 

rr Il iiir   ma-ln -llrilrl.a  F.nr.  n'cI  nmirr:  rlle  a 

vu  Pascal  aux  léirs  île  Vr|■^adlrs  ,rlle  vml  iliir  .Sa;iil-Gor- 
main),  ot  un  regard  a  été  le  lien  de  leurs  cœurs.  Pascal  a 
demandé  la  main  de  Marie,  qu'on  lui  a  refusée.  Séparés 
par  la  volonté  de  ce  frère  sans  pitié,  dès  que  les  deux 
amanis  se  retrouvent  à  leur  insu  dans  ce  couvent  de  Port- 
Royal,  ils  n'ont  rien  de  plus  pressé  que  de  mêler  leurs  sou- 
pirs et  leurs  larmes;  Marie  va  même  jusqu'à  accorder  un 
rendez-vous  nocturne  à  son  amant ,  ainsi  marche  faction 
parmi  des  aspirations  à  la  grâce  et  des  citations  des  Pro- 
vinciales. Angélique  Arnauld,  celte  fiére  et  rigide  abbesse, 
s'ailiinril  ^ll:Llll,rl\  iiirnl  ilaii>  rr  ilr.imc  ;  elle  se  fait  la 
riHiipLin.inii'  ilr  1  -  .iii,ian>  iai|iii~  ililrs,  et  va  iiiêmejus- 

(|ii  ,1  Mi.jn    r  a  l'.i-'  .il  ;lr  ilr inln  la  main  de  Marie  une 

-rr Ir  1(11-    1  m  r.is r-l  1,i\,iim1  Ir,  rt  voici  Venir  le  niar- 

,|,,,.,i|r  l.a  f.irr  Ir  Irrir  ilr  la  sirliinr  Cr  m,ili|llis  r>t  rn- 
riiiv rn|ialil  ipi  il    uni    a    l'.iir  ,    r.l\,l^r  p.ir    Ir  i„i 


l'alihay  [rriiirr  il,' n  hmiurs  muimUrs  ,  rninine  dit  Itarinr, 
l.a  Farr  s  ari|iiillr  ilr  la  nininii>-iiiii  .\\n-  une  brutaliK''  de 
p|■(>l■rdl■^  i|iii  Ir  iiirt  luuL  de  =iiite  a  la  hauteur  des  pins  vio- 
lents tvraiis  de  mélodrame,  après  quoi  Pascal  vient  lui  réi- 
lérersii  deniaiide  à  brùla-pourpoint,  et  on  vous  l'accueille 
plus  rudement  encore  ijue  madame  Angélique.  Le  gentil- 


homme insulte  le  savant,  lui  jette  son  gant  au  visage  et 
finit  par  le  menacer  d'une  leltrc  de  cachet;  mais  Pascal  a 
un  bon  ange  qui  veille,  Pascal  est  protégé  par  un  frère  (de 
lait),  et  il  se  Irouve  que  ce  Bernard  a  sauvé  la  vie  au  mar- 
quis dans  les  guerres  civiles,  ol  que  le  marquis  n'a  rien  à 
lui  refuser,  de  sorte  que  le  frère  donne  son  consentement 
au  mariage  de  la  sœur,  et  toul  cela  se  passe  en  plein  Port- 
Royal,  dans  cette  maison  si  austnr  ri  si  ^.'lave,  sous  les 
yeux  des  jeunes  reli.nieuses,  de  rassniiinirni  1  Ir  .Saint  Cyran 
et  avec  la  bénédiction  de  mailamr  \ii^i  h(|ii!' ;  c'est  une 
grande  surprise,  mais  pas  pins  Mn|irr  i.nilr  ipir  relie  du 
dénoùmrnl,  ri  m  \i  in  1'  1 'r-l  I  '  r.is  ilr  il  nr  i|iir  l,i  lin  justifie 
les  moyen-  M.nir  rrliip^irr  aii\  iii;iirni- lin  ilnllrr,  Marie 
aimée  (le  Pascal  et  pivlr  a  1  epnuscr,  suicuinlic  aux  émo- 
tions de  ce  grand  bonheur  qui  lui  tombe  du  ciel  :  on  la  voit 
se  troubler,  pâlir,  chanceler,  et  à  son  tour  Pascal  ne  peut 
supporter  celte  vue  lamentable;  alors  nous  avons  le  spec- 
tacle de  deux  agonies  qui  se  débattent ,  c'est  l'agonie  de 
Marie,  c'est  l'agonie  de  Pascal  ou  du  moins  celle  de  sa  rai- 
son. 

Je  puis  bien  le  porter,  moi  qui  porte  le  monde, 

dil  le  grand  homme  à  Marie,  et  de  ce  moment  on  comprend 
qu'il  esl  tout-ii-fait  fou. 

Biaise  Pascal  est  un  personnage  assurément  fort  peu  dra- 
matique, surtout  au  point  de  vue  où  M.  Costa  (c'est  le  nom 
de  l'auteur)  l'a  envisagé;  en  outre  cette  introduction  de  ce 
grand  nom  et  des  grandes  choses  de  Porl-linyal  dans  une 
amourette,  est  loin  d'être  heureuse  ;  on  pourrait  s'étonner 
aussi  du  rôle  de  comparses  niais  que  In  l'.inl.iisir  de  l'auteur 
impose  au  terril ilr  Saint-IX  imh  ri  a  la  liri'r  Aiiui'lii|iir  ;  car 
si  la  reproduction   liilrlr  ilr  llnsliHir  mi  dr  la  lim.m-aphie 

n'est  pas  de  premirrr  iirrr--ilr  il.iiis  Ir  ili-, ,  le  drame  ne 

gagnera  jamais  rien  a  drliijnii  1  1rs  l'Innrni-  de  la  réalité. 

Ces  restrictions  faites,  on  a  |mi  h'^n mnii  applaudir  dans 

ce  coup  d'e-ssai  quelque  rnlnilr  ilr  l,i  -  rnr,  ri  unefacilité 
et  parfois  une  élr.L'anrrilr  vn-ilir.iliiiii  lu-  iin'ritoires.  Bref 
cet  ouvrage  surcliaiL'r  ilr  |irr-;inii.r-r-  a-  ilriiirsetd'autant 
plus  ingrats,  a  élr  jmir  a\rr  Ir  /rir,  I  rii-raibk- et  le  talent 
qui  distiu^urnt  MM,  les  coiiir  liens  Ir.iiiçais 


l.e  Ban<|iict  (lu  99   spiilrnilire. 

C'est  une  grande  date  que  le  22  septem.bre;  elle  corres- 
pond au  1"  vendémiaire,  qui  fut  le  point  de  départ  de  la 
nouvelle  année  et  de  l'ère  républicaine ,  après  que  l'une 
et  l'autre  eurent  été  instituées  par  l'Assemblée  nationale 
de  1792. 

Nous  avons  donc  inauguré,  jeudi  dernier.  Van  57  de  la 
République  française,  et  c'est  en  commémoration  de  cette 
grande  ère  qu'une  portion  des  membres  de  r.\ss:!inblée  na- 
tionale, à  laquelle  s'était  adjoint  un  certain  nombre  de 
ritovens  apparlenniit  pour  la  plupart  à  la  presse  et  aux 
ii|illiliills  ilinHirralii|llrs  rrliralrs,  s'rsl  ,  l-  :!.>  sr|ilriiilire  , 
iviinir  an  piiliii  ilr-  (  hainp-KIvsrrs  ilil  Ir  (  hulrl,  autour 
d  un  inodcslr  banquet  dont  la  [nUerniU  faisait  l'essentiel, 
sinon  le  seul  luxe. 

Pourquoi  une  partie  do  l'Assemblée  seulement,  et  pour- 
quoi pas  tout  entière,  après  surtout  le  vote  de  conciliation 
qui  avait,  dans  la  journée  même,  rallié  par  un  ordre  du 
jour  motivé  toutes  les  fractions  de  la  Chambre?  Solenniser 
l'avènement  de  la  République,  ce  n'est  pas  une  question  de 
parlis.  H  paraît  néanmoins  que  l'on  n'a  pu  s'entendre,  car 
cent  cinquante  ou  deux  cents  membres  seulement  de  la  g.iu- 
che  et  de  l'extrême  gauche,  habitués  des  mêmes  bancs,  se 
sont  assis  à  une  même  table  de  quatre  cents  couverts  envi- 
ron, préparée  sous  l'immense  tente  où  s'abritent  les  spec- 
tateurs, durant  les  représentations  et  les  exhibitions  plus  ou 
moins  foraines  du  pelit  théâtre  du  Chalet. 

Ainsi  circonscrite,  cette  réunion,  qui  eût  pu  empruntera 
l'unanimité  un  caractère  national,  se  réduisait,  ce  que  nous 
regrettons  ,  à  una  manifestation  politique.  On  n'y  remar- 
quait aucun  des  hommes  ni  du  gouvernement,  ni  de  la  rue 
de  Poitiers,  et,  bien  que  l'on  eût  répandu,  entre  autres 
bruits  que  le  général  Cavaignac  et  M.  Sénard  devaient  s  y 
11 lin  Iniis  les  deux,  ni  l'un  ni  l'autre  n'a  paru. 

Cria  s  r\|ilii|uede  soi-même.  Le  banquet  était  présidé  par 
M.  Audi  y  de  Puyraveau  ;  et  M.  Ledru-Rollin,  qui  s'unit  de 
plus  en  plus  avee'^la  Montagne,  devait  en  être  l'orateur. 

On  esl  parti  avant  six  heures  de  la  sallo  des  Pas-Perdus, 
pour  se  rendre  à  celle  du  festin,  dont  l'ornemeiitalioii  ne 
brillait  guère  que  par  une  simplicité  toute  républicaine. 
Quant  au  banquet,  ce  n'était  pas'précisément  le  brouet  noir, 
-mais  peu  s'en  faut.  On  sait  qu'en  général  ces  sortes  de  sc- 
tennités  se  recommandent  médiocrement  par  le  côté  gastro- 
nomique. Néanmoins,  la  vie  politique  ét.mt  iiisullisante  a 
soutenir  son  homme,  il  y  faut  joindre  forcément  un  récon- 
fort d'autre  nature.  Il  courait  sur  ini,-  li'irs  un  [irlit  \riilde 
montagne  fail  pour  aiguiser  l'appi  iii  \ii--i  Ir-  1  miMves,  à 
jeun  depuis  une  demi-heure  (le\aiit  -ix  liiii,-iir,-  lahlrs  sur- 
chargées de  biscuits  et  de  pâtisseries  dciuieusrs  qui  flai- 
raient le  fesiin  d'opéra-comique,  oiil-ils  frémi  quand  on 
leur  a  annoncé  que,  de  par  l'ordre  supérieur  des  commis- 
saires, le  potage  ne  ferait  son  apparition  qu'a  sept  heures  pré- 
cises. Cette  partie  seule  du  prii,^r.i!ii .1  i''ii'  m  inpiileuse- 

ment  remplie.  On  avait  calcule  sur  un  ■  -rinrr  rlnsr  a  six 
heures  et  demie   seiiirinrnl  ,   el    il   r-l  rlair  ipir  lini  avait 

r„nn,lrsuri>i..insila|.lir 1  ,  In-  ilr  /rIr  ilr  I; 1,1,'slé- 

■nsl.ilrilis  mai-  Ir  m.  ■  ih'  r..»rr'/i,/ln«  ,u,ill  pin  i-rment 
'Miivn'.  rr  jonr-la  l.i  ili-ii-nni  parlniirlilairr  l.r  1111. t  du 
ir-tr  paiMii  ilrMMi  laiir  Iniliiii.'  ;  Car  j'euteuds  prcs  île  moi 

ilniv  ,1 ,  1 1.1 1 1  r-  ilriiiaiider  au  garçon,  par  inég.irde, 

lieux  sriir-ilr  cntiiii nilinii  iliailiiisez  par  :  mélange  d'ab- 
suiihr  ri  il,iiii-rilr  jinii  -  ■  l.iirr  pivnilr  p.itieuce,  Aiitre- 
fi.isrrla  -  a|i|irl,ill  pii|iill,iirriiiriil  ciinsiiltilinn  ,\utrestemps, 
aulir-siih-Linlil.-    l.r  iin.t  Lia  Ir  tmii  ilrs  tables.  Les  hoiu- 


L'ILLUSTRATION,  JOURNAL  UNIVERSEL. 


mes  sont  aujourd'hui  semblables  à  Niobé,  qui  ne  voulait  pas 
Hre  consolée.  Ils  sont  trop  heureux  pour  cela. 

Enfin  ,  le  pota!;e  désiré  se  montre,  suivi  d'un  repas  servi 
par  M.  L'Amiral ,  grand  restaurateur  politique ,  qui  fait 
banquets  démocratiques,  réformistes,  phalansliériens  et  au- 
tres, et  va  en  ville,  le  tout  à  des  prix  modérés.  Il  était 
temps;  car,  un  peu  plus,  le  bord  de  ce  bon  M.  L'Amiral 
n'était  qu'un  vaste  radeau  de  Méduse,  et,  dans  un  diner 
fraternel,  il  eût  été  de  mauvais  Eoùt  de  se  manger  les 
lins  les  autres.  11  y  a  eu  moins  cl(!  proftKiiin  que  de  lonfii- 
sion  dans  le  service,  et  le  rôt  a  iikiii.|ih',  :iim-i  'yir  l;i  in;i- 
roe,  sur  plus  d'une  table,  sans  (| 


)ins  il  en  soit  n 
félicitons.  Mai: 
Jamais  pu  étn 


(l..n=  1l' 


mnri  d'In 


•p.,!,. 


ce  iluiil  liijll,->  llou> 
du  moins  cela  n'a 
iiriiiiris  ,  ce  qui  par 
iiirliiilis  pour  l'or- 
i|lir-  liilllr  iiiiiverts 

.|U..   nnlI-X.r.'l-SOnS 

.iili>  (■iMli>,iiMiii  tu- 


Mais  laissons  de  côté  ces  vulgaires  détails ,  et  venons 
il   l'obji't  véritable ,    c'est-à-dire  au  côté  politique  de  la 


M.  Audry  de  Puyraveau,  placé  à  l'extrémité  de  la  table 
du  milieu  entre  MM.  Ledru-Rolhn  et  Flocon,  a  inauguré  la 
séance  en  prononçant  d'une  voix  ferme  encore,  une  allo- 
cution de  circonstance. 

«  Vive  la  République  démocratique  !  •>  s'est  écrié  en  ter- 
minant M.  Audry  de  Puyraveau, — •  Et  sociale  !  ■■  ont  ajouté 
par  manière  de  répons  quelques  voix  intrépides,  mais  iso- 
lées. Un  petit  incident  a  fait  naître  un  sourire  exempt  de 
loule  raillerie  aux  lèvres  dc!  la  réunion.  Au  moment  même 
(III  le  vi''iiéral)lo  président  appuyait  sur  la  cécité  et  Vaveu- 
i/linirnl  ilr  (  ru\  qui  ne  reconnaissent  pas  la  vérité  rcpubli- 
(  .uni',  il  :i  en  lui-iiiéiiie  beaucoup  dc  peine  à  déchiffrer,  et 
.-,  est  vu  sur  le  point  d'interrompre,  faute  d'un  suffisant  lu- 
minaire, la  suite  de  son  discours  écrit. 

Il  n'y  a  eu,  au  reste,  que  deux  harangues,  et  cette  dimi- 
nution d'éloquence  constate  un  progrès  dans  l'art  du  ban- 
quet. Le  Bénédicité,  comme  on  vient  de  le  voir,  était  échu 
il  l'honorable  M.  Audry  de  Puyraveau,  et  c'est  M.  I.edru- 
Uollin  qui,  au  monienl  où  l'on  débouchait  le  Champagne, 
s'est  chaiLTc  ili'  iliic  1rs  iiràces. 

M.Ledrii-K'illMi  ,i  l.nl,  dans  un  toast  très  élendu,  ce  qu'on 
nomme  un  iliMinifs-niinistre ,  en  ce  sens  qu'il  a  pris  texte 
de  la  réunion  cl  do  son  objet  pour  développer  ses  théories 


et  les  principes  de  gouvernement  qu  d  appliquerait  s'il  re- 
montait au  pouvoir. 
11  a  débuté  en  ces  termes  : 

"  CiTOÏESS, 

»  A  l'anniversaire  du  22  septembre  1792!  à  cette  mémo- 
rable journée  où  la  Convention  proclama  la  République  dans 
le  palais  inêiiic  où  la  veille  elle  avait  aboli  la  royauté! 

«Oui,  a  la  Hépublique  que  nos  pères  ont  décrétée  et  que 
nous  avons  mission  de  rendreàjainais  durable,  en  lui  don- 
nant il. m-  li's  institutions  s(jcialcs  une  bas(!  indestructible! 
iAppIduilissimcnls.) 

A  la  Hépublique  génie  prolecteur  des  [«>uples,  qui 
comme  nous  poussent  un  cri  de  délivrance  !  A  la  KépuWi- 
que  vengeresse  des  deshérités  de  la  grande  famille  humaine 
qui,  à  notre  exemple,  arborent  le  drapeau  démocratique  et 
sonltraquéspar  les  derniers  représentants  des  vielles  aris- 
tocraties!  f Bravos. J 

»  Citoyens,  je  dis  :.4  la  République  consolidée  par  les  in- 
stiiiiiiiiii>  -i,(  iiiiis  ;  car,  nous  qui  sommes  ici,  nous  sentons 
qui  M  Ir  11  i-l.itrur  ne  la  fait  pas  pénétrer  profondément 
dans  li>  iiii-,  il.ins  les  mœurs,  nous  n'aurons  encore  que  le 
mot  sans  la  chose:  aussi  infortunés  que  nos  pères  qui  n'en 


l),lil.lili;l,ili;s  He 


eiitiiits  diSmociMtoi  dans  le  .lardiii  du  Chalet,  le  ii  septambre  1848. 


furent  qui'  li's  |iri.|,lii.i,rs  et  niî  virent  jamais  la  Terre-Pro- 
mise q\i  ils